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EAN : 9782711772469
211 pages
Vuibert (15/02/2007)
4/5   4 notes
Résumé :
À l'occasion de ce procès qui s'est terminé le 21 août 1947, le monde entier a découvert l'ampleur et l'horreur des expérimentations médicales qui ont été réalisées sur des hommes, des femmes et des enfants dans les camps de concentration. Les questions d'ordre éthique soulevées par les experts médicaux de l'accusation et les réponses qu'ils ont apportées aux arguments des accusés et de leurs avocats ont servi de fondement au Code de Nuremberg. La rédaction du Code ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Lorsqu'on parle de Nuremberg le procès qui vient à la tête est celui des haut dignitaires nazis. On sait qu'il y a eu plusieurs autres, petits, partout en Allemagne ainsi que dans les pays qui ont été occupés par les Allemands. On pense peu au deuxième procès, celui des médecins et quelques autres qui ont suivi.

Le procès des médecins a commencé juste après les exécutions du premier procès et est certainement un des plus importants puisque les accusés n'étaient ni des politiciens ou bureaucrates idéologues, ni des bourreaux incultes. C'étaient des personnes ayant un doctorat comme niveau d'études et un métier de médecin, ayant prêté le serment de Hippocrate et dont la mission était de sauver des vies.

Au contraire du procès des dignitaires où la discussion tournait sur les décisions à un niveau élevé, ici le sujet a été les expérimentations sur des êtres humains que ces médecins ont ordonné et pratiqué eux mêmes. le discussion s'est passé à un niveau bien plus concret et technique.

On peut comprendre que certaines des expérimentations sur le typhus, le paludisme pourraient avoir un intérêt pour le développement de la médecine dans l'éradication de ces maladies. La résistance à des très basses températures ou à des hautes altitudes (12000 mètres) peuvent avoir un intérêt pour comprendre les limites de notre corps. Je veux dire par là que ce sont des problèmes réels à résoudre mais, bien entendu, pas comme cela a été fait par les médecins nazis.

Néanmoins, même un non médecin comprends, par le récit, que ces expérimentations n'ont été suivi une méthodologie scientifique courante même à l'époque. Ensuite elles ont été effectuées sans aucune éthique humaine dans le sens où les expérimentations ont été poussées jusqu'à la mort des "cobayes". On comprend ce dernier point par le fait que tous ces médecins ont été imprégnés par l'idéologie nazie qui considérait les êtres non aryens comme des êtres inférieurs, c'est à dire, ne méritaient pas être traités comme des êtres humains.

À cela s'ajoutent des expérimentations sans aucun intérêt humain et qui choquent des principes élémentaires d'éthique, comme la collection de squelettes (crânes) du Docteur Hirt (Université de Strasbourg) ou la transplantation d'une omoplate d'un déporté vers un patient l'ayant perdu par cancer, avec exécution du donateur par injection d'essence par voie intraveineuse (voir citations).

La défense des accusés a largement utilisé comme argument l'inexistence d'une règle éthique dans la profession médicale, autre que le serment de Hippocrate. Argumentation, bien entendu, de mauvaise foi mais lors d'un jugement cela fini par être un critère atténuant.

Mais ce manque a été comblé par le Code de Nuremberg qui a été repris par la Déclaration de Helsinki qui défini l'éthique médicale pour l'expérimentation sur des humains. C'est, à mon avis, le point le plus positif de ce procès.

Finalement, des 23 accusés, 7 ont été condamnés à mort et exécutés, quelques acquittements et plusieurs peines de prison allant de 15 ans à la prison à vie. Mais tous les emprisonnés ont été libérés, pour diverses raisons, au plus tard en 1954, soit six ans après la fin du procès. Tous ceux qui n'ont pas été condamnés à mort ont continué leur vie, la plupart en tant que médecins.

Aucun des accusés, condamnés ou pas, ont manifesté des regrets.

Il y a un sentiment d'injustice puisque le comportement de ces médecins n'a pas été une exception dans la période nazie. Plusieurs centaines de médecins adeptes de l'idéologie nazie ont échappé à la justice.

