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sur 351 notes
Après un dixième roman introspectif et personnel, où Grégoire Delacourt se mettait à nu tout en tentant de réparer un traumatisme d'enfance, l'auteur offre ici un roman d'amour qui se déroule le temps d'une nuit…particulière. Loin de l'amour abjecte de « L'enfant réparé », il nous sert ici le véritable amour, le beau, l'inconditionnel, le lumineux…même s'il s'avère également tragique et éphémère.

Aurore, 55 ans, arpente les rues de Paris à la recherche d'une rencontre qui lui permettra d'échapper au gouffre qui vient d'avaler tout son être. Après trente ans d'un amour passionnel, son mari la quitte. Pendant qu'il quitte définitivement leur appartement, elle erre dans la capitale, demande du feu à un inconnu, lui prend la main et lui demande de l'emmener…

Une nuit, deux personnages qui déambulent dans la ville le temps d'une rencontre improbable, où deux solitudes cherchent à se combler. Deux êtres au bord du précipice, voire déjà en train de sombrer, qui décident, sur un coup de tête, de remplir leurs vides respectifs d'un amour aussi intense qu'éphémère.

Racontée du point de vue d'Aurore, puis de Simeone, l'histoire invite à croiser l'amour sous plusieurs formes. Se glissant tout d'abord dans la peau d'une femme, puis dans celle d'un homme, Grégoire Delacourt nous plonge dans leur intimité, mêlant sentiments crus et poésie. Sacrifiant souvent la crédibilité des dialogues au profit du sens de la formule, l'auteur parvient néanmoins à transmettre beaucoup d'émotions en nous parlant d'amour…
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L'idée d'une narration de cette nuit vécue ensemble par une femme et un homme est originale puisqu'ils la racontent à tour de rôle en exprimant leurs ressentis.

D'abord, la femme et, avec elle, les invraisemblances s'accumulent. Elle est quittée par son mari après des décennies partagées ensemble et aborde immédiatement un inconnu à qui elle propose une nuit ensemble à l'hôtel. Quel homme refuserait une telle proposition dans la mesure où elle est séduisante et où leurs âges concordent. Mais, à l'hôtel, il ne se passera rien, bien qu'elle se dénude devant lui, conservant son soutien-gorge car elle trouve ses seins trop tombants. L'homme est assez respectueux de ce corps trop vite proposé et, après quelques errements dans Paris, ils partent en voiture voir... la mer, prenant le plaisir de quelques attouchements qu'il appellent "faire l'amour". Bof. La suite est bien moins délectable qu'une chanson de Brassens bien connue.

La version de l'homme est plus élaborée, avec des regrets exprimés sur le ratage d'une adoption réalisée avec son épouse. Il est beaucoup plus sympathique que la femme, ne cherche pas à se faire plaindre alors qu'il aurait matière bien plus grave que le caprice de la femme.

Il restent quelques jolies phrases sur la vie, le couple, l'amour, la mort, mais pas vraiment de style et l'ennui gagne très vite au cours de la lecture de cette trop longue nuit de vide entre deux personnes qui se parlent beaucoup alors qu'elles ont peu à se dire de vraiment important.
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« J'avais envie de retrouver un homme et une femme capables de se jeter dans le vide par amour. Parce que c'est vivre sans amour qui est l'enfer ».

Une nuit particulière n'est rien d'autre qu'un hymne à l'amour. le sauvetage de deux âmes à la dérive.

Aurore, la cinquantaine attend sur un trottoir parisien que son mari Olivier soit parti. Ce soir, il la quitte. Effondrée à cette idée après trente ans d'amour fou, il lui faut un amant de sauvetage, un amant du deuil. Ce sera cet homme à côté qui fume, Simeone. Un homme marié mais qui osera suivre cette sublime créature.

Découpé en deux points de vue, féminin et masculin, ce livre désarçonne. La notion de réel est obscure, les gestes, les mots, les regards nous rappellent ce temps des années folles où l'on se devinait encore du bout des yeux. Roman clos dans l'intimité la plus totale de ces deux amants comme en apesanteur dans leur rencontre romantico-tragique. Une nuit particulière, c'est un autre monde où plus rien n'a d'emprise si ce n'est d'être aimé, mordu, léché avec des mots bleus comme seule ballade nocturne.

