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sur 211 notes
Premier roman de l'auteur Junot Diaz, d'origine dominicaine, « La brève et merveilleuse vie d'Oscar Wao » (prix Pulitzer 2008) est une fresque familiale riche en rebondissements et en mésaventures parfois sanglantes. « Peu importe en quoi vous croyez, le fuku, lui, croit en vous. » dit le narrateur, éphémère petit ami de Lola. le fuku, une très ancienne légende dominicaine, est la malédiction qui frappe, depuis des générations, la famille d'Oscar. Oscar, lui, ne vit que dans des mondes fantastiques, à la Tolkien, il s'imagine bourreau des coeurs, Casanova dominicain cueillant les jolies femmes au rythme de sa marche.. sauf qu'Oscar Wao est loin d'être l'archétype du tombeur des Caraïbes : il est solitaire, porteur de lunettes, sédentaire au point d'être obèse, souffre-douleur et ne sait pas aborder une femme sans lui parler de Science Fiction ou de Fantastique Fantasy, de quoi faire fuir les plus courageuses. le tombeur des bacs à sable est devenu un jeune homme obèse, graphomane malheureux, qui voit toutes ses tentatives amoureuses vouées à l'échec … hormis lorsqu'il prend en main son destin tragique.

Oscar a bien un pouvoir particulier de super-héros : celui de voyager dans le temps et permettre au lecteur d'entrer dans la saga familiale et l'histoire dominicaine. le roman relate trois adolescences, celles d'Oscar, de Lola et de Beli. Lola déteste sa mère, Beli, élevée par sa tante la Inca à Saint Domingue. Beli a eu une vie inimaginable, extraordinaire et dramatique alors que la vie l'avait fait naître dans une famille aisée de la bourgeoisie dominicaine. Or, à l'époque de la dictature féroce exercée par le Trujillo, Rafael Trujillo, il est dangereux pour un père d'avoir une très belle fille, adolescente, à la maison et de la cacher afin de l'éloigner de sa convoitise de prédateur sexuel. le père de Beli osa soustraire sa fille à l'appétit lubrique du dictateur provoquant la chute et la perte de sa famille. Par miracle, après de multiples embrouilles, tombant de Charybde en Scylla, Beli devenue esclave est sauvée par sa tante. Or, Beli est si belle qu'elle attire la convoitise des hommes et qu'elle a le malheur de tomber amoureuse d'un fidèle du Trujillo au point qu'il lui en cuira et qu'elle devra fuir aux Etats-Unis, dans le New Jersey où elle donnera naissance à ses deux enfants.

« La brève et merveilleuse vie d'Oscar Wao » est un roman tellement foisonnant que je m'y suis perdue plus d'une fois avant de m'adapter au rythme de la narration et à l'écriture si particulière de l'auteur qui mêle les mots en espagnol, les expressions des Caraïbes à sa langue d'adoption ce qui n'est guère aisé à rendre dans la traduction française. Cet inconvénient est vite oublié parce que le récit virevoltant est passionnant. Junot Diaz entrelace les registres de langues et les genres littéraires. On passe de la comédie au drame le plus noir, du burlesque au tragique, du réalisme au surnaturel, de la profondeur des idées à la crudité, parfois éprouvante, des mots et des scènes, du récit classique à l'exubérance baroque. C'est un pur plaisir que de se laisser porter par l'inventivité littéraire de l'auteur. Ce qui m'a également désarçonnée c'est l'alliage, cité ci-dessus, de deux langues mettant en valeur du spanish connu, les onomatopées, les jurons et autres interjections imagées, de tics de langage, de verlan et d'autres inventions plus cocasses les unes que les autres. Sans compter les notes de bas de page où la frontière entre la parodie et les précisions historiques est d'une minceur fragile.

« La brève et merveilleuse vie d'Oscar Wao » est aussi un roman sur une masculinité qui vire au tragi-comique sous l'ironie facétieuse de l'auteur. Oscar traîne sa virginité comme un fardeau, le fardeau du fuku qui fait qu'il ne peut être un mâle dominicain qui se respecte. A défaut de conquêtes féminines, il noircit ses cahiers de romans, de récits fantastiques et engloutit des montagnes de nourriture. Junot Diaz a écrit, également, un roman sur l'immigration, l'identité, la mémoire de l'esclavage et la diaspora tout en évoquant l'envie légitime de s'élever dans la société américaine sans trahir ses origines et en être fier. le tout servi par une ironie joyeuse qui rend la chronique épique de cette famille, parfois dysfonctionnelle, hilarante tant Oscar peut être vu comme le Buster Keaton de la « loose ».

