Dernier ouvrage écrit par la Grande Reine du Crime (puisque "
La dernière énigme" et "Hercule
Poirot quitte la scène" avaient été rédigés pendant la seconde guerre mondiale, dans la perspective de conclure les aventures respectivement de Marple et Poirot si Agatha ne sortait pas indemne du conflit), "
Le cheval à bascule" est une oeuvre malade.
Malade, car comme toujours, Agatha met beaucoup d'elle-même dans ses héros, et en particulier dans Tuppence Beresford, projection romanesque de son auteure. Malheureusement, à 80 ans, la grande Reine du Crime n'est plus que l'ombre d'elle-même, et cette tentative désespérée d'offrir une conclusion à son couple d'aventuriers délirants ne nous offre qu'un bien piteux récit, miroir de l'état dans lequel se trouvait
Agatha Christie lors de sa composition.
Pourtant, le postulat de départ est alléchant : le meurtre d'une mystérieuse gouvernante remontant à plus d'un demi-siècle, des messages cachés dans les livres, de mystérieux objets semblant ouvrir la porte vers un secret d'Etat ... Mais dès les premiers chapitres, quelque chose sonne faux. Les phrases sont courtes, sans recherche, les personnages répètent plusieurs fois une même information, comme si l'auteure elle-même tentait de ne pas perdre pied dans son écriture. Et si les nombreuses réflexions sur le temps, la nostalgie, le décalage entre les grandes aventures d'autrefois et le repos d'une fin de vie sont touchantes remises dans le contexte de leur rédaction, l'intrigue policière, elle, s'égare, se désagrège pour s'achever de bien piteuse manière.
Un roman malade, donc, sauvé par son couple principal, toujours aussi attachant, par Hannibal, toutou qui sera donc l'une des dernières images de l'oeuvre d'
Agatha Christie, mais plombé par une enquête inexistante, quelques incohérences et l'impression de lire un roman qui s'est égaré en chemin, achevant le travail de la Grande Reine du Crime d'une manière bien amère.