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. Les chroniqueurs judiciaires ont actuellement la cote en librairie, en télévision , en radio . du coup , il m'a paru intéressant de retourner auprès d'un grand ancien qui le fut occasionnellement . Jean Giono , puisqu'il faut l'appeler par son nom , s'intéressa , en voisin, à cette affaire qui mobilisa l'opinion et dont j'entendis abondamment parler dans mon enfance. L'ouvrage se présente en deux parties : des notes prises pendant le procès et mises en forme et un texte intitulé « Notes sur le caractère des personnages » . Mais il n'est pas sans risque de confier les rênes à un romancier de ce calibre , car il aura tôt fait de repeindre le monde à ses couleurs : voilà que les protagonistes de ce sombre drame se mettent à ressembler furieusement aux personnages d' « Ennemonde » ou « Colline ». A lire donc non pour la chronique judiciaire (cependant les remarques sur la barrière linguistique entre justice et accusé sont fort intéressantes) mais pour la virtuosité du verbe.
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En 1952, Jack et Ann Drummond sillonnent le Sud-Est de la France avec Elisabeth, leur petite fille de 10 ans. Ils assistent à une corrida dans les Basses-Alpes puis, repartent vers la Côte d'Azur. Ils campent pour la nuit près de la Grand'Terre, ferme de la famille Dominici.
Au matin,Jack et Ann Drummond sont retrouvés assassinés près de leur voiture. le corps d'Elisabeth repose plus loin. L'enfant a été tuée à coups de crosse.

Après bien des rebondissements, des aveux, des mensonges et des rétractations, Gaston Dominici, 75 ans, sera déclaré coupable du triple homicide et condamné à mort.En 1973, Jean Gabin endossera la peau de Gaston et Victor Lanoux celle de son fils Gustave dans un film de Claude Bernard-Aubert (dont je n'ai rien retenu d'autre). C'est vous dire la puissance des personnages.

Jean Giono a suivi le procès Dominici. Il nous le livre avec talent sur 114 pages d'un "J'accuse" qui ne lève pas le doigt. Provençal, il dessine les taiseux d'un pays où le silence est d'or, où"L'espoir est obligatoirement fabriqué à la main et ne peut être que d'un usage personnel.". C'est par là, observe Giono, que Victor Hugo fait commencer Les Misérables. Les hommes y vivent avec une "indifférence d'insecte". Certains mentent comme on respire. Tous sont, malgré l'effort de l'écrivain, ou plutôt à cause de lui, hors de la compréhension des gens de notre société. Leur vocabulaire est réduit à l'essentiel, le leur. Il est inadapté, incompréhensible.
"""LE PRESIDENT s'adressant à l'Accusé. - Êtes-vous allé au pont ? (Il s'agit du pont de chemin de fer.)
L'ACCUSE.- Allée ? Il n'y a pas d'allée, je le sais, j'y suis été."""

Mais il comprend si peu qu'il ne sait pas qu'il ne comprend pas. C'est Kafka en Provence. le portier de la loi face au vieil homme de la campagne.
On pourrait penser "quelle importance ?", tant la prison nous paraît préférable à la Grand'Terre. Tout au moins similaire...

"Si vous ne connaissez pas la porte où frapper, vous pourrez arpenter le village, il restera désert", explique Giono. Si les Drummond l'avaient su...

Gaston Dominici sera gracié par le général De Gaulle en 1960. Malgré les doutes et le talent de Giono, il ne sera jamais réhabilité. Il mourra le 4 mars 1965. Dans une "indifférence d'insecte". Je suppose.
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" A l'aube du 5 août 1952, Gaston Dominici trouve le corps d'un homme assassiné à une centaine de mètres de sa ferme de la Grand-Terre à Lurs dans les Basses-Alpes (aujourd'hui Alpes-de-Hautes-Provence). Arrivés sur les lieux, les gendarmes découvrent deux autres cadavres. Il s'agit d'un couple d'Anglais, Jack et Ann Drummond, tués par balles, et de leur petite fille de dix ans, Élizabeth, tuée à coup de crosse. Commence alors l'une des affaires judiciaires les plus mystérieuses du XXe siècles. L'enquête dure un an et demi et aboutit à l'emprisonnement et la condamnation de Gaston Dominici." Extrait à l'aube du 5 août 1952

