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sur 377 notes
Rose s'est embarquée avec ses deux enfants pour une croisière en Méditerranée. Une nuit, leur énorme paquebot se porte au secours de migrants, perdus en pleine mer à bord de leur vedette surchargée. Emue par un jeune Nigérien de l'âge de son fils, Rose lui offre des vêtements et le téléphone portable de son aîné. Rentrée chez elle, elle pensera ne garder de cette histoire qu'un prénom, Younès, et des factures de portable qu'elle continuera à régler. Elle sera loin de s'imaginer où vont la mener son geste et ce lien désormais établi à travers ce téléphone.


J'ai été totalement séduite par la première partie du roman, à bord du bateau de croisière. le récit est enlevé, empli d'un humour sarcastique sur le tourisme idiot, tandis qu'il nous fait découvrir des personnages convaincants et réalistes, dans tous leurs doutes et leurs ambiguïtés. L'on se prend de sympathie pour Rose, pour son sentiment de gêne et de culpabilité dont elle pense se tirer à bon compte, une fois reprise par le tourbillon de son quotidien, comme pour tout un chacun pas si facile.


Le livre prend ensuite un rythme moins marqué, où l'humour se fait plus discret au fur et à mesure que Rose se retrouve confrontée à de vraies décisions. Si le souffle du récit n'est plus le même, le questionnement qu'il nous soumet prend tout son sens : et vous, jusqu'où laisseriez-vous un enfant qui n'est pas le vôtre bouleverser votre existence ? Sans misérabilisme ni manichéisme, Marie Darrieussecq met le doigt sur l'embarras de notre société face à l'afflux de réfugiés que les politiques migratoires ne parviennent pas à gérer. Elle nous interroge aussi sur nos priorités et nos tracas quotidiens, si centrés sur nous-mêmes, notre famille et notre travail. Enfin, elle insiste sur l'importance du « toit » et du « chez soi », ces centres de gravité qui nous équilibrent, nous protègent, et nous identifient.


Malheureusement, cette seconde partie du récit m'a agacée par l'inutile et improbable évocation des pouvoirs de magnétiseuse de Rose, et déçue par la facilité presque naïve du dénouement, dont j'attendais bien davantage eu égard à la gravité des thèmes abordés. Ce qui commençait comme un livre coup de coeur s'est ainsi mué en une jolie lecture, sympathique et très actuelle, mais d'une profondeur par trop inégale pour convaincre totalement.