Dans ce 21è siècle, il m'a fallu un effort pour imaginer Aurore plus toute jeune qui croit dur comme fer que l'amour peut la sauver du vide. Ses manières, ses propos, ses répliques sont d'un romantisme tantôt impressionnant tantôt affligeant, je suis sceptique voyez-vous. C'est que j'ai perdu le goût à l'amour avec les années, surtout cet amour-là, romantique et absolu. Paris, ça fait longtemps, ne m'en veux pas mais je ne te connais plus vraiment. Tu en vois souvent toi des inconnus d'un soir qui s'accrochent à tes réverbères et tiennent ta nuit en otage ?

Aurore est sculptée comme une veuve éplorée dont la mélancolie semble infinie ; elle ne joue que sur des notes tristes et désenchantées.. Oui trente ans d'amour c'est lamentable. Ses pensées sont l'une après l'autre tragiques, ça plaira aux vaccinés de l'amour.

Il y a dans une nuit particulière un goût de trop, de lourd, d'une chappe de plomb comme trop d'artifices pour dire si peu. Je ne trouve ni trop long ni trop court ce roman – c'est déjà ça… Il ne me touche pas autant qu'il aurait pu – parce que je ne possède plus la fièvre amoureuse ardente de mes trente ans – je suis quelque peu immunisée face à ces mots passionnés qui surabondent… Quand je lis j'aime souligner quelques passages marquants mais ici j'ai fini par abandonner – chaque phrase semblait taillée dans du cachemire.

Ca me rappelle un temps que les moins de quinze ans ne peuvent pas connaitre – Est-ce qu'on aime encore ainsi ? A l'ère du texto et des MDR, je ne sais pas s'il existe encore certains érudits qui peuvent rêver à cet absolu amour. le vivre encore moins.

Grégoire Delacourt a imaginé une parenthèse dans la vie de deux étrangers qui avaient besoin d'amour et de sauvetage. Il déploie tout son talent littéraire pour composer des lignes empreintes soit de mièvrerie sentimentale pour certains ou bien de la prose solitaire des grands poètes. Vous vous ferez votre propre avis.

J'ai lu ce livre avec un peu de nostalgie au creux du ventre car j'ai connu une vie où l'amour était tout pour moi. Je lui aurai donné mon sang et ma vie et des phrases entières d'envolées d'espoir fou. Grégoire Delacourt est resté un éternel amoureux pour qui le mot doit danser avec la nuit, doit s'ouvrir comme une peau d'orange pour extirper ses saveurs exquises et qui oui, dégoulinent quelque peu.
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Après une rencontre mémorable avec l'auteur au salon du livre (le tout premier qui, j'espère, sera suivi de nombreux autres) de ma petite ville dans les Alpes-de-Haute-Provence, c'est avec frustration que je referme - déjà -cet ouvrage. Oui frustration il y a eu car cet ouvrage se lit trop vite (et pourtant, j'ai ralentis ma lecture de force pour encore en savourer chaque page mais bin, il a bien fallu -ou il aurait bien fallu de toute façon que je le termine tôt ou tard (même si pour moi, j'aurais préféré que ce soit plus tard que tôt mais bon, c'est ainsi...

Ici, nous faisons la découverte d'un homme et d'une femme qui ne se connaissaient pas mais qui vont pourtant passer la nuit ensemble. Oh, non, pas de la façon dont vous l'imaginez mais cette nuit, sera pour eux, et pour nous, lecteurs, une véritable et enchanteresse "nuit particulière" parce qu'elle ne sera faite que d'amour. Lui est en voix de quitter sa femme, elle en voix d'être quittée par celui qu'elle aime et pourtant, ces deux-là (que je ne nommerai pas exprès bien qu'ils le soient dans l'ouvrage car pour moi, ils resteront à jamais cet homme-là et cette femme-là (et que cela ne pouvait arriver qu'à eux) s'aimeront le temps de cette nuit-là avec des mots, des regards, des souvenirs d'opéras entendus jadis et tant d'autres choses encore ! Donc pas d'amour charnel entre cet homme et cette femme mais bien plus : une promesse, celle de ne pas se quitter, de se retrouver mais surtout l'espoir qui permet tout !

Un roman à deux voix où le lecteur découvre deux fois la même histoire (du point de vue de la femme et de celle de l'homme) et pourtant, bien que les faits soient les mêmes, le lecteur a l'impression de découvrir deux histoires complètement différentes et c'est là que la magie de Grégoire Delacourt opère ! Une petite pépite que cet ouvrage que je ne peux que vous recommander !

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J'ai choisi d'écouter ce livre, assez court, donc pas trop d'heures. Cela m'avait semblé une bonne idée.