La célébrité de Sir Jack Drummond, éminent biochimiste anglais, et le profil du coupable idéal de la personne de Gaston Dominici, agriculteur "frustre et taciturne", vont déchainer la presse française et étrangère. Cette passion populaire international va engendrer divers films et livres notamment celui de Jean Giono.
Giono interroge le lecteur, revient et appuie sur les zones sombres de ce dossier. Des éléments pertinents-percutants ont été volontairement laissé de côté, l'absence de preuve flagrantes vont mettre au premier plan la présomption d'innocence, sur lequel les journalistes exercent un pouvoir fort. Les notes de Giono nous plonge au coeur même de l'affaire avec des témoignage pris sur le vif. On découvre un procès qui se base sur le langage n'ayant aucunes voir très peu de preuves physiques. " Il y a des preuves formelles qui démontrent la culpabilité de l'accusé que de preuves formelles qui démontrent son innocence"
L'accusé Gaston Dominici, paysan de 76 ans, utilise un vocabulaire réduit à l'essentiel, le sien. Il est inadapté, incompréhensible et se compose entre 35 et 40 mots en tout et pour tout. Il comprends si peu qu'il ne sait pas qu'il ne comprends pas.
""Le Président s'adressant à l'accusé - Etes-vous allé au pont? (il s'agit du pont du chemin de fer)
L'accusé - Allée? il n'y a pas d'allée, je le sais, j'y suis été""
Ces malentendus idiots irriteront les deux parties au point de ne plus s'entendre. On décrit l'Accusé comme brutal, cruel, sujet à de terribles colère et solitaire. Mais on ne prendra pas en compte son état de solitude, on en vient même à s'attacher à ce personnage tout à fait commun.

Un livre exceptionnel qui met en lumière les failles de la justice française.
En 114 pages, Giono soulève des questions auxquelles personnes à ce jour, n'a encore répondu. Et surtout une : Gaston Dominici est-il réellement coupable?
A vous d'en décider...
Lien : http://lavaguelitteraire.blo..
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J'ai retrouvé le souvenir de conversations des parents autour de la table du salon de la maison de vacances, à cette heure entre chiens et loups où, enfants et presque grandes, nous attendions, sans trop d'agitation, dessinant ou faisant semblant de lire, l'heure du dîner, et un vague souvenir d'effroi. Je crois avoir retrouvé aussi la lecture de ces articles, oeuvre de commande, regard qui cherche l'honnêteté et parle de Giono, de sa façon de vivre ce pays et ces gens... j'ai reconnu cette impression, avant tout, de la rencontre de deux univers, de deux langues et de l'incompréhension qui en résulte,
et, déjà dans cette partie, les portraits et celui qui se dessine peu à peu de l'Accusé, avec ses zones d'opacité, ses contradictions, les tentatives de le comprendre, portrait splendide et peut-être fantasmé
Et il y a ce petit texte, gionitissime et merveilleux : «essai sur le caractère des personnages» où, amplifiant cette ébauche de portrait, l'éclairant, le justifiant par une tentative de reconstitution de la vie de Gaston Dominici - et ce que cela a fait, à sa suite ou en réaction, des fils – il raconte, il chante avec retenue, la haute Provence (schématisant un peu trop en passant l'autre, dont je découvre maintenant qu'elle n'est pas uniquement dans l'image pour visiteurs).
Il y a des pages admirables sur la description de ces «pays», les nuances entre Brunet, caché dans l'ombre, accroché à mi-chemin sur «le flanc noir du plateau de Valensole», la solitude et la vue que l'on a des pâturages sur la vallée de la Durance et l'ouverture sur le monde, Ganagobie et les durs contreforts de la montagne de Lure, les bois et la sauvagerie, et la petite et encore ingrate «Grande Terre», toute proche, mais proche également de la route, du chemin de fer, même si la gare désaffectée n'est plus que l'»aboutissement d'un téléphérique qui transporte le charbon des mines de Sigonce».
Pages dans lesquelles il y a l'amour du vieux pour ces terres dures à la richesse cachée, et surtout l'amour qu'a pour elles l'habitant de la déjà plus douce Manosque.
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Une nuit de l'été 1952, un couple de Britanniques et leur fille de dix ans en vacances dans le sud de la France sont assassinés lors d'une halte à proximité de la ferme de la famille Dominici. le patriarche, un paysan de 75 ans, est accusé. Il sera condamné à mort, puis gracié trois ans plus tard.

Jean Giono est mandaté par le journal Arts pour couvrir le procès, retentissant. Sans connaître personnellement l'accusé, les témoins et les jurés, Giono connaît leurs semblables, les habitants de la Haute-Provence où il a vécu toute sa vie. Giono témoigne des audiences par le prisme de son regard d'homme de lettres. Il insiste notamment sur les limites langagières du vieux Dominici (son vocabulaire compte moins de trente-cinq mots en français), tout en le décrivant comme un individu charismatique et plus grand que nature, comme le serait un personnage de roman. L'auteur assiste au ballet des mensonges et ses doutes sur la culpabilité de l'accusé demeurent.

Un court texte que j'ai beaucoup aimé. Les notes sur l'affaire Dominici, qui se veulent une transcription objective des faits et des paroles, sont suivies de l'Essai sur le caractère des personnages, une interprétation plus subjective. En complément, j'ai écouté une émission de France Culture (Giono et Welles dans l'affaire Dominici, 2017), dans laquelle j'ai appris qu'Orson Welles s'est aussi intéressé à l'affaire en réalisant un téléfilm, jamais achevé.
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C'est à la demande du directeur de l'hebdomadaire "Arts" que Jean Giono consent à couvrir ce qui sera l'une des affaires les plus mystérieuses du 20ème Siècle. Deux raisons essentiellement le poussent à accepter ce travail. Tout d'abord, le meurtre a été commis à Lurs, petit village situé à une vingtaine de kilomètres de Manosque où vivait Jean Giono. Ensuite, l'auteur se passionne - comme beaucoup de ses contemporains - pour ce qui deviendra dans les annales de l'histoire judiciaire, l'Affaire Dominici.