Une lecture jubilatoire et une très belle découverte.

Traduit de l'américain par Laurence Viallet
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LA BRÈVE ET MERVEILLEUSE VIE d' OSCAR WAO de JUNOT DIAZ
En République Dominicaine on croit au fuku qu'on appelle aussi l'amiral et on y croit d'autant plus que dans les années 1930/1960, il avait son grand prêtre, Trujillo!! le fuku américanus, c'est une sorte de malédiction, arrivée avec les européens en Hispaniola, qui l'ont libéré. La fatalité sur la famille Kennedy, le fuku, la défaite au Vietnam, le fuku collé aux chaussures des dirigeant et des soldats qui décidèrent d'envahir St Domingue pour en finir avec le sanguinaire Trujillo. Heureusement, quelquefois, on peut contrer le fuku avec un contre sort, le zafa!
Bref, New Jersey dans les années 1975/1989, Oscar bébé était une beauté, un »tombeur des bacs à sable », mais quand la petite Maritza l'a largué, il a commencé à grossir et à s'enfoncer dans la contre culture, si bien qu'en seconde au milieu de ses lectures de SF il pesait 110 kilos. Tout le monde se moque de lui, les filles lui tournent le dos, sa mère l'expédie à St Domingue pour l'été. À son retour il tombe amoureux sans espoir, sa soeur quitte la maison et il commence à écrire et veut créer des jeux vidéos. Mais il reste puceau, le fuku, sûrement.
Junot Diaz dresse un tableau familial entre drame et comédie, Oscar et sa soeur Lola sont les représentants type de ces dominicains exilés aux États Unis à la suite des turpitudes de Trujillo et leur implantation locale n'est pas long fleuve tranquille. Un patchwork passionnant qui vaudra le Pulitzer 2008 à son auteur.
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Moi, les livres et les transports en commun, volume 4 (je crois que je m'étais un peu chauffé la dernière fois, je pense vraiment n'avoir fait que 3 épisodes avant). Comme souvent dans le tram je lis, et ce soir là, même debout je lis. Accroché à la barre centrale, je suis plongé dans le livre dont il est question. Une amie , actrice de ma troupe de théâtre, me repère de loin et s'approche, hésite à me sortir de mon univers littéraire mais finit par me saluer doucement... et forcément me demande ce que je lis, parce que les gens se demandent toujours ce qui nous sort aussi parfaitement du monde qui nous entoure. Et là, grâce à Babelio et ses challenges, je peux sortir une des réponses les plus classes qu'il m'ait été donné de faire à ce genre de question: un des livres préférés de David Bowie.

Ce fut donc ma porte d'entrée vers ce livre magnifique et je dois donc remercier Gwen et Sab pour leur si utile challenge Multi-Défis qui m'a mené à cette lecture.

Un livre magnifique par son foisonnement, rempli de références aux jeux de rôles, au Seigneur des Anneaux, aux super-héros, à la culture geek en général. le fait que je connaisse ces références a forcément dû m'aider à apprécier... mais le livre est bien plus que ça évidemment.

Il est également une approche fantastique de la culture des émigrés dominicain aux États-Unis. On visite avec les personnages leur pays d'origine et son histoire, comme ces visites que je préfère des pays quand on est accompagné par un local qui peu vous faire rentrer au coeur des maisons, dans le quotidien des habitants. Pour moi la République Dominicaine a longtemps été pour moi la moitié dorée d'une île dont le côté obscur était occupé par Haïti, comme si le destin avait décidé de faire se côtoyer deux avenirs possibles pour un même territoire, l'un radieux et l'autre ténébreux. Cette image idyllique avait déjà été écornée après un voyage de mon cousin sur place qui m'avait décrit comment les visites organisées par les hôtels sur place faisaient tout pour faire ignorer aux touristes le versant pauvre de ce pays de carte postale. J'aurais dû me douter bien sûr que les retombées financières du tourisme ne ruisselaient pas sur tout le peuple. Cette lecture n'aura fait que me confirmer cette réalité, ajoutant en plus une bien meilleure connaissance de l'Histoire du pays, avec notamment la période de la dictature infâme de Trujill, décédé en 1961 mais dont le poids pèse encore sur la politique gangrénée du pays.

