Wendy hurla. Elle s'aplatit derrière le vieux canapé, comme s'il pouvait la protéger. Par-dessous elle voyait Dan étendu sur le sol. Immobile. Une mare de sang en train de se former autour de sa tête, maculant la moquette. Le tireur traversa la pièce. Sans hâte. D'un pas nonchalant. Il s'arrêta au-dessus de Dan, le visa à la tête.
Être confronté à la mort nous pousse vers la vie.
- Tu aimes le rap ?
- Tu veux dire la râpe ? L'ustensile de cuisine ?
- Euh. .. non. La musique.
- Je préfère encore écouter tousser un chat catarrheux.
Il regarda la pute morte. On en voyait beaucoup dans le métier. Des putes, des junkies qui fichaient leur vie en l'air, qui glandaient, se défonçaient, se faisaient démolir ou qui se retrouvaient en cloque de Dieu sait combien de pères différents, et tout ça, ça en faisait un sacré putain de gâchis.
Deux jours plus tard, l'émission est passée à l'antenne. Tout le monde l'a vue.
Et la vie de Dan Mercer, ainsi que je l'avais pressenti en arrivant devant cette porte, a basculé.
Walker regarda ailleurs, ne voulant pas lui donner raison. Il est bien plus facile de classer les gens en catégories, anges ou démons, sauf que ça ne marche pas. On travaille dans le gris et honnêtement, ça craint. Les extrêmes, c'est tellement plus simple.
A force de cultiver la haine, on finit par passer à côté de tout le reste... vous ne croyez pas ?
- Un homme qui n'est plus capable de subvenir aux besoins des siens... autant lui couper les roustons. Il a l'impression d'être un moins que rien.
Perdre son boulot, c'est la cata, qu'on soit en bas ou en haut de l'organigramme. En haut, ça doit être pire.
- Peut-être que la solution n'est pas de trouver un autre travail, fit Wendy, mais de réviser sa conception de la virilité.
- A votre place, je ne serais pas aussi dure avec moi-même.
- Comment ça ?
- Vos histoires d'échec.
Wendy pointa le menton vers l'ordinateur.
- Un raté, personne ne miserait six cents dollars sur son vieux bandana.
Il sourit.
- Ça vous en bouche un coin, hein ?
Se penchant un peu plus, il chuchota :
- Vous voulez connaître un petit secret ?
- Bien sûr.
- L'enchérisseur, c'est ma femme. En fait, elle utilise deux noms différents et enchérit sur elle-même. Elle croit que je ne le sais pas.
Wendy hocha la tête.
- CQFD.
- Hein ?
- Quelqu'un que sa femme aime à ce point-là, comment pouvez-vous dire que c'est un raté ?
Ten-A-Fly entreprit d'exécuter ce que d'aucuns appelleraient une "danse", même si des experts médicaux parleraient davantage d'une "attaque sévère" ou d'une "crise d'apoplexie".