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EAN : 9782754828567
112 pages
Futuropolis (07/04/2021)
4.22/5   121 notes
Résumé :
Paris, juin 2000. Lisa, étudiante, loue une chambre chez le vieux Mohamed.
Retraité veuf et bourru, Mohamed est un ancien harki, un supplétif de l'armée française en Algérie. Lisa et Mohamed ignorent encore que leur rencontre va faire ressurgir le passé. Celui des harkis. Ces hommes qui n'ont aujourd'hui toujours pas le droit de retourner en Algérie.

Après L’Œil du STO, Julien Frey continue son travail de mémoire des zones sombres de notre pass... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (28) Voir plus Ajouter une critique
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Le sous-titre de la première de couverture -- Une étudiante, un harki, un secret... -- porte parfaitement le thème de cette très belle bande dessinée qui aborde avec doigté, sérénité et émotion le drame des harkis, des hommes restés fidèles à la France, mais surtout à leur terre, leurs village au coeur de l'atmosphère de destruction et de malheur de la guerre d'Algérie.

C'est donc une étudiante, Lisa, qui rencontre, un peu par hasard, Mohamed, le vieil harki, perdu dans de trop douloureux souvenirs, qu'elle parvient patiemment à faire exprimer son histoire, sa douleur, ses peurs encore présentes, à travers ses souvenirs de cette guerre où certains ont peut-être fait le mauvais choix mais ne méritent sûrement pas leur statut, plutôt leur absence de statut, rejetés qu'ils sont de tous côtés.

Les dialogues sont souvent durs par l'évocation de tant de mal, de la torture, de la peur permanente, de l'absence d'issue. Ils sont en même temps pleins de pudeur et de retenue s'harmonisant ainsi parfaitement avec les images aux rendus magnifiques.

Tous les dessins du livre sont parfaits, ils restituent par les traits des différents visages, l'émotion portée par les protagonistes y compris par la jolie Lisa qui dénoue les fils du vécu tragique de Mohamed. Les teintes pastel confèrent un très beau rendu aux différentes planches, les pages se tournent en admirant vraiment les images d'une histoire attachante malgré le contexte de ces moments dramatiques vécus en Algérie par les différentes parties.
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De nos jours, on ne sait plus vraiment qui sont les harkis. Cette BD va traiter de ces personnes qui ont beaucoup souffert à la fin du conflit algérien suite à leur exode dans la métropole.

J'ai bien aimé cette BD car elle met l'accent sur ce qui s'est passé et qu'on a vite voulu oublié. Les harkis ont aidé les français qui les ont abandonnés à leur triste sort malgré une victoire militaire indéniable sur le terrain. Les harkis sont dès lors considérés comme des traîtres à leur nation. Ils seront pourchassés et tués. Beaucoup d'entre-eux viendront se réfugier dans la Métropole après avoir tout perdu.

Le président Bouteflika qui a dirigé l'Algérie pendant 20 ans (1999- 2019) avait gracié les intégristes musulmans responsables de la fameuse décennie noire qui avait endeuillé ce pays mais qu'il n'a jamais pardonné aux harkis même 40 ans après les faits.

Ainsi, on apprendra par les paroles de Mohamed qu'un harki et sa famille n'ont toujours pas le droit de fouler les pieds en Algérie, également leur terre natale. Au contraire, la France accueille les ex du FLN. Oui, il y a deux poids, deux mesures selon lui. On ne peut cependant le nier.

J'ai bien aimé la fin de ce récit qui donne un peu d'espoir de réconciliation qui serait nécessaire pour avancer. Néanmoins, le peuple algérien ne serait pas encore prêt. On espère alors qu'il le sera un jour car la haine ne sert à rien. C'est un peu tous le sens donné dans cette BD.
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Une BD pour comprendre les Harkis, ce qu'ils ont vécu, et leur ressenti, tout en sensibilité, et douceur.

Une approche intelligente d'une partie de notre Histoire, encore tabou et douloureuse à ce jour, à travers la rencontre d'une jeune étudiante, Lisa, et Mohamed, qui vient de perdre son épouse.

Son fils ne lui laisse plus le choix. Il propose que Mohamed accueille une ou un étudiant afin de le sortir de son deuil.

La cohabitation ne va pas se faire sans mal. Mais, Lisa veut comprendre la vie de cet homme qui l'intrigue, après avoir trouvé des cassettes. Petit à petit un lien va se créer et l'histoire de mémoire peut commencer.

"Pourquoi vous avez choisi de vous battre pour la France ?

