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EAN : 9782824705934
138 pages
Bibebook (07/06/2013)
3/5   9 notes
Résumé :
Comédie : Alcidon, amoureux de Clarice, veuve d'Alcandre et maîtresse de Philiste, son particulier ami, de peur qu'il ne s'en aperçût, feint d'aimer sa soeur Doris, qui, ne s'abusant point par ses caresses, consent au mariage de Florange, que sa mère lui propose. Ce faux ami, sous un prétexte de se venger de l'affront que lui faisait ce mariage, fait consentir Célidan à enlever Clarice en sa faveur...
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
La Veuve est la troisième pièce écrite par Pierre Corneille. Cette comédie date de 1632 et suit le ratage qu'avait été Clitandre (avis personnel). Vu la qualité de la présente pièce, on peut dire que voilà l'auteur relancé.

Corneille joue ici avec l'éloignement qui peut exister entre le sentiment ressenti et le sentiment déclaré. Il met en scène deux couples qui se tourne autour. le premier, Clarice – la fameuse veuve – et Philiste, éprouve une attirance forte et partagée mais joue l'indifférence, la retenue (je connais, j'ai beaucoup pratiqué). A l'opposé le second, Doris – soeur de Philiste – et Alcidon – ami de Philiste – en fait des kilos de vers amourachés alors qu'il n'y a rien derrière la façade, ni l'un ni l'autre n'éprouvant autre chose que de l'indifférence, voire du mépris.

Et tout le début joue sur ce contraste. le comportement de façade est suivi de la déclaration des véritables sentiments à soi-même ou à un tiers. Philiste se meurt d'amour, Alcidon n'est qu'un ambitieux qui veut se placer. La suite dévoile les véritables intentions de ce dernier, le complot qu'il a monté avec la nourrice de Clarice (un véritable stratège de palais celle-là). Alcidon est en fait amoureux de Clarice, lui aussi, et n'a de cesse de pousser son « ami » Philiste à retenir ses sentiments loin de sa bouche. Il s'est rapproché de Doris pour donner le change. Tout ce qu'il raconte sonne faux et l'on finit par ne plus savoir s'il croit lui-même à ses mensonges.

L'action déboule. Sous l'idée de la nourrice, Alcidon décide d'enlever Clarice pour l'éloigner définitivement de Philiste. Pour ce faire il fait appel à un ami, Célidan, que l'on perçoit au début comme un naïf, un pion sans intérêt.
Mais on est vite trompé. C'est lui qui coupera le noeud gordien, dévoilera la fourberie d'Alcidon, rapprochera Clarice et Philiste et libèrera Doris des mariages imposés en devenant son amoureux. Ce personnage essentiel, qui apparaît assez tard dans la pièce, est avec le stratège-nourrice le plus intéressant de la pièce.

Les vers se lisent toujours avec ce plaisir jouissif où le rythme de l'alexandrin s'associe merveilleusement avec le sens des phrases. Dans son Examen, écrit des années plus tard, passe du temps à se justifier des dérives de la pièce par rapport aux canons d'unités de lieu et de temps. Je l'avoue, ce débat me chaud très peu. Si je trouve l'exercice de style du respect des canons intéressant intellectuellement, je n'apprécie pas de le voir transformé en dogme quasi-religieux par les académiciens du temps. Enfin, il s'agit d'un avis contemporain sur une époque qui n'en a que faire.
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Ce fut un moment de réel plaisir de retrouver l'écriture vieille et suave de Corneille. La veuve nous dépeint. comme la plupart des textes du Xviiie s, les moeurs de l'époque. Une critique sur une amitié tissée sur une base hypocrite. On retrouve les folies du romantisme avec l'enlèvement de la veuve, puis cet acharnement des mères de l'époque de voir leur fille vite se marier même si c'est avec le diable pourvu que la honte de la famille soit ôtée. Les personnages ont du caractère, de nature très calculatrice, si bien que ça fait mouvoir la pièce...
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Après Clitandre, un essai de tragi-comédie qui ne semble pas avoir eu de succès, Corneille revient pour sa troisième pièce à la comédie, qui lui a permis des débuts prometteurs avec Mélite.

