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sur 480 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Pierre et Séverine Sérizy forment un jeune couple à qui tout semble sourire. Pierre est un médecin réputé, il est aussi beau que Séverine est resplendissante. Par-dessus tout, les mariés s'aiment à la folie et vivent dans l'adoration l'un de l'autre. « Quoi qu'il advînt, jamais Pierre ne souffrirait par elle. Quelle merveilleuse chaleur elle se sentait pour cet homme à la respiration d'enfant. Puisqu'entre ces mains reposaient toute sa peine et toute sa joie, elle saurait faire pour lui de chaque journée une journée heureuse. Et cela jusqu'à la fin de leur vie jumelée. » (p. 35) Mais derrière les portes closes de la chambre conjugale, la froideur amoureuse de Séverine fait peser un nuage triste sur le couple, nuage qui se gonfle peu à peu de l'amertume et des remords de l'épouse frigide.
C'est alors que Séverine décide de chercher ailleurs le plaisir qu'elle ne trouve pas avec son mari. Elle entre dans une maison de rendez-vous et offre son corps à des hommes de passage. « le sentiment qu'elle eut de devenir une machine impure la fit frémir encore d'humiliation perverse. » (p. 91) Étrangement, elle trouve enfin le plaisir, loin de Pierre et de son foyer parfait, en devenant Belle de Jour, femme sensuelle et généreuse. « Elle n'était pas venue chercher rue de Virène de la tendresse, de la confiance, de la douceur (de cela Pierre la comblait), mais ce qu'il ne pouvait pas lui donner : cette joie bestiale, admirable. » (p. 99) Malheureusement, la félicité des sens ne dure pas et la double vie de Séverine va causer la ruine de son couple.
Ce roman décrit avec finesse la scission entre coeur et corps, entre sentiment et plaisir. Malgré l'immense amour, voire la ferveur d'amour, que Séverine éprouve pour son époux, elle ne sait pas passer au-dessus d'une barrière physique inexplicable. Son corps ne vibre qu'auprès du vulgaire et s'exalte dans le commun. La pureté de l'affection qui unit le couple est précisément trop grande pour laisser place à l'immédiateté du plaisir. « Séverine eût voulu se faire la servante de Pierre, pourtant elle ne put se résoudre à l'accueillir dans son lit quand, ému par tant de chaleur, il montra le désir qu'il avait d'elle. » (p. 89 & 90)
Pierre est entièrement tourné vers son épouse, obéissant à tous ses désirs, et elle le lui rend bien. Chacun veille sur l'autre, jusqu'à la dévotion. « Quand tu es malheureux, je vois bien que tu es toute ma vie. » (p. 31) Mais Séverine ne peut cesser de se chercher, convaincue qu'elle est de ne pas être accomplie, ni épanouie. Hélas, même la révélation de sa complétude ne suffit pas à l'apaiser puisque cela nourrit une nouvelle culpabilité. D'épouse incomplète, elle devient épouse infidèle et souillée. Et Séverine vit dans la terreur que sa vie secrète, sous toutes ses formes, soit découverte.
Joseph Kessel, dès le début du roman, écrit l'histoire d'un couple qui court à l'abîme parce que le coeur entrave le corps et parce que le corps a honte de n'être pas aussi sublime que le coeur. La dichotomie est presque monstrueuse, mais Séverine ne l'est pas. J'ai éprouvé une grande compassion et beaucoup de tendresse pour cette femme tellement éprise de son époux qu'elle ne veut lui offrir que son âme, et pas son corps qui est contingent et faillible.
On a dit de ce roman qu'il était sulfureux et il l'était probablement lors de sa sortie. Les esprits bien pensants aiment se gausser et médire des histoires bancales des autres. Mais Séverine et Pierre partagent un amour si sublime qu'il est transcendé par les erreurs de l'épouse, comme la plus belle des fleurs qui s'épanouit sur le fumier. Jamais Séverine n'aime autant son mari que lorsqu'elle commet ce qui peut l'en éloigner pour toujours. Alors, qu'ils médisent ceux qui vivent dans un confort médiocre. Séverine, le temps d'un instant qui reste immortel, a été plus sublime que les plus vertueux.
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À sa sortie en 1928, Belle de jour fit scandale.
Un scandale qu'en 2019 on a du mal à comprendre.
Que de changements intervenus dans les mentalités en moins d'un siècle ! Nous ne vivons plus dans le même monde.
Le sujet est périlleux et le roman aurait pu basculer à tout moment dans le vulgaire ou le mauvais goût.
Or, grâce à la finesse de l'auteur, grâce à son immense habileté à manier la langue, il n'en est absolument rien.
Joseph Kessel sait dire beaucoup avec des mots innocents, et n'a pas besoin d'obscénités pour suggérer des choses plutôt osées.
Il s'est pourtant cru obligé de s'expliquer un peu dans une préface très bien tournée et qui commence ainsi :
