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sur 2198 notes
Avec Les Années, Annie Ernaux réussit le tour de force d'écrire un récit de vie qui ne soit absolument pas narcissique ni même autocentré. Cette chronique de l'après guerre évoque par petites touches l'évolution de la société française à travers les souvenirs de l'auteur et sa propre expérience. Ecrit à la troisième personne, il porte un regard presqu'extérieur sur la femme qu'elle était. Elle se souvient, de conversations de table quand elle avait 6 ans, de la télévision qu'on regardait au café du coin, de la première voiture et de ce type qui vantait Paic Citron sur Europe 1, des vacances en Espagne si bon marché, de 68 et de Sartre, de Kiri le Clown et de la petite ville normande où elle a grandi. Les couches de mémoire se sédimentent et Annie Ernaux exhume 60 ans d'impressions, de jalons qui marquent une époque, un moment du temps. On disait "encore un que les boches n'auront pas", on disait "épatant" puis "débile", on disait "mon copain", on avait un téléphone, un ordinateur, un Ipod et à chaque fois l'engin nouveau s'intégrait à la vie au point qu'on ne puisse pas imaginer la vie sans lui.
Le récit d'Annie Ernaux est très touchant. il nous renvoie à notre condition d'étoiles filantes qui accumulent expériences, sensations, souvenirs et connaissances, importantes ou dérisoires mais qui pour la plupart sont vouées à disparaître avec nous et, en même temps, il rappelle de manière saisissante ce qui fait que la vie vaut la peine d'être vécue, ces milliers de minuscules sensations, de plaisirs plus ou moins grands, de secondes où le bonheur surgit d'un rayon de soleil ou d'une odeur retrouvée.
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Le premier livre que j'ai lu d'Annie Ernaux est "La Place".
Cette lecture m'avait bouleversée, sans doute par quelque effet de miroir que les livres de cette auteur ne manquent jamais de nous tendre.
Pourtant, elle ne cherche pas à émouvoir son lecteur, au contraire, son travail se caractérise par une sorte de mise à plat des faits et des situations hors contexte affectif.
Écrivain, elle met l'émotion à distance, elle la bride, elle la tient tellement en respect qu'elle l'efface. Elle se force à dire la vie sans émois...
Et elle y va de sa magistrale "écriture blanche", "plate", "au couteau", et elle me bouleverse... et elle m'impressionne...
Parce que c'est sans concessions, sans faux fuyant, sans mensonges.
C'est un travail de forçat et d'ascète. Une ligne et une méthode tenue jusqu'au bout sans défaillir.
Dans ce premier livre lu d'elle (et c'est un hasard bienvenu) cette forme de travail était déjà en marche pour aboutir semble-t-il à l'oeuvre d'une vie qui s'appelle "Les Années".
Annie Ernaux est la reine du paradoxe et si elle était une figure de style, elle serait un Oxymoron.
Ce livre qui ne parle que d'elle est un miroir sans tain dans lequel elle s'efface comme pour mieux nous révéler à nous mêmes.
C'est une autobiographie impersonnelle, une forme donnée à une prochaine absence/disparition, un abîme mis à plat.
Il tente d'approcher la profondeur du temps dans la linéarité chronologique.
C'est un récit de vie sans "vécu" et qui fait abstraction de l'affect, ne se concentrant que sur la description des choses, du monde comme il va.
Ce texte a l'ambition de rendre palpable l'histoire sociale d'une époque en la passant au tamis d'un "je" omniprésent et qui semble pourtant constamment nié.
C'est une histoire individuelle écrite à la troisième personne du singulier et la première personne du pluriel.
Elle et nous sont Annie Ernaux.
Elle ,c'est celle qui est sur les douze photos décrites et soigneusement choisies pour nous faire passer de décennie en décennie.
Ce n'est déjà plus Annie Ernaux et ce ne le sera jamais plus.
C'est à partir d'objets qui produisent du paradoxe que ce texte est construit : des photographies du sujet qui est en train de s'écrire et qui d'un même mouvement en posent l'absence et la présence passée...
Rajoutons à cela que ces images ne nous sont pas montrées, mais dévoilées par le texte.
Consciencieusement et courageusement l'auteur les décrit en y cherchant sans relâche le "punctum "que Barthes explique dans "La chambre claire".
Elle traque la “blessure”, la “piqûre”, “la marque faite par un instrument pointu”. “Le punctum d'une photo c'est ce hasard en elle qui me point (mais aussi me meurtrit, me poigne)”.
