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Longue litanie d'un homme exilé, qui de retour temporaire à son pays, le temps de l'enterrement de sa mère et de liquider un héritage, déverse sa haine pour son pays natal, le Salvador, dans un long monologue proche du délire. En faites il est assis dans un bar en fin d'après-midi, et s'adresse à son ami Moyà, l'auteur lui-même. Mais ce dernier se manifestant qu'en avant propos, laisse la scène à Vega, cet illuminé qui en 104 pages va nous lessiver, avec un discours aux mots forts et violents, renforcé par un style à la Thomas Bernhard ( phrases longues à répétitions ), d'où le titre, et pas seulement.....
Il nous déballe les revers d'un pays dévasté, pauvre et corrompu, sous le joug de la dictature et des criminels, ses propres rapports familiaux, non des plus sains, bref toute sa bile pour un système, un pays, des hommes et des relations, que désormais il honnit. Mais il faut accepter que l'énergumène n'est pas dépourvu d'humour, et que son discours a un fond de vérité valable pour tous les dictatures et pays du tiers monde régit par des régimes douteux et même dirais-je certains arguments valent pour nos propres sociétés et régimes occidentaux, supposés démocratiques.
C'est tellement noir, que l'effet est revigorant; mais vaut mieux ne pas échoir dans la langue de ce genre de personnage, c'est de l'acide caustique. Et si vous aviez par hasard, un minimum d'envie de voyager un jour au Salvador, après cette lecture, il ne vous en restera aucune trace 😊!
Pour moi, une inconditionnelle de Bernhard, et bientôt de Moyà, ça ne pouvait que me plaire. Un formidable coup d'oeil au grand écrivain autrichien et une expérience littéraire unique, que je conseille absolument, d'autant plus que c'est court !
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En espagnol, on dirait, à propos d'Edgardo Vega, le narrateur : "Qué exagerado, cómo se está pasando el tío"*.
Pourtant, il faut le comprendre, ce pauvre Vega. Voilà 18 ans qu'il a quitté le Salvador, son pays natal, pour émigrer au Canada, dont il a acquis la nationalité sous le nom de Thomas Bernhard. Lui qui pensait ne jamais remettre un orteil dans son pays abhorré, il se trouve aujourd'hui contraint d'y retourner au décès de sa mère, sans quoi il n'obtiendra pas sa part d'héritage.
On le découvre à San Salvador, assis dans un bar en compagnie de son ami Moya, l'auteur. Et on assiste avec ce dernier à un long monologue furieux, litanique et répétitif, où Vega s'en prend impitoyablement à la bêtise et au mauvais goût de ses ex-compatriotes, à leur mesquinerie et leur vanité, au goût infect de la bière locale, aux moustiques et à la chaleur, à la musique débile du bar, au pays lui-même avec toute sa corruption, ses guerres, ses dictatures et sa criminalité, et même à sa propre famille cupide et décadente. Bref, pour lui, tout au Salvador est dégénéré et il n'aspire qu'à monter dans l'avion qui le ramènera pour toujours au Canada, ou ailleurs, mais pas dans ce pays de fous.
Et donc, à cette lecture, on comprend bien le sous-titre "Thomas Bernhard à San Salvador", tant ce texte est un exercice d'imitation de/un hommage à l'Autrichien rageur (que je n'ai jamais lu, honte à moi). Edgardo Vego éructe, hurle, déteste et vomit son pays et ses habitants dans des flots de bile. Ce livre qui ne connaît pas la demi-mesure est écrit à l'acide sulfurique. Critique féroce qui tend à l'universel quand elle décrie les régimes politiques non démocratiques et la surconsommation, il s'en dégage évidemment beaucoup de noirceur, mais aussi une énergie contagieuse, une sorte d'élan vital désespéré à l'idée de rester coincé dans ce pays fangeux. Un tour de force impressionnant, génial et jouissif qui a, paraît-il, valu des menaces de mort à l'auteur. Les Salvadoriens n'auraient-ils pas le sens de l'humour ?
*Il exagère, ce type dépasse les bornes.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Un salvadorien exile, professeur d'histoire de l'art au Canada, revient a San Salvador pour les funerailles de sa mere. Un retour apres 18 ans d'absence qui tourne au cauchemar. Il deteste tout ce qu'il voit, autant sinon plus qu'il le detestait quand il etait parti. Il cite un vieil ami, Moya (un double de l'auteur?),le seul a qui il voudrait parler, le seul de qui il croit pouvoir etre compris.