Au delà des références et du contexte, la construction du livre est également très originale et jouissive. Deux narrateurs-personnages (la soeur d'Oscar et un ami d'Oscar et de sa soeur) qui racontent à la fois la vie d'Oscar mais aussi la leur. Un narrateur-écrivain qui vient aussi régulièrement mettre son jeu et brouille les pistes. Des plongées dans l'histoire familiale en remontant à l'histoire maternelle puis grand-paternelle, pour mieux faire comprendre le poids des secrets, des malédiction et celui de l'Histoire tout court. Un titre qui, presque comme un mauvais quatrième de couverture, nous révèle un élément essentiel de l'histoire (si si, relisez-le bien ce titre étrange), information avec laquelle la narration ne cessera de jouer tout au long, nous faisant frémir face à l'inéluctable, observateur omniscient qui aimerait tant pouvoir ne pas savoir.

J'ai adoré que Junot Diaz joue avec moi, j'ai ressenti tout ce qu'il avait pu donner de lui-même dans cette histoire, comme Jeunet après Amélie Poulain qui dit qu'il avait mis toutes ses idées dans le film et qu'il se sentait incapable d'écrire une nouvelle histoire ensuite (raison pour laquelle je pense il a ensuite adapté un roman et aussi rejoint une saga de SF à l'univers déjà existant... mais je m'égare). L'auteur a depuis écrit des essais, des livres pour enfant, mais pas d'autres romans il me semble pour l'instant.

Alors pourquoi manque-t-il une demi-étoile me direz-vous ? Tout simplement la frustration de me dire que je n'ai pu pleinement saisir toute la richesse du récit parce que je ne suis pas Latino-Américain et que, même si la traduction d'un tel livre est une prouesse, il me manquera toujours toutes les subtilités de ce mélange anglais-espagnol utilisé par l'auteur (merci les traduction de WordReference qui m'ont malgré tout beaucoup aidé). Ce travail linguistique était indispensable et l'auteur n'a sans doute fait que parler comme il l'aurait fait lui-même au quotidien... mais la frustration ne peut qu'être présente en tant que lecteur français, avec mon espagnol si limité.

En tout cas, que vous aimiez ou pas David Bowie, courez-y, les goûts de l'artiste sont éclectiques mais riches, j'avais déjà beaucoup aimé d'autres livres de la liste et je pense que j'y puiserais d'autres idées à l'avenir.
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Histoires de familles hantées par la malédiction du « fukù », de la République Dominicaine à Nueva York.

Dans une alternance de chapitres centrés tour à tour sur les différents personnages, on a Oscar, un joli petit garçon qui devient un ado obèse, qui tombe amoureux de toutes les filles. Il vit en partie dans l'univers parallèle de la SF, de la fantasy et des jeux de rôles. Il est plus à l'aise avec la langue elfique qu'avec celle des approches amoureuses.

Sa soeur Lola qui protège au mieux son petit frère, mais qui deviendra une rebelle et devra même se réfugier auprès de « La Inca » en RD.

Retour quelques années plus tôt, celle qu'on a d'abord vue comme une mère intransigeante, est une ado qui travaille dans la boulangerie avec « La Inca ». L'adolescence l'a transformée en une femme trop belle pour son bien…

Les années 40, avec les grands-parents d'Oscar, le père médecin et la mère infirmière, des intellectuels, qui ferment les yeux sur les horreurs de la dictature de Trujillo, jusqu'au jour où leur fille Jackie devient une adolescente trop jolie, le genre de proie préférée du tyran…

Du mal de vivre aux tortures physiques, un roman fort, qui raconte les tragédies des générations de Dominicains. À plusieurs endroits, l'auteur a ajouté de longues notes de bas de page pour situer les personnages historiques et montrer ainsi que même si c'est un roman, il est basé sur événements et des drames humains réels.