"Je n'aime guère les préfaces qui expliquent les livres et il me déplairait singulièrement de paraître m'excuser d'avoir fait celui-ci. Je n'en ai pas écrit qui me soit plus cher et je crois y avoir mis l'accent le plus humain. Ce langage peut-il n'être pas compris ?"
Ayant lu Les mains du miracle, je savais que Joseph Kessel écrivait magnifiquement bien ; Belle de jour me conforte dans cette opinion.
Quel plaisir de lire une si belle langue ! Quand elle est, en plus, au service d'une histoire forte, c'est un régal. Joseph Kessel, par la subtilité de son écriture décrit au plus près les sentiments humains et fouille au plus profond les psychologies.
Le thème est simple sur le papier, l'auteur le dévoile dans sa préface :
"Ce que j'ai tenté avec Belle de jour, c'est de montrer le divorce terrible entre le coeur et la chair, entre un vrai, immense et tendre amour et l'exigence implacable des sens."
Joseph Kessel dit avoir "tenté", je fais partie des lecteurs pensant qu'il a réussi.
Séverine, le personnage principal, est parfaitement tiraillée "entre le coeur et la chair", comme le souhaitait son créateur et la lutte permanente qui a lieu en elle entre ces deux aspects de sa vie va la mener très loin. Trop loin.
Le roman achevé, j'ai relu le prologue qui m'avait fait une forte impression en début de livre. Je lui ai trouvé encore plus de force, sachant quelles allaient en être les conséquences.
L'image de Catherine Deneuve en couverture du livre m'a poursuivie pendant toute ma lecture : la beauté froide et distante qui était la sienne lorsqu'elle était jeune lui permet parfaitement d'incarner physiquement Séverine.
Alors, ce roman est-il choquant ?
Absolument pas !
Mais il est troublant, assurément.
Le texte a vieilli, mais garde tout de même ses qualités littéraires. Il témoigne d'une époque où le respect était de mise entre les personnes, même entre personnes peu fréquentables, même entre la tenancière d'une maison close et ses pensionnaires.
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Le contraste entre l'apparente pureté de Séverine l'héroïne de ce roman et son comportement dépravé est la clé de ce livre. Comme si le sentiment amoureux était un frein au plaisir, comme si la relation sexuelle ne pouvait être que tarifé, comme si la femme ne s'épanouissait que dans des relations conflictuelles ou dangereuses. Car le sujet est la, on ne sais pas si l'auteur par le biais de ce texte a voulu se venger du genre féminin dans son ensemble ou d'une histoire malheureuse, mais la critique voir la caricature sont acerbes. La gentillesse du mari prévenant et compréhensif à l'excès en fait une victime toute désignée des tromperies de sa femme. Celle-ci prude et effacée la nuit se prostitue la journée dans une maison de passe de préférence avec des hommes rustres et peu cultivés. Quand elle finira par prendre une petite frappe de banlieue comme amant le drame inéluctable se dénouera. Ecrit en 1928, ce roman a choqué par les moeurs qu'Il décrivait. Il n'a plus ce pouvoir maintenant même s'il garde une force qui rend encore sa lecture troublante... un classique
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Quel plaisir que de retrouver l'écriture de Joseph Kessel. L'histoire qu'il nous relate dans Belle de jour pourrait être vulgaire et peu attachante, or la finesse de son écriture et sa grande connaissance des sentiments humains, y compris les plus cachés rendent ce livre d'une terrible beauté. L'on ne s'attachera sûrement pas à Séverine, ni à Pierre son époux, mais on les comprendra tour à tour sans jugement et l'on se surprendra à aimer comme ils aiment et à pleurer sur leurs souffrances. Aux antipodes d'un manichéisme trop souvent présenté, Joseph Kessel aura réussi son pari : celui « de montrer le divorce terrible entre le coeur et la chair, entre un vrai, immense et tendre amour et l'exigence implacable des sens ».
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Mes souvenirs du célèbre film de Bunuel sont bien trop lointains et flous pour comparer film et roman. Il ne me vien pas cependant pas en mémoire avoir trouvé à l'écran l'intensité du livre.
Kessel nous fait comprendre parfaitement Séverine et sa dualité à la fois complexe et simple.
Les pages sont belles, puissantes. le roman est fort et les personnages tout sauf inexistants ou caricaturaux.
On est emporté jusqu'au dénouement et on referme le livre heureux d'avoir découvert ce classique et heureux du plaisir retiré.
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👱🏻‍♀️ « La frayeur portée à son extrême possède ceci de commun avec la jalousie que le moindre possible devient certitude pour celui qui en souffre. » (p. 137)