Et nous voila partis pour un monologue torrentiel, ininterrompu, de quelques heures, ou il deverse, haineux, tout le degout que lui inspire son pays natal, ses habitants, ses moeurs et ses coutumes. Buvant du whisky, vu qu'il trouve la biere locale infecte, il vomit sa bile sur les politiques, tous des criminels; sur l'eglise qui enterine cyniquement leurs turpitudes et leurs injustices; sur la population, tous des ignares n'ayant jamais lu un livre, tous peureux face aux gangs de “maras" maffieux qui proliferent, tous serviles devant la police et l'armee qui ne sont qu'une autre sorte de bande de malfaiteurs. Tout y passe. Il ne pardonne rien ni personne. La ville, puante, pestilentielle, infestee de bestioles malveillantes, est un chaos architectural sordide, crasseux. L'eau y est contaminee et meme la biere locale provoque la diarrhee. La gastronomie n'est pas en reste, les “supusas au chicharron" dont tous se delectent, graisseuses et indigestes. La famille, le sens donne en cet endroit a la famille, ignominieux, les hommes hantant des bordels sordide avec l'aval de leurs epouses. Sa propre famille, celle du seul frere qu'il ait, abetie par la television, est cupide et ne pense qu'a lui voler sa part d'heritage.


Un monologue qui n'est pas une critique mais un matraquage de tout ce qui est salvadorien. Presque un anatheme. Et le denomme Moya du recit ecoute sans rien dire, sans interferer en quoi que ce soit. Je me demande donc si ce ne sont pas les vraies pensees de l'auteur, du Castellanos Moya reel, qui sont versees la. En tous cas c'est ainsi que cela a ete ressenti dans son pays, d'ou il a du fuir suite a des menaces. Et en fait dans le seul autre livre que j'ai lu de lui, Moronga, il est aussi tres critique du Salvador, qu'il decrit gangrene par les “maras", les gangs, et ou les anciens guerilleros de la guerre civile sont vite devenus des autocrates corrompus. Mais cela n'atteignait pas le paroxisme de la critique de ce livre, cette condamnation sans appel, justement intitulee le degout.


Ce n'est que vers la fin que l'exile imprecateur notifie qu'il a change son nom. Il s'appelle desormais Thomas Bernhard. Ah, bon! Ce livre est donc un exercice de style, dans le genre du celebre auteur autrichien. Des phrases longues a la Bernhard, repetitives a la Bernhard, et un denigrement, mechant et gratuit, de la societe ou il vit, a la Bernhard. Mais la comparaison s'arrete la. Bernhard l'autrichien, si j'essaie de me rappeler de vieilles lectures, a plus d'humour, et il se denigre lui-meme beaucoup plus, ce qui rend ses ecrits plus jouissifs. D'un autre cote Bernhard a ete, malgre quelques critiques, tres bien accepte en son pays, ayant meme recu des prix, alors que Castellanos Moya a ete pratiquement chasse du sien.


