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3,7

sur 215 notes
A peine La Tentation de Saint Antoine refermée, j'ai envie de lui consacrer une petite chronique tant ce livre m'a touchée. Bien que ma contribution soit, comme d'habitude, modeste, je vais tâcher de vous donner l'envie de découvrir ce "délaissé" de la bibliographie de Flaubert.

En premier lieu, le genre dans lequel classifier cet ouvrage est indéfinissable. L'on pourrait facilement penser à une pièce de théâtre tant la construction du récit en est similaire mais certains passages sortent du cadre du théâtre donc cette oeuvre est un ovni rien que dans sa présentation, c'est un peu un électron libre de la littérature du XIXème.

L'histoire est basée autour du personnage de Saint Antoine, qui pour communier avec le Seigneur, vit en hermite dans le désert égyptien. Tressant des nattes et subissant volontairement les privations de toutes sortes pour se préserver des péchés que peut offrir une vie normale, Antoine reste néanmoins un être humain et va connaître une sorte de crise de foi. Tiraillé entre le bien et le mal, victime d'hallucinations, son périple mental va le conduire dans des situations mettant à l'épreuve ses croyances les plus tenaces...

La Tentation de Saint Antoine c'est avant tout l'image d'un homme en proie aux tourments de ses propres démons, a travers ce personnage d'Antoine l'on pourrait penser que Flaubert à transposé certains de ses sentiments sur son vécu dans le voyage délirant de son personnage principal. le côté "torturé" est omniprésent dans les passages ou Antoine, guidé par Hilarion (qui m'a un peu fait penser au Virgile de la Divine Comédie), voit une facette des religions polythéistes qu'il n'aurait jamais imaginée et ne veux pas voir, conforté par l'apparente perfection de sa doctrine chrétienne. Les diverses divinités et personnalités importantes qui sont mises sur la route d'Antoine ne font qu'émousser le début d'agonie de cette foi déjà si fragile, confronté à sa dualité d'homme qui en a trop vu et en même temps pas assez . C'est aussi le récit d'une solitude, quand le mental prend le pas sur la volonté et met les résistances à l'épreuve comme un volcan endormi depuis trop longtemps et prêt à exploser...

Quand Flaubert affirme que La Tentation de Saint Antoine est l'oeuvre de sa vie, je veux bien le croire. Vingt-cinq ans n'ont pas été de trop pour élaborer cette oeuvre hors du commun, très loin de ce que l'on croyait connaître de cet auteur. le degré d'érudition du récit est flagrant et Monsieur Flaubert met la barre très haut. L'on retrouve quand même certains points qui font le charme de ses ouvrages comme les descriptions parfois longues (sauf qu'ici elles sont dans le style didascalies) et l'aspect psychologique des personnages passé au peigne fin. Dans certains passages, j'ai trouvé quelques légères ressemblances avec Salammbô, dans les descriptions de l'Orient et la violence de quelques faits.
Hormis ceci, ce livre est un comme un boulet de canon, ça passera ou ça cassera, mais il contient ses propres richesses et n'a rien à envier aux autres classiques. C'est comme si il m'avait emmenée dans une exploration du cerveau humain, de plus ne vous fiez pas au format du livre (moi j'ai l'édition Folio) car sur les cinq cent pages, une bonne moitié est consacrée à la préface et aux notes, le récit est donc assez court mais c'est un bijou donc si le coeur vous en dit, n'hésitez pas à découvrir cette petite perle du grand Gustave. A lire!
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Je croyais qu'il fallait lire La Tentation de saint Antoine de la même manière que les autres livres de Flaubert, à vrai dire, je m'étais plantée pour la première fois. Il m'a fallu évidemment, pour la deuxième tentative, chercher à le lire sous un autre registre, et j'avoue que ce n'était pas facile... puis, quel voyage! Profondément hermétique, mystico-ésotérique, philosopho-religieux, je ne sais pas comment qualifier ce livre, c'est tout attrait à l'esprit et à la vie spirituelle. C'est vrai que Flaubert s'est montré un fin érudit avec ce livre, je crois qu'il lui a fallu également entreprendre un voyage un peu fou avec son esprit pour pouvoir nous produire une telle œuvre initiatique! Déjà, moi, lectrice, j'ai eu pas mal d'étourdissement pour essayer de décrypter toutes ces images anagogiques qui n'arrêtaient pas de foisonner au fils des pages. Si l'arrivée de Jésus-Christ sur cette terre a bouleversé le monde physique et son histoire, mais Flaubert nous fait comprendre ici que cet homme nommé Christ a aussi bouleversé le monde spirituel... Un livre que je ne dirais pas beau mais grand!
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Oeuvre baroque, bizarre, dérangeante, La Tentation de Saint-Antoine est une grande fresque de panthéons dont les divinités et les prophètes se succèdent à un rythme très soutenu dans un grand défilé et vont se perdre dans l'oubli de la nuit des temps, comme des animaux se rendant à l'abattoir. Beaucoup de religions sont ici passées en revue et les dieux prennent la parole : les panthéons grec, égyptien, hébreux,… ainsi que des personnages légendaires comme la Reine de Saba ; tous des illusions, dont le diable tire les ficelles, venant tenter et apitoyer Antoine au cours d'une même nuit éprouvante.