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La Mer à l'envers, ce n'est pas la mer à boire...
Quand justement Rose part en croisière avec ses deux enfants, elle n'imagine pas un seul instant que plus rien ne sera comme avant, comme le surgissement de l'inattendu dans ses jours ordinaires.
Son couple est un peu en perdition, elle ne sait plus trop bien où elle va, avec l'ennui qui l'étouffe, son métier qui ne la passionne plus et un mari alcoolique. Cette croisière sur la Méditerranée dans cet immense paquebot de luxe est l'occasion pour elle de prendre un peu le large, faire ce pas de côté devenu salutaire. Rose est une femme et mère un peu perdue dans sa vie, elle a pourtant l'habitude d'aider les autres, elle est psychologue, un peu guérisseuse aussi, mêlant la magie à la pratique de son métier, c'est ce qui rend également insolite son personnage un peu déviant.
Les couples sont un peu comme ces grands bateaux difficiles à manoeuvrer, à faire bouger de leurs trajectoires, et quand il y a une voie d'eau qui s'agrandit, c'est un peu comme le Titanic, l'orchestre continue de jouer sa musique comme si de rien n'était.
Une nuit le paquebot de croisière où séjournent Rose et ses enfants rencontre une embarcation en difficulté, remplie de migrants à son bord. Rose, dans cette cabine de passagers un peu étroite pour trois personnes, se doute qu'il vient de se passer quelque chose... Elle entend des voix, des cris... Pendant que la croisière s'amuse, Rose va être témoin du sauvetage de ces survivants.
Elle est un peu perdue comme cette nuit-là sur le pont du bateau avec la Méditerranée qui l'entoure, immuable, se frayant un chemin parmi les membres de l'équipage et les réfugiés transis de froid, elle enjambe les corps de ceux qui se sont peut-être noyés, tandis que d'autres passagers continuent de danser deux ou trois étages plus bas dans l'ivresse et la frénésie de la musique.
On distribue des couvertures de survie, du café chaud, on évacue ces nouveaux arrivants dans la zone sous l'eau, juste sous le casino, des femmes bercent des bébés en pleurs. C'est une scène sidérante avec l'angoisse de la nuit, peinte avec justesse, j'ai l'impression d'être aux côtés de Rose qui s'active parmi les visages hagards parce qu'elle sait y faire. Parmi les naufragés, le regard d'un jeune homme capte son attention, c'est encore un adolescent, il s'appelle Younès, il a seize ans, plus tard elle apprendra qu'il est venu de son Niger natal en passant par la Libye. Ce dont il a besoin, c'est d'un téléphone. Il est aussi perdu qu'elle, comme venu de nulle part... Alors elle court vers sa cabine et lui ramène celui de son fils Gabriel qu'elle lui a pris à son insu, avec son chargeur... Elle ne sait pas encore que ce geste déclenchera tout.
Le lendemain, les garde-côtes italiens emportent les migrants sur le continent. Gabriel, désespéré, cherche alors son téléphone partout, et verra en tentant de le géolocaliser qu'il s'éloigne du paquebot. Younès l'a emporté avec lui, de l'autre côté du paysage, dans son périple au-delà des frontières.
J'ai aimé cette image du signal de la géolocalisation comme une étoile égarée dans la nuit sidérale d'un écran informatique, comme un fil invisible qui continue de les relier encore un peu et peut-être à jamais...
Imagine-t-elle à ce moment-là que l'étoile refera surface dans le ciel... ?
Marie Darrieussecq esquisse une histoire de vie presque ordinaire, avec comme toile de fond le sujet prégnant de l'immigration qui parvient jusqu'à nos quotidiens par le prisme de l'actualité. C'est le chemin d'une mère de famille pleine de bon sens qui croise le destin d'un jeune migrant. Ce sont deux trajectoires qui se croisent dans l'incompréhension réciproque de deux mondes.
Plus tard, quand Younès refera surface dans sa vie, il y aura le regard des autres sur Rose, celui de ses proches, ses enfants, son mari alcoolique, sa mère, ses amis...
La plume de Marie Darrieussecq est sarcastique pour dire l'hypocrisie, l'indifférence, l'incompréhension des autres. Il n'y a aucune morale, aucun jugement, aucun bon sentiment pour dire cela, Rose aussi est égoïste, tâtonne aussi dans cette incompréhension. Marie Darrieussecq ne dénonce rien, elle observe et raconte une histoire aux apparences légères sur un sujet qui prend aux tripes.
L'écriture pourrait presque paraître banale, le texte est gorgé de phrases courtes qui cueillent l'instant et charrient des sensations très fortes. Malgré ses apparentes maladresses et ce sentiment d'inachevé, ce récit poétique, où s'invite un peu de magie, porte une humanité qui fait du bien.
C'est un roman étrange et attachant, perturbant aussi, dont la voix continue de résonner longtemps après, comme ce petit signal de géolocalisation, sorte de bouée en perdition dans la nuit abyssale.
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Entre divorcer ou suivre son mari (très porté sur la boisson) au pays Basque, Rose, psychologue et parisienne, hésite. Pour réfléchir à la question, sa mère lui offre ainsi qu'à ses enfants une croisière. Durant ce périple, Rose va croiser la route de Younès, migrant recueilli sur le bateau, à qui elle va donner un manteau et le téléphone de son fils. Ce choix va changer sa vie (et celle du jeune homme)...Un roman intéressant, qui pose un regard acéré (absolument pas manichéen) sur les politiques migratoires. C'est un récit qui questionne tout en étant le portrait très crédible d'une femme à la croisée des chemins. j'ai beaucoup aimé, tout m’a paru juste.
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La croisière (ne) s'amuse (pas).
Rose est gâtée : pour Noël, sa mère lui a offert une croisière en Méditerranée sur un luxueux paquebot. Elle tente d'y passer un séjour agréable avec ses enfants, tandis que son mari est resté à Paris, mais elle n'est pas dupe de l'énorme machinerie capitaliste sur laquelle elle vogue. Une nuit, le paquebot croise une embarcation de migrants sur le point de chavirer et leur porte secours. Rose va s'attacher à l'un d'eux, Younès, du même âge que son fils, et sa vie va s'en trouver modifiée.