Pourquoi des ecrivains tentent de copier des modele qu'ils admirent? Castellanos Moya a bien fait par la suite de developper sa propre veine. Et si je dois donner un conseil, lisez plutot Moronga que ce livre-ci.
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Pour la petite histoire, ma grand-mère était salvadorienne, et j'ai encore beaucoup de famille dans ce pays, puisqu'une partie y est retournée après la fin de la guerre civile. Ne connaissant aucun écrivain originaire du Salvador, quand j'ai découvert Horacio Castellanos Moya à l'occasion de la sortie française d'un roman intitulé Là où vous ne serez pas, (tout un programme..!), j'ai voulu commencer par le dégoût. Bien m'en a pris, je vais sans doute éviter de le citer dans les prochaines correspondances avec mes cousins éloignés.

Même si cet auteur , dans un entretien, dit:
" L'humour est une composante de la mentalité centrale-américaine. C'est difficile à expliquer, mais nous, les centre-américains, nous aimons rire de tout, et notamment rire des gens. Ce n'est pas toujours politiquement correct, mais c'est inscrit dans notre culture. C'est sans doute un mécanisme de défense. La réalité est trop dure pour être assumée sérieusement ", je ne suis pas persuadé que cet "humour" soit apprécié à sa juste valeur. Et d'ailleurs, pour ce seul roman paru au Salvador, les réactions ont été assez violentes.."

Ne t'inquiète pas, j'apprécie, moi, les gènes?
L'avant-propos :
"Edgardo Vega , le personnage central de ce récit, existe: il vit à Montréal sous un autre nom- un nom d'origine saxonne qui n'est cependant pas celui de Thomas Bernhard. Il m'a fait part de ses opinions de manière assurément plus outrée et plus crue qu'elles n'apparaissent dans ce texte. J'ai voulu atténuer quelques uns de ces jugements qui sinon auraient scandalisé certains lecteurs."

Ah bon!! Qu'est-ce que cela pourrait être, alors, car ce roman est déjà, disons assez heu.. percutant..
Vega, donc, exilé au Canada sous le nom de Thomas Bernhard , d'où le thème, pays je te hais- et le style- est contraint de rentrer au bercail une quinzaine de jours à la mort de sa mère. Pour l'enterrement et pour y toucher sa part d'héritage. Il y est accueilli par son frère et sa famille, et retrouve dans un bar un certain Moya, double de l'auteur, journaliste et écrivain. de 17 heures à 19 heures . Il boit deux verres de whisky, deux seulement à cause de sa colite. Et écoute Tchaïkovski. Et hurle. Son dégoût de tout ce qui concerne ce pays. Sa politique, son absence complète de culture, son frère, sa belle soeur, les enfants de son frère, la télé, la bière locale.. Tout y passe.. et on sort un peu abasourdi de cette lecture, à la fois exercice de style d'écriture, et de pastiche finalement, mais aussi portrait certainement réaliste, je n'en doute pas une minute, de ce qu'est devenu ce pays d'Amérique centrale après une guerre civile qui a fait 100 000 morts.

" Je ne décris que des personnages qui n'ont rien de commun avec moi. Tant que je ne les entends pas, le livre ne vaut rien. J'écris à l'oreille. Je pars d'un ton, non d'une vision. Au livre suivant, je change. D'abord, c'est un pari sur le langage. Ensuite, je déteste me répéter. Enfin, c'est le plaisir de la croissance : plonger dans d'autres passions, d'autres voix. La mienne ne m'intéresse pas "
Horacio Castellanos Moya dans Libération.

Là, ça sonnait quand même très personnel, pourtant.. Et une des forces du texte, c'est que ce n'est pas vraiment un personnage sympathique, ce Vega! Car après tout, la mort de sa mère, il s'en fout, seul lui importe l'héritage, il n'est là que pour 15 jours et s'il ne se plait pas chez son frère et ses neveux brailleurs, si les télés dans toutes les chambres l'horripilent tant , il n'était pas obligé d'y aller, si la bière locale lui donne la diarrhée, il n'est pas obligé non plus d'en boire etc.. Il réussit , par sa verve énervée qui mélange un peu tout tant il hait ce pays, ses états d'âme et ses problèmes digestifs variés, à nous donner envie de lui dire de prendre un Lexomil et de reprendre l'avion le plus vite possible. Et à la fin, il perd son passeport, c'est l'horreur absolue.. et c'est très drôle..
J'aime beaucoup les écrivains qui arrivent à rire d'eux-mêmes. Car c'est en grande partie comme cela que j'ai lu ce roman.

