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Noémi Cingöz (Traducteur)
EAN : 9782742781126
396 pages
Actes Sud (03/02/2009)
2.81/5   13 notes
Résumé :
Dans une île méditerranéenne, probablement en mer Egée, Leylan fut un jour abandonnée par sa mère. Son père, muré depuis dans le silence, vit avec elle et lui renvoie chaque jour une douloureuse image d'incomplétude. Perdue dans ses hypothèses, culpabilisée par les insulaires, Leylan se tourne vers une diseuse de bonne aventure, auprès de laquelle elle espère comprendre, trouver des réponses, admettre l'abandon. Peu convaincue par ses propos, Leylan convoque l'étonn... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
« La chute des prières » de Sema Kaygusuz (2009, Actes Sud, 420 p.)
Il a fallu quatre ans et demi à Sema Kaygusuz (38 ans) pour écrire ce premier roman, après quelques nouvelles (4 livres publiés en Turquie). J'attends avec impatience les romans suivants (Yüzünde Bir Yer – Cent une érosion ?, publié en 2009).
Revenons à « La chute des prières », livre en deux parties « Raisin » (171 p.) et « Or » (224 p.). Deux parties asymétriques puisque la première a des sous-titres alors que la seconde se décompose en numéros. Les histoires diffèrent aussi, de même que les ambiances. Si l'une est écrite comme un conte, l'autre est un récit allégorique, et ces deux parties se répondent. La première partie raconte la vie de Leylan, jeune fille solitaire qui vit sur une île de la mer Egée avec son père qui se tue doucement dans l'alcool. La seconde partie raconte le voyage d'un jeune garçon (Oeildroit) des plaines anatoliennes qui part sur la route avec sa mère (Femmehomme) et leur cheval (Yasur) pour un voyage assez fantastique à la fin duquel le garçon deviendra Yasur.
La première partie, Raisin, se passe dans une île méditerranéenne, probablement en mer Egée, Leylan se retrouve un jour abandonnée par sa mère, et vit avec son père, muré depuis dans le silence et l'alcool. «Sans subir d'hostilité, de haine ou une quelconque attaque, vous êtes aussitôt projeté au coeur d'une solitude devenant dure comme le roc au fur et à mesure que les jours passent». Elle va voir Letife Keysal, une tzigane, diseuse de bonne aventure, pour comprendre, trouver des réponses, admettre l'abandon où elle se trouve. Elle découvre alors la bibliothèque de livres abandonnés ou oubliés par les touristes quand s'achève l'été. Elle va y chercher son destin. «Le mystère enfoui sous le plaisir de lire et que j'avais été incapable de résoudre avait fini par se dévoiler : les gens ne pouvaient lire que les livres qu'ils connaissaient mais, comme ils ne savaient pas exactement ce qu'ils connaissaient, ils ont été obligés de lire.» Elle invoque alors les divers personnages qui peuplent l'île, avec leurs mystères et leurs croyances puis, toujours insatisfaite, s'éloigne encore du réel pour mieux l'appréhender. L'épisode des chiens abandonnés sur leur île et qui hurlent pendant des jours et des pages sert de toile de fond à la révélation paternelle. Viennent alors s'ajouter les poèmes, mythes et légendes écrites ou issues de la tradition orale. Il en ressort toute une polyphonie métaphorique qui fait écho à sa propre histoire, et l'autorise enfin à devenir adulte. C'est une forme de roman initiatique qui aborde les origines du récit turc et qui s'inscrit au coeur des cultures turques, anatolienne et des iles.
En fait, cet univers est très typique de celui de l'alévisme, la religion actuelle d'un tiers des Turcs, surtout dans la partie anatolienne. C'est une sous-marque plus ou moins issue du chiisme avec des apports chrétiens et du chamanisme. SK a grandi dans cet islam ouvert, (elle est originaire de Samsun, sur les bords de la Mer Noire), où la femme est depuis toujours célébrée à l'égal de l'homme, d'où ses références aussi bien au Talmud qu'à la Bible ou au Coran. «Viens à moi qui que tu sois, juif, chrétien ou apostat». La clef du titre est dans le poème qui conclut le livre : «Même si chacune de mes prières retombe sur cette terre en faisant un bruit sourd, je ne renoncerai pas à ce monde »
La seconde partie, Or, est beaucoup plus fantastique, pratiquement mythique, et également initiatique. Les trois héros, doubles de ceux de la première partie, progressent à leur tour vers des univers inconnus. L'épisode de la forêt (chapitre Six) est à ce point remarquable. Il est suivi d'un long poème en prose.

