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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Pour faire connaissance avec la plume de Jean Echenoz, est-il judicieux de commencer par un roman noir? Il est certain que je n'ai pas entièrement saisi le noeud de l'intrigue qui mêle une histoire d'héritage à la cinquième génération, une secte adoratrice des rayons, la disparition d'un perroquet Morgan, avec pour fil rouge un colosse au réseau cortical peu développé. Peu importe. Dès les premières phrases, je suis happée par le travail d'écriture, fine, ciselée, développant l'art de la métaphore recherchée mais gracieuse, raffinée . Un exemple :

"un pont enjambait ensuite le boulevard périphérique, où renâclait sur huit files un bétail contraint ruant dans son oxyde d'où s'échappaient, à peine perceptible, par les déflecteurs poussés, des filaments d'autoradios " .

Beaucoup d'humour également, comme dans cette séquence où Georges, à la recherche de Jenny, se fait passer pour un animateur d'un émission radio intitulée Manque de bol! On sourit, on rit même.

C'est donc, à défaut d'un rendez-vous réussi avec la trame policière, un baptême convaincant avec un magicien de la langue, que je vais continuer à fréquenter dans les semaines à venir.


Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Partir d'une histoire de polar à deux balles et en faire un objet littéraire de haut niveau, il n'y a pas 36 auteurs qui relèvent de défi – et encore moins si l'on impose comme condition d'être drôle à chaque page. L'Artiste en la matière, le Grand Maître de la chose, est sans conteste Jean Echenoz.

« Cherokee » a reçu le Prix Médicis 1983. Il est difficile de vous résumer l'histoire car chaque phrase la modifie. Mais, sachez qu'il y a notamment des policiers désastreux, des zeugmas, des cousins qui se détestent ou qui s'aiment, des descriptions minutieuses d'objets et de lieux, des questions d'héritages, du jazz, des disparitions d'oiseaux, une secte, des belles phrases et filles. En mélangeant tout cela, le roman constitue une déambulation drôle et prenante, qui ne se détache pas des mains. Dans ce style-là, un peu intello, un peu « Tontons flingueurs », c'est un petit bijou.
Lien : Https://evanhirtum.wordpress..
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"Un jour, un homme sortit d'un hangar. C'était un hangar vide, dans la banlieue est. C'était un homme grand, large, fort, avec une grosse tête inexpressive. C'était la fin du jour."
Ainsi débutent les aventures rocambolesques de Georges Chave. Contraint de sortir de sa léthargie, il entre au service d'une agence de détectives. C'est le début d'une série de poursuites : il doit pister une épouse volage, un perroquet rarissime et les héritiers d'une fortune ancienne. Mais le chasseur va progressivement devenir proie et s'enfermer dans un piège finement tissé. Il va cheminer dans la nébulosité des quartiers populaires de la banlieue parisienne et croiser toute une faune sinistre : affairistes sans scrupules, détectives minables, policiers incompétents, disciples d'une secte fantoche et autres Pieds nickelés.
Les décors grisâtres et les personnages louches s'emmêlent, le récit s'étoffe et étouffe un lecteur qui finit par se faire une raison : le roman noir n'est qu'un prétexte, une porte d'entrée dans un milieu interlope. Les filatures, les échanges de coups de poing ou de feu ne sont qu'un écran de fumée ; finalement, tout repose sur la virtuosité de l'écriture.