Un petit extrait:
"Et les pires, ce sont les misérables politiciens de gauche, Moya, ceux qui naguère se faisaient appeler commandant, ce sont ceux qui m'écoeurent le plus, je n'aurais jamais cru qu'il y avait des types aussi vils, des types répugnants de la tête aux pieds, après avoir envoyé à la mort tant de gens, après avoir envoyé tant de naïfs au sacrifice, après s'être fatigués de répéter ces stupidités qu'ils appelaient leurs idéaux, les voilà maintenant qui se comportent comme les plus voraces des rats, des rats qui ont troqué leurs uniformes militaires de guérilleros contre le complet veston-cravate, des rats qui ont troqué leurs harangues de justice pour la moindre miette tombée de la table des riches, des rats dont l'unique désir a toujours été de s'emparer de l'Etat pour se goinfrer, des rats vraiment écoeurants, Moya, ça me fait de la peine de penser à tous ces imbéciles qui sont morts à cause de ces rats, ça me fait une peine terrible de penser à ces milliards d'imbéciles qui se sont fait tuer parce qu'ils obéissaient aux ordres de ces rats, à ces dizaines de milliers d'imbéciles qui sont allés à la mort dans l'enthousiasme parce qu'il obéissaient aux ordres de ces rats qui maintenant ne pensent qu'à amasser la plus grande quantité de fric possible pour ressembler aux riches qu'ils combattaient avant…."

...Et ça ne leur a pas plu, au Salvador?





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Horacio Castellanos Moya est originaire du Salvador, bien que né au Honduras. Il a quitté le Salvador au début de la guerre civile. Il a écrit ce livre en 1997 : victime de nombreuses menaces de mort pour ses livres, activités journalistiques et politiques, il a dû s'exiler au Canada, au Costa Rica puis au Mexique, au Japon, en Allemagne...
Le roman nous met en position d'auditeur totalement impuissant face à la logorrhée verbale du personnage principal. le narrateur est un ancien camarade de pensionnat mariste d'Edgardo Vega, il l'écoute parler de son retour au Salvador pour les obsèques de sa mère.
Edgardo Vega est professeur d'histoire de l'art au Canada à présent, il a changé d'identité et adopté la nationalité canadienne sous le nom de Thomas Bernhard.
Thomas bernhard comme cet écrivain autrichien qui n'a jamais eu de mots assez durs envers son pays, celui qui du faire un séjour dans un centre de rééducation national-socialiste pour enfants où il fut torturé. Ses écrits lui valurent de nombreux procès en diffamations. Et malgré tout il cherchait à tirer son pays vers le haut...
Vega se défoule, il déroule le dégoût profond que les dirigeants et la petite bourgeoisie salvadorienne lui inspirent. Dans une homélie obsessionnelle et répétitive, il décrit ses impressions sur l'Université salvadorienne, sur la junte militaire au pouvoir soutenue par des groupes paramilitaires d'extrême-droite, les escadrons de la mort, qui firent des milliers de morts.
Au fur et à mesure de l'avancement du discours, un effet comique se fait jour dans des scènes d'une absurdité terrible et assez abjecte parfois.
Il faut un courage immense pour écrire un livre pareil, et surtout il fait aimer son pays pour avoir écrit ce livre.
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Lors de la lecture de ce livre, j'étais assez perturbée du fait que le style d'écriture est assez différent des livres classiques, et du fait que l'oeuvre entière est un monologue.
Ce monologue est brutal avec une telle violence dans le choix des mots, qu'on peut ressentir la haine du personnage, envers tout ce qui peut toucher El Salvador.
Sa lecture m'a fait beaucoup penser à celle de l'Etranger d'Albert Camus, mais dix fois mieux. Excusez-moi, je n'aime pas du tout Albert Camus !
La chute est très bonne, même si on la connaissait dès le début.
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Edgardo Vega alias Thomas Bernhard est contraint de retourner au Salvador afin d'assister aux obsèques de sa mère. Il doit faire acte de présence car c'est la seule condition dictée par sa mère s'il veut toucher sa part d'héritage qui consiste en la maison de son enfance. Edgardo est professeur d'histoire de l'art à l'université McGill de Montréal et n'est pas retourné à San Salvador depuis dix-huit ans. Il exècre son pays natal qui ne lui inspire que du dégoût par son absence de culture et l'ignorance crasse de ses habitants. Au cours de son séjour, Edgardo réside chez son unique frère, un commerçant borné et stupide dont la seule activité culturelle est d'écouter la télévision et regarder les matchs de foot. Sa famille est du même acabit. Notre pauvre Edgardo est au supplice et finit par se louer une chambre à l'hôtel afin d'échapper à cette famille qu'il juge ignoble et monstrueuse. Tout le récit consiste en une rencontre d'Edgardo avec un ancien compagnon de lycée du nom de Moya… dans un bar salvadorien, rencontre qui dure de cinq à sept et au cours de laquelle Edgardo exprime à son ami tout son dégoût et sa haine du Salvador et de ses immondes habitants.