Quoi ?

Pourquoi vous avez…

On vous apprend vraiment rien à l'école. Je ne savais même pas que c'était la guerre."

Et le pardon… Ne serait-ce que pour pouvoir panser les plaies…

Le graphisme est tout simplement superbe, des touches de bleu, de jaune et de beige et de blanc viennent appuyer le récit et les différentes périodes de l'histoire.

Remarquable ! Là aussi, prévoyez des mouchoirs !
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« Tout le monde t'en voudra. Les Algériens, les Français… même les harkis t'en voudront. »
Lisa étudie à Paris et souhaite devenir journaliste. La pénurie de logements étudiants la contraint à accepter de partager le logement d'un vieil homme afin de lui tenir compagnie. Elle aura sa propre chambre et pourra dîner avec lui de temps en temps mais aussi devra prévenir son fils en cas de nécessité.
Ce vieil homme s'appelle Mohamed, il était maçon, mais ça, c'était sa vie en France, son activité... Auparavant, en Algérie, il aimait courir d'un village à l'autre avec ses cousins dans l'insouciance de leurs vingt ans. Mais un jour, avec la seule intention de défendre ses proches des attaques de fellagas, il avait accepté de devenir guide et traducteur pour les Français ; il était devenu harki et, dès lors, porteur de cette tache indélébile qui le marquera toujours quarante ans plus tard.
Il y a beaucoup de douleur contenue en Mohamed comme en Lisa. le premier qui sait sa chance et sa malédiction. Sa chance d'avoir rencontré Louise alors qu'il avait été interné dans un camp au retour d'Algérie ; elle est devenue sa femme. Et sa malédiction d'avoir travaillé pour les Français pendant la guerre d'indépendance. Les sentiments de rejet et de peur ne l'ont jamais quitté.
Lisa, quant à elle, est une jeune et jolie métisse de mère guadeloupéenne et de père absent et inconnu ; c'est sa névrose. Pour combler ce manque, elle cherche et se documente ; le journalisme est sa voie et sa rédemption.
LISA ET MOHAMED est un album sur les détresses existentielles et les blessures émotionnelles telles que le rejet ou l'abandon, l'humiliation, la trahison ou l'injustice ; ces problèmes rencontrés dans l'enfance et l'adolescence qui ouvrent en nous des brèches si profondes que le traumatisme engendré nous hante encore à l'âge adulte.
Comment se remettre des actes innommables entrevus ou commis, comment se débarrasser des peurs ainsi chevillées au corps et à l'esprit, comment apprendre à se réconcilier, comment pardonner, comment apprendre à revivre (ensemble) ?
Quant au dessin de Mayalen Goust, il est sensible et pudique et convient tout à fait au récit de Julien Frey. Déjà bien connue en tant qu'illustratrice pour les éditions pour la jeunesse - ses productions étaient malicieuses, féériques, énigmatiques, poétiques - on lui reconnaîtra dorénavant de nouvelles compétences.
C'est un bel exemple d'ouverture d'esprit et d'humanisme. Plus que jamais, on en a besoin !
« On était trois cousins. Tayeb, Amine et moi. On courrait tout le temps… »
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Mayalen Goust dans « Vies volées » racontait avec Matz au scénario le trafic des enfants volés et le combat des grands-mères de la place de mai en Argentine ; Julien Frey dans « l'oeil du STO » donnait la parole à un vieillard qui dans les années 1940 avait dû faire son service de travail obligatoire en Allemagne. Tous deux s'associent cette fois pour évoquer une autre page historique méconnue et scandaleuse : le sort des harkis après l'indépendance de l'Algérie.
*
Paris au début des années 2000, Lisa jeune étudiante en communication ne trouve pas de logement en cité U et refuse d'habiter sans le studio de son petit copain car elle craint que la promiscuité mette à mal leur relation. Un ami de ce dernier, Nicolas, lui propose alors d'occuper gracieusement une chambre dans le grand appartement de son père. Elle devra en échange tenir compagnie au vieillard, Mohamed, qui se replie sur lui-même depuis qu'il est veuf. Les débuts de la cohabitation sont difficiles jusqu'au jour où la jeune femme découvre par hasard caché dans l'ex-secrétaire de la femme de Mohammed des cassettes audio qui racontent son histoire …
*