J'aime bien Marie Darrieussecq, parce qu'il y a toujours une légère touche de bizarre dans ses histoires, et celle-ci n'y coupe pas. J'aime aussi son intelligence et son humanité, et sa façon d'aborder les sujets d'actualité avec une honnêteté qui fait du bien. On n'est pas dans les bons sentiments, ici, on est dans la réalité, avec ses limites, ses contraintes, ses possibilités.
Et avec Rose, donc, responsable et pragmatique, mais aussi capable d'initiatives qui dérogent à son rationalisme, et de choix pas toujours explicables mais toujours justifiés par quelque chose qui la dépasse. Et j'ai été impressionnée par la façon dont l'auteur excelle à saisir ces instants furtifs où la vie déraille, et par son talent à retranscrire le vertige juste avant qu'il se dissipe.
Mais ce roman est aussi un témoignage juste des années 2020, entre angoisse climatique, crise migratoire et tournant identitaire ; comment envisager sereinement l'avenir dans ces conditions, et surtout comment vivre au mieux ce présent anxiogène quand on a grandi dans le confort mental des années 70-80 ? Toutefois, si Rose n'hésite pas à donner son point de vue sur ce que lui inspire le monde, ce livre n'est en aucun cas une incitation à l'activisme ; Marie Darrieussecq ne dénonce rien, elle raconte -qui plus est, sur un ton léger, presque futile. Et ce décalage entre le fond et la forme rend la lecture encore plus perturbante -et passionnante.