J'ai eu besoin de lire le roman une seconde fois pour pouvoir apprécier le style de l'auteur, une fois l'intrigue évacuée. Certains passages sont truculents. Voici la description de Crocognan, l'«homme grand, large, fort» présent dans l'incipit : « C'était un bar sombre et maigre, absolument désert, sans même un barman derrière le comptoir auquel, du haut d'un tabouret crevé, s'accoudait pesamment un seul consommateur : un être herculéen coiffé d'un chapeau mou qui ballotait sur son crâne comme un flan, avec un pull-over bleu roi et des socquettes vertes fluorescentes. » Si vous êtes calé en figures du style et si vous aimez herboriser les oxymores ou et autres paraboles, ce texte est fait pour vous. Un billet du blog « l'oreille tendue » de Benoît Melançon en relève quelques-unes. «La voyante posa sur lui un regard attendri, sur ses jambes un plaid » là, par exemple, il faut le savoir, c'est un zeugme ! (lecture du blog recommandée). Si ces figures de style peuvent échapper au lecteur « non expert », ce n'est pas le cas des traits d'humour qui jalonnent le récit. Et ça marche ! On ne peut s'empêcher de sourire à la lecture de ces piques.

Cherokee est aussi un roman sur Paris et sa proche banlieue. J'ai apprécié les descriptions du Cirque d'Hiver et des passages couverts de la capitale, riches de portes dérobées et de sorties secrètes. le lecteur suit les personnages dans leurs pérégrinations à pied, en métro, en voiture, dans la ville et hors la ville, une fois le périphérique franchi, ou après de longs trajets en autoroute, dans des automobiles en bout de course.

J'ai relu des passages de ce roman en mettant en fond musical diverses interprétations de 'Cherokee' pour tenter de m'imprégner du rythme de ce morceau de jazz et de l'associer à ma lecture.Sans succès. J'avais réalisé la même expérience avec le roman "White jazz" de James Ellroy qui par son rythme saccadé, son mouvement permanent s'y prêtait parfaitement.

Cherokee est mon premier roman d'Echenoz. le roman est remarquable mais je ne l'ai pas trouvé passionnant. Je vais tenter de lire d'autres romans, notamment «les grandes blondes », pour me faire une idée plus précise de son oeuvre.
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Je gardais ce livre dans ma pal bien au chaud pour le jour où j'aurai besoin de me réconcilier avec la littérature. Après ma incommensurablement pénible lecture de la vie d'une autre, le temps d'Echenoz était arrivé.

Choisir de lire Echenoz, c'est accepté de se faire balader, sortir continuellement des rails du récit classique. Car celui qui est probablement le plus émérite des ambassadeurs des Editions de Minuit, manipule les artifices du polar au point de faire capoter "l'enquête" à tout moment. On s'amuse à suivre "les aventures du héros", Georges Chave, enquêteur rapidement devenu à son tour objet d'enquête. le tout, sous la plume affûtée d'un écrivain qui, dans la lignée d'un Robbe-Grillet ou encore d'un Hubert Aquin, prend un malin plaisir à brouiller les pistes en multipliant les descriptions toujours à la limite du sujet, à proposer avec un ton et une géographie bien à lui, "l'aventure d'une écriture".

