Mettant un peu ennuyée devant
Indian Creek de
Pete Fromm dont le Narrateur était aussi un « compteur de saumons » dans le Grand Nord, j'avais peur de ressentir la même chose, de retrouver un solitaire dans les grands espaces ne parlant qu'à ses chiens, un contemplatif qui cherche à ne faire qu'un avec la nature. J'ai effectivement eu cette impression par moment, avec le personnage de Jack qui a des côtés caricaturaux : il lit de la poésie seul dans sa cabane – et d'auteurs vivant eux aussi seuls dans la nature, pour bien insister sur le fait que c'est un marginal pour qui la nature compte plus que l'humanité. C'est ce que je n'aime pas forcément dans le « nature writing » : les personnages humains ne sont que des utilités au milieu de longues descriptions du paysage changeant selon les saisons ou d'évocations de mythes ou de contes locaux : comme si les auteurs n'osaient pas, n'assumaient pas, de se passer de personnages au lieu d'écrire directement de la poésie en prose. Les mythes indiens évoqués sont intéressants, mais leur présence est trop appuyée, manque de subtilité – on a vite compris le lien avec l'histoire des personnages, pas besoin de les répéter. Ainsi, les antagonistes de Jack sont des chasseurs brutaux, qui martyrisent leurs chevaux, sans respect de la nature.
S'il n'y avait que Jack, je n'aurais donc pas trop apprécié ce roman. de plus, d'un point de vue romanesque, je n'ai pas été convaincue par la dernière partie, un épilogue sous forme d'avancée dans le temps qui n'apporte pas grand-chose. Ce sont les souffrances de la jeune Hannah,les discriminations dont elle souffre, son lien avec la nature, son intégration à sa façon, par l'amour de la terre elle-même qui ont le plus d'intérêt, pas sa reconstruction seule dans la forêt.
L'originalité du roman vient donc du fait que ce soit en plus un roman historique, et ce, d'autant plus, sur des événements assez peu connus en France au moins. Je savais que les Japonais ou leurs descendants avaient été internés aux États-Unis après Pearl Harbor, je ne savais pas que c'était aussi le cas au Canada. J'aurais d'ailleurs aimé en savoir davantage sur ces mesures politiques d'internement, aussi racistes que le régime hitlérien que le Canada combattait.