J'ai donc énormément aimé ce roman un peu étrange mais attachant, qui interroge sur la façon d'appréhender les événements selon notre éthique, et qui offre un portrait de femme complexe (pléonasme !) très réussi.
Et à bien y réfléchir, c'est quand même plus enrichissant qu'une virée avec le Capitaine Stubing.
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La mer à l'envers où comment j'ai lâchement changé de tactique pour un bouquin qui ne m'intéresse pas.
L'histoire : Rose et ses deux enfants sont sur un bateau, enfin un truc monstrueux de douze étages qu'on trouve en centre ville à Venise ou au plus près des icebergs pour donner des sensations à de riches désoeuvrés…
Bon, là c'est pas Rose qui paye. C'est maman qui offre un break (une coupure, pas une voiture) à sa fille pour qu'elle fasse le point sur son couple, son mariage. Va-t-elle divorcer ou suivre son mari en province. Que c'est trop dur la life hein.
Pourquoi j'ai ce bouquin entre les mains ????? Euh… Ah oui… si la croisière s'amuse, le Pacific Princess du livre va croiser un chalutier surchargé de migrants et les secourir.
Alors oui pendant une bonne vingtaine de pages j'ai commencé à entrer dans l'histoire et puis… j'ai attendu, j'ai attendu que ça commence vraiment. Page 51 tout est terminé, tous les rescapés sont expédiés sur une vedette direction la Sicile. Rideau.
Jusque là, c'était pas violent non plus niveau émotions. Rien sur le sauvetage ni sur les migrants, juste Rose, témoin, qui va de pont en pont pour mieux voir.
La mère à l'envers d'avoir assisté à ce dommage collatéral de la misère va réfléchir sur la vie, la société enfin si j'en crois les billets lus des autres babélioteurs parce que c'est maintenant que je vous donne ma nouvelle tactique sur ce coup là.
Page 89, l'escale en Grèce avec l'excursion au Parthénon parce que la Grèce c'est au programme de la troisième et du CE1 (les classes des enfants de Rose, c'est bien foutu quand même) ben… au Parthénon et à ses excursinistes je leur ai dit : Partez si, loin, très loin de moi. J'ai refermé le bouquin pour ne plus l'ouvrir. Abandonné, voui.
Faut dire que les autres billets ne m'ont pas incité à poursuivre puisque même les chroniques richement étoilées laissaient entendre que le début et tout ce qui concernait la croisière étaient top et que ça se gâtait un peu une fois la terre ferme retrouvée. La croisière n'ayant déjà à mon avis aucun intérêt, j'ai pas eu le courage…
Si encore l'écriture m'avait attrapé mais là aussi, quelle platitude, quel ennui.
L'amer allant vers l'impasse, il n'y avait pas d'autre issue que la capitulation devant tant de fadeur.
Première et dernière rencontre avec Marie Darrieussecq.
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Les 40 premières pages sont fracassantes. Elles expriment avec force le choc de deux mondes (celui des privilégiés et celui des réfugiés) sur fond de mer Méditerranée. Sans trop en rajouter, Marie Darrieussecq exprime avec justesse le désarroi de cette femme, Rose, qui n'assume pas le drame humain qui se répète sur les côtes italiennes. le sujet dominant de ce roman n'est pas la culpabilité mais l'héroïsme. Qu'est-ce qui peut faire de nous des héros ? le fait de risquer non seulement sa vie mais celle de ses proches au nom d'une noble cause ? L'inconscience ? Des facultés extraordinaires ? Rose, la protagoniste du roman, est tout cela. Une maman sensible, une femme perturbée, une magnétiseuse, une idéaliste. Tout le long du livre, Marie Darrieussecq marche sur une corde raide, entre l'envie de raconter une belle histoire et la peur de tomber dans le misérabilisme bon ton. Mais elle trouve l'équilibre. Son histoire tient la route, malgré des longueurs nécessaires, pour illustrer les hésitations de Rose, sa reconstruction, son envie d'une autre vie. C'est le deuxième thème du livre : la quête d'un ailleurs. Pour Younès, le migrant recueilli, cet ailleurs est l'Angleterre, le pays « où il n'y a pas de contrôle d'identité dans la rue ». Pour Rose, il est au pays basque. On devine que Marie (l'auteure) se cache peut-être derrière Rose (le personnage) : le mariage à bout de souffle, l'éducation compliquée des enfants, l'étrange évolution des rapports humains, les errements d'une société qu'elle ne comprend plus… Younès, l'homme qui vient du Niger, est un catalyseur. Avec son roman, Marie Darrieussecq porte un regard critique sur ce monde globalisé tout en nous affirmant qu'il est possible de le rendre meilleur. Il suffit d'un peu de folie, bien placée.
Bilan : 🌹
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Voici un récit bien dans l'air du temps :
Rose, parisienne typique, magicienne presque à son insu, citadine bobo, personnage fantasque, très attachée à sa liberté, psychologue pour enfants, mère aimante de Gabriel, 15 ans et Emma , 7ans , un peu dépassée par le déménagement prochain au Pays basque, croise le destin de Younès , jeune adolescent nigérien——-ses yeux se posent sur lui ——: Il est très jeune, des cheveux mouillés en boucles , un grand front un peu cabossé .Il ressemble à son fils . »
Où le rencontre t- elle ?

Au beau milieu de la Méditerranée , quelques heures avant Noël , lors d'une croisière offerte par sa mère ,avec ses deux enfants .

L'énorme paquebot sur lequel elle a embarqué a croisé la route d'un frêle esquif où s'entassent des réfugiés venant d'Afrique .

Les naufragés embarquent sur le gros navire. Aux migrants elle apporte quelques affaires , à Younès , l'adolescent nigérien , elle donne le portable de son fils Gabriel.

Lorsque quelques heures plus tard , les chemins de Rose et de Younès se seront séparés , ce téléphone mobile constituera entre eux —- un lien indéniable ——un attachement —- affectif autant que lointain ——

Rose réalise que les paquebots de vacanciers pour enfants gâtés sont sur les mêmes routes maritimes que les frêles esquifs des Migrants ...

En découvrant Younès , ce jeune migrant qui a fui son pays de misère ou de danger, elle plonge la tête la première dans cette terrible réalité .

Le décalage entre ses enfants exigeants , sa vie gâtée lui saute aux yeux .
Son univers change , celui du lecteur aussi...

