Un nouvel
Ellroy chez Rivages après de longues années de silence, c'est un peu comme le retour des beaux jours. On piaffe d'impatience. Même si les deux derniers volumes de la trilogie Underworld USA m'avaient déçue, malgré la présence de cette flamboyante ordure de Pete
Bondurant, j'attendais beaucoup du retour du Dog.
Dans ce court roman de 135 pages sorti en 2012,
Ellroy nous livre les vraies/fausses confidences de Fred Otash, déjà aperçu dans la trilogie précédemment citée et dans L.A. Confidential, pour le personnage de Syd Hudgens de Hush-Hush Magazine.
Dans un long monologue halluciné, Otash , ancien flic pourri, ancien privé, ancien proxénète, fournisseur de ragots pour le tabloïd Confidential, "Tells the Facts and Names the Names", se retrouve au Purgatoire et farfouille dans ses souvenirs bien nauséabonds. Quelques fameuses silhouettes fantomatiques viennent parfois titiller sa conscience quand il devrait faire acte de contrition. Il y croise même ce cabot d'
Ellroy qui n'hésite pas à se mettre en scène: "
Ellroy est un casse-couilles. Je l'ai connu sur mon déclin, les derniers mois de ma vie. On m'a pourvu d'un pouvoir télépathique total. Je vais tout savoir de ce salopard. Il m'a tout piqué pour camper un personnage de son roman surmédiatisé L.A. Confidential."
On l'aura compris,
Ellroy dévide toujours le même écheveau, le rêve américain vérolé, les fonds de poubelle des stars de cinéma et de leurs poissons pilotes ambiance
Hollywood Babylone de
Kenneth Anger, le voyeurisme, la fascination pour les secrets et les parts d'ombre, les accointances entre flics corrompus et la pègre, bref, sa petite mécanique bien huilée.
Cette resucée fut pour moi décevante même si les thèmes maintes fois rebattus sont sauvés par l'apparition de James Dean en sympathique dilettante qui bénéficie d'une indulgence étonnante et presque attendrissante de la part du narrateur, et surtout par l'image récurrente du chariot poussé par un gamin et qui serait à Otash ce que la luge est à Citizen Kane, un des rares éléments qui suscite sa nostalgie et cristallise son humanité.
Pour conclure cette mise en bouche de 135 pages, Rivages nous colle en fin de volume deux chapitres du futur roman d'
Ellroy,
Perfidia, histoire de nous donner grandement envie de lire sa nouvelle fresque sur la seconde guerre mondiale, et de nous montrer que l'Irlandais Dudley Smith sera de nouveau dans la place. On finit la lecture de ce volume avec la vague impression de s'être fait extorquer des attentes et des zlotys mais comme je suis faible, je vais guetter avec fébrilité la publication de
Perfidia l'année prochaine, histoire de retrouver tous ces personnages répugnants qui nous fascinent mais dont on ne voudrait à aucun prix croiser un jour le chemin.