Le texte est intéressant, mais pose plusieurs difficultés de lecture plus ou moins grande selon votre « background » linguistique. D'une part, la prose comporte beaucoup d'expressions en espagnol typiques de la République Dominicaine.

D'autre part, certains chapitres où parlent des jeunes à New York utilisent un langage très argotique. « Avec ses petos, on bédave et on ne pense qu'à bouillave. On kene sa reumda ». (Peu signifiant pour une Québécoise, je me sens bien loin du « slang » de New York… j'aurais peut-être dû lire en version originale.)

Une troisième difficulté tient à la personnalité d'Oscar. Il fait constamment référence au monde de la SF, des Morlock, de Tolkien ou des Marvel. Il faut savoir de quoi il s'agit quand on parle de l'anneau ou de Sauron…
Un très bon roman, mais pas pour tout public.
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La fête au Book

Avant d'ouvrir ce livre, pensez à vous équiper en conséquence : sac à dos et provisions car vous ne le lâcherez plus et surtout, machette pour dans un premier temps, vous frayer un chemin dans cette jungle lexicale.
Car Junot Diaz invente quasiment un style, ce qui est plutôt rare. Mais en plus, ce style est puissant, nous possède à l'usure, et c'est au bord de l'ivresse que l'on pénètre enfin dans ce livre.
Inutile d'espérer une issue convenue, le fukú -le destin tropical- va engluer les personnages dans une fatalité implacable. Faut il également le préciser : le titre est ironique. La vie d'Oscar est brève et si peu merveilleuse qu'on peut même douter qu'elle ait vraiment commencée.

Car ce héros n'en est pas un. Véritable puceau de compétition, prisonnier de son corps et de son splendide isolement, il finira happé par la force mortifère et centrifuge de son pays d'origine C'est un leurre que le roman agite. Et bien plus que le jeune et pas-beau Oscar, ce sont les femmes de la famille Cabral et le pays théâtre de leurs illusions, qui vont illuminer ce récit.
Les femmes sont fortes : la saeur Lola, la mère Belicia et la grand mère adoptive La Inca, se voient exister bien au delà d'Oscar et sont les vrais hommes issus d'un terreau machiste.

L'autre acteur principal du livre est aussi sa principale toile de fond : la République dominicaine.
« La fête au Bouc » de Vargas Llosa était déjà un remarquable reportage fictionnel sur la vie du dictateur Trujillo et de sa bande. Mais en faisant voler en éclats tous les codes narratifs, Junot Diaz expose de façon encore plus frappante, cette longue et triste parenthèse de ce pauvre pays caraïbéen. le style, ébouriffant et décousu, bâti à la truelle, rythme jusqu'à la syncope, cette partie de l'histoire, la rendant irréelle comme seules peuvent l'être ces périodes cauchemardesques qui en toute logique ne peuvent exister, mais existent pourtant.

Les récits se croisent alors, comme les destinées, lardés de coups d'une « langue » nourrie de références bédéphiles, et science-fictionnesques, d'expressions argotiques issues de la rue et en particulier des trottoirs hispaniques.
C'est un voyage halluciné qui vous est proposé, au caeur de cette île maudite et de la famille Cabral qui en sont les pauvres satellites, déracinés, déboussolés, puis détruits par le destin. Si vous cherchez à raisonner, à tout comprendre, à nager dans ce roman qui, tel un torrent de boue vous enserre inexorablement pour vous étouffer, vous êtes perdu. Par contre, dès que vous acceptez de perdre pied, c'est un moment de pur abandon particulièrement jouissif.

Il est possible que l'on reste rétif, extérieur à ce livre. Indifférent, cela me paraît plus difficile.
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En 2008 Junot Diaz obtient le prix Pulitzer pour un roman qui parle d'immigration, d'exil, de tradition, d'histoire de famille et de malédiction. Un roman que David Bowie classe parmi ses livres préférés (merci au Challenge Babelio qui nous l'apprend).

Un livre qui m'avait interpellé il y a quelques années et qui patientait dans ma PAL sans que j'arrive à me plonger dedans. Voilà qui est fait, et hélas c'est une déception.