Ce voyage donnera une nouvelle orientation à sa vie ou comment habiter intelligemment le monde ?
N'en disons pas plus..
Ce n'est pas un roman sur l'exil mais un récit engagé sur les différences et nos difficultés à accepter l'autre ou plutôt ce qui ne fait pas partie de notre univers habituel.
. Comment bousculer son quotidien et ses habitudes pour sauver un enfant qui n'est pas le sien,?
Une réflexion prégnante et exigeante, à travers le personnage investi, complexe de Rose, sur la place de l'individu dans le monde.
«  La-mer à l’envers  » , qui n'a rien de moralisateur, reflète l'embarras de sociétés complètement démunies face aux réfugiés qui se présentent à nos portes .

Un malaise , une culpabilité diffuse , malgré l'héroïsme de Rose, traverse l'écriture de l'auteure . Les phrases sont courtes , limpides , agréables.

Des thèmes graves abordés avec simplicité , une belle réflexion, une déclaration de tolérance, d'ouverture au monde , d'écoute pour Rose qui a beaucoup à donner .....

«  Le problème avec les migrants, c'est combien ils sont angoissants ... »
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La Mère à l'endroit

Alors qu'elle est en croisière en Méditerranée, une mère de famille est brutalement confrontée à la tragédie des migrants. Marie Darrieussecq a choisi de nous confronter à l'actualité avec humour et ironie. Une belle réussite!

«"La Mer à l'envers" se lit aussi comme "La Mère à l'endroit"». La formule est d'Olivia de Lamberterie, dans sa chronique pour le magazine ELLE. Elle résume parfaitement le propos de ce roman tour à tour drôle et émouvant en montrant qu'il est davantage centré sur la mère de famille et les choix qu'elle fait que sur le migrant qui va croiser sa route. Une façon habile aussi de happer le lecteur et de le confronter à cette question: qu'aurait-il fait à la place de Rose? Aurait-il réagi à l'endroit ou à l'envers face à la tragédie qui se joue devant ses yeux?
Car rien ne préparait les passagers de ce bateau de croisière conçu pour le farniente à se retrouver soudain confronté à la «question des migrants», pour reprendre le langage des chaînes d'information en continu.
Prévenu de la présence d'une embarcation qui tentait de se diriger vers un port européen, le capitaine est parti à leur secours et a réussi à recueillir ces candidats à l'exil à son bord. Pour la plupart des vacanciers, ce sauvetage en mer tient du spectacle et, une fois la manoeuvre réussie, ils sont retournés à leurs loisirs.
Marie Darrieussecq réussit parfaitement dans le registre ironique, donnant tout à la fois à son récit la dose de cynisme qui fait le quotidien de ces gens dont on préfère ne pas connaître le destin et accentuant ainsi le fort contraste avec l'attitude de Rose qui, elle, ne détourne pas les yeux. Mieux, elle va se rapprocher d'un jeune homme et lui confier le téléphone portable de son fils afin qu'il puisse prévenir sa famille de sa situation.
Ce faisant, elle devient acteur du drame qui se joue. Au moment de débarquer, elle reste reliée à Younès, dont elle peut suivre les déplacements en traçant son portable. Retournée à Clèves, ce village imaginaire du Sud-ouest, elle «voit» son protégé à Calais et comprend que sa situation n'est pas très enviable. Aussi décide-t-elle de partir pour l'aider une fois de plus, un peu contre l'avis de sa famille.
Quand elle débarque avec le jeune homme, il faudra pour tous une période d'adaptation. Mais n'en disons pas davantage.
Rappelons plutôt que c'est à ce moment que le roman bascule. Lorsqu'il place le mari, la fille et le fils, mais aussi Rose face à Younès et face à leur indifférence, sans jamais être moralisateur. On se régale de ces pages drôles et vraies, graves et sarcastiques qui, dans un tout autre registre – mais aussi très réussi – que Mur Méditerranée de Louis-Philippe DalembertCeux qui partent de Jeanne Benameur, enrichit notre réflexion sur l'un des problèmes majeurs que les pays occidentaux ont et auront à gérer dans les mois et les années qui viennent.