Les êtres deviennent surnaturels comme la Femmehomme ou simplement métaphoriques comme le voleur, double de la narratrice. « Pendant quelques jours, je cherchai au milieu de la peupleraie une pensée qui me féconderait comme une graine couverte de petits poils qui se dispersent ici ou là. ». Cette partie propose donc au lecteur une véritable quête du sens. Cette recherche est faite par Oeildroit (on découvrira pourquoi ce nom), qui va devenir Yasu (idem, c'est à découvrir, mais on s'en doute). C'est celle de l'histoire, de sa propre histoire, qui n'est qu'enquête sur soi-même.

Assurément Sema Kaygusuz signe là un grand roman, aussi beau que poétique et beau. A découvrir.

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A l'école où je bosse, l'ambassade nous envoie régulièrement une dizaine d'exemplaires d'un journal à destination des français et francophones installés en Turquie.
Dans le dernier exemplaire j'avais repéré l'interview d'une romancière: Sema kaygusuz qui parlait de son premier roman qui était encensé par la critique aussi bien turque que française.
Lors de mon bref passage à Paris pour le weekend de Pâques, je me suis perdue (...) à la Fnac. Je faisais une cueillette savoureuse en me baladant d"un rayon à l'autre quand je suis tombée sur ce bouquin. Je me souvenais de la très belle couverture et du titre, il m'a fallu un petit temps pour ressituer d'où je le connaissais. Et puis, hop, dans le panier. Je te ramène à la maison petit bouquin: en route pour la Turquie.

Ce livre ne ressemble à rien de ce que j'ai pu lire (et apprécier) jusqu'à présent.
J'ai mis un certain temps à le lire parce que la fin de chaque chapitre m'imposait une pose, le temps d'y penser, de comprendre, de savourer les mots et les idées.

L'écriture est très puissante et heureusement les phrases sont courtes, les chapitres nombreux. Ca permet d'alléger une lecture qui serait sinon trop intense.
Mais jamais, je n'ai trouvé l'écriture trop lourde. Elle demande simplement une démarche progressive. C'est une dégustation, pas une goinfrade (amis des mots inventés bienvenus!). Un livre qui demande du temps, de l'investissement.

Le roman est composé de 2 parties, à première vue indépendantes l'une de l'autre mais progressivement on retrouve des liens, des allusions auxquelles on n'arrive pourtant pas à donner un sens précis. Ca reste vague. Mystérieux. Intriguant.

La première partie se concentre sur le sort de Leylan, jeune fille solitaire qui vit sur une île de la mer Egée avec son père qui se tue doucement dans l'alcool. A son drame familial se mêle la force mythologique de l'île, de son histoire, de ses habitants.
La deuxième partie nous conte Yasur, un jeune garçon des plaines anatoliennes qui part sur la route avec sa mère et leur cheval pour un voyage homérique.

Mais je serais bien incapable de vous parler de cette histoire de façon linéaire et logique. Elle est à la fois sombre, très sombre et très lyrique. On est dans un conte, oui, mais pas dans une version épurée de celles qu'on sert aux enfants.
Ce conte-là est tels que le sont à la base tous nos contes: fantasmagorique où l'on retrouve toutes les affres de l'humanité: la vie, la sensualité, la mort, l'ivresse....