Alors qu'il existe une offre pléthorique sur les deux conflits mondiaux, peu d'albums de bande dessinée sont consacrés au sujet encore brûlant de la guerre d'Algérie. On se souvient bien entendu des derniers tomes des « Carnets d'Orient » de Ferrandez et du superbe « Azrayen » de Lax et Giroud où j'entendais parler pour la première fois des Harkis. Mais cet album de Goust et Frey a le mérite d'en faire son sujet central. A travers le personnage de Mohammed, ils nous rappellent le sort de ces algériens de souche, souvent employés comme guides ou traducteurs, qui ont travaillé pour l'Armée française et parfois combattu à ses côtés. Après les accords d'Evian, ils furent abandonnés à leur sort ou au mieux expulsés vers la France où ils furent parqués -et oubliés- dans des camps et quarante ans plus tard (au moment où se déroule l‘action principale de l'album), ils n'avaient toujours pas le pardon du président Bouteflika et par conséquent pas le droit de remettre les pieds sur le sol de leur terre natale.
*
Nul pavé didactique cependant, les auteurs mêlent au contraire habilement le présent (2000-2001) et les flash-backs grâce aux cassettes retrouvées puis aux confidences de Mohammed à sa jeune colocataire. Ce biais narratif crée une fluidité et nous donne, par ailleurs, l'impression que ces souvenirs nous sont directement rapportés. L'émotion qui nous étreint est ainsi augmentée. Nul manichéisme non plus : Mohammed n'a pas vraiment choisi de devenir harki mais il a commis des actions répréhensibles ; son cousin chez les fellagas n'agit guère mieux. Les auteurs racontent mais ne jugent pas. On comprend ainsi la difficile intégration de l'exilé et on compatit ; mais on perçoit aussi la difficulté du pardon des autres qui se sont sentis trahis. Tout est nuancé : le propos (qui souligne comment des amitiés a priori indéfectibles ont pu être brisées par le conflit) comme le dessin. Mayalen Goust emploie en effet un dessin aux pastels d'une grande douceur qui contrebalance l'âpreté du récit. Ses paysages algériens dans les tons ocres sont sublimes et la relation toute de pudeur qui se noue entre le vieillard et la jeune femme, elle-même métisse, est subtilement rendue grâce au jeu très expressifs des regards mis en place par la dessinatrice mais aussi grâce aux dialogues toujours justes et aux moments de silence très … parlants du scénariste.
*
Un très bel album sur un pan peu glorieux de notre histoire mais aussi une oeuvre finalement optimiste : le vieux Mohamed reprend sa vie en main grâce à Lisa et cette dernière évite grâce lui de sombrer dans le fatalisme (elle est doublement discriminée en étant femme et métisse) et prend son avenir à bras le corps.
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critiques presse (1)
BoDoi
08 juillet 2021
C’est donc une gageure, et par la même une réussite, de combiner un récit pétri d’humanité tout en n’éludant pas l’horreur du conflit. Une lecture essentielle pour qui veut donner de l’âme à l’Histoire, de la consistance aux faits.
Lire la critique sur le site : BoDoi
Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Je crois que les conditions ne sont pas encore venues pour les visites de harkis. C'est exactement comme si on demandait à un français de la résistance de toucher la main d'un collabo. C'est très dur (Abdelaziz Bouteflika).
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-- Lisa, ceux qui réussissent ne sont pas les meilleurs, ce sont les plus... les plus entêtés.
Commenter  J’apprécie          330
En France on me met dans un camp... et je rencontre Louise au village. Avec son père, ils ont tout fait pour me faire sortir. j'ai eu de la chance. Louise m'a appris à lire et à écrire. Il faut le savoir, Lisa,. La France a laissé les harkis et leurs familles pourrir dans des camps pendant des années. On les a internés comme des bêtes . On les a empêchés d'aller à l'école, de travailler. Moi j'ai eu de la chance. (p. 90)
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- Le FLN a cherché les harkis. Pendant longtemps, même à Paris, fallait se planquer.
- Vous retournerez en Algérie ?
- J'aurai jamais le droit ! Les anciens du FLN, la France les laisse venir, mais les harkis, Bouteflika il en veut pas. Vous savez qu'il vient d'amnistier les terroristes du GIA et de l'Armée Islamiste ? Et les harkis, quarante ans plus tard, c'est toujours trop tôt.
(p. 91)
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- Pourquoi vous avez choisi de vous battre pour la France ?
- Quoi ?
- Pourquoi vous avez...
- On vous apprend vraiment rien à l'école. [...] J'ai travaillé pour les Français. Je me suis pas battu pour la France. C'est différent.
(p. 46-54)
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Videos de Mayalen Goust (7) Voir plusAjouter une vidéo
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