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EAN : 9782070762255
182 pages
Gallimard (30/11/-1)
3.93/5   14 notes
Résumé :

Toi qui marches, qui ne veux pas voir descends, descends toujours jusqu'aux royaumes de l'infertile là tout un peuple bouge, ombres des pères que les fils bafouent, reines qui dansent dans leur délire et loin, très loin sur une falaise un homme qui regarde la mer et qui murmure, montagnes de l'écume, rendez-la-moi.

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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Je reviens toujours avec intérêt vers la poésie de Claude Esteban. Dans le Jour à peine écrit et La Mort à distance, j'avais découvert une écriture tout en sensibilité.

Dans Morceaux de ciel, Presque rien, je retrouve la marque chez lui d'une inquiétude placée sous le signe du tourment, de la mort, la recherche d'un accord entre les mots et la matière éparse du monde sensible.
La forme des poèmes contenus dans le recueil révèle une parole disjointe, divisée par des distiques par lesquels le poète tente de maintenir une unité dans une intériorité quelque peu décomposée.
Dans son écriture Claude Esteban immobilise la forme pour faire se révéler l'ombre d'un sentiment douloureux de division, une sorte d'impression de vivre en exil qui se déverse dans le langage.


« Je n'avais rien vu, rien
voulu découvrir, ni le soir quand il vient

avec ses vagues de tendresse, ni le matin
comme un fruit dans l'arbre

et j'ai vécu longtemps, les yeux
ouverts, l'âme aveugle

quelle douleur dans la chair du monde, je n'ai
rien su, ce soir

devant celle qui ne respire plus
je pleure

et mes larmes sont douces
et me délivrent. »


Dans ses poèmes, un personnage jamais nommé prend la parole et s'adresse à un autre, absent ou disparu. Réemprunter au souvenir des morceaux de ciel, de presque rien, glaner dans la solitude, la maladie ou la mort, ce qui raccroche au sens de la vie, à cette respiration, à ce geste, à ce regard de l'autre qui maintient, autant que la vue d'un paysage, l'être dans son espace sensible.


« Et le jour devenait tout bleu
comme dans les fables

seul un enfant pouvait marcher
sur l'ombre du soleil

les mots pour chaque chose
étaient pareils

mais ils avaient sur la langue
un goût de miel et de feuilles d'arbre

on s'endormait,
on avait presque tout fini de son travail

on se réveillerait
peut-être. »


Chez Claude Esteban, il y a toujours quelque chose de délié qui semble être revenu de la nuit, de la douleur de l'absence. Il y a chez lui encore, une obstination à dire, une tentative d'unifier par les mots, de maintenir par leur reflet le tragique de la vie, la lucidité au travers de la poésie.


« Vous mes amis,
mes endormis,
j'avais tant de choses à vous dire

le ciel est noir,
tout mon savoir
s'est noyé comme chaque soir dans le délire

mes beaux amis,
dormez parmi
les infortunes du monde

je veillerai
j'arracherai
vos soleils aux cavernes profondes. »

.
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Quand on aime on ne compte pas...J'ai découvert Esteban il y a peu et je le lirai jusqu'à la lie tant il me parle et m'enchante. J'aurais aimé tout citer, partager toutes les émotions qui m'animaient à la lecture de ce recueil. Mais comment les dire? le mieux n'est-il pas de les vivre à votre tour, d'entrer dans l'intime du poète et d'y mêler vos propres émotions ?
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Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
Reposez-vous, mes souvenirs, mes jours, mes paysages, rien ne bouge

et quelque chose a changé, c'est peut-être
la couleur d'une écorce ou

le chant quelque part
d'un oiseau, ne cherchez pas, laissez

en vous que la nuit s'accumule et qu'il y ait
tout cet espace sur la page

et qu'il reste, qui sait, juste
un mot.


(extrait de " III. Morceaux de ciel, presque rien " - p. 130).

.
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On s'est donné le temps, on s'est
perdus, on a poursuivi

le soleil, on s'est endormis tant de fois
sur un lit de paille,

maintenant, comme il est frais
le souvenir du vent

on dirait que la pluie fait un long
silence

et c'est comme si dans le soir
des dieux naissaient

mais si petits
que les oiseaux les picorent comme des graines.
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Et peut-être que tout était écrit dans le livre
mais le livre s’est perdu

ou quelqu’un l’a jeté dans les ronces
sans le lire

n’importe, ce qui fut écrit
demeure, même

obscur, un autre qui n’a pas vécu
tout cela

et sans connaître la langue du livre, comprendra
chaque mot

et quand il aura lu, quelque chose
de nous se lèvera

un souffle, une sorte de sourire entre les pierres.
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A la même heure du soir un mot
s'efface, un

autre et c'est chaque soir comme un peu
de moi qui meurt

car il suffit
qu'une chose n'ait plus de nom

pour que toute la phrase du monde
se défasse
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Ce soir, même une feuille

qui bouge

fait trop de bruit.

