C'est un pays où toutes les habitantes et habitants connaissent au moins un poème. Un pays où les poèmes sont des choses vivantes, les poètes célébrés. Un pays où la poésie est vénérée.
On se dit que ça doit être un endroit formidable. Et pourtant…
C'est un pays où on obtient le divorce uniquement parce que sa femme écrit son désir:
« je te désire mais jamais je le sais
Contre toi je ne me blottirai
Toi vaste ciel éclatant
Moi dans sa cage oiseau captif »
Un pays où plaisir et péché sont synonymes:
« J'ai péché un péché lourd de plaisir
Dans une étreinte ardente incandescente
J'ai péché dans des bras
D'acier brûlants et triomphants
En un lieu écarté sombre et silencieux
J'ai regardé ses yeux où tremblait un mystère
Mon coeur fébrile a frémi dans ma poitrine
À sentir le désir de ses yeux où tremblait une soif »
C'est un pays où il n'est pas permis d'être poétesse. Pas permis d'être une femme libre. Pas permis non plus d'être femme …
« Cet être marqué au fer du déshonneur, qui se riait
Des sarcasmes absurdes, c'est moi
Je disais « je veux être le cri de ma propre existence »
Hélas ! hélas ! femme je suis »
C'est un pays où on assassine les jeunes femmes parce qu'elles portent des vêtements inappropriés.
Je dis son nom : Mahsa Amini.
Je dis son nom : Mahsa Amini
Mahsa Amini.
Alors à la mémoire de Mahsa Amini je cite
Forough Farrokhzad:
« Je boirai de tout mon être assoiffé
Le sang brûlant de tes instants
Je jouirai si fort de toi
Que ton dieu sera fou de rage ! ».