Partout on rencontrera cette disposition à la joie qu'on appelle les Lumières, et qui fait de ce siècle français l'un des plus optimistes que l'histoire du monde ait connus. Par un conservatisme remarquable, et peu remarqué, les Etats-Unis d'Amérique, fils du XVIIIè siècle et son immense "lieu de mémoire", en portent encore aujourd'hui la marque euphorique, naïve et "jeune", à jamais effacée en Europe après la Terreur de 1792-1794. Les Lumières françaises? Un dégel du sacré, une religion poignante et profane du bonheur et de l'instant de grâce, et dont la Jérusalem céleste est Paris. Parfois quiétiste, parfois militante, avec son haut et bas clergé, ses fidèles, ses libertins, ses tartuffes, elle fut persécutée à Paris même par ses propres hérésies dont le dogme féroce a été mis en lumière par Chateaubriand :
"Au fond de ces divers systèmes, repose un remède héroïque, avoué ou sous-entendu, on n'hésite que sur le moment de l'application : ce remède est de tuer. Il est simple, se comprend à merveille, et se rattache à cette sublime Terreur, laquelle, d'affranchissement en affranchissement, nous a traqués dans les fortifications de Paris : massacrez sans faiblesse tout ce qui empêche le genre humain d'avancer".
Cette émission "Une Vie, une Œuvre", consacrée à Boèce, dans laquelle intervient Marc Fumaroli, est diffusée le 11 juillet 1991, sur France Culture, et réalisée par Françoise Estèbe et Isabelle Yhuel. Autres invités : Philippe Hoffman, Colette Lazam, André Miquel et Michel Onfray.