Une femme, Aurore, et un homme, Simeone, se rencontrent. Ils ne se connaissent pas. Son mari la quitte ce soir, et elle ne veut pas assister à son départ, ni rester seule. Elle choisit Simeone pour l'accompagner tout au long de cette nuit, qui les verra devenir très proches.
Si vous voulez le lire, ne lisez ni la quatrième, ni trop de retours. Il vaut mieux en savoir le moins possible avant de l'aborder. Surtout au sujet de l'homme, qui ne se dévoilera que dans la deuxième partie.

Le texte est très "littéraire", mais ce point ne m'a pas gênée, je l'ai apprécié. En revanche, je n'ai pas aimé la voix de la narratrice, j'ai trouvé qu'elle met trop d'effets dans sa lecture, que celle-ci devient parfois trop mélodramatique. Et la sobriété sied à mon avis beaucoup plus à la beauté du texte. Je me suis réconciliée avec le texte lors de la deuxième partie, point de vue de Simeone, et lu alors par le narrateur, dont la voix m'a semblé mettre plus en valeur les mots de l'auteur.

Un texte très littéraire, donc, qui maintient un peu les personnages à distance, malgré ce qui leur arrive. L'émotion pour moi n'a pas été créée par ceux-ci, mais par les mots, les échanges entre eux, l'évolution de leur relation et puis évidemment le sujet de ce livre qui nous parle d'amour.

Merci à NetGalley et aux éditions Audiolib pour ce partage #Unenuitparticulière #NetGalleyFrance
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« Une rencontre romanesque, poétique, fulgurante », voilà ce que nous promet la quatrième de couv', de quoi allécher le chaland ! Hélas, à mon avis ce roman ne tient pas ses promesses et je m'y suis beaucoup ennuyée. J'aurais dû, peut-être, le lire en écoutant l'aria de Madame Butterfly que Grégoire Delacourt affectionne et qu'il qualifie de « plus bel aria sur le désir »
Bon, le désir, c'est ce qui tend l'intrigue. L'histoire, somme toute banale, met en scène une femme que son mari va quitter et un homme de rencontre dont le couple est fragile. Entre eux, le temps d'une nuit, va se nouer une relation éphémère et intense. La prose poétique de Grégoire Delacourt nous entraîne dans une balade nocturne de Paris en compagnie des deux amants qui se livrent peu à peu. On aimerait y croire mais cette virée dans « la nuit apprêtée comme une fille » qui nous mène de places en cafés et bars d'hôtels où nos deux bobos boivent du chardonnay ou du cognac devient vite lassante. Ils prennent un taxi pour nulle part, parlent, marchent, boivent et échangent sur leurs films préférés, les oeuvres d'art et la musique qu'ils aiment, un vrai catalogue de culture générale qui émaille des propos sans intérêt.
J'ai trouvé ce roman surfait et présomptueux, avec l'impression que l'auteur se regardait écrire… et j'ai beaucoup baillé en attendant une fin assez décevante.
Le roman ne fait que 188 pages, mais bon sang que c'est long et fastidieux ! En ressenti, il doit bien faire 500 pages !
Ce roman n'était pas fait pour moi, tant pis ! (Consolation : je l'ai emprunté à la médiathèque)
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J'avais connu Grégoire Delacourt à ses débuts et me souviens de ses premiers romans enjoués et plutôt légers. Au fil des années ses livres se sont assombris. Certes son style s'est affiné, devenant plus lyrique, plus poétique. Si je ne suis pas un adepte des romans feel-good, « Une nuit particulière » nous emporte à l'opposé, dans ce que l'on pourrait appeler le « feel bad », mais cette expression n'est pas usitée, car pas considérée comme politiquement correcte.
Cependant, il faut bien avouer qu'une fois abordé le sujet de cette « rencontre particulière » entre ces deux êtres meurtris, l'auteur ne pouvait que difficilement écrire un déroulement et une issue différents à son récit. Raconter la même nuit par les deux protagonistes à la suite n'était pas une mauvaise idée en soi, même si le second point de vue, malgré le changement du style de narration, devait également finir par me lasser.
Les deux protagonistes ont aussi trop en commun, en plus des coups du sort qui se sont abattus sur eux: ils harmonisent parfaitement d'emblée au point de vue culturel, communiquent très vite par des non-dits, des échanges de regards…Et c'est là que le roman bascule dans l'irréel. Il n'y a pas de coup de foudre entre eux, l'osmose sonne faux, car dans ce récit, chacun des deux protagonistes voit l'autre comme sa bouée de sauvetage l'espace d'une nuit. J'y ai vu aussi quelques parallèles avec « Clair de femme » de Romain Gary, le talent en moins.
Une réflexion d'Aurore résume bien ce livre. Je la reproduis ici: « J'aime nos mots dérisoires. Ils éparpillent ceux du chagrin, comme une boule de bowling disperse les quilles. » (p.57 de la version poche). C'est tout dire.
Vous aurez compris que ce livre ne m'a pas parlé. Pour moi, il est trop construit et représente davantage un exercice de style qu'une histoire d'amour ou qu'un drame réalistes, selon la façon dont le lecteur considère cette oeuvre. Je suis conscient aussi de mon point de vue subjectif. À voir la moyenne des notes sur Babelio, nombreux sont celles et ceux qui apprécient ce roman.
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Aurore a été mariée avec Olivier pendant trente ans, trente ans d'amour fou, cette nuit son mari la quitte, il ne reviendra pas. Elle erre dans les rues de Paris et s'offre à un inconnu : Simeone, il a quarante-huit ans il est à la fin de sa vie, ses jours sont comptés.
Cette histoire d'amour commence sur le bout d'un trottoir par une cigarette partagée entre une femme et un homme qui ne se connaissent pas. Cette le même récit de cette nuit que nous racontent Aurore puis Simeone.

