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EAN : 9782729119737
90 pages
Editions de La Différence (12/04/2012)
3/5   5 notes
Résumé :
« Un refus d’être dans la course, de participer avec armes et bagages à cette poursuite échevelée de la modernité qui caractérise tant notre époque tonitruante. S’éloigner de la clameur du moderne, préférer l’implicite et ses chuchotis à l’explicite qui aboie ses vérités. Se montrer plus sensible à l’écho qu’à la voix qui l’a produit. Ne pas vouloir se rendre exclusivement contemporain de son siècle, mais retourner aussi vers d’autres, en commencer le voyage. En pla... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Pas du tout le livre d'un atrabilaire d' « un vieux toqué rétro » mais celui d'un jeune homme de 80 ans habité par la littérature, amoureux de la langue qui préfère baguenauder en compagnie de Fontenelle, Catulle, Montaigne qui viennent le rejoindre sur un banc ou accompagne sa marche quand leurs pages subitement défilent et tournent à l'intérieur de lui-même. Un rêveur qui aime par-dessous tout feuilleter de vieux livres.
« J'aime lire des phrases qui ont pris de l'âge, car l'âge aussi est une rêverie qui enrichit celle éventuellement proposée par le texte qu'on découvre ! J'entre alors dans mes parenthèses, mes instants feuilles mortes tombées de l'arbre émondé du Temps. Et la ville autour peut hurler, je n'entends plus que le bruit irréel des pages que je tourne. »

C'est avec grand plaisir que j'ai retrouvé Michel Chaillou, narquois, malicieux.
Un écrivain qui mériterait bien des éloges.

« Qui ne s'aperçoit que réfléchir, c'est toujours se démoder, se mettre hors, devenir le fantôme de soi avec qui on discute ! Que cette humeur, cet état, cette démarche (de quel nom qu'on l'accoutre) est celle d'un esprit qui musarde, tarde à rejoindre le trot général, quand ce n'est pas le galop ! le démodé ne règle jamais ses pas sur sur ceux des autres, mais s'en invente d'inattendus, rarement mesurés. »
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Et la télévision, la radio ont beau mettre leur voix aux enchères, je deviens sourd à leurs alarmes, cherchant un coin retiré de l’espace où la solitude pourrait s’asseoir avec moi sur un banc. Car la solitude a aussi ses bancs. J’y patiente, m’amusant de mon ombre, si le soleil m’en fournit une, songeant à mes dernières lectures dont la page se tourne alors en moi. Cette anecdote par exemple, tirée d’un vieil almanach où la poussière a inscrit son nom. « Monsieur de Fontenelle souriait quelquefois, mais ne riait jamais. On lui en demandait un jour la raison. Je ne me suis jamais senti le besoin de faire ah, ah, ah ! répondit-il. » p 44
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"Fin de siècle", expression désabusée qui m'a toujours enchanté. J'y lis l'élégance d'une mode surprise juste à l'instant où elle se démode, une fin qui s'éterniserait dans sa finitude, une fin qui n'en finirait pas de s'achever. Etre "fin de siècle", se prendre les pieds dans la traîne du temps qui passe, se servir de cet embarras pour devenir une sorte de dandy du passé ! p 24
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   Tenez, il n'y a pas si longtemps, une femme dans un train, un après-midi. On roulait vers Nantes, ma ville natale où l'enfant que j'étais naguère devait déjà m'attendre à la gare. Une jeune blonde, vive créature vêtue de couleurs brillantes, me voyant, sans considération pour son aimable personne, plongé de la tête aux pieds dans un vague roman depuis Montparnasse, me jeta soudain désinvolte en se levant (elle descendait âpre à Angers) : « Tout ça, c'est fini ! » Et le mépris accompagnait sa main désignant mon livre. Comment aurais-je pu lui répondre, elle avait déjà tourné les talons et s'éloignait très sûre d'elle dans les profondeurs de l'Anjou.
   Un mois plus tard, dans un autre train se dirigeant cette fois vers Le Croisic, une mère d'à peine trente ans répandant sa maternité entre des effusions à son bébé et à son chien, me voyant plongé dans la même attitude avec en mains la Profession de foi du vicaire savoyard, pourtant en collection de poche, signe de modernité, osa néanmoins me faire remarquer, avant de descendre triomphante à La Baule suivie de sa progéniture, qu'à tous ces auteurs du patrimoine, ces Rousseau, Voltaire, Diderot ânonnés à l'école, elle préférait, et de loin quant à elle, ouvrir des romans de plage et justement à la plage.
   ‒ Mais qu'en pense la mer ?
   M'entendit-elle ? Qu'elle m'ait entendu, la question lui eût paru certainement saugrenue. Et pourtant ce ressassement permanent qui borde nos plages aurait mérité qu'elle s'y attarde. Car n'est-ce pas à un immense radotage de «senior» (comme l'époque appelle désormais les gens d'âge) auquel on assiste ? Allait-elle alors traiter l'océan de vieux mec qui redit sans cesse la même chose ?

p.11-12
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   Bref, pour toutes ces donzelles à ordinateur portable, branchées sur toutes les ondes de la planète, mais pas sur l'essentiel, faute d'écouteurs d'âme, j'étais décidément un vieux affairé, à l'aide de vieilles mains tavelées, à de vieilles choses. Tourner page après page l'absolu d'un livre, s'efforcer d'entendre au plus près la voix sans bruit d'une œuvre ne paraissant, à leurs yeux bleus ou noirs ou verts, même marron vert, plus du tout à la mode, elles qui dans leur ardeur juvénile préfèrent, et de loin, courir après l'alphabet sur tous les écrans variés et divers de la modernité. Un livre ? Foutaise que cela ! N'ont-elles pas depuis leur scolarité expulsé à jamais le mot de leur vocabulaire ?
   J'acquiesçai. Dans les tréfonds de mon être, j'opinais dans leur sens. Qu'en effet, ayant atteint une somme considérable d'années, je n'étais plus dans le coup. Mais un coup porté par qui ? eus-je pu insidieusement leur faire observer.
   Car autant vous l'avouer tout de suite, j'ai quatre-vingts ans. Ma porte a d'ailleurs le même âge qui geint au fond du couloir. Au moindre toucher, elle s'apeure, ne cesse de branler sur ses gonds. Que cache-t-elle donc d'inexpliqué dans son bois tendre qui tressaille ? Ouverte, elle semble s'effrayer de s'être ainsi laissé ouvrir, fermée, elle paraît contenir avec peine ce que je suis : un individu de moyenne stature que la moindre rue dépasse, que le tumulte du monde ensevelit.

p.12-13
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Le fané ? Le démodé de la fleur.
(...)
Une chose folle me revient : l'âne serait-il en définitive le démodé du cheval, un cheval démodé ?
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Vidéo de Michel Chaillou

5 # Michel Chaillou
Grand prix 2007 de littérature de l'Académie française pour l'ensemble de son œuvre, Michel Chaillou poursuit inlassablement sa quête du temps, dans une recherche qui n'a rien de nostalgique. Outre ses livres autobiographiques qui mettent en scène son double littéraire Samuel Canoby ("Le dernier des Romains", Fayard 2009), son œuvre de plus de vingt-cinq livres propose des échappées purement imaginaires, la fantaisie, voire le fantastique ou un savant mélange ("Virginité", Fayard 2007). Interrogé par un romancier plus jeune, Jean Védrines, Michel Chaillou s'est efforcé de penser tout haut ce qu'est pour lui la littérature dans "L'Écoute intérieure", neuf entretiens sur la littérature (Fayard 2007).
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