Jean Sulivan (de son véritable nom Joseph Lemarchand) naquit en 1913 à Montauban-de-Bretagne et mourut en 1980 à Boulogne-Billancourt. Il fut le fils d'exploitants agricoles, non propriétaires de leur terre. Il entra au grand séminaire de Rennes et fut ordonné prêtre en 1938.
Comme il le dit lui-même, il "quitta le service actif" en 1967 pour cause de "dissidence cléricale bretonne". Il ne fut pourtant jamais officiellement démis de ses fonctions.
Que fut cette dissidence ?
Jean Sulivan prôna le primat de l'intériorité de la foi par rapport au fonctionnement hiérarchique politicienne de l'institution catholique. Il appelle l'Eglise à cesser "d'apparaître comme cette énorme coiffe de plomb à organiser les apparences”
Il s'installa à Paris en 1967, entreprit plusieurs voyages, notamment en Inde, et une carrière d'écrivain et de directeur de collection chez deux éditeurs de renom.
Le chemin intérieur que trace Sulivan a croisé celui des grandes spiritualités orientales, mais sans se confondre avec elles : il conserve la spécificité du catholicisme qui est essentiellement "l'appel de la grâce", ou amour mystique.
Il y a un peu de Pascal en lui, de
Christian Bobin en plus argumenté et moins "joli", de
Pascal-Quignard en moins anguleux, quoique ce le soit suffisamment comme ça. Ce qui n'exclut pas la joie.
C'est beau et poétique : Sulivan rumine dans le sens noble du terme et entend conquérir et préserver une forme de solitude souriante et lucide, tout en appelant à ne pas se couper du monde et de l'action. Il appelle à la légèreté et au sérieux (pas du tout incompatibles) par rapport à une interprétation dogmatique et littérale des Evangiles dans "l'esprit de lourdeur". Chaque homme, chaque femme, a la responsabilité de sa foi ou de son doute et ne devrait pas se contenter de souscrire à une loi extérieure : importe plus que le fait de croire ou pas, le "comment" on croit ou pas : le parcours spirituel individuel.
Je conseille cet écrivain aux croyants quelque soit leur religion, aux agnostiques, et aux athées soucieux de spiritualité sans exotisme et sans maître à penser.