J'ai eu l'impression d'être dans un film en noir et blanc de Jean Carmé : Gabin et Michèle Morgan, « T'as de beaux yeux tu sais, embrasse moi ! »
Une fois de plus l'écriture de Grégoire Delacourt m'a transporté, cette nuit particulière est en fait un roman très particulier. Une rencontre improbable, une divagation sur l'amour, c'est beau, c'est tendre, c'est cru parfois violent ou triste comme l'amour !


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Aurore a abordé un inconnu pour qu'il lui parle d'amour, pour oublier que son compagnon est en train de la quitter.
Ces deux là vont se découvrir, se raconter, déambuler dans la ville endormie durant une nuit particulière.
Nous découvrons d'abord la rencontre du point de vue d'Aurore, femme sur le point d'être quittée, puis, la même rencontre vue par Simeone.
Il ne se passera rien d'exceptionnel, une communion de pensée, l'envie d'être ensemble, de marcher, boire un verre de vin, et pourtant tout est magique, comme un instant d'éternité suspendu dans leurs deux vies. L'auteur sublime ces instants de bonheur que procure l'état amoureux, comme pour nous démontrer qu'être amoureux est toujours un grand privilège.
J'ai vécu avec eux, vibré et espéré avec eux.
Grégoire Delacourt sait trouver les mots pour magnifier la banalité de la situation.
Il m'a emmené loin, très loin, dans un coin de Corrèze où il y a quelques décennies, j'ai vécu comme Aurore « Une nuit particulière ». Il ne s'est rien passé, à part des mots échangés et c'est peut-être pour cela que je ne l'ai jamais oubliée.
Je remercie les Editions Grasset qui m'ont offert ce grand plaisir littéraire via NetGalley.
#Unenuitparticulière #NetGalleyFrance






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Chronique vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=292cI-BZB-M

Bonjour à tous ! Aujourd'hui on va parler d'Une nuit particulière de Grégoire Delacourt.

De quoi ça parle ? C'est une nuit d'amour entre Aurore et Siméone. Rien de moins, rien de plus.

La couverture joue sur la même corde que celle d'un Connemara, ou d'un Rien ne s'oppose à la nuit, on va parler de femme, ici, de femme qui regarde l'horizon les yeux vagues et mélancoliques, femme forte et fragile, femme qui fume comme Deneuve. Ou Romy Schneider. Les deux citées dans le bouquin.

Le bouquin fait 26 000 mots alors pour délayer, on fait comme dans le dernier Ernaux, on saute de la ligne au kilotonne, on aère, on aère, il parait que c'est pour le confort de lecture, tu parles.
Une écriture qui se veut poétique mais qui réalise l'exploit d'être à la fois éculée, et abstraite, ancrée dans aucun réel — aucune tangibilité si ce n'est la rêverie de l'amant, figure totémique de la littérature Galligrasseuil actuelle. « le soir écrase Paris. Je ne sais pas encore quelle nuit choisir. Vers quelle lumière aller. »