Lire aujourd'hui ce livre publié initialement en 1983 rajoute un petit côté vintage qui n'est pas sans intérêt. Me voilà réconcilier avec la littérature.
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Il y a deux pôles dans l'oeuvre de Echenoz : une dilection pour des phrases travaillées, qui ne répugnent pas à la préciosité, et dans laquelle surviennent des dérapages parfaitement contrôlés, qui donnent toute leur saveur à son style ; un goût pour des personnages loufoques, sans lien apparent, qui finissent ou pas par se télescoper. Ces personnages écument Paris et sa banlieue à bord d'automobiles dont la variété et les descriptifs ne dépareraient pas un magazine spécialisé. Ils aiment le jazz et les looks improbables. Ils travaillent pour d'obscures officines et entrent par effraction dans des villas luxueuses ou des maisons miteuses. Ils y croisent des femmes mystérieuses qui le restent jusqu'au bout. Ils se livrent parfois à des courses-poursuites effrénées au cours desquelles ils empruntent des couloirs interminables. Ils courent après des perroquets rares comme dans l'Oreille cassée.
On n'y comprend pas grand chose pendant une grosse partie du livre. On ne sait pas qui court après qui. Mais tout ça n'a sans doute pas grande importance...
Il émane de ce livre un charme lancinant, irrésistible. Comme à bord d'une belle Ford Mustang Fastback 1968, la route suffit à elle-même : ne comptent que la beauté de la ligne, l'odeur du cuir, la douceur de l'asphalte et un standard de Charlie Parker.
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Un roman vraiment spécial, à la fois archétype du polar et son contraire. Pas l'ombre d'un indien comme pourrait le laisser supposer le titre mais un jeu de piste dans un Paris des années 80, glauque et peuplé de personnages louches. L'auteur s'attache à poser tous les jalons d'un roman policier mais surprise! Les énigmes n'aboutissent pas, l'auteur semble jouer avec nous en accumulant des changements abruptes qui brouillent toute logique et des situations absurdes. Et pourtant... et pourtant on est embarqué, on ne comprend rien, on se laisse mener par Echenoz et on referme le livre en se disant que la dernière phrase est parfaite et qu'on a passé un bon moment. Incompréhensible.
Lien : https://yaourtlivres.canalbl..
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L'histoire, au fond, est plausible : comment récupérer l'argent d'un homme qui a fait fortune au loin et qui a mis comme condition dans son testament que son héritage ne soit attribué qu'après la mort du dernier des héritiers directs. Donc longtemps après la sienne. Pourquoi pas …
S'ensuit une aventure déjantée, pleine d'individus étonnants, de situations improbables et de rebondissements hors de toute logique.
On a vraiment l'impression que J. Echenoz s'amuse beaucoup. L'écriture est foisonnante, riche, ébouriffante pleine de fantaisie et d'humour.
Un joli moment de lecture délirante, jubilatoire, à lire pour le plaisir, et à relire sans doute pour en apprécier toutes les saveurs.
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Attiré par les comptes rendus de “Vie de Gérard Fulmar” qui venait de paraître, j'ai procédé comme souvent avec des auteurs réputés : lire un autre de leurs livres. Ce serait donc “Cherokee”, sur les conseils de ma libraire préférée.

La quatrième de couverture, qui reproduit une lettre de Jean-Patrick Manchette, m'avait conforté dans mon choix. le fait est que, par bien des aspects, “Cherokee” pourrait ressembler à du Manchette. Mais ce ne sont que des apparences. Certes, le style souvent concis et fleuri, les personnages façon roman noir, le déroulement de l'intrigue rappellent l'auteur de “La position du tireur couché” (un de mes romans-cultes). Sauf que Echenoz se moque de l'intrigue comme d'une guigne – d'où la qualification de “meta-polar” par Manchette. Et ce parti fonctionne, tant le rythme, les descriptions, les péripéties hautement fantaisistes soutiennent l'intérêt…

Cependant, dans le dernier quart du texte, j'ai ressenti une soudaine lassitude – quand les protagonistes convergent vers Grenoble, notamment. Soudain, il semble y avoir un aboutissement, une solution (partielle) aux mystères évoqués précédemment. Ce renoncement à l'absurdité m'a perturbé, et presque gâché le plaisir de lecture. Peut-être aussi ai-je fait une “overdose” de gratuité, ce méta-polar – plutôt un “non-roman” à mes yeux – finissant par déclencher une saturation du lecteur, ce qui nous ramène à la ”perplexité” de Manchette, à la différence près que lui la qualifie d'“enthousiaste”, le mien s'étant réduit à la portion congrue… Il reste la virtuosité du style, c'est indéniable. Mais cela suffit-il ?
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Un foutraque fatras littéraire Un amoncellement amphigourique
Un chambardement sans nom
Une joyeuse confusion
Une accumulation de débandades, désordres, fouillis galimatias .......
Un véritable tohu-bohu
Le tout bien cuisiné par Jean Echenoz et bien sûr suivant une recette des Editions de Minuit.
Un petit régal de lecture.
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