Au premier mot

j’ai compris que je faisais fausse route

dans ma bouche

Ni l’équerre ni le compas

n’ont pu mesurer

un arbre.

N’ajoute pas de la poussière

à la poussière

laisse devant la chambre tes souliers.

peut-être qu’on respire encore

sous les racines

et que le ciel oublie

Quelqu’un crie

que tout est noir, mais c’est dans sa tête

qu’il se cogne

Dans la mémoire des autres

nos blessures

guérissent toujours

J’ai compté sept gouttes de pluie

sur un pétale

sept bonnes pensées

Je porterai

le temps sur l’épaule

pour marcher mieux

la lumière qu’on cherchait

ensemble

n’est plus jamais revenue

À moi, rien qu’à moi

je ne partage avec personne

querelle de moineaux

ce papillon je l’ai vu

dans un autre rêve

il y a mille ans

À ne désaltérer que l’absolu

l’eau

devient sèche

Il se trompe le soleil

il écrit chaque jour

de droite à gauche

Et sur le mur

cette ombre

qui n’appartient à personne

Cette rumeur, c’est peut-être

une étoile

tombée dans l’herbe

Au temps de l’encrier

même les mots

avaient une odeur violette

Avant de quitter le jardin

il embrassa

l’écorce d’un saule
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Videos de Claude Esteban (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Claude Esteban
« […] « La poésie est parole dans le temps », Machado (1875-1939) n'a pas cessé de l'affirmer. Encore fallait-il que le temps ne se résumât pas à la pression immobile du passé sur la circonstance, ni la parole au simple ressassement de l'irrémédiable. Certes Machado […] a éprouvé une manière d'attirance étrange devant la négativité et la noirceur du destin de l'Espagne. Il ne s'y est point abandonné. Ou plutôt, avec une véhémence souvent proche du désespoir, une tendresse mêlée de répulsion et de haine, il a tenté, longuement, d'en sonder les abîmes. […] La poésie - Machado, seul de sa génération, s'en persuade - n'a plus pour tâche de répertorier pieusement les ruines ; elle se doit d'inventer le futur, cette dimension héroïque de la durée que les Espagnols ont désappris dans leur coeur, dans leur chair, dans leur langue depuis les siècles révolus de la Reconquête. […] […] Nostalgique de l'Inaltérable, à la poursuite du mouvant… Par son inachèvement même, dans son échec à s'identifier à l'Autre, la poésie d'Antonio Machado atteste, et plus fortement que certaines oeuvres mieux accomplies, la permanence et la précarité d'un chemin. Hantée par le néant, elle se refuse au constat de l'accord impossible. Prisonnière du doute et de la dispersion, elle prononce les mots d'une reconnaissance. Elle déclare la tâche indéfinie de l'homme, la même soif à partager. » (Claude Esteban.)
« […] “À combien estimez-vous ce que vous offrez en échange de notre sympathie et de nos éloges ? » Je répondrai brièvement. En valeur absolue, mon oeuvre doit en avoir bien peu, en admettant qu'elle en ait ; mais je crois - et c'est en cela que consiste sa valeur relative - avoir contribué avec elle, et en même temps que d'autres poètes de ma génération, à l'émondage de branches superflues dans l'arbre de la lyrique espagnole, et avoir travaillé avec un amour sincère pour de futurs et plus robustes printemps. » (Antonio Machado, Pour « Pages choisies », Baeza, 20 avril 1917.)
« Mystérieux, silencieux, sans cesse il allait et venait. Son regard était si profond qu'on le pouvait à peine voir. Quand il parlait, il avait un accent timide et hautain. Et l'on voyait presque toujours brûler le feu de ses pensées. Il était lumineux, profond, car il était de bonne foi. Il aurait pu être berger de mille lions et d'agneaux à la fois. Il eût gouverné les tempêtes ou porté un rayon de miel. Il chantait en des vers profonds, dont il possédait le secret, les merveilles de la vie ou de l'amour ou du plaisir. Monté sur un Pégase étrange il partit un jour en quête d'impossible. Je prie mes dieux pour Antonio, qu'ils le gardent toujours. Amen. » (Rubén Darío, Oraison pour Antonio Machado)
0:00 - Titre 0:06 - Solitudes, VI 3:52 - du chemin, XXII 4:38 - Chanson, XLI 5:39 - Humour, fantaisies, notes, LIX 7:06 - Galeries, LXXVIII 7:54 - Varia, XCV, Couplets mondains 9:38 - Champs de Castille, CXXXVI, Proverbes et chansons, XXIX 10:14 - Champs de Castille, idem, XLIII 10:29 - Prologues. Art poétique. Pour « Champs de Castille » 12:17 - Générique
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