Aucun marqueur comme le boulot, où le quotidien de la plupart des gens, les transports, la ville lumière telle que peinte mille fois dans les films et les séries, rien à faire du réel — du concret. C'est l'amour, l'amour qui vide la ville de ses habitants, de ses contraintes. Ou plutôt, c'est l'amour entre bourgeois qui permet d'avoir une ville clichesque de terrasse de café, vidée de toute contrainte. « La salle se remplit rapidement. C'est l'heure des rires, des spritz et des bières, des éclats de voix et de la musique, des regards qui se posent, s'installent, des doigts qui se frôlent. L'heure des possibles, avant la nuit » Paris est une fête. Référence aux attentats pour pouvoir cocher la case du bon petit roman parisien et aussi le fantasme d'un ailleurs, quitter la fameuse grisaille, même si les bourgeois adorent la ville, Paris la nuit, sa culture, comme j'en avais parlé dans ma chronique sur Petites dents, grands crocs, il faut un fantasme d'un départ, de la campagne, de l'étranger. Et l'ailleurs ici, c'est le Touquet, ce qui est assez croquignolesque. le vouvoiement entre les amants, sinon c'est pas drôle qui va dans l'aspect désuet du roman, désincarné.

Et les dialogues putain, les dialogues :
« Je lui demande s'il croit qu'on peut mourir d'amour et il me répond.
— Je crois qu'on peut en vivre. »
C'est magnifique.


Mais y a plus drôle, quand ils parlent des ruptures marquantes de leurs vies.
— Qu'est-ce qui vous a le plus manqué ?
— L'impondérable. Tout ce que je ne pouvais pas peser d'elle. Son sourire. Son regard. Son odeur de marsala et de châtaigne. Son désir. Sa jouissance.
— J'aimais aussi mon mari pour toutes ces sortes de choses. »
Et surtout l'odeur de marsala. Non mais plus sérieusement, rien ne va dans les dialogues dans le fait qu'ils sont surécrits, personne ne parle comme ça, même lors d'une rencontre amoureuse. ‘Ou alors des poseurs de première. On passe à côté de cette rencontre et on ricane car elle est tirée de mauvais livres ou de mauvais films.

— Vous aimez Dvorak ?
— Je préfère Mendelssohn.
— Rohmer ?
— Sautet.
— Piccoli ?
— Trintignant.
Deneuve ?
— Dorléac »

Là ce qui est intéressant, c'est qu'ils parlent de l'art en surface, uniquement pour vérifier si l'autre a la même culture bourgeoise, le même décorum. Ce n'est pas une discussion, plus un interrogatoire. Pareil dans tout le roman, on a affaire à un name dropping artificiel, Bellini, Puccini, Barthes, Hopper, Glissant, Desnos, c'est même pas de l'ekphrasis, avec la description d'un tableau, d'une oeuvre d'art, non, c'est juste les personnages qui balancent des noms comme ça ; pour le paraître. Pour s'assurer que l'autre fait bien partie de la même classe, a bien reçu la même éducation. Sans que ce soit dit comme ça.


J'arrive même pas à arrêter de les recopier, les dialogues, tellement c'est. Arg, je vous laisse juger :
« Plus tard dans l'obscurité je lui apprends que je me prénomme Aurore.
— C'est un prénom qui annonce le jour, dit-il.
— Mais le jour ne succède pas toujours à la nuit. »

Bon et le dernier pour la route, juste parce que j'ai bien rigolé en le lisant :
« — Ce que votre langue goûte maintenant, c'est la cyprine. Mais on l'appelle aussi écume du plaisir, c'est plus joli, vous ne pensez pas, vous qui aimez la mer ? »

Une fois le rire passé, je trouve que ça ressemble à un dialogue tricoté autour d'une recherche wikipédia. C'est ce que j'ai pensé aussi un moment où elle parlait du couple, et ça m'a rappelé ma vidéo sur Houellebecq, ou je dis exactement pareil, Copula, en latin, le lien, liaison. Ça gâche ce qu'il reste à gâcher.