Le personnage de Saint-Antoine, ermite retiré dans le désert égyptien et vivant dans le dénuement le plus complet, est malmené, terrassé, écartelé et broyé par ces visions d'une fantasmagorie de figures mythologiques qui défilent à la tribune pour déblatérer sur le monde et l'anéantissement du culte que les hommes avaient placé en eux. C'est un spectacle complètement foutraque et désarticulé. Bien sûr, il s'agit là d'une hallucination.

Le travail de documentation faramineux qu'a dû entreprendre Flaubert n'est pas à la hauteur de l'effet que je trouve franchement raté. Cet immense effort d'érudition ne passionne que lui et lasse, ennuie dans sa vision presque totalitaire de l'art ; j'ai l'impression d'une quête mystico-religieuse qui débouche sur la mise en scène d'une synthèse d'un cours d'histoire des religions plutôt que sur une oeuvre de littérature. La recherche et l'exactitude documentaires semblent pour lui plus importantes que le livre qu'il a voulu en tirer.

L'effet hallucinatoire est réussi au-delà de la mesure. Flaubert a cette fois voulu fixer toute une mosaïque de mirages. L'histoire est cependant dépaysante. le dialogue avec le diable, à forte tonalité métaphysique, est parmi les plus forts de ce livre. On retrouve bien entendu Flaubert dans cet érémitisme : il est Antoine.

Cette tentation folle, fatigante, soûlante n'est (heureusement !) pas trop longue. Ce livre ressemble plus à une purge, la catharsis d'un homme désenchanté et en proie aux pires angoisses en quête du Beau absolu, de la transcendance libératrice ; d'un athée mystique qui conçoit l'art comme la seule chose pouvant lui apporter le salut.
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Je regrette parfois d'avoir lu les grands classiques de la littérature française à un âge où je ne pouvais pas en mesurer ni tout le sens ni toute la portée. Et c'est précisément ce que je ressens pour La tentation de Saint-Antoine. Lue dans le cadre de mes études de lettres modernes, j'ai reçu un éclairage sur l'oeuvre assez général et bref dans la mesure où il ne s'agissait pas d'une oeuvre étudiée mais d'une lecture cursive destinée à enrichir la bibliothèque intérieure et personnelle de l'étudiante que j'étais.
Voilà donc mon premier regret lequel m'incite à reprendre la lecture des oeuvres majeures que je n'ai peut-être pas eu la possibilité d'assimiler véritablement à 20 ans.
Je vais donc m'appuyer sur les résurgences de cette lecture, sur mes impressions et sur mes souvenirs, à l'instar du Saint-Antoine de Flaubert qui se trouve assailli par les eaux troubles de son passé à travers lesquelles il cherche le sens de sa vie et, plus largement, de la vie.
Comme chacun des romans de Flaubert, celui-ci m'a marquée par sa puissance et son foisonnement. L'auteur s'inspire, à l'instar d'un grand nombre d'artistes, de l'histoire du saint Antoine le Grand qui se retrouve en proie à ses démons et aux assauts du Diable alors qu'il se trouve dans le désert en Egypte.
Chez Flaubert, il est assailli par des visions qui le soumettent à la tentation : des images de luxure, de volupté, excitant ses sens dans le but de le voir céder. La vision suivante est celle de son disciple qui va tenter de pointer du doigt toutes les incohérences de la religion à laquelle il est entièrement dévoué. Ses croyances sont mises à mal et toutes ses certitudes subissent les assauts démoniaques destinés à l'éloigner de la foi. Enfin, la dernière vision est celle de Sciences. Cette fois, le Diable tente d'opposer la science à la religion chrétienne afin de convaincre et de persuader Saint-Antoine de la vacuité de son existence.
Ces visions mystiques sont un prétexte au dialogue, à la quête du sens et à la mise à l'épreuve théâtralisée du Saint.
Les lecteurs de salammbô retrouveront l'orientalisme foisonnant cher à Flaubert, dans un décor antique onirique.
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Il y a un plaisir particulier à lire Flaubert. Chaque oeuvre, bien que marquée par la beauté de son style, est source de nouveautés et de surprises. le recueil "Trois Contes" en est un bon exemple. Certes, on pourrait rapprocher chaque récit aux romans de Flaubert, comme l'exprime bien Colinette26 (voir les autres critiques du recueil), mais il s'agit dans le cas présent d'histoires courtes, composées d'une manière toute différente des longs romans antérieurs. Flaubert montre ainsi tout son génie dans la nouvelle. Peut-être s'essaya-t-il à ce genre pour se délasser de ses impasses dans l'écriture de "Bouvard et Pécuchet" ?
Le plaisir vient du rapprochement de trois récits d'apparences bien distinctes, entre une nouvelle réaliste ancrée dans la contemporanéité de l'auteur, une légende médiévale merveilleuse et un récit biblique. Rien ne semble les réunir. On pourrait penser que ce recueil ne répond qu'aux envies et aux idées successives de l'auteur. Pourtant il y a bien une sorte de fil conducteur. C'est le drame de l'excès, l'inévitable danger d'un engagement total. Que ce soit vers la voie de la bonté ou, à son opposé, vers la cruauté, chaque personnage exprime ce travers : Félicité (quelle ironie !) victime de sa bêtise et de sa simplicité, saint Julien de son obsession pour la chasse et la mort, enfin, Hérode et saint Jean-Baptiste, le premier victime de ses promesses emportées, le second de son fanatisme. Ces excès, tels des chemins vers la folie, ne devaient pas être étrangers à Flaubert, connaissant ses insurmontables exigences en matière de création artistique.
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Nous partageons avec St Antoine des visions de cauchemar et des souffrances dont tout martyr doit se réjouir. Les souffrances, supplices et mortificatons ne sont-elles pas le plus court chemin vers la félicité éternelle ?

