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EAN : 9782226039354
468 pages
Albin Michel (27/03/1990)
2/5   1 notes
Résumé :
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Autant l'avouer tout de suite : je n'ai pas lu en entier ce bouquin. Seulement l'intro, le 1er chapitre lu "en entier". le reste a été survolé ; c'est-à-dire lu en sautant des paragraphes, un peu trop rapidement pour être sérieux, mais assez je pense pour me faire une idée générale de la teneur du livre.

En fait je bosse dans une asso de lutte contre le Sida. le titre logiquement m'intriguait donc, et j'estime être assez calé en épidémiologie et en stratégie de luttes contre cette épidémie. Je voulais voir les thèses défendues dans ce livre.

Le contexte de parution, d'abord, parce qu'il est important. Il y a d'abord, en 1989 — en pleine épidémie du VIH donc, quand on a pas encore de traitements efficaces, qu'on tatonne sur beaucoup de points — en 89 donc, il y a cette article de M. Fumento, journaliste étasunien. Un article qui dit que, aux Etats Unis, on ment ou exagère les chiffres sur le VIH. Après, il en fait un bouquin.

Ce que j'ai à dire, c'est que d'un strict point de vue épidémiologique, le livre est très bien documenté et d'une grande précision. Fumento maitrise son sujet. Pas d'approximations quand il présente les faits dans les 1ers chapitres.

Les faits donc, c'est : quelles sont les populations les plus touchées ? Pourquoi ? Quels sont les risques réels de transmission du VIH pratique par pratique (sexe anal, fellation, partage de seringue) ? Qu'est ce qui fait que cette maladie peut se transformer en épidémie dans telle population, et pas du tout dans tel autre ? etc. C'est des rappels de l'épidémiologie pure, mais ça donne une bonne base très solide.

Mais aussi : Quels sont les messages de prévention ? A qui s'adressent-t-ils ? (A son époque et aux USA)

Après il y a l'analyse qui en fait, souvent pertinente et qui pointe du doigt des vérités dérangeantes parfois. Malheureusement cette, ou ces analyses sont gâchés dans une bonne partie du livre par des considérations morales assez hors de propos par rapport à la rigueur du début du bouquin.

Ce que Fumento dit, c'est que l'épidémie a VIH est très centrés sur les hommes qui ont des relations sexuelles avec d'autres hommes (HSH), sur les consommateurs de drogues par injection et, chez les hétéros, centrées sur des sous populations. de façon générale, les afro-américains et les latinos, notamment les plus précaires, sont les plus exposés.

Ce que dit encore Fumento, c'est que la probabilité d'une épidémie à VIH chez les hétéros blancs est impossible. Parce que les conditions pour que ceci arrive ne sont pas réunis (pas assez de pratique à risque, pas assez de partenaires sexuels, pas de conso de prods, pas assez de gens contaminés).

Pourtant, ce que pointe Fumento, c'est que les messages de prévention s'adressent avant tout à ces hétéros là, au "grand public". Ce qui a une double conséquence néfaste : jouer le registre de la peur + louper la cible des populations les plus vulnérables en visant ce grand public assez, finalement, à l'abri.

Ce constat de 1989 est en fait toujours vrai aujourd'hui. Avec des gros changements. Par exemple les injecteurs ne sont plus une population vulnérable : les programmes de distribution de seringues stériles ont très massivement fait baissé le nombre de contaminations. le reste est toujours vrai : les HSH sont la population la plus exposée statistiquement (la seule sous population où le nombre de contamination continue à augmenter chaque année), suivi des hétéros d'origine migrantes et en situation de précarité, notamment les femmes. le "grand public" hétéro était et reste à l'abri — relativement, le risque zéro bien sur n'existe pas. Tout cela s'explique très bien par les logiques des moyens de transmission et d'épidémiologie, de la "vie" et mort d'une épidémie.

Les messages de prévention ont par contre changé. La com grand public s'est fait beaucoup plus discrète, voire a presque disparu sauf lors du sidaction, 1er décembre et autres événements liés au VIH. Mais l'Etat continue de subventionner largement les structures et assos qui luttent contre le VIH, avec un regard spécifique sur l'action en direction de ces populations les plus touchées (HSH, migrants, etc). L'Etat ne "loupe" plus sa cible donc, ou alors moins, ou en en ayant conscience et en essayant de rectifier le tir.

Le livre de Fumento est intéressant pour ça : cette vérité qu'en fait on dit jamais, parce qu'elle est politiquement incorrecte : en tant qu'hétéro blanc qui couche avec des blancs/blanches, vous avez peu de chances de 1/ tomber sur une personne qui a le VIH 2/avoir une pratique avec des forts risques contaminants. C'est encore plus vrai si vous êtes un homme qu'une femme, parce qu'il est toujours moins risqué, anatomiquement parlant par rapport au VIH, d'être pénétrant que pénétré(e). Ce n'est pas la même histoire si vous êtes un mec gay ou une femme d'origine subsaharienne, précaire. Parce que les rencontres que vous faites et les pratiques auxquelles vous etes exposées sont à un tout autre "degré de risque".

La réalité des années 80 était un peu celle là au départ, pour le dire avec les mots crus comme le défend Fumento : comme il y avait que les pédés, les toxicos et les noirs qui mourraient, les pouvoirs publics s'en foutaient. Il a fallu faire peur, surexagéré les risques en disant des trucs du genre "1 hétéro sur 10 va mourrir", pour que quelque chose se passe. Je n'ai pas assez de recul historique pour savoir si cela est vrai, mais de ce que j'ai lu par ailleurs ça semble plausile.

Là où Fumento devient puant, c'est quand il dit que les homos sont des menteurs, qu'ils ont sciemment organisé le mensonge, fait du lobbiying pour gratter des subventions.

Il y a effectivement eu une mobilisation de la communauté gay, sans précédent, pour que les pouvoirs publics et médicaux se bougent le cul. En même temps ils étaient en train de crever. Que ceci ait créer une panique morale, et qu'on fasse flipper plusieurs générations d'hétéros pour cela, c'est selon moi d'abord une conséquence imprévue et indésirable. Qui s'est d'ailleurs retourné contre les mouvements gays : l'argent n'était pas mis où il fallait, pas dans les priorités et les réalités de l'épidémie à VIH. On avait plus peur d'une éventuelle épidémie VIH hétéro (qui n'a jamais eu lieu) que de la catastrophe, déjà en cours celle là, qui décimait HSH, injecteurs, migrantes...

Un livre qui m'a bien fait réfléchir. Pertinent, complet, bien pensé... mais vraiment très dommage de ces nombreux jugements franchement homophobes qui discréditent le sérieux de la première moitié du livre
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