Le cas Mengele est mentionné en passant, par l'auteur, mais pas dans le procès. Peut-être qu'il n'était pas encore connu. Il aurait certainement pu être jugé par contumace, puisque la présence de l'accusé n'était pas obligatoire à l'époque.

L'auteur de ce livre, Bruno Halioua, est médecin dermatologue et enseignant en histoire de la médecine. C'est très important et c'est sûrement grâce à cela que la partie éthique médicale occupe une partie importante dans ce livre.

Les médecins japonais n'ont pas fait mieux, mais cela est une autre histoire...



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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Code de Nuremberg 1947
1. Le consentement volontaire du sujet humain est absolument essentiel. Cela veut dire que la personne concernée doit avoir la capacité légale de consentir ; qu’elle doit être placée en situation d’exercer un libre pouvoir de choix, sans intervention de quelque élément de force, de fraude, de contrainte, de supercherie, de duperie ou d’autres formes sournoises de contrainte ou de coercition ; et qu’elle doit avoir une connaissance et une compréhension suffisantes de ce que cela implique, de façon à lui permettre de prendre une décision éclairée. Ce dernier point demande que, avant d’accepter une décision positive par le sujet d’expérience, il lui soit fait connaître : la nature, la durée, et le but de l’expérience ; les méthodes et moyens par lesquels elle sera conduite ; tous les désagréments et risques qui peuvent être raisonnablement envisagés ; et les conséquences pour sa santé ou sa personne, qui pourraient possiblement advenir du fait de sa participation à l’expérience. L’obligation et la responsabilité d’apprécier la qualité du consentement incombent à chaque personne qui prend l’initiative de, dirige ou travaille à l’expérience. Il s’agit d’une obligation et d’une responsabilité personnelles qui ne peuvent pas être déléguées impunément ;
2. L’expérience doit être telle qu’elle produise des résultats avantageux pour le bien de la société, impossibles à obtenir par d’autres méthodes ou moyens d’étude, et pas aléatoires ou superflus par nature ;
3. L’expérience doit être construite et fondée de façon telle sur les résultats de l’expérimentation animale et de la connaissance de l’histoire naturelle de la maladie ou autre problème à l’étude, que les résultats attendus justifient la réalisation de l’expérience ;
4. L’expérience doit être conduite de façon telle que soient évitées toute souffrance et toute atteinte, physiques et mentales, non nécessaires ;
5. Aucune expérience ne doit être conduite lorsqu’il y a une raison a priori de croire que la mort ou des blessures invalidantes surviendront ; sauf, peut-être, dans ces expériences où les médecins expérimentateurs servent aussi de sujets ;
6. Le niveau des risques devant être pris ne doit jamais excéder celui de l’importance humanitaire du problème que doit résoudre l’expérience ;
7. Les dispositions doivent être prises et les moyens fournis pour protéger le sujet d’expérience contre les éventualités, même ténues, de blessure, infirmité ou décès ;
8. Les expériences ne doivent être pratiquées que par des personnes scientifiquement qualifiées. Le plus haut degré de compétence professionnelle doit être exigé tout au long de l’expérience, de tous ceux qui la dirigent ou y participent ;
9. Dans le déroulement de l’expérience, le sujet humain doit être libre de mettre un terme à l’expérience s’il a atteint l’état physique ou mental dans lequel la continuation de l’expérience lui semble impossible ;
10. Dans le déroulement de l’expérience, le scientifique qui en a la charge doit être prêt à l’interrompre à tout moment, s’il a été conduit à croire — dans l’exercice de la bonne foi, de la compétence du plus haut niveau et du jugement prudent qui sont requis de lui — qu’une continuation de l’expérience pourrait entraîner des blessures, l’invalidité ou la mort pour le sujet d’expérience.
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(p. 108-109)
La collection de squelettes juifs

