Bien sûr, il y avait eu cette étoile mystérieuse où les pommes et les araignées connaissaient une croissance exponentielle ! Bien sûr encore, il y eut ce voyage sur la Lune et ses rebondissements spatiaux, mais jamais jusqu'alors Tintin n'avait rencontré le Troisième type. Ce sera chose faite dans cet album où se retrouvent par ailleurs – certains, pour la dernière fois – de « vieux amis », façon de parler !
On y rencontre aussi un nouveau : le milliardaire excentrique et peu scrupuleux Laszlo Carreidas – caricature de notre
Marcel Dassault –, dont l'épisode des aveux – sous l'effet d'un sérum de vérité –, couplés à ceux d'un Rastapopoulos malencontreusement piqué à son tour, constitue un moment d'anthologie des aventures de Tintin. Ou quand l'inconscient se libère du silence !
N'oublions pas non plus l'étrange personnage télépathe, Mik Ezdanitoff, lequel est en connexion avec une intelligence extraterrestre, dont nous n'apercevrons que l'astronef ainsi qu'un temple érigé quelques milliers d'années auparavant. Ce qui évoque certaines théories sur une présence extraterrestre parmi des civilisations disparues, notamment les Egyptiens ou les Mayas.
Surtout, Vol 714 pour Sydney est un récit dont l'intrigue, excepté le début et la fin, reste confinée sur une île, ce qui en fait, selon moi, le récit le plus vernien d'
Hergé, bien que ce dernier se soit défendu jadis d'avoir lu son aîné. A ce propos, il existe un texte très éclairant sur les étranges similitudes entre les deux oeuvres : Tintin chez
Jules Verne, de
Jean-Paul Tomasi et
Michel Deligne.
En effet, nous voilà précipités, à la suite d'un atterrissage sportif, sur une île volcanique dont les entrailles cachent des mystères. Remplacez l'avion par une montgolfière et vous obtiendrez
L'île mystérieuse !
C'est une histoire qui échappe au contrôle de héros qui ont plutôt l'habitude d'agir sur les événements que de les subir : j'ai parlé du sérum de vérité, mais il y a le détournement de l'avion ; la force télépathique qui impose sa volonté et, enfin, la nature qui, à travers un volcan, dicte sa loi.
Les personnages sont ainsi emportés dans un récit qu'ils ne maîtriseront jamais et dont ils n'auront aucun souvenir, car volontairement frappés d'amnésie par leur ami télépathe. Ils ne pourront donc rendre compte de leurs péripéties. Jusqu'à présent, c'est volontairement qu'ils gardaient le silence, notamment à propos des trésors incas qu'ils avaient promis de ne jamais révéler, dans le temple du soleil.
Enfin, Vol 714 est un album qui explose de toute part et ça, comme dirait Séraphin Lampion, « c'est plus fort que du roquefort ! »