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EAN : 9782757896433
512 pages
Points (01/09/2023)
3.95/5   22 notes
Résumé :
Longtemps, les femmes n'ont été que des corps, définies par leurs fonctions sexuelle et maternelle. La révolution féministe les a délivrées de ce carcan, mais elle a aussi dévalorisé le corps féminin. N'est-il pas pourtant le nœud singulier de notre rapport à nous-même et au monde ? À partir d'une relecture de Simone de Beauvoir, la philosophe Camille Froidevaux-Metterie propose de le saisir sous ses deux aspects : lieu de la domination masculine et vecteur d'une pl... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Pendant des années, il ne faisait pas bon se dire féministe. Car c'aurait signifié pour beaucoup qu'on vouait une haine éternelle à la gent masculine et qu'on avait jeté sa lingerie au feu. Camille Froidevaux-Metterie revient rapidement, et pas de manière aussi imagée toutefois, sur l'histoire du féminisme en France, à ces années 70 où les discours d'obédience marxiste dénoncent l'exploitation des femmes comme un des avatars du système de production et de reproduction patriarcale tandis qu'une veine essentialiste installait la féminité dans une dimension sacrée qui la valorisait autant qu'elle l'enfermait. Pour dépasser ces définitions contradictoires du féminisme, proposer une voie qui fasse place aux revendications intersectionnelles, aux dénonciations des vagues metoo et aux questions de genre, l'auteure propose de se placer du point de vue phénoménologique. Elle s'inscrit pour cela dans la lignée de Simone de Beauvoir et derrière elle, de Merleau-Ponty.
En postulant que toute notre existence physique, affective, psychique, relationnelle n'est envisageable qu'avec nos sensations pour origine, que tout est expérience sensorielle et que c'est de notre perception du monde que jaillit notre identité, ce courant de pensée place le corps au centre de sa conception. Ce qui est particulièrement intéressant si l'on prolonge la réflexion pour étudier spécifiquement l'éprouvé d'un corps féminin, c'est-à-dire d'un corps qui vivra les menstrues, relations sexuelles, grossesse, ménopause*. Et ce dans une société dont le regard plein de normes et d'injonctions transforme la qualité de ces expériences et en fait la raison d'un emprisonnement. Se trouve ainsi intrinsèquement mêlé tant la réalité physiologique indéniable d'un corps féminin que le prisme déformant à travers lequel notre monde encore fondé sur des normes patriarcales assigne les femmes à certaines fonctions au nom de leur genre. On voit bien que si l'on peut espérer renverser le deuxième facteur, le premier est quant à lui intangible, sauf à prôner un féminisme qui clame que la femme est un homme comme un autre et à nier ses spécificités organiques.
Cette manière d'envisager les choses m'a beaucoup séduite. le livre suit une progression très claire, de nombreuses auteures sont convoquées pour les besoins de la démonstration et le propos est toujours solidement argumenté. C'est donc une lecture que je recommande à ceux qui chercheraient à faire cheminer leur réflexion sur le féminisme dans un cadre historique et philosophique étayé. Et si je n'ai quasiment rien à opposer à l'ensemble, j'aurais tout de même préféré lire davantage que deux lignes ici ou là sur le fait qu'il s'agit bien de réinventer tout autant les féminités que les masculinités. Là, j'ai eu l'impression que, par peur d'être taxée de collaboration ou de tiède à la cause, l'auteure passait sous silence ce que cela peut être de vivre sa relation au monde à l'épreuve d'un corps masculin perçu comme non viril, ou de se dire homme et de se défier pourtant des oripeaux tyranniques qu'on accroche collectivement à cette dénomination.
*L'auteur prend bien soin de noter que toutes ces expériences ne sont pas vécues par toutes les femmes et que ce qui importe, c'est le fait d'éprouver l'expérience des répressions et des agressions que suscite le corps féminin. Cette précision évitant de croire que ce propos ne vise que les femmes cisgenre, à l'exclusion de toutes les autres.
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Un livre magnifique et indispensable dans le paysage féministe aujourd'hui.
Camille Froidevaux-Metterie expose un féminisme phénoménologique c'est-à-dire un féminisme où l'expérience première nous vient du corps. Il est question du corps féminin à tous les âges, sous toutes ses formes, sous toutes ses modalités (règles, ménopause, maternité, rapport à la nourriture ... ) qui est étudié ici. Notre corps, ses capacités et tout ce qui le traverse ne peut être ignoré. Avec la philosophe le corps redevient un sujet au sein du féminisme. Nous avons d'abord eu besoin de nous en éloigner, pour échapper à l'essentialisme mais aujourd'hui peut-être avons nous au contraire besoin d'y revenir, car de-là nous vient nos premières expériences. Cependant, ce n'est pas un retour à l'essentialisme, les femmes ne sont pas que leur corps. L'autrice inclue les femmes trans lorsqu'elle parle des femmes. Non parler du corps et de l'expérience vécue des femmes trans n'est pas antinomique.
Il y a d'abord une première partie (la plus courte) qui revient sur l'histoire du féminisme. C'est la partie la plus compliquée parce qu'elle est très dense et conceptuelle. Elle est cependant très intéressante. La seconde partie aborde le corps sous divers aspects appuyés d'exemples très concrets. Cette partie est plus simple a appréhender et passionnante.