Sans doute jouée pendant la saison 1631-1632, "La veuve" est publiée en 1634. Corneille fait précéder sa pièce d'un « Avis au lecteur » où il exprime quelques unes de ses idées sur le théâtre. Il est définitivement un « moderne » et considère que suivre de façon absolu les règles que certains semblent avoir trouvées chez les Anciens n'est pas forcément la chose à faire. Dans La veuve, il ne suit pas la règle des 24 heures (l'unité de temps), la pièce se passe sur cinq jours, chaque acte correspondant à une journée. Il insiste aussi beaucoup sur la langue, importante pour la vraisemblance de la pièce, il faut que ce soit la langue telle que des personnages comme ceux de sa pièces utiliseraient dans la vraie vie (« la langue des honnêtes gens » dit-il), la comédie n'est ni la tragédie ni un poème épique et doit éviter un style trop noble.

La pièce est une comédie de moeurs, sentimentale bien sûr, à l'époque il n'était pas vraiment envisageable de faire une comédie sans amour et sans mariage final.

Clarice, une jeune, riche et jolie veuve, est aimée par Philiste, qui est assidu auprès d'elle mais qui ne se déclare pas, car il est bien moins fortuné que sa bien-aimée. Qui finit par se déclarer elle-même à son amoureux si réservé. Mais Alcidon, que Philiste considère comme son meilleur ami et à qui il a promis sa soeur, est en réalité son rival auprès de Clarice, Doris (la soeur de Philiste) ne servant en quelque sorte que de couverture. Apprenant que le mariage entre Clarice et Philiste est proche, il se décide sur les conseils et avec l'aide de la Nourrice de la jeune femme, à l'enlever. Il utilise pour cela l'aide de Célidan, dont il abuse la bonne foi en lui confiant que Doris sera finalement mariée à un autre homme par sa mère, plus riche, alors que cela lui indiffère (et que ce mariage est rendu impossible par Philiste). Mais Célidan finit par comprendre la supercherie et libère Clarice, ce qui lui permettra de briguer la main de Doris dont il était secrètement amoureux.

L'intrigue est plus complexe et spectaculaire que celle de Mélite, il y a un méchant, un enlèvement, des rebondissements. L'étude des moeurs matrimoniales est aussi plus poussée et plus réaliste. Doris, que son frère et sa mère, veulent marier sans tenir compte de ses sentiments, exprime avec une vraie force la souffrance que cette situation d'objet mis aux enchères sur le marché du mariage provoque chez elle. La sujétion des femmes est très bien suggérée par Corneille, l'importance des accords financiers au moment du mariage aussi. Il n'y a que les veuves comme Clarice, si elles sont riches comme elle, qui peuvent se permettre le luxe de se marier selon leur sentiment. On sent qu'à une autre époque, dans laquelle les conventions pesantes sur les comédies auraient été moins lourdes, Corneille aurait pu donner des satires cruelles et justes des moeurs de son temps.

Les personnages sont intéressants, pas forcément idéalisés, Philiste a visiblement mauvais caractère, il tyrannise sa soeur et sa mère, il n'est pas très clairvoyant, ni vis à vis d'Alcidon ni de Clarice, si les choses se terminent bien, il n'y est pas pour grand-chose. Alcidon est fourbe à souhait, et Doris fine mouche. Il y a vrai potentiel comique dans la pièce, même si cela est subtil, et demande de la finesse. Il manque peut être un peu une vraie analyse du sentiment amoureux, on reste dans quelque chose de conventionnel, alors que c'est censé être le centre de l'intrigue.