Les descriptions de scènes baroques et délirantes, les grotesques querelles entre idolatres, vrais et faux croyants, tous animés de fureur intégriste, les dialogues du Saint avec le Diable, les argumentaires spécieux des docteurs de la Foi (oui, mais laquelle ? ) chacun proclamant détenir la Vérité, voilà bien de quoi dérouter-et dégoûter- celui qui s'attend à trouver des réponses à ses interrogations spirituelles.

Antoine l'Égyptien a vécu au IV è siècle et lança la mode du monachisme, qui connut un grand succès au cours des époques chrétiennes. Ses reliques furent vénérées et une très belle abbaye fut bâtie dans le Dauphiné pour accueillir les pèlerins et malades souffrant "du mal des Ardents'. Les bons moines les soignaient avec moult prières et quelques potions et onguents.
Après une visite de l'abbaye, des musées et jardins, passez faire un tour à la librairie, riche en ouvrages historiques, litteraires, recettes de philtres et de breuvages d'herbes médicinales.
Un délicieux remède à la solastalgie.
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Ces trois contes, à l'inverse de Madame Bovary, ont été un plaisir à lire!
L'écriture est magnifique, et d'ailleurs, c'est ce qui m'a marqué dans cette oeuvre.
J'aime beaucoup les histoires qui y sont raconté, avec une préférence pour Hérodias. Pour me plonger dans la lecture, il m'a vraiment fallu rentrer dans le contexte historique, et relire les contes une seconde fois, sans prêter attention aux annotations.
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Cette "Tentation de Saint Antoine" est totalement surprenante et assez inattendue pour ceux, comme moi, qui ne connaissent pas bien l'oeuvre de Flaubert. Je classe cette oeuvre dans le roman, mais seulement par défaut, car je ne saurais pas dire à quel genre elle pourrait s'apparenter. Il y a du théâtre, car sa structure se compose de sortes de didascalies posant le cadre des événements suivies des paroles des personnages précédées de leur nom. Mais il ne s'agit pas vraiment de théâtre…
Alors qu'est-ce que c'est que cet ovni dix-neuviémiste ?
Peut-être une longue énumération, une suite interminable de tableaux et de personnages, féeriques, fantastiques, monstrueux et étranges, respectivement parcourus et rencontrés par Saint Antoine, cet ascète qui fit le choix de se retirer dans le désert égyptien pour se protéger de toutes les tentations matérielles offertes par la société de son temps. Un ascète confronté à des hallucinations, plaçant ce fidèle serviteur de l'Eglise chrétienne naissante en face de ses doutes et de ses contradictions dogmatiques.
Cette peinture flamboyante des multiples sectes, croyances et religions qui se sont affrontées, se sont confrontées ou même ont cohabitées au cours du premier millénaire permet au lecteur de se rendre compte que chaque Eglise s'appuie sur des principes et des dogmes communs, usant de méthodes similaires. La prétention de chacune à vouloir affirmer sa Vérité apparaît alors bien puérile et vaine, on pourrait aussi dire mensongère et autoritaire.
Mais finalement, les Eglises ne se réduisent-elles pas à des sortes de petits Etats totalitaires ?
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Une nouvelle étrange, presque une fable qui, dans son caractère mythique à une résonance sacrément moderne, mettant en scène l'hubris humaine. Je l'ai lue dans une édition présentant également "Un coeur simple", cruel et poignant récit réaliste où la parenté avec "Une vie" du disciple Maupassant est évidente. de "La tentation de Saint-Antoine" à "Un coeur simple", on a l'arc du génie de Flaubert.
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Je dois avouer que je n'ai pas du tout accrocher à ces histoires. Pourtant, d'habitude j'adore les oeuvres de Gustave Flaubert, mais cette fois-ci je suis passé à travers peut-être. Probablement à redécouvrir beaucoup plus tard avec un oeil neuf, Flaubert mérite bien une seconde chance. :)
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