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Cette ouvrage sur la femme est son rapport avec le corps selon un chemin historique et philosophique est très bien menée. L'argument est présenté clairement malgré une difficulté à cause de l'ignorance personnelle à propos de plusieurs courants philosophiques. J'ai adoré voir les choses avec des lunettes différentes et relire ce nouveau mouvement de féminisme. L' auteur mérite de partager de plus en plus ces réflexions intelligentes et mûres.
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critiques presse (3)
LesInrocks
06 septembre 2023
C’est un livre hybride, fruit d’une enquête menée auprès de patientes d’une maternité parisienne.
Lire la critique sur le site : LesInrocks
Elle
29 novembre 2021
Elle analyse les effets du temps, les premières menstruations, le développement de la sexualité, et les nombreuses injonctions faites aux femmes au cours de leur vie sur la représentation de leur corps. Par sa vision moderne et phénoménologique, Camille Froidevaux-Metterie s’impose sans doute comme l’une des fondatrices du féminisme de demain.
Lire la critique sur le site : Elle
LeMonde
03 septembre 2021
La philosophe Camille Froidevaux-Metterie mêle dans son nouvel essai théorie, témoignages et expériences personnelles pour affiner sa réflexion sur les dimensions physiques du féminisme.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
Durant les quelque deux siècles d’enracinement de la démocratie occidentale, les femmes sont restées des citoyennes de façade, dotées certes des droits humains gravés dans le marbre des Constitutions, mais toujours définies comme des sujets essentiellement privés, assignées au domestique et dépendantes des hommes, au sein d’un système patriarcal que les transformations modernes n’avaient pas détruit, pas même ébranlé.
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La féminité inauthentique que circonscrit la culture patriarcale doit disparaître au profit d’une conception du féminin revalorisée qui débouche sur une autre différence des sexes. Pour Antoinette Fouque, personnalité centrale de ce courant, il faut rejeter la définition freudienne de la femme comme un être privé de phallus pour lui substituer une « théorie de la génitalité » qui fait de l’enfantement la production spécifique des femmes. Il s’agit de « considérer que notre chair pense le vivant-parlant, qu’elle crée quand elle procrée ; de considérer que ce n’est pas une tare d’être génitale. Ce sera peut-être génial ! ».
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On comprend que le constat ait produit des revendications utopiques, on ne se débarrasse pas de siècles d’enfermement domestique et d’exploitation sexuelle sans définir les conditions nouvelles et tranchantes de sortie du cadre patriarcal. La proposition du lesbianisme politique constitue de ce point de vue l’issue sans doute la plus conséquente : comment mieux échapper à la domination masculine et à l’assignation maternelle qu’en rejetant l’hétérosexualité ?
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La féminité renvoie à un ensemble de dispositions considérées comme indissolublement attachées à la condition féminine définie par une triple injonction : disponibilité sexuelle, dévouement maternel et subordination sociale. Le mot de féminité condense en somme le projet patriarcal tel qu’il est imposé aux femmes depuis les origines, à savoir un pseudo-destin corporel placé sous le signe de l’infériorité et de l’asservissement. Il s’articule à la virilité comme à un vis-à-vis nécessaire, celui d’une triple injonction miroir faite aux hommes : conquête sexuelle, accomplissement individuel et domination sociale. Féminité et virilité s’enracinent dans le terreau immémorial de la hiérarchisation sexuée des rôles, portée et perpétuée par des mécanismes dont l’efficacité doit beaucoup à leur invisibilité. L’une et l’autre renvoient aux fondements patriarcaux de notre monde commun, ceux que la révolution féministe a commencé d’ébranler et que nous nous efforçons de détruire tout à fait.
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Si les hommes n’échappent pas aux injonctions qui sont celles de nos sociétés néolibérales en termes d’accomplissement de soi et de performance, si eux aussi doivent souscrire aux impératifs du beau, du jeune et du dynamique, ils n’ont pas à pâtir du fait qu’ils ont un corps sexué. Que leur voix change, leurs poils poussent et leur pénis éjacule, ils ne sont pour autant pas transformés d’un coup en objets sexuels. Qu’ils deviennent père, une fois, deux fois, trois fois, ne nuit pas à leur parcours professionnel ni ne limite leurs projets. Qu’ils boivent beaucoup, déambulent dans les rues la nuit, rentrent seuls au petit matin, ne les met pas en danger d’une agression sexuelle. Qu’ils soient chauves, ventripotents ou ridés, ne les discrédite pas aux yeux des femmes ni ne les discrimine quand il s’agit d’obtenir un poste ou une promotion.
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Videos de Camille Froidevaux-Metterie (24) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Camille Froidevaux-Metterie
Camille Froidevaux-Metterie, philosophe et écrivaine, fait paraître "Un si gros ventre. Expériences vécues du corps enceint" (Philosophie magazine Éditeur/Stock), une enquête philosophique qui mêle témoignages et réflexion sur la grossesse.
Elle présente son ouvrage et répond aux questions d'Ariane Nicolas, journaliste à "Philosophie magazine".
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