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Citations sur Les papiers de Jeffrey Aspern (33)

Il flottait autour de son nom une odeur de passion impénitente, une impression qu'elle n'avait pas été exactement ce qu'on appelle une jeune personne comme il faut. Était-ce signe que son chantre l'avait trahie, en avait fait de la copie, comme nous dirions aujourd'hui ?
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- Vous, coupable ?
- Je navigue sous pavillon de contrebande.
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J'avais doucement flotté jusqu'à la maison, porté par ma gondole en écoutant les éclaboussements espacés des rames dans les étroits canaux sombres et, maintenant, la seule idée qui me possédait était qu'il serait bon de s'étendre tout de son long, dans l'obscurité embaumée, sur un banc du jardin.
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Entre-temps, les journées d’été arrivèrent et se mirent à passer, et je me souviens d’elles comme étant presque les plus heureuses de ma vie. Je prenais de plus en plus soin d’être dans le jardin chaque fois qu’il ne faisait pas trop chaud. J’avais installé sous une tonnelle un fauteuil et une table basse ; et j’y apportais des livres et des sous-mains (j’avais toujours quelque chose à rédiger), et je travaillais et attendais et rêvais et espérais, tandis que les heures dorées s’écoulaient, et que les plantes buvaient la lumière, et que le vieux palais insondable pâlissait pour bientôt devenir rouge dans le jour mourant, et que mes papiers bruissaient sous la brise capricieuse de l’Adriatique.

(p. 75-76) / traduction de Jean Pavans
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— Oh, j’aime le passé, mais je n’aime pas les critiques, déclara la vieille femme, avec sa belle tranquillité.
— Ni moi, mais j’aime les découvertes qu’ils font.
— Est-ce que ce ne sont pas surtout des mensonges ?
— Les mensonges sont parfois ce qu’ils découvrent, dis-je, en souriant de ma propre impertinence. Ils mettent souvent la vérité à nu.
— La vérité appartient à Dieu, elle n’appartient pas aux hommes ; nous ferions mieux de la laisser tranquille. Qui peut juger… qui peut savoir ?
— Nous sommes terriblement dans le noir, je le sais, admis-je. Mais si nous renonçons à les sonder, qu’adviendra-t-il des belles choses ? Qu’adviendra-t-il des œuvres que j’ai mentionnées, celles des grands philosophes et des grands poètes ? Elles restent de vains mots, si nous n’avons pas quelque instrument pour prendre leur mesure.
— Vous parlez comme un tailleur, dit malicieusement miss Bordereau.

(p. 116) / traduction de Jean Pavans
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Nous fûmes en cinq minutes sur le Grand Canal ; elle poussa alors un murmure d’extase aussi spontané que si elle était une touriste fraîchement arrivée. Elle avait oublié le splendide aspect de cette voie d’eau par une nuit d’été limpide et chaude, et à quel point la sensation de flotter entre les reflets et les palais de marbre disposait l’esprit à une conversation sympathique. Nous naviguâmes longtemps et loin, et, quoique miss Tita n’exprimât nullement son plaisir d’une voix aiguë, je sentis qu’elle rendait les armes. Elle éprouvait plus que du plaisir, elle était transportée ; tout cela représentait une immense libération. La gondole avançait par mouvements lents, pour lui donner le temps de jouir de sa liberté, et elle écoutait le bruit des rames, qui devenait plus sonore, plus liquide et plus musical quand nous passions par des canaux étroits – comme si Venise lui était révélée.

(p. 103) / traduction de Jean Pavans
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J’étais revenu en gondole, au lent murmure scandé de l’aviron dans les eaux noires des étroits canaux, et maintenant, la seule idée qui me sollicitait vaguement était qu’il serait bien agréable de s’étendre de tout son long sur un banc du jardin, dans l’obscurité embaumée. C’était sans doute l’odeur des canaux qui m’y avait fait aspirer, et le souffle du jardin, lorsque j’y pénétrai, confirma mes espoirs. C’était délicieux – c’était le même air qui avait dû frémir des déclarations de Roméo debout parmi les fleurs et tendant les bras vers le balcon de sa maîtresse. Je jetai un regard aux fenêtres du palais, pour voir si, par hasard, l’exemple de la proche Vérone avait été suivi ; mais tout était sombre, comme d’habitude, et tout était silencieux. Juliana, lors des nuits d’été de sa jeunesse, s’était peut-être mise à sa fenêtre pour murmurer des réponses à Jeffrey Aspern, mais miss Tita n’était pas plus la maîtresse d’un poète que je n’étais moi-même poète.

(p. 82) / traduction de Jean Pavans
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Je passais donc les heures tardives soit sur l’eau (le clair de lune à Venise est célèbre), soit sur la splendide place qui sert d’avant-cour à l’étrange vieille basilique de Saint-Marc. (…) La merveilleuse église, avec ses dômes bas et son hérissement de broderies, le mystère de ses sculptures et de ses mosaïques, avait un air fantomatique dans les ténèbres phosphorescentes, et la brise marine circulait entre les colonnes jumelles de la "Piazzetta", linteaux d’une porte qui n’était plus gardée, avec autant de douceur que si elle y soulevait un épais rideau. Alors, il m’arrivait de penser aux demoiselles Bordereau, à la tristesse de leur réclusion dans des pièces qui, malgré leurs dimensions vénitiennes, ne pouvaient manquer d’être étouffantes dans un juillet vénitien. Leur vie semblait à mille lieues de la vie de la "Piazza", et il était sans nul doute trop tard pour convaincre l’austère Juliana de changer ses habitudes.

(p. 81-82) / traduction de Jean Pavans
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Voyez comme la ville s'épanouit, à mesure que l'été avance: comme le ciel , et la mer, et l'air rose, et le marbre des palais frémissent et se fondent tous à la fois!
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C’était ce qu’incarnait la vieille femme — une connaissance ésotérique ; et c’était l’idée qui faisait palpiter mon cœur de critique. Et il battit effectivement plus vite, un soir, alors que j’étais sorti et que je restais un moment avec mon chandelier dans la salle sonore avant d’aller me coucher. C’était comme si, dans le calme de la nuit, après les obstacles de la journée, les secrets de miss Bordereau flottaient dans l’air, comme si la merveille de sa survivance était plus palpable. C’étaient des impressions aigües. Je les recevais sous une autre forme, avec davantage d’une certaine sorte de réciprocité, lorsque je restais assis durant des heures dans le jardin, à regarder, par-dessus mon livre, les fenêtres fermées de mon hôtesse. À ces fenêtres, nul signe de vie ne se manifestait jamais ; comme si, de crainte que je ne les aperçusse, les deux dames passaient leurs journées dans l’obscurité.

(p. 74) / traduction de Jean Pavans
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