Par ce travail remarquable que j'imagine douloureux, s'ouvre la mémoire, les réminiscences, les images et les sons d'une époque et petit à petit, par le jeu de la lecture et de nos propres souvenirs, le ELLE se transforme en NOUS... C'est presque magique, toujours extrêmement troublant !
Chacune de ces photos sont comme des portes pour la mémoire individuelle de l'auteur qui trace le chemin. Ce passé singulier devient collectif à la lecture, parce c'est un fait, nous nous reconnaissons tous en passant par ces portes.
Suivant celle que nous prenons, en fonction de notre génération, nous plongeons dans des souvenirs virevoltants, et toutes les autres font échos à un passé proche ou lointain de gens connus, parents, grands parents ou autres, qui nous a été plus ou moins transmis...
L'image qui symbolise la quête d'une forme pour son travail, Annie Ernaux nous la propose, et voici ce qu'elle en dit :
"...le tableau de Dorothea Tanning, Anniversaire, qu'elle peignit juste après sa rencontre avec Max Ernst. Il est également en creux dans mon livre. Ce tableau représente une femme presque nue et, derrière elle, des portes à l'infini. Cette oeuvre m'accompagne depuis que je l'ai vue lorsque je préparais mon diplôme sur «La femme et l'amour dans le surréalisme».
J'ai été prise dans les filets de ce récit époustouflant, qui en quelques 241 pages nous fait vivre par le menu soixante années en réussissant l'exploit de faire resurgir en nous des images qui sont les nôtres.
Assez brutalement, elle nous fait toucher du doigt notre grégarité et notre contingence.
Ce travail exceptionnel dans sa forme et courageux dans son engagement force l'admiration.
J'avais fini "La Place" la gorge nouée et les larmes aux yeux, j'ai terminé les "Années", admirative et envahie d'une grande tristesse.
Ce texte est nimbé d'une grande douleur qui ne se dit pas, les larmes sont ravalées, les rêves n'affleurent pas, l'amour ne s'y raconte pas, et du coup, la pilule est bien amère.
Annie Ernaux a l'art de toucher là où ça fait mal, et on ne lui en veut pas.
On a même envie de lui dire merci !
des liens et des images sur le blog
Lien : http://sylvie-lectures.blogs..
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Je n'avais jamais lu de romans d'Annie Ernaux, c'est maintenant chose faite et je dois dire que j'ai beaucoup aimé : Les années.
Annie Ernaux possède le talent et la finesse de l'écriture, un tantinet satirique et moqueuse, d'allier la sphère de l'intime, son petit monde, ses ondes intérieures à celui du monde universel qui nous concerne tous.
Au travers de photos et de clichés personnels, elle tisse le fil de sa mémoire etcelui de la mémoire du monde.
Avec beaucoup de finesse, à l'instar de, Marcel Proust qu'elle apprécie, elle se glisse dans la notion du temps qui passe, qui se perd et qui nous fait tout simplement parcourir le temps de la vie d' un homme, d'une femme.
L'expérience de sa propre vie est en corrélation étroite avec la mentalité d'une époque.
Elle part des années 40, celles de sa naissance jusqu'aux années 2000 jugées inaccessibles ou inateignables pour les gens de sa génération.
On apprend ainsi l'évolution de la société, très codifiée et religieuse des années 50, en passant par l'espoir de mai 68, l'élection de 1981, point d'orgue d'une génération.
Ce qui est très intéressant, c'est que ses observations ou ses commentaires comme par exemple les fêtes de famille résonnent en chacun de nous. On a tous entendu nos parents, nos grands parents raconter des choses similaires.
Le détachement, voire le reniement des origines sociales dû à une élévation sociale, notamment par les études est très pertinent.
Au total, même si je n'ai pas l'âge d'Annie Ernaux, beaucoup de choses dites et d'analyses de nos comportements sociaux ont résonné dans ma tête.
Je vous conseille vivement ce petit opus surtout si vous ne connaissez pas cet auteur.
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« Ecrire une sorte de destin de femme, qui ferait ressentir le passage du temps en elle et hors d'elle, dans l'Histoire, un roman total. Ce sera un récit glissant, dévorant le présent au fur et à mesure jusqu'à la dernière image d'une vie »
Voilà le but que s'était fixé Annie Ernaux : écrire son autobiographie mais non centrée uniquement sur elle-même, plutôt une femme dans sa famille, dans la société, dans son pays, dans le monde. Son appréhension des choses. Pas de « je », mais « nous », « on ».
Elle participe au monde, et le monde rejaillit sur elle.