👱🏻‍♀️Séverine et Pierre filent le parfait amour, un amour platonique, empreint de pudeur et de dévotion extrême. Les ardeurs de Pierre sont souvent éteintes par la pruderie de Séverine, qui n'ose laisser ses passions charnelles prendre le dessus de sa droiture spirituelle. Un amour presque maternel les unit, une bienveillance étrange dont un couple devrait être étranger ; nul doute que le feu qui les embrase chacun ne dépassera jamais les frontières de leurs rêves les plus fous.

👱🏻‍♀️ Un jour pourtant, après être tombée malade et avoir eu vent des aventures d'une de leurs amies désormais perdue, Séverine se rendra dans une « maison », tenue par Mme Anaïs, et dans laquelle elle va devenir « Belle de Jour ». Car si elle éprouve pour Pierre des sentiments louables, des penchants inavouables la taraudent jour et nuit, dont l'assouvissement est inéluctable. En proie à une véritable guerre intérieure, Séverine vacille, se divise, elle mène une double vie qui, très vite, lui échappe et la précipite dans le malheur le plus total.

👱🏻‍♀️ Écrit en 1928 et porté à l'écran par Buñuel en 1967, ce roman est un chef d'oeuvre. Tiraillement d'une femme esclave de ses élans charnels et pourtant si dévouée à l'amour de son mari, Kessel saisit à merveille les errances d'un désespoir infini.

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Un livre qui m'a tenu en haleine d'un bout à l'autre. Je l'ai lu dans un souffle, il m'était impossible à refermer. J'ai donc poursuivi ma lecture tard dans la nuit car il fallait que j'accompagne Séverine jusqu'au bout ...

Séverine, jeune femme de 23 ans est mariée à Pierre depuis deux ans et pourtant tout deux agissent comme s'ils venaient de se rencontrer. L'amour qui les unit ne fait aucun doute. Ils sont de plus jeunes, beaux, aisés, ... Severine a donc tout pour être heureuse mais un petite ombre plane dans ce tableau idyllique ; leurs relations intimes sont rares car la jeune femme ne montre aucun goût pour le plaisir de la chair. Elle semble froide, distante, frigide et n'éprouve que de la satisfaction à donner du plaisir à Pierre au vu de l'amour qu'elle lui porte. Un jour, une de ses amies lui parle d'une connaissance, une femme du monde qui mènerait une double vie, elle fréquenterait les maisons closes ... Loin de la rebuter, Séverine va être fascinée par ce monde interdit et ne pourra plus arrêter le mécanisme qu'elle enclenche dès ce moment ...

Vous dire que j'ai aimé ce livre est peu de le dire. Tout d'abord j'ai été conquise par l'écriture de Joseph Kessel qui a quelque chose d'un peu désuet mais de poétique, sans compter la richesse du vocabulaire qui rend la lecture particulièrement plaisante.

Le personnage de Husson m'a fasciné. Pervers et manipulateur, c'est à la fois l'homme qui répugne le plus notre héroïne et celui qui la comprendra le mieux et dont au final elle sera la plus proche quand se produira le choc. C'est le mal dans toute sa splendeur qui la conduira au pire tout en révélant par comparaison ce qu'elle a de plus lumineux et ce qu'il a perdu ...