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*** Chronique de la rentrée 2019 # 8 ***

Je découvre l'autrice, Marie Darrieussecq, avec ce roman de notre temps. L'écriture des premières pages est fulgurante. Je suis en croisière d'agrément avec Rose. Je ne sais pas trop pourquoi elle y est sans son mari mais avec ses enfants. Peu importe, on fera connaissance. Je la sens tourmentée par une décision de vie à prendre. Peu à peu, je comprends qu'elle doit choisir entre un divorce avec un mari porté, plus que de raison, sur la boisson ou la poursuite d'une route commune, mais sur quelles bases? A elle de le savoir. Moi, je profite de la croisière.

Et puis, une nuit, entre la Lybie et l'Italie, le bateau repère une pneumatique de migrants qui appellent à l'aide. Les recueillir à bord est une priorité, ne pas les mélanger avec les touristes semble en être une autre, toute aussi importante pour le business.

Mais, Rose, curieuse, thérapeute et en questionnement sur sa vie, va se montrer encore plus curieuse de la vie d'autrui. Elle laisse ses enfants endormis dans la cabine et rejoint un pont inférieur où elle découvre Younès qui a fuit le Niger pour le « Pays », l'Angleterre, le seul au monde où on ne contrôle pas l'identité des gens dans la rue… Younès plonge ses yeux dans ceux de Rose et réclame un téléphone. Rose lui donnera celui de son fils Gabriel. Petit geste, larges conséquences…

La « Mer à l'envers », est un merveilleux titre qui renverse les situations, les valeurs, les priorités. Il illustre cette transformation d'une mère centrée sur elle et ses problèmes en une mère qui, parfois décide, parfois subit ses impulsions mais pose des gestes qui vont métamorphoser la vie, celle de Younès comme celle de sa famille. La mère est double, celle de ses enfants, celle de Younès. Elle est épouse en rupture mais s'appuiera sur son mari, ses enfants, pour se sortir de la situation longtemps cachée de ce lien, ce fil invisible, qui, par le téléphone donné, tisse de nouvelles relations et trame la vie sur un canevas que personne n'attendait, n'espérait ou imaginait.

Avec une écriture, qui au fil des pages, se révèle moins tranchante, moins explosive, Marie Darrieussecq pose tout de même d'excellentes questions, sans manichéisme aussi inutile qu'outrancier. Tout en nuance, elle pose un regard sur les différentes politiques migratoires, interroge le monde des croisières grand luxe pour touristes non pensants. Elle pousse le lecteur à prendre conscience que les croisières organisent un tour en mer pour permettre aux croisiéristes d'échapper à la ‘vie impossible qui est la leur'… alors que des migrants, dans le même espace, rêvent d'une traversée pour trouver, enfin, ‘une vie possible' sans retour à la case départ.

Et, tout à tout, parce que tout est imbriqué, l'autrice pose aussi des bonnes questions sur ce qui fonde la vie de couple, la famille, les choix de vie, les fuites en avant dans la boisson ou les déménagements… C'est notre monde et ses stéréotypes qui sont questionnés et revisités.

A ce titre, avec « La mer à l'envers », Marie Darrieussecq nous offre une héroïne qui interpelle. L'héroïsme de Rose tient dans un GSM donné, sans rupture de communication. Alors, même si, comme le dit la quatrième de couverture, Rose n'est héroïque que par moments, le roman met l'héroïsme à portée de mains. Après tout, il serait bon, parfois, de se laisser pousser par une douce folie qui laisse la place à autrui.

Un roman réussi, utile, sans être tout au long aussi emballant que ses cinquante premières pages.
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Lors d'une croisière de luxe, des migrants sont secourus par l'équipage.
Rose, psychologue en vacances avec ses enfants, donne à l'un de ces migrants le téléphone de son fils.
Un lien sera créé entre eux.
Que dire ?
C'est pas mal mais j'ai trouvé cela très long à lire.
Les rapports du couple, de la famille, ne sont pas assez approfondis à mon goût.
On saute soudainement quelques mois, quelques années dans la vie des personnages.
Une sensation de décousu, de fouillis.
Pourtant Marie Darrieussecq a bien pensé son histoire.
L'idée est bonne.
Alors qu'est-ce qui me chiffonne dans ce livre ?
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