Rapport sur l'obtention de crânes de commissaires bolcheviques juifs à l'intention de recherches scientifiques à l'université allemande de Strasbourg. Il existe d'importantes collections de crânes de presque toutes les races, et peuples. Cependant, il n'existe que très peu de spécimens de crânes de la race juive permettant une étude et des conclusions précises. La guerre à l'Est nous fournit une occasion de remédier à cette absence. Nous avons l'occasion d'obtenir des preuves scientifiques et tangibles, en nous procurant les crânes des commissaires juifs bolcheviques qui personnifient une humanité inférieure, répugnante mais caractéristique. Le meilleur moyen d'obtenir rapidement cette collection de crânes sans difficulté consisterait à donner des instructions pour qu'à l'avenir la Wehrmacht remette vivants à la police du front, tous les commissaires bolcheviques juifs. De son côté, la police du front devra recevoir des instructions afin de tenir constamment au courant un certain service, du nombre et du lieu de détention de ces Juifs capturés; il aura à les garder jusqu'à l'arrivée d'un envoyé spécial. Celui-ci chargé de réunir le matériel (un jeune médecin attaché soit à la Wehrmacht soit à la police du front, soit un étudiant en médecine pourvu d'une voiture et d'un conducteur), devra prendre une série de photographies, et des mesures anthropologiques; il devra s'assurer autant que possible de l'origine, de la date de naissance, et des autres données personnelles des prisonniers. Après la mort de ces Juifs, dont on aura soin de ne pas endommager la tête, il séparera la tête du tronc, et l'adressera à son point de destination dans un liquide conservateur, dans un récipient scellé spécialement destiné à cet usage. D'après les photographies, les mesures, et d'autres données de la tête et du crâne lui-même, les recherches d'anatomie comparée et les recherches sur la race, sur les données pathologiques de la forme du crâne, sur la forme et la dimension du cerveau et sur beaucoup d'autres choses, pourront alors commencer.
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La profession médicale allemande a été l'une des plus profondément nazifiées avant la guerre : de nombreux facteurs pourraient l'expliquer, nous ne pouvons que le constater, malheureusement sans surprise.
Mais il y a bien plus qu'une lâcheté professionnelle : car le nazisme fut avant tout une idéologie de la race à prétention scientifique.
Entre la doctrine raciste nazie et la science médicale ou biologique de cette époque s'est opérée une double et vicieuse fécondation : les biologistes apportaient leur imprimatur scientifique, les idéologues la traduisaient en termes opérationnels sociétaux et politiques, et donnaient en retour les moyens matériels, de prestige et de pouvoir professionnel qui ont fait de l'anthropologie raciale une discipline reine de l'université nazie.
Or, plusieurs années avant que le nom de Hitler ne fût connu, les adeptes du darwinisme social dans sa version eugéniste avaient déjà introduit dans la société, outre le concept de races humaines (que peu de biologistes dans le monde mettaient alors en doute), celui de hiérarchie raciale et ces notions terribles à nos yeux, mais d'une certaine banalité à l'époque, de vie « ne valant pas la peine d'être vécue » (1920, par des psychiatres allemands) ou de vie « de moindre valeur ». C'est ce terreau qui alimente le nazisme et qui est en retour alimenté par lui. Une mise en œuvre légale des pratiques eugénistes avait eu lieu ailleurs qu'Allemagne, comme argumentèrent avec une grande mauvaise fois les accusés de Nuremberg : une trentaine d'états américains, ainsi que d'autres pays, s'étaient prononcés pour la stérilisation des aliénés et « déviants héréditaires », mais nulle part ailleurs qu'en Allemagne il n'y eut cette collusion de la science biologique avec l’extrémisme politique.
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En effet, en dehors de quelques médecins sadiques l’écrasante majorité des praticiens responsables des expérimentations étaient des praticiens de haut niveau, bons époux, excellents pères de famille, diplômés des plus grandes universités allemandes.
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(p. 103)
Les interventions de chirurgie plastique.

... Le docteur Fritz Fischer, SS-Sturmbannführer de la Waffen-SS, procède à l'ablation de l'articulation de l'épaule (omoplate, clavicule, et tête de l'humérus) d'un détenu du camp, puis la fait parvenir dans un délai extrêmement bref à la clinique d'Hohenlychen où Karl Gebhardt, orthopédiste Richard Schulze et Ludwig Stumpfegger, médecin accompagnateur de Himmler, la transplantent à un patient ayant perdu cette articulation, victime d'un angioblastome. La greffe prend et le cancer ne réapparaît plus chez ce patient; quant au donneur, un malade mental, il est immédiatement exécuté après l'opération par une injection intraveineuse d'essence.
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