J'ai adoré ce type de narration qui m'entraine bien plus loin que moi-même.
Depuis l'après-guerre jusqu'à la première décennie des années 2000, Annie Ernaux cite des faits marquants, retrace l'humeur et l'état d'esprit de chaque génération, expose l'âme du temps.
J'ai l'impression que tout est recensé !
Evidemment, comme elle est française, elle fait référence aussi à la politique de son pays, mais nous les Belges y sommes habitués, donc ses fragments ne m'ont pas souvent déstabilisée.
J'ai retrouvé les préceptes d'éducation de ma grand-mère et de ma maman, et les miens aussi.
J'ai acquiescé devant son exposition de la transformation du monde.
J'ai souri devant son énumération des morceaux de musique, des titres de livres, des slogans publicitaires, des phrases toutes faites, des blagues éculées.
J'ai frémi au souvenir des faits-divers marquants.
J'ai souscrit à ses pensées féminines et féministes.


Deux éléments récurrents rythment le récit : les repas de famille et les photos d'Annie Ernaux, qui sont détaillés à chaque décennie environ, et on remarque ainsi le glissement des mentalités, de la préhension du monde. Ayant vécu plusieurs décennies depuis les années 60, je peux assurer que j'y adhère complètement !


« Sauver quelque chose du temps où l'on ne sera plus jamais » : c'est totalement réussi.
Ce livre m'a aidée à appréhender le temps qui passe et à opérer un retour sur moi-même, mon époque et celle de mes parents.
C'est un coup de coeur !
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Beau défilé de chroniques des années de la France d'après-guerre jusqu'aux années 2000 d'après des photos, des faits, des affiches.
Pour moi, un récit doit vibrer et non défiler froidement comme si tout se passait en dehors du narrateur.
Une société, c'est vrai que ça se décrit, ça se raconte mais il faut quelque chose d'humain : de l'humour, des sentiments, des liens.
Le petit je ne sais quoi qui fait que le lecteur se passionne.
Je suis très vite tombée dans l'ennui en lisant ce livre car il ne me rappelait rien que j'aie connu. Je suis sûre que l'ennui m'aurait été épargné si les personnages avaient été plus humains comme dans le livre "En vieillissant, les hommes pleurent" de Jean-Luc Seigle ou dans un autre livre d'Annie Ernaux "Une femme" qui raconte la vie de sa mère.
Cet ouvrage-ci a plus une portée sociologique et je ne peux m'empêcher de penser que la société était bien triste vue par Annie Ernaux.
Côté pilule, par exemple, en Belgique, nous avions des centres de planning familial . Pas besoin de la bénédiction des parents.
Je suis née en 1956 mais j'ai une vision plus dynamique, plus joyeuse, plus insouciante de notre jeunesse et je me dis que sa vision n'est pas à généraliser.
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De la grisaille au culte d'Apple
OU
des méfaits cognitifs de l'hédonisme.

Dans mes explorations des romans contemporains, j'ai rencontré le nom d'Annie Ernaux en lisant des critiques. Il y en a des volumes, sur Babelio. Pour me former une opinion, j'ai choisi le roman qui me semblait être le plus ambitieux, ou le mieux abouti: Les Années.

Dans son discours d'acceptation du Nobel, elle dit écrire pour venger les siens, des humbles, et les femmes, ses soeurs. Elle se veut aussi opposante à l'extrême droite. de tout cela, je n'ai pas retrouvé grand'chose de bien explicite ici. Il s'agit plutôt d'une exploration chronologique de sa vie, dans le contexte où elle l'a vécue. Un récit ethnographique, en quelque sorte. Écrit dans ce style qu'elle justifie par la pudeur, ne voulant ni des larmes ni des ricanements de ses lecteurs, surtout s'ils sont riches.

J'ai eu l'impression d'assister à la projection d'un film, ou d'entreprendre un voyage en train. Les paysages changent, mais chaque paysage a ses maisons, ses prés, ses forêts et ses cours d'eau. L'enfance, l'adolescence, les années d'étude … passent la revue. Et chaque période est accompagnée de nouveaux mots, de marques, de modes, d'activités, de passions, d'événements petits et grands, de la première voiture à l'élection présidentielle ou à la chute du Mur. Ainsi passent les années puis les décennies : trois p'tits tours et puis s'en vont.