Mais la pièce est vraiment intéressante et complexe, dommage que les comédies de Corneille, à l'exception de L'illusion comique, très atypique dans la production de l'auteur, ne soient plus jouées actuellement.
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Comédie particulièrement appréciée, notamment par de nombreux paires de son temps, La Veuve n'est pas l'une des pièce de Corneille les plus connues. Pourtant, toujours sur le même schéma (comme il l'explique si bien au début de la pièce), il réussit à faire rire son spectateur tout en gardant une écriture toute spécifique à Corneille que l'on connait si bien dans le Cid ou Horace.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
DORIS
Qu'aux filles comme moi le sort est inhumain !
Que leur condition se trouve déplorable !
Une mère aveuglée, un frère inexorable,
Chacun de son côté, prennent sur mon devoir
Et sur mes volontés un absolu pouvoir.
Chacun me veut forcer à suivre son caprice :
L'un a ses amitiés, l'autre a son avarice.
Ma mère veut Florange, et mon frère Alcidon ;
Dans leurs divisions mon cœur à l'abandon
N'attend que leur accord pour souffrir et pour feindre.
Je n'ose qu'espérer, et je ne sais que craindre,
Ou plutôt je crains tout et je n'espère rien ;
Je n'ose fuir mon mal, ni rechercher mon bien.
Dure sujétion ! étrange tyrannie !
Toute liberté donc à mon choix se dénie !
(Acte IV, scène 9)
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ALCIDON
J'en demeure d'accord, chacun a sa méthode,
Mais la tienne pour moi serait trop incommode,
Mon cœur ne pourrait pas conserver tant de feu
S'il fallait que ma bouche en témoignât si peu.
Depuis près de deux ans tu brûles pour Clarice,
Et plus ton amour croît, moins elle en a d'indice,
Il semble qu'à languir tes désirs sont contents,
Et que tu n'as pour but que de perdre ton temps.
Quel fruit espères-tu de ta persévérance
À la traiter toujours avec indifférence ?
Auprès d'elle assidu sans lui parler d'amour,
Veux-tu qu'elle commence à te faire la cour ?
(Acte I, scène 1)
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PHILISTE : À croire ton babil, la ruse est merveilleuse ;
Mais l'épreuve, à mon goût, en est fort périlleuse.
LA NOURRICE : Jamais il ne s'est vu de tours plus assurés.
La raison et l'amour sont ennemis jurés ;
Et lorsque ce dernier dans un esprit commande,
Il ne peut endurer que l'autre le gourmande :
Plus la raison l'attaque, et plus il se roidit ;
Plus elle l'intimide, et plus il s'enhardit.

Acte II, Scène 3.
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LA NOURRICE
Ce cajoleur rusé, qui toujours vous assiège,
A tant fait qu'à la fin vous tombez dans son piège.
CLARICE
Ce cavalier parfait, de qui je tiens le cœur,
A tant fait que du mien il s'est rendu vainqueur.
(Acte II, scène 2)
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C'est ce qui ne se peut, l'amour est tout de feu,
Il éclaire en brûlant et se trahit soi-même :
L'esprit d'un amoureux absent de ce qu'il aime
Par sa mauvaise humeur fait trop voir ce qu'il est,
Toujours morne, rêveur, triste, tout lui déplaît,
À tout autre propos qu'à celui de sa flamme
Le silence à la bouche, et le chagrin en l'âme ;
Son oeil semble à regret nous donner ses regards,
Et les jette à la fois souvent de toutes parts,
Qu'ainsi sa fonction confuse ou mal guidée
Se ramène en soi-même, et ne voit qu'une idée.
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Vidéo de Pierre Corneille
Lecture par l'auteur
Rencontre animée par Marie-Madeleine Rigopoulos
« Ce livre est un ensemble de nouvelles autobiographiques, classées par âge de la vie, de la petite enfance à aujourd'hui. Ces nouvelles sont souvent, pas toujours, des mésaventures dans lesquelles j'éprouve peur et honte, qui me sont assez naturelles et me donnent paradoxalement l'énergie d'écrire. Scènes de gêne ou de honte, scènes de culpabilité, scènes chargées de remords et de ridicule, mais aussi scènes, plus rares forcément, de pur bonheur, comme celle qui donne son nom au livre, Célidan disparu : personnage à la fois pusillanime et enflammé d'une pièce de Corneille que j'ai jouée à mes débuts d'acteur, dont je découvris lors de l'audition pour l'obtenir, qu'il me révélait à moi-même, et faisait de moi un acteur heureux. »
Denis Podalydès
À lire – Denis Podalydès, Célidan disparu, Mercure de France, 2022.
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