Ce livre est fabuleux, hallucinant, fantastique ! Cet écrivain me fait vibrer presque autant que Michel Tremblay ce qui n'est pas rien ! Son récit est absolument savoureux et rocambolesque à souhait. le regard que porte Edgardo sur son pays natal est impitoyable et d'une dureté sans bornes. Bref, il hait tout ce qui est salvadorien : la musique, la politique, les militaires, la famille, les loisirs, la ville et ses divertissements malsains. le récit de son voyage en avion est une pure merveille de même que celui de sa sortie avec son frère qui l'emmène « tirer un coup » avec un de ses amis noir dans un lupanar immonde et répugnant. C'est drôle, hallucinant et l'écriture touffue et dense de Moya, sans aucun paragraphe et comportant des phrases interminables emporte le lecteur dans un tourbillon de mots, de sensations pénibles, d'angoisse et aussi de moiteur palpable dont il est impossible de s'extraire avant d'avoir lu le tout dernier mot. Seul Moya est capable de décrire aussi bien des situations épouvantables avec un déluge de mots qui fouette le lecteur et l'entraîne dans le monde absolument infernal que constitue San Salvador pour Edgardo. Un pur régal !

Le personnage d'Edgardo est réel et réside effectivement à Montréal mais sous un autre nom. Moya a atténué quelques-uns des jugements de son héros pour épargner certains lecteurs. Dommage…

Suite à la publication de ce roman, Horacio Castellanos Moya a reçu de nombreuses menaces de mort qui l'ont contraint à s'exiler.

« Moi, ça faisait dix-huit ans que je n'étais pas revenu au pays, dix-huit ans pendant lesquels rien de tout ça ne m'a manqué, parce que je suis parti justement pour fuir ce pays, je trouvais qu'il n'y avait rien de plus cruel et inhumain qu'avec la quantité d'endroits qu'il y a sur la planète ce soit précisément dans ce coin que moi je doive naître, je n'ai jamais pu accepter, alors qu'il existe des centaines de pays, que ce soit dans le pire de tous, dans le plus stupide, le plus criminel des pays, qu'il me soit revenu à moi de naître, ça je n'ai jamais pu l'accepter, Moya, c'est pour ça que je suis parti à Montréal, bien avant que ne commence la guerre, je ne suis pas parti comme exilé, ni à la recherche de meilleures conditions économiques, je suis parti parce que je n'ai jamais accepté la macabre plaisanterie du destin qui m'a fait naître dans ces terres, me dit Vega. »