Il y a donc de tout dans ce récit. de tout, sauf de projet de vie, mis à part l'envie, sans cesse remise, d'écrire ce roman.. L'engagement politique, tant vanté, se limite à des sympathies, peut-être à un bulletin de vote, et au souvenir de lectures de jeunesse. Pas de philosophie ni d'idéologie, plutôt un hédonisme plat, matérialiste et franchement assumé ( c'est déjà ca). L'écriture serait quête spirituelle, mais elle aboutit à une énumération. L'auteur affirme avoir tellement changé au fil des ans qu'elle n'y voit pas vraiment de continuité personnelle. D'où peut-être le besoin de mettre les choses à plat et d'écrire cette énumération. Pour voir ce qu'il en ressort.

Je crois que là, justement, réside la force de ce roman. Il peint un portrait, que l'on pourrait sans doute qualifier de “naturaliste” ou “ minimaliste” de tout ou partie d'une génération. Celle dont je fais juste encore partie . Bien que venant de contextes différents,aussi sur les plans politiques et philosophiques, je me souviens moi aussi du monde gris de mon enfance. La télévision noir et blanc. La radio qui serinait vingt fois par jour la même chanson. Les convenances. Les questions qu'il ne fallait pas poser, les choses dont on ne pouvait pas parler. Les hypocrisies. La routine. L'ennui. Quand j'ai eu seize ans, j'ai regardé autour de moi, j'ai vu mes copains, leurs mobylettes, leur flipper, leurs parents, leurs trois-pièces-cuisine. Mon prof. d'histoire, qui se disait anarcho-syndicaliste mais vivait en petit-bourgeois, qui avait un vague DEUG mais se prenait pour un intellectuel. Je me suis dit : je ne veux pas être comme eux. Cette vie là, je n'en veux pas. Moi, je ferai quelque chose de ma vie. Je veux être quelqu'un. Je ne sais pas si j'ai réussi mieux que les autres. Mon “moi” de seize ans me jugerait sans doute sévèrement. Je lui dirais que c'est un petit con et qu'il la ferme. Mais je me dirais aussi que si nous avons déconstruit un monde de conventions et de grisaille, nous n'avons pas mis grand chose de valable à la place. Un terrain vague, avec un hypermarché au milieu. le culte d'Apple. Quelle bêtise ! C'est cela, ce que montre ce roman. C'est là sa force. Et c'est pourquoi je crois que ce livre devait être écrit.




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"Avec le temps, on oublie le visage et l'on oublie la voix" chantait Léo Ferré.
Et le temps, il en est question dans cet ouvrage, où Annie Ernaux décrit une douzaine de photos où elle apparaît à différentes époques de sa vie, dressant peu à peu le portrait d'une femme et d'un écrivain, mais établissant aussi une radioscopie de la France contemporaine. Et c'est fascinant.

Lire Annie Ernaux place toujours le lecteur dans une position de voyeur, même si la vie qu'elle raconte -la sienne- a une résonance universelle. En parlant d'elle, elle parle de toutes les femmes, de leurs élans et de leurs contraintes. Mais bien que narré d'un point de vue féminin, son récit ne s'adresse pas qu'aux femmes, et sans sombrer dans un féminisme virulent, il souligne juste la complication d'être une femme (lecteurs masculins, soyez donc les bienvenus !).
Toutefois, il ne s'agit pas non plus d'une véritable autobiographie -d'ailleurs, Annie Ernaux n'utilise jamais le "je", préférant le "elle" ou le "nous". C'est plutôt une étude sociologique de la France de 1941 à 2006, dans laquelle elle s'inscrit en personnage principal. Au fil des années, et notamment autour des repas de fête en famille, on perçoit l'évolution de la société française. J'ai beaucoup aimé cette façon de chroniquer 65 ans de notre Histoire, de l'après-guerre à l'élection de Sarkozy, avec une multitude de repères politiques, culturels, technologiques et publicitaires. J'ai beaucoup apprécié son analyse de notre rapport au progrès et à la consommation.
Mais ce livre est aussi, et surtout, une réflexion sur le temps qui passe et qui emporte tout, jusqu'au souvenir des souvenirs, qui pose la question de ce qui restera de nous après notre passage sur cette planète, et qui interroge sur la façon d'appréhender le temps qui nous reste. Ce n'est pas la partie la plus gaie de cet ouvrage.
Enfin, l'écriture est toujours "plate" et "froide", mais elle se prête parfaitement bien à la distanciation qu'Annie Ernaux souhaite instaurer avec ce qu'elle relate. Chaque mot est réfléchi et pesé avec précision, mais ça ne m'a pas empêchée d'être émue lorsque l'auteur évoque son chat.