Amoureux de la sémantique, Jean Giono est confondu durant tout le procès par le poids des mots qui pèseront lourds dans la balance de la Justice. Il comprend rapidement que ce procès particulier d'une affaire non moins complexe sera celui du langage, une querelle de points de vue divergents entre le Président et Gaston Dominici, le patriarche, le coupable idéal et tout trouvé. Parce que Gaston Dominici cumule tous les défauts héréditaires, toutes les tares sociales qui conforteront cette position de coupable : égoïste, rude, primitif, dur à la tâche, taciturne.
Lien : http://dunlivrelautredenanne..
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J'ai ouvert le livre en juriste et j'ai été replongée dans ma Provence natale, sauvage et intraitable.

Dans les années 1950, dans la région de Manosque, un couple d'anglais et leur petite fille sont retrouvés assassinés. Gaston Dominici, paysan frustre est condamné. Il sera gracié mais on ne saura jamais ce qui s'est réellement passé et qui a commis le crime.
Des témoignages douteux, des indices qui disparaissent, d'autres éléments troublants laissés de côté, une enquête bâclée.
Ma mère m'en parlait, mon grand-père, juriste, la suivit avec passion comme de nombreuses personnes du cru et mit de côté un paquet de coupures de journaux.

Giono est envoyé pour couvrir le procès par un hebdomadaire. Il nous livre un ouvrage qui va au-delà du simple rapport d'audience, partisan et arbitraire.

Deux moments dans ce livre: le procès, la justice et la Provence, mais loin de la Méditerranée ensoleillée et désinvolte. Deux portraits donc, l'un sur la justice, ce qu'on en attend et l'autre sur la Provence, dans ce qu'elle de plus sombre, au travers des notes de l'auteur sur le procès et son « essai sur les caractères des personnages ».

Il est à lire pour comprendre aussi bien les enjeux de ce qu'on appelle la « vérité judiciaire » que la Provence, lorsque l'on est étranger à ces deux univers, étranger dans le sens où l'on ne travaille pas dans ce monde formel, avec ses propres règles parfois obscures et si l'on a pas vécu en Provence, au-delà d'un simple passage de vacances en famille.

Giono est impressionnant de justesse par les questions qu'il pose dans ses compte-rendus, questions qui auraient du être posées pour s'approcher de la vérité, qui diffère de la vérité judiciaire, relative, livrée par le délibéré. il y a de nombreuses thèses, discussions sur l'enjeu du procès qui n'est n'est pas seulement la recherche de la vérité mais aussi une sécurité juridique avec l'obtention d'une chose jugée, qui participe à la paix sociale indirectement. Avec les notes de Giono, nous avons justement une autre vision du procès

Mais il y a donc aussi la Provence au travers de son étude de caractères, peu reluisants, qui renvoient à une Provence sombre, et rude. Dominici a vécu non loin de Valensole et ses champs de lavande, hautement intsgramables, mais dans un village qui avait à peine 3h de soleil en hiver.
Giono nous livre un portait sans fard de la région, loin des bars à pétanque, et de la côte d'azur : « j'habite Manosque depuis soixante ans. Je connais un pays sauvage (…) il existe de vastes régions où la civilisation n'a pas pénétré (…)on ne me croira jamais si je dis que la Provence est une terre inconnue »
« ces silences de hautes Provence. Là on est jamais distrait de soi-même. C'est la vieille condition humaine qu'il faut constamment supporter ».
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Après ma lecture de Affaire Dominici : La contre-enquête de Jean-Louis Vincent, j'étais curieuse de lire les notes de Jean Giono qui a été témoin direct des événements : il était présent au tribunal, a vu les témoins et l'accusé. Son témoignage direct était intéressant dans la mesure où il donne une couleur et une épaisseur incomparable aux faits (je parle du procès ici, pas de l'enquête). Un livre qui se lit très vite, on en vient à oublier qu'il s'agit de faits réels : quand on aime la façon d'écrire de cet auteur, il pourrait aussi bien nous présenter certains de ses personnages.
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Giono a couvert le procès de Dominici. .Il nous fait part de ses remarques et met en lumière les nombreuses zones d'ombres de ce terrible fait divers.
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L'affaire Dominici a bouleversé la justice du XXème siècle et je dois avouer que j'ai vu le film avec le monument français Michel Serrault à plusieurs reprises. Je fus assez sceptique quant aux capacité de Jean Giono a me refaire vivre cette affaire. Il a réussi avec brio car j'ai relevé certaines choses qui m'avait échappé pendant le visionnement des films notamment sur le vocabulaire ou la syntaxe de Dominici qui était différente de la justice française. Jean Giono nous donne ces impressions par rapport auquel il a assisté. A découvrir
Lien : http://leschroniquesdemilie...
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