Pour me changer les idées et fuir l'ambiance morose du moment, j'ai fait un retour dans le passé pour me retrouver... en pleine épidémie de choléra, celle qui a débuté en mars 1832 à Paris. J'y ai suivi le séduisant journaliste Romain Berthier, chargé par son patron de mener l'enquête sur les hauteurs insalubres de Montfaucon, là où plane encore l'ombre des fourches du gibet. Cela aurait arrangé beaucoup de monde de trouver l'origine du mal dans ce lieu malsain, réceptacle de tous les immondices de Paris. Mais aucune victime n'y est à déplorer et ceux qui pensaient que leurs richesses les protégeraient de la maladie doivent déchanter. Côtoyer quotidiennement la fange agirait-il comme un vaccin ?
C'est une visite peu ragoutante, mais ô combien enrichissante que nous propose
Denise François, auteure éphémère qui n'a pas laissé beaucoup de traces sur internet. A Montfaucon, le point commun de cette population hétéroclite faite de chiffonniers, d'équarrisseurs, d'ouvriers dans les mines de chaux et de vidangeurs, c'est la pauvreté, mais aussi la débrouillardise, la solidarité et la gaité qu'ils partagent à
l'Auberge du Grand Balcon où ils aiment se retrouver, pendant que les bourgeois du centre-bourg comptent leurs morts.
J'ai beaucoup aimé ce livre qui mêle
L Histoire et la romance. Si on fait abstraction des multiples coquilles qui se sont glissées dans le texte, l'écriture est agréable et l'auteure nous fait découvrir tout un pan de l'histoire de Paris et de la société de l'époque. A côté des jeux politiques entre royalistes, républicains et bonapartistes, on assiste aux débuts du saint-simonisme ainsi qu'à la prise de conscience de l'insalubrité de la ville. Certaines décisions d'urbanisation provoqueront des émeutes, car beaucoup des habitants des quartiers pauvres trouvent de quoi survivre dans les immondices abandonnés au coin des rues des beaux quartiers. Dommage que l'inconstance du personnage principal, Romain Berthier ne le rende pas sympathique. C'est un séducteur-né partagé entre le désir d'obtenir par le mariage une position solide dans la société et la liberté de butiner les filles-fleurs (parfois très, très jeunes) de Montfaucon.
J'ai beaucoup appris avec cette lecture à laquelle j'accorde un 15/20 et je me suis aperçu que presque deux siècles plus tard, rien n'avait changé. Les remèdes farfelus proposés et les tergiversations des responsables politiques face à une épidémie inconnue sont identiques...