Le thème de cette histoire, la décadence d'une femme, ne m'a pas laissé indifférente. Probablement parce que les personnes qui mènent une double vie m'ont toujours un peu fasciné. Puis le personnage de Séverine est particulièrement attachant. L'amour qu'elle ressent pour son mari est le plus pur qui soit et pourtant cohabitent en elle des désirs inavouables contre lesquels elle luttent avant de s'y abandonner et qu'ils ne deviennent même une véritable addiction. C'est tout le combat entre la raison et les désirs qui devient passionnant. Pour certains, Séverine sera perçue comme un cas d'école, ceux qui liront le livre comprendront. Pour moi c'est avant tout une femme faible qui se laisse emporter. Elle n'a rien d'une libertine, elle vit dans la culpabilité de céder à ses pulsions et fantasmes, tout déviants qu'ils soient. C'est l'histoire universelle des hommes et des femmes déchirés entre raison et passion.

Lien : http://depuislecadredemafene..
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Le roman sulfureux de Kessel dont est issu le chef d'oeuvre de Bunuel. Kessel sur les tréfonds du psychisme d'une belle jeune femme se prostituant pour échapper à son milieu bourgeois qui l'entrave comme un carcan. Sensualité et érotisme puissants.
Lien : https://lediscoursdharnois.b..
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Mon premier roman de Joseph Kessel... et surement pas le dernier ! L'auteur a une écriture si fine, vraiment magnifique, désirant décrire le plus fidèlement possible les sentiments du coeur humain. Il décrit principalement ceux de Séverine, qui est déchiré entre l'amour pour son mari, la fierté de son rang social et le besoin qu'elle ressent pour cette autre vie, cette vie qui la mêle au "peuple" et qui fait qu'elle est anonyme en cet endroit.

La quatrième de couverture évoque la citation de l'auteur. On pourrait croire en la lisant qu'il s'agit de narrer la difficulté pour une femme de choisir entre son mari et son amant, qui existerait par un besoin de la chair. Ici il n'en est pas question. L'auteur présente cette difficulté mais met l'amour en avant, Séverine ne voulant pas tromper son mari mais désirant autre chose. Cela semble paradoxal quand l'oeuvre nous est inconnue mais Joseph Kessel manie l'écriture de manière formidable, permettant au lecteur de comprendre, de se mettre à la place de cette femme et d'essayer de la comprendre.

Les sentiments sont plus qu'explorés, Séverine est un personnage attachant. Son histoire pourrait en rappeler d'autres, paraître assez banale mais la situation de l'héroïne est unique, incomparable et tout simplement merveilleuse.

En lisant ce livre, comme dit précédemment, je ne m'attendais pas à cette histoire. Je n'avais pas vu non plus le film, qui je crois ne reflète pas vraiment le livre, et lorsque j'ai compris qu'il s'agissait de prostitution j'ai été un peu rebutée... Mais quelle erreur !!! le roman n'est pas là pour souligner la bassesse, la légèreté de la femme ou la bassesse de l'âme, non, le roman est un condensé d'émotions fortes, de grandeur et de beauté. Je crois que ce roman est plus qu'à recommander !!!
Lien : http://mary-book.blogspot.fr..
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Ce roman est d'une précision et d'une lucidité remarquables dans la description des "zones d'ombre" de l'âme humaine en matière de sexualité. Il rive son clou autant à l'époque pudibonde à laquelle il fut écrit que, prophétiquement, à la pseudo-libération d'aujourd'hui.
Contrairement au film, il livre la clé qui permet de comprendre pourquoi et comment, de fil en aiguille, Séverine Sérizy "en est arrivée là". Par là-même, l'héroïne acquiert une humanité que les raccourcis du cinéma et le froide personnalité de Catherine Deneuve ne permettaient aucunement de saisir.
Au-delà de cet inoubliable portrait d'une femme meurtrie et coincée dans la culpabilité sociale (de naguère comme de maintenant), les personnages secondaires sont eux aussi parfaitement esquissés, dans les traits du moins qui permettent de comprendre leurs interactions avec Séverine.
Lien : https://livre.fnac.com/a1897..
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