Le récit choral est porté par les proches d'Oscar Wao, un adolescent obèse, geek et passionné de science-fiction. Et avec une obsession : ne pas mourir puceau. Oscar naît dans une famille originaire de République Dominicaine. Dans ce récit choral on découvre un peuple catholique, très croyant et extrêmement superstitieux. le récit suit presque la chronologie de la famille. Après Oscar qui raconte son enfance et sa soeur qui parle de la mort de leur mère, nous partons pour l'Ile de la Dominique et remontons le fil du temps avec la vie de sa mère, avant de retrouver Oscar étudiant et la réalisation de son destin.

L'écriture de Junot Diaz est dense, difficile. C'est une langue populaire, mélange d'argot et d'espagnol (non traduit). Si la découverte de la culture dominicaine est intéressante, avec la juxtaposition des croyances tribales, de la foi catholique, de la culture geek et de l'univers du fantastique, à aucun moment je n'ai réussi à être en empathie avec les personnages et surtout avec Oscar, et j'ai lutté pour reprendre le récit quand le livre me tombait des mains au bout de quelques pages.

Comme l'impression d'être passée à côté et une sensation de frustration en le refermant.

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Où l'on retrouve Yunior, narrateur de "Los Boys", qui cette fois ne parle pas de lui, mais -comme vous l'aurez deviné- d'Oscar, vaste sujet dans tous les sens du terme...

La vie d'Oscar est un drame... le séducteur des bacs à sable qu'en digne représentant du mâle dominicain il était petit garçon, a rapidement fait place à un adolescent obèse, solitaire et passionné de science fiction.
Oscar n'a qu'une ambition : devenir le nouveau Tolkien. Et Oscar n'a qu'une grande angoisse, celle de mourir puceau. Et il va falloir qu'il se dépêche, car si prétendre que la vie d'Oscar a été merveilleuse est une antiphrase, dire qu'elle a été brève est en revanche la triste vérité !

Raconter l'existence d'Oscar, c'est énumérer une succession d'échecs, de déceptions et d'humiliations.

La faute au "fukú" ?

C'est en tout cas ce que semble suggérer le narrateur. le héros serait selon lui victime de cette malédiction typiquement dominicaine qui se transmettrait dans la famille depuis qu'Abélard, l'aïeul maternel, aurait osé manquer de respect au "Jefe", le dictateur Rafael Leónidas Trujillo Molina, qui instaura durant plus de trente ans le règne de la terreur en République Dominicaine. Et pour étayer cette hypothèse, le récit remonte le temps pour nous livrer la pathétique et douloureuse histoire de la mère d'Oscar -la belle Beli au caractère bien trempé-, ainsi que celle de ses grands-parents, qui perdirent fortune et considération suite au fameux affront évoqué plus haut. Viol et violence, prison et tortures, maltraitance... il semble effectivement que cette famille soit maudite ! Mais rares sont ceux qui, sous Trujillo, n'eurent pas eu à subir malheurs et vexations...

Seulement il semble bien que cette malédiction ait suivi Beli lors de son immigration aux États-Unis pour s'abattre sans pitié sur son fils chéri !

Junot Díaz dépeint un monde (le nôtre) dur et injuste, dans lequel la faiblesse et la différence sont des handicaps insurmontables. Un monde où le plus fort, qui est aussi en général le plus cruel, gagne à tous les coups, et dans lequel les destins individuels sont ballottés, voire anéantis, par les impitoyables flots de la grande Histoire. Et il parvient pourtant à nous faire rire, malgré le lot de souffrances qu'il dépeint et malgré ce sentiment de malheur omniprésent qu'il nous fait éprouver. Et s'il nous fait rire, c'est en partie grâce à son style, flamboyant, entremêlé d'argot, d'espagnol et d'anglais (français pour la traduction), dont il émane une incontestable poésie aux accents populaires, qui donne au récit un dynamisme et une force d'évocation hors du commun. L'autre source de la réjouissance que procure la lecture de ce roman est le talent avec lequel Junot Díaz manie l'ironie. Avec un infatigable mordant, il parvient à insuffler à son sujet pourtant tragique une atmosphère d'épopée comique.

"La brève et merveilleuse vie d'Oscar Wao" est à ce jour l'unique roman écrit par cet auteur...