Et puis toutes ces phrases sur la nuit, sur la ville, les personnifications pour remplir de la page « La nuit s'est apprêtée comme une fille », « La nuit, les coupables ne se voient pas » « La nuit s'est emparée de Paris, étire les ombres comme des draps. » « Cette nuit, je veux être une proie pour la dernière fois. »

C'est censé parler de la rupture amoureuse, la rupture, quand c'est bien fait, ça peut-être un sujet vraiment émouvant, troublant ou poignant, ben là ; il en fait rien, juste des jolies phrases un peu creuses — je crois que ça peut être le sous-titre du roman, jolies phrases un peu creuses. « Je suis de celles qu'on blesse et qui chérissent leurs blessures. de celles qui meurent parce que l'autre meurt. »

Et ce que je me demande, c'est comment cet auteur peut avoir un succès populaire comme ça, alors que c'est vide, et que surtout, le décor de ses romans, c'est ce qui est inaccessible à des millions de français. La plupart des gens ne connaissent pas les chambres d'hôtels en toiles de Jouy à 500 balles, le fait de déambuler dans les rues de Paris sans se soucier des horaires, du travail, des enfants, des factures. Pourquoi et comment un texte aussi peu réaliste parle aux gens ? Et c'est aussi le cas d'autres auteurs populaires, comme Ledig, De Vigan ou Lugan Martin, leurs personnages existent dans un espace-temps sans contrainte si ce n'est le bonheur ou le confort relationnel de ces mêmes personnages. Rien sur les habitants dans ce Paris vide, sur les métros, sur les voitures, sur les gens qui bossent dans les cafés ou les hôtels ou notre Aurore donne rendez-vous à Alonso. Ou si les travailleurs sont présents, c'est pour se plier à leurs désirs, qui en bons clients chiants, restent jusqu'à la fermeture du restaurant, font conduire le taximan une partie de la nuit, roulez, roulez, prenez nos billets et roulez tout au long de la nuit — en substance. Bref, le décor est un décor de privilégiés sans être assumé comme tel. Les culottes sont de soie alors que la culotte des Françaises, c'est plutôt un slip dim à l'élastique distendu, et encore dim, les jours fastes.
Même les parfums sont trop subtils « ton parfum boisé à l'éclat de shiso », les plats choisis, « une assiette de burrata, jambons, caponata, buvons un vin de Ventoux au parfum de confiture de fraises et de figues sèches ». « saint-pierre en papillotes, un fumet de citron confit » (Ce roman est sponsorisé par le Michelin) Ou peut-être que le concept, c'est comme ces box qui faisaient fureur y a dix ans de ça, Wonderbox et cie, testez la vie de bourgeois le temps d'un bouquin.

Et je m'interroge du succès auprès d'un lectorat féminin avec un portrait de femme aussi bouffée par les hommes, très dépendante, qui ne vit que pour l'amour, que pour le couple. le couple disséqué, le couple parisien, qui aime s'écrire, se raconter « J'ai rencontré Olivier il y a trente ans. Un dîner chez de vieux amis communs à Montmartre, soirée bab, bougies parfumées, taboulé, fèves à la sarriette, vinyles de Cat Stevens et de Bob Dylan. »

Ce qui permet l'élaboration d'aphorismes à deux euros « C'est l'attente qui crée le malheur. Ne rien attendre crée la joie. » « Un couple qui se sépare, c'est l'éboulement du monde. » « Les hommes nous quittent peut-être parce qu'ils ne s'aiment plus avec nous. »

Et toutes ces phrases Lancôme « Nous ne connaissons que l'urgence. La pureté des aubes sans promesses. » On dirait un de ces titres qui sonnent comme un slogan de parfum. « Rien ne s'oppose à la nuit » (Vigan), Je voudrais que quelqu'un m'attende quelque part (Gavalda) « Juste avant le bonheur » (Ledig), Désolée, je suis attendue (Martin-Lugan). C'est marrant parce que Delacourt, il a commencé comme publicitaire.

Et c'est vraiment ça, je sens le sens de la formule, souvent je me dis, purée, ça sonne bien, mais ça sonne pas juste, ça sonne comme un slogan qui fait bien mais qui se révèle creux.
Je vais répéter ce que j'ai dit pour le roman Après la fête, qui s'applique totalement à celui-ci:
Il n'y a rien d'universel, (ou même de singulier), c'est exsangue, blanc, voire transparent, un vase vide, joli, oui, « une écriture poétique » dit la jaquette.
« Je marche derrière toi, perdue dans cette nuit grasse et blanche et je sais que bientôt, mon amour, je devrais te quitter » (on dirait une pub pour Mauboussin)
Au moins, je me dis qu'à chaque fois que je tomberais sur ce genre de livre, je pourrais recycler mes chroniques, puisqu'eux recyclent leurs images.
La preuve, voici une citation du Delacourt qui ressemble à s'y méprendre à l'extrait de Lola Nicolle que je viens de lire « à l'instant même où notre couple risquait de ronronner, tu le secouais, mon amour, comme une nappe à la fenêtre. »

Lien : https://www.youtube.com/watc..
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