Ce livre a une force que je n'avais pas rencontrée depuis longtemps. Cette auteur est une sacré révélation. A suivre donc...
Lien : http://vanillabricot.canalbl..
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Suivant assez régulièrement les lettres turques, attiré aussi par l'élégante couverture, et ayant eu tort de lire d'abord un certain nombre de critiques, j'ai été fort déçu par cette lecture. D'abord, je trouve qu'il est abusif de qualifier le livre de roman: il n'en a pas la structure ni ses personnages n'en possèdent l'épaisseur. Il est divisé en deux parties dont le fil conducteur est très mince: la première rassemble une série de nouvelles (certaines bien faites), qui tournent autour d'un personnage féminin, Leylan, dans le cadre d'une île égéenne. Leylan est incidemment bibliothécaire (affichant un rapport pour le moins ambigu avec le livre et la lecture - mais ça, ça pourrait être du Pamuk, avec moins de justesse toutefois), et substantiellement écrasée par l'alcoolisme de son père (qu'elle semble rejoindre parfois), la disparition énigmatique de sa mère, et un milieu passablement asphyxiant.
Sans y trouver un paysage suffisamment détaillé pour les exigences du réalisme, ni des portraits satisfaisants, j'avoue que si je m'étais arrêté là, ma notation aurait été supérieure.
La deuxième partie, dans laquelle je m'attendais au moins à ces références miroitées à la mythologie anatolienne atavique, ne m'a laissé que du désarroi face à une sorte de réalisme magique (qui pour moi est loin d'être l'apanage des Sud-américains) mal digéré. Une histoire de marche (initiatique???) en rond dans un bois, d'un frêle garçon à un seul oeil, de sa mère androgyne et d'un cheval, seul des trois à porter un nom...
Les ambitions de l'auteure sont de toute évidence mirobolantes. le résultat n'en est pas à la hauteur. Il se trouve que, pour avoir un peu fréquenté cette génération de Turques nouvellistes post 1990, leur prose ne m'étonne plus, et les tentatives des moins talentueuses parmi elles de "edebiyat yapmak" ce qui veut dire bien plus que le sens littéral: "faire de la littérature", m'indisposent désormais.

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J'arrête.
Je ne suis pas prête pour ce livre.

Est il trop pointu ? Moi pas assez ?
Nous ne sommes pas sur la même longueur d'onde.
Je suis parfois à me demander ce que signifie la phrase et même le mot que je viens de lire...

Allez je le pose et sans doute un jour le reprendrais-je... qui sait ?
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C'est un livre qui m'a impressionnée mais que j'ai trouvé vraiment trop dense, j'ai été un peu submergée par toutes les références, toutes les clés de lecture dont beaucoup me manquent tout de même..
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
J'avais ouvert la bibliothèque à huit heures trente, mis mon thé à infuser sur le petit réchaud et fait des mots croisés jusqu'à midi devant ma table en Formica. Cela faisait très longtemps que j'avais renoncé à classer les ouvrages. Ma bibliothèque est une sorte de cimetière des livres. Un lieu défraichi sans lecteur possible. L'hiver, hormis les écoliers venant là pour travailler leurs leçons, il n'y a pas d'allées et venues. Simple rectangle construit au cours des premières années de la république, elle ressemble à un monument funéraire centenaire recouvert de lierre ; des rais de lumière vert cru se faufilent à l'intérieur par les fenêtres de la façade principale. De l'extérieur la bâtisse fait penser à un chagrin recouvert d'une carapace, nul besoin d'y pénétrer pour le ressentir.
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La vérité, n’est-ce pas ce monde changeant qui s’écaille à chaque réminiscence../.. . Cela signifie-t- il que nous naissons à l’obscurité ? Que nous passons notre vie à nous habituer à l’existence à partir du reflet des autres ? La douloureuse solitude des poupées russes ne quittera-t-elle jamais notre cœur ?
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Le mystère enfoui sous le plaisir de lire et que j’avais été incapable de résoudre avait fini par se dévoiler : les gens ne pouvaient lire que les livres qu’ils connaissaient mais, comme ils ne savaient pas exactement ce qu’ils connaissaient, ils ont été obligés de lire
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Viens à moi qui que tu sois, juif, chrétien ou apostat.

Même si chacune de mes prières retombe sur cette terre en faisant un bruit sourd, je ne renoncerai pas à ce monde
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Pendant quelques jours, je cherchai au milieu de la peupleraie une pensée qui me féconderait comme une graine couverte de petits poils qui se dispersent ici ou là.
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