A quand la suite !?
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Quelle entrée en matière. Un parler argotique , des phrases cinglantes , un peu d'espagnol qui se glisse ici ou là. Tout ça pour nous parler d'Oscar , un gros boutonneux dominicain exilé dans le New jersey dans les années 80.
Et en plus, il y a des notes (qui peuvent presque prendre toute une page) qui nous narre l'histoire de Santo Domingo et de la république dominicaine , depuis les conquistadors jusqu'à Trujillo, bel enculé surnommé 'face de gland' par ses compatriotes.
Et puis , on plonge dans la culture antillaise avec le 'Fuku' , sorte de malédiction qui te colle aux basques et qu'ont choppé les Kennedy (puissant le truc quand même).
300 pages d'éclate donc.
Nan :(
je ne sais pas ce qui s'est passé , c'est très long... Pauvre Oscar, puceau un jour, puceau toujours . Sa soeur, sa mère, leur vie difficile , entre coups , viols mais toujours l'honneur, l'abuela et l'abuelo victimes de "face de gland"..tout ça est prometteur.
Mais je n'ai pas accroché , trouvant l'ensemble très poussif, étant surtout déçu alors que les planètes semblaient s'aligner. Bon , je me suis fait un peu chier, ni plus ni moins.
tant pis.
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Junot Diaz réussit (à mon avis) un tour de force. Faire rentrer en 293 pages plusieurs livres. Il y a l'histoire d'Oscar... Surnommé Oscar Wao, pour Wilde, par ses potes et ses moins potes. Il y a l'histoire de la République Dominicaine, et du Trujillanisme... Il y a une saga familiale, sur plusieurs générations. Il y a New York, en creux, dans les errances d'Oscar. Il y a une amitié entre un frère et une soeur, Oscar et Lola. Il y a une fabuleuse histoire d'amour, celle d'Oscar et de son envie de tirer sa crampe, mais voilà ! il est obèse et complètement geek, accroc au jeux de rôles et au cinoche de genre. Pas le truc qui permet d'emballer les filles. Et Oscar, il tombe amoureux à la seconde. C'est un roman sur le mal de vivre, sur le suicide, l'auto-destruction, l'apreté de la vie.

C'est aussi l'histoire de fuku, une malédiction maousse, qui suit la famille d'Oscar, depuis le grand-père, voire avant. Faut dire aussi que Trujillo, comme lanceur de fuku, il maîtrise le sujet comme personne.

C'est surtout un style déjanté. Incroyablement personnel et déroutant. On a un peu de mal au début. Je me suis accroché et je n'ai rien regretté. A côté de ce récit La Fête au Bouc de Vargas Llosa, c'est Bonhommet et Tilapin. Une chiure de mouche. Junot Diaz multiplie les figures de style fleuries. Les références à Tolkien et à son oeuvre, à de multiples jeux de rôle (Aftermath... j'y ai joué) et il emballe sec. Il y a de l'autobiographie, une sorte de coming-out, dans le rapport qu'Oscar possède avec Yunior qui rêve de se faire Lola, mais que sa nature dominicaine empêche d'être fidèle et pousse à tringler tout ce qui passe. Ne considérez pas que c'est leste, obscène ou vulgaire. Rien de tout cela dans le récit de Diaz. Mais beaucoup de tendresse, de fatalité et de poésie sauvage. A l'instar de la vie elle-même.

Le livre, je l'ai appris lors du Challenge Multi-Défis 2021, est sur la liste des incontournables de David Bowie. Je n'en suis pas étonné. Je me suis régalé. Un roman rock'n'roll.
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J'ai longtemps hésité avant d'acheter ce roman, notamment à cause de nombreux avis insistant sur le fait qu'il était compliqué à suivre, avec beaucoup d'espagnol et d'argot.
La brève et merveilleuse vie d'Oscar Wao est un beau et grand roman. La langue ne m'a pas du tout dérangé, les mots non traduits sont finalement peu fréquents et facile à comprendre. Je peux cependant comprendre qu'il puisse être difficile d'accès, à travers les thèmes abordés et les nombreuses références à la culture pop. C'est un roman original, de par son histoire et sa narration, mais aussi terriblement moderne. L'auteur ne s'impose aucune limite, ne suit pas des codes linéaires, c'est un véritable plaisir. Les personnages sont touchants, drôles, pathétiques et toujours sincères.
Je ne connaissais pas cet auteur et j'espère rapidement découvrir le reste de son oeuvre.
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