La guerre entre les trois grands blocs est ouverte. Mais pas encore de chocs frontaux. Sargasse cherche, par des attaques périphériques, à détruire la confiance des nouveaux alliés de l'amiral MacGregor et de sa Fédération. Si cette nouvelle entité se montre incapable de protéger ses nouveaux membres, les planètes les plus fragiles, alors, à quoi bon renoncer à son indépendance et y participer ? MacGregor va-t-il devoir céder ou trouvera-t-il un plan lui permettant de sauver la situation ?
Comme pour les autres volumes, et vous l'aurez compris en lisant cette introduction, il est inconcevable de commencer la lecture de Vatican (et de cette chronique) sans avoir découvert Régulus, Orosco et Providence, les trois précédents romans de la série du Second Oekumène. Même si, il faut bien le dire, dans ce roman,
John Crossford (par souci de simplicité, je vais continuer à l'appeler ainsi, même si l'éditeur a révélé voici quelques mois qu'il s'agissait en fait d'un pseudonyme pour
Bertrand Passegué) renouvelle pas mal l'intrigue et décentre l'action sur d'autres personnages que ceux qui avaient la vedette précédemment. Ces derniers ne disparaissent pas de la scène ni de l'action. Loin de là. Mais leurs rôles sont moins essentiels, moins centraux. Et les histoires mises en place sont, sinon totalement nouvelles, du moins en partie autonomes par rapport aux précédentes. le monde est toujours le même, la trame principale aussi, mais on enrichit le débat, on l'ouvre. Et cela m'a fait un grand bien. Lors de ma découverte de Providence, je disais un certain « moins bien » ressenti, une certaine frustration. Ils ont totalement disparu lors de celle de Vatican. D'où mon impatience terrible : novembre, mois de la sortie de Taraël, est encore bien loin.
Mais revenons à ce quatrième tome (Attention ! Divulgâchis en approche). On y retrouve l'ancien père Douglas O'Connor, celui qui avait permis à un pape plus modéré de prendre le pouvoir sur Vatican au détriment du précédent, ambitieux, sans scrupule et peu ouvert à la différence. Or, le principe de la Fédération fondée par l'amiral MacGregor, sans doute un peu naïf (mais cela fait du bien), est celui de la tolérance, de l'ouverture aux autres. Y compris aux alter, qui ont mauvaise réputation sur de nombreux mondes. La peur de l'autre est destructrice. Nous la voyons tous les jours à l'oeuvre. O'Connor, donc, qui a laissé de côté sa religion au profit d'une histoire d'amour avec une alter et d'un poste officiel, vient servir de liaison entre la Fédération et Vatican. Mais les retrouvailles avec le nouveau pape ne sont pas aussi joyeuses que prévues : les tenants de l'ancien ordre n'ont pas désarmé et préparent quelque chose.
Ça, ce n'était pas une vraie nouveauté, plutôt une suite (même si cet axe va prendre une direction intéressante et possiblement riche). Allons donc plutôt du côté d'un petit jeune : Alaïs, le fils de l'impératrice, sauvé par Einar. le voilà à l'Académie, sous une fausse identité, à essayer de se trouver une place dans cette nouvelle société, lui qui était censé diriger l'ancienne. Sous une fausse identité, car il veut obtenir ses galons pour ses qualités réelles. Pas pour son rang social. À la différent de nombre de ses condisciples, issus des grandes familles, et qui supportent difficilement le nouvel ordre établi par MacGregor. Auparavant, eux seuls obtenaient les plus hauts postes. À présent, ils (ou elles, d'ailleurs) sont mis en concurrence avec de simples plébéiens. Et cela leur reste en travers de la gorge. Ce thème de la remise en cause de l'ordre établi, de la prépondérance du sang sur la valeur est un classique de la SF militaire. La série Honor Harrington de
David Weber en est un parfait exemple. Et Second Oekumène suit cette tradition. Alaïs est confronté à un choix. Suivre ceux de son « rang » ou ceux de son coeur. Ma formulation indique déjà dans quelle direction il va aller. Comme souvent dans cette série, les surprises ne sont pas le sel, l'intérêt principal. Ce dernier réside avant tout dans l'action et l'évolution des personnages.
Tout à fait ce qui caractérise le dernier axe de ce roman : les opérations de notre bande d'alter, un peu semblable à celles que l'on trouve dans la série des Ocean's au cinéma ou, en littérature de SF, dans
le magicien quantique de
Derek Künsken. Des missions hors normes, qui doivent rester secrètes. Il suffit de réunir la bonne équipe, les bons talents, et c'est parti pour des plans mitonnés aux petits oignons et des scènes d'action plutôt réussies. Car dans ce domaine,
John Crossford se débrouille plutôt bien. Les plans sont ingénieux et ménagent le suspens, révélant les différentes étapes les une après les autres. Certes, une fois encore, c'est plein de bons sentiments et les méchants sont souvent punis. On est plus proche des thématiques et du traitement sauce YA. Mais avec un univers riche et bien bâti. Et un sens du rythme qui fait tourner les pages à la vitesse de l'éclair. Donc, même si parfois j'ai un peu tiqué devant tant de bienveillance, dans l'ensemble, j'ai passé un très bon moment de lecture.
Vatican m'a redonné un nouvel élan dans la découverte de ce Second Oekumène, un peu essoufflé que j'étais après Providence. Un roman bien construit, qui sait renouveler son lot de personnages, avec des aventures exaltantes et pleines d'un souffle bien agréable, d'un optimiste rafraîchissant après tant de noirceur. Un tremplin idéal pour attendre, le plus posément possible, l'ultime volume de cette sage, Taraël, attendu (avec résignation) pour novembre 2023.
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