J'ai donc beaucoup aimé cet ouvrage inclassable, court mais dense, qui ne peut laisser indifférent. J'ai aimé cette mise à nu, cet autoportrait en femme seule et forte, avec en toile de fond un monde qui tourne de plus en plus vite.
Alors, "avec le temps, on n'aime plus" ? Pas toujours, et surtout pas lorsque l'on écrit un témoignage aussi intelligent sur une tranche d'Histoire de France ; et je me sens prête à admirer et aimer Annie Ernaux pendant des années encore.
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Les années est un recueil de phrases ciselées décortiquant la mémoire, essayant de comprendre les liens entre souvenirs et identité, d'encapsuler la société française d'hier, bien loin de l'écriture "plate" d'Annie Ernaux – ainsi qu'elle-même caractérise son style. Sorte de biographie discrète, ce livre parvient à fondre l'existence individuelle au sein de l'existence collective, cette sorte de vague qui emporta chacune (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2022/11/08/les-annees-annie-ernaux/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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C'est une forme originale et étonnante d'autobiographie que nous propose Annie Ernaux.
Sur la forme d'abord :
- Une autobiographie où "elle", "on" et un "nous" impersonnel remplacent le "je". L'auteur se raconte comme elle conterait la vie d'une copine, ou d'un groupe de copains. On ne peut douter de la véracité du contenu, mais elle y met beaucoup de distance et de recul, qui cachent sans doute une grande pudeur.
- Une autobiographie rythmée par des photos ou des extraits de film, prétextes à analyser l'évolution physique de l'auteurs et l'impact personnel et sociétal du vieillissement.
- Une autobiographie continue, sans découpage en chapitres ou parties thématiques ou temporelles, qui se déroule inexorablement, comme le temps qui s'écoule.

Sur le fond ensuite : l'auteure nous propose tout autant une réflexion sur le temps qui passe et l'évolution de la société des années 1940 au début du 21ème siècle qu'une véritable biographie. Quand on tourne la dernière page, on a le sentiment d'en savoir plus sur l'environnement familial, social et sociétal dans lequel elle a vécu que sur Annie Ernaux elle-même, un peu comme si elle se caractérisait plus au travers de ses interactions avec les autres que par elle-même...

Le résultat est étonnant et intéressant, tant sur la forme que sur le regard porté sur la seconde moitié du 20ème siècle et le début de 21ème, même si on en apprend finalement assez peu sur ce qu'a fait l'auteure au cours de ces années.
Lien : http://michelgiraud.fr/2020/..
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« Toutes les images disparaîtront », avertit Annie Ernaux en incipit. Vrai ! Sans compter, au fur et à mesure que j'avance en âge, celles dont je suis la seule à me souvenir, parce que des personnes sont mortes et d'autres ont été perdues de vue.
L'autrice construit son livre à partir de photos. La première, sans doute de 1941, montre un bébé coiffé avec un rouleau sur la tête, il est à moitié nu sur un coussin ; avez-vous eu sous les yeux ce genre de photos, de vous-même ou de vos parents ou grands-parents ? Elles correspondent à une époque, tout comme les photos suivantes. L'une d'elles montre une petite fille aux cheveux courts et au ventre proéminent. En cette année 1944, était-elle atteinte de rachitisme ? Des temps oubliés de la narratrice, mais pas de sa famille.
Pas étonnant, donc, que le livre embraye sur les repas de famille et le grand sujet évoqué, cette guerre encore si proche.

Des images fortes, pleines d'émotion pour ceux qui l'ont vécu, ce qui est mon cas pour certains souvenirs, mais pour ceux qui ne l'ont pas vécu ? C'était il y a 80 ans. Viennent d'autres repas de famille, il y a soixante ans, quarante ans, puis vingt.

Lien : https://dequoilire.com/les-a..
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