À peine âgé de huit ans, le narrateur orphelin se retrouve sous la garde de son grand-père. Cet homme simple, tenancier d'un petit bistro, le café de l'Excelsior du titre (qui a plus l'allure d'un estaminet). Là viennent noyer leur misère et leur chagrin, loin de leurs femmes, quelques vieux bonhommes du coin qui forment une grande famille. C'est là que le narrateur mènera une vie heureuse et comblée, sous les yeux de son grand-père qu'il adore. Ce dernier ne connait pas grand chose en dehors de son établissement mais il a de bonnes histoires à raconter (il pouvait parler pendant des heures sur Waterloo) et une philosophie de la vie très inclusive qui semble plaire au garçon. Qui parmi nous ne garde pas de pareils souvenirs ? Des moments éphémères, certes, mais ô combien doux et réconfortants ! Et c'est du donnant-donnant, l'enfant est un vrai rayon de soleil et il regaillardit l'existence de l'aïeul. Visiblement, ce n'est pas l'avis de l'administration (représentée par «l'homme de la Grande Ville») qui décide d'envoyer le garçon, une fois âgé de onze ans, dans une famille d'accueil. Puis dans une autre, et encore, toujours balloté. Rendu adulte, le narrateur décide de retourner au café, si symbolique de son enfance. Il n'en reste que des souvenirs ou presque…
Cette petite plaquette (à peine 84 pages) va droit à l'essentiel. C'est ce que j'aime de la plume de Philippe Claudel. Pas besoin de longues descriptions ni de dialogues superficiels. En peu de mots, il réussit à faire comprendre beaucoup et, surtout, à faire passer des émotions. Et sans les nommer non plus. Par exemple, dans le vacarme et le tourbillon de la Grande Ville où ils doivent se rendre, le grand-père serre la main chétive de son petit-fils en lui répétant sans cesse « Ne me quitte pas » J'imagine tellement facilement cet homme modeste, s'occuper avec amour de cet enfant. Je comprends que le narrateur vénère son grand-père, avec ses attentions (les glaces achetées, les visites au zoo…), tous les moments du quotidien qu'ils auront partagés, etc. Et le narrateur aussi est attendrissant, encore innocent comme les jeunes enfants peuvent l'être, mais également docile et aidant pour son grand-père. Vous voyez, rien de larmoyant ni de dramatique. La vie, c'est tout. Évidemment, c'est un brin tristounet quand le garçon est arraché à ses repères mais on s'y attendait. Rendu à la fin, c'est presque dommage que le roman soit si court. Mais bon, le café de l'Excelsior est une histoire émouvante, remplie de poésie et d'humanité, alors on pardonne.
Commenter  J’apprécie         665