"Le commerce sexuel est ce qu'il y a de plus dégoûtant, Moya, rien ne provoque en moi autant de répugnance que le commerce de la chair, quelque chose en soi de visqueux et de propice aux malentendus comme l'est le sexe atteint des abysses abominables avec son commerce, une pratique qui ronge tes facultés spirituelles d'une manière foudroyante."
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Un livre remarquable qui vaut le détour. Dans un long monologue ininterrompu, un homme exprime tout son dégoût de son pays d'origine, le Salvador, et de ses ex-compatriotes, les Salvadoriens. Il s'est exilé au Canada, et n'est revenu au Salvador que pour les funérailles de sa mère. C'est à cette occasion qu'il s'exprime un soir auprès d'un ami d'enfance retrouvé lors des funérailles.

Rien n'échappe à son mépris : le manque de culture des Salvadoriens ; la multiplication des universités privées où n'importe qui peut devenir professeur et qui enseignent à leurs élèves comment devenir "manager d'entreprise" ; les militaires ; la famille de son frère, en particulier sa belle-soeur qui ne se nourrit que de cancans et de soap-opéras mexicains ; l'horrible bière du pays qui lui donne la diarrhée ; les sorties au port et le comportement abject de ses ex-compatriotes dans l'avion et à l'aéroport.

Le monologue se termine par une grande crise d'angoisse : il a failli perdre son passeport canadien !

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Livre coup de poing, un gros décrassage au vitriol de notre société. Même si on attaque dans ce livre la population de San Salvador, on peut facilement appliquer cette longue analyse à notre société élitiste.

Ce gros décrassage en long en large et en travers fait vraiment du bien. Ici tout ce que les gens pensent tout bas est enfin étalé au grand jour. Les seules personnes qui peuvent se sentir choquées sont les personnes visées par les propos de l'auteur.

Le seul reproche est le côté trop court de l'oeuvre, car il y avait encore tant à dénoncer. J'avais déjà lu un livre de l'auteur lors d'un masse critique, je n'ai vraiment pas bouder mon plaisir avec ce livre coup de gueule. Vraiment un pur régal. C'est violent, acerbe et jouissif...
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"Le dégoût" d'Horacio Castellanos Moya (104p)
Ed. Métailié
Bonjour les fous de lectures….
Waouh !!!! Quel exercice de style nous présente Horacio Castellanos Moya!!!
Un long monologue, un seul paragraphe de 104p. Clin d'oeil subtil à Thomas Bernhard, le célèbre dramaturge autrichien.
Edgardo vega est exilé à Montréal depuis 18 ans. Jamais de regrets de sa famille ni de la mère patrie et si ce n'était assister aux obsèques de sa mère et régler sa part d'héritage, il ne serait jamais revenu en pays maudit.
Pendant deux heures passées dans un bar, Edgardo va monologuer face à notre auteur (ami d'enfance ) et lui balancer tout la haine qu'il ressent pour son pays et ses habitants.
Tout y passe, le politique, le social, la religion, la corruption.
Eduardo a vraiment existé.. n'est-ce pas cela le plus terrible ?
Récit impitoyable, fiel déversé à outrance.
On se prend au jeu et on se demande où Edouardo va s'arrêter.
Ne trouvera-t-il vraiment rien atténuant sa hargne pour son pays? aucune circonstance atténuante ? … Et bien non !!!!
C'est piquant , j'ai adoré.
Horacio Castellanos Moya qu'il est né au Honduras, il a longtemps vécu au Salvador, séjourné au Canada, au Costa Rica, il est aujourd'hui établi au Mexique.
Iil a été menacé de mort pour ses livres (romans et essais), et ses activités politiques et journalistiques l'ont contraint plusieurs fois à s'exiler.
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