Jean-Baptiste Fouque, Le téméraire de la charité

Ouvrage emprunté à la médiathèque dans laquelle je travaille durant cette période de confinement, je n'avais pas eu le temps (ou plutôt, à tord, pas pris le temps) de la lire plus tôt, ce qui m'aurait probablement été bénéfique mais je tiens ici à dire mon ressenti suite à ma lecture de cette dernière. J'ignorais alors qu'il s'agissait d'une commande et j'avoue que j'ignorais même qui été ce fameux abbé Jean-Baptiste Fouque.

Ici, le lecteur découvre la vie d'un homme qui a consacré sa vie à Dieu mais pas seulement (d'où la raison pour laquelle je pourrai conserver cet ouvrage dans mon fonds et le conseiller sans aucun problème à mes lecteurs, que ces derniers soient chrétiens ou non) car si est bien évidemment ici question de religion, ce n'est pas le cas au départ et toutes les opinions sont défendues. Cela commence justement pas une réunion d'illustres personnages laïcs, qui, reconnaissant, tous les bienfait que celui qui n'était qu'un "petit vicaire" a apporté pour les plus miséreux, à commencer par les jeunes filles sans pour autant les inciter à entrer dans un couvent ou à rester auprès des soeurs qui prennent soin d'elles. Non, il veut juste les préserver d'un monde extérieur parfois brutal envers elles et il en sera de même pour toutes les autres établissements qu'il créera par la suite : orphelinat, établissement pour les personnes âgées, restaurant féminin, hôpital... Bref, ces personnages illustres veulent se réunir pour décider ensemble, journalistes, témoins, hauts fonctionnaires si ils ne pourraient pas accorder la Légion d'honneur à ce brave homme qui a toujours agi en luttant contre la précarité et ce, sans arrière pensée. Ici, le lecteur découvre de manière romancée une partie de son parcours.

C'est donc un très bel hommage qui est rendu ici à cet homme d'église mais qui n'en était pas moins un homme charitable et qui ne pensait qu'aux besoins des plus malchanceux et des plus démunis, ceux que la vie n'avait pas épargnés et à qui il entendait donner une nouvelle chance. Donc, rassurez-vous, pas de préjugés à avoir si vous vous décidez à entamer la lecture de cette bande-dessinée : quoi qu'il en soit, vous serez au final seul juge mais quant à moi, j'avoue que celui-ci m'a convaincu. Extrêmement bien travaillé du point de vue graphique et scénaristique, je ne peux que vous en recommander la lecture et la rencontre avec ce personnage étrange mais par lequel on ne peut que se laisser attendrir !

En tant que scénariste de cet album, il serait mal venu d'en rédiger une critique au plein sens du terme. En revanche, il est possible de rédiger un commentaire qui donne quelques explications sur l'esprit dans lequel ce scénario a été rédigé.

Cette BD est le fruit d'une commande. Il s'agissait de rédiger la biographie de l'abbé Jean-Baptiste Fouque, fondateur de différentes oeuvres caritatives à Marseille ou dans les environs et notamment l'hôpital Saint-Joseph de Marseille. A priori, rien donc de bien palpitant. La difficulté était donc à partir de cette base un peu ingrate de parvenir quand même à faire une BD qui se laisse lire comme une véritable BD et qui ne soit pas simplement un alignement de divers épisodes à la suite les uns des autres sans autre fil conducteur que l'écoulement de la vie du personnage. Un autre souci qui a guidé la rédaction de ce scénario était d'en faire une histoire qui puisse intéresser un plus large public que les seuls amateurs de ce qu'on appelle la "BD chrétienne".

Pour parvenir à ce résultat, quelques libertés ont été prises avec la "vérité historique". Des événements imaginaires, mais plausibles, ont été ajoutés, des personnages de fiction ont été introduits, des événements réels ont été transposés à d'autres époques ou avec d'autres personnages... Rejetant toutefois toute démarche militante ou apologétique, ces libertés prises avec la "vérité historique" n'ont à aucun moment eu pour but de permettre une démonstration ou d'altérer des faits pour cacher des éléments qui auraient pu être gênants, mais uniquement celui de donner une dynamique au récit afin de maintenir l'attention et l'intérêt du lecteur et de garder une légère distance par rapport à un discours purement hagiographique, même si, étant donné qu'il s'agissait d'une commande, il n'était pas envisageable de faire un portrait charge du personnage.

Est-ce que ces objectifs ont été atteints ? Ce n'est pas à moi en tant que scénariste d'en juger. La seule chose que je peux dire de ce point de vue est que cet album a reçu deux prix : le prix Gabriel de la bande dessinée chrétienne et un prix de l'Académie de Marseille.

Pour ce qui est d'élargir le public à un autre public que celui de la "BD chrétienne", en revanche, c'est un peu décevant, car jusqu'à présent, à part les quelques amis et connaissances auxquels je l'ai donnée à lire, je n'ai eu connaissance d'aucune critique qui n'était pas liée au milieu un peu fermé de la "BD chrétienne".