Le King et Sherlock Holmes ont une chose en commun : lorsqu'ils voient la campagne et les petites maisons éloignées les unes des autres, ils ne pensent pas au côté bucolique ou pittoresque de la chose.
Le Maître de l'Épouvante y voit de la matière pour ses romans et le Consulting Detective y voit matière à des meurtres qui peuvent se commettre en toute impunité.
Le King sait aussi qu'il n'y a pas besoin de faire intervenir des monstres velus, poilus, des horreurs sur deux pattes pour épouvanter le lecteur.
Non, un simple chat peut suffire à vous faire dresser les cheveux sur la tête…
Considéré comme le livre le plus terrifiant qu'il aurait écrit,
Simetierre est un roman aux personnages attachants, ce qui rendra l'Horreur encore plus noire.
Stephen King est un Maître dans l'agencement de son récit et, à l'aide de petits détails, d'anecdotes, de légendes, de faits banals de la vie de famille, il parvient à distiller une ambiance qui lui est propre.
Le fantastique est présent, jamais de manière trop prégnante, toujours discrètement, mais vu que le diable se cache dans les détails, ce sont eux, ces petites choses insignifiantes, qui donneront toute la dimension au récit.
Éléments pris séparément, on dirait la vie ordinaire d'une famille ordinaire, avec des voisins sympas mais ordinaires…
Mais le King, grâce à ses ingrédients habituels, nous prépare une toile gigantesque, une toile qui prendra forme une fois que toutes les pièces éparpillées du puzzle seront bien rangées.
Le récit se lit tout seul : ça commence comme une rivière tranquille et je me suis laissée bercer par la courant gentillet, mais trompeur.
Lorsque cela commence à bouger et que les remous font danser l'embarcation, il est déjà trop tard. La berge est trop loin et on est trop engagé sur cette rivière que pour espérer faire demi-tour.
Accroché au bastingage, vous priez pour ne pas chavirer avec Louis, le personnage central, vous ramez de toute vos forces pour tenter vous éloignez de ce courant qui commence à devenir furieux. Peine perdue, pauvres fous !
Alors que vous soufflez, parce que votre frêle esquif a fini de danser, telle une coquille de noix sur la rivière sauvage, vous entendez au loin un grondement, celui des rapides qui vous mèneront à une chute vertigineuse.
J'ai terminé cette lecture totalement KO, les 250 dernières pages étant d'une telle intensité dramatique que c'est comme si notre barque percutait un rocher affleurant au milieu de la rivière déchaînée.
Le Mal rôde et je l'ai croisé, son souffle malveillant était sur ma nuque et mes poils se sont hérissés. Pas à cause d'un monstre quelconque, non, juste à cause de ce que ce Mal pouvait faire dans l'esprit des gens : les pousser à faire des choses…
Sans jamais sombrer dans le pathos, le King fait monter la douleur, vous donnant envie de hurler avant de vous rendre compte que non, on peut aller encore plus loin dans l'horreur et là, ça vous laisse glacé, sans voix.
Une lecture qui restera gravée dans mon âme, une lecture qui explore notre refus de voir disparaître ceux auxquels on tient le plus; que ce soit nos proches ou tout simplement nos compagnons à quatre pattes de notre enfance, ceux qui nous ont mis face-à-face avec la Mort et notre condition de mortel. Ceux pour qui on a pleuré des rivières.
Jusqu'où pourrait-on aller pour voir revenir ceux que l'on aime ? Et bien, je suis allée voir et j'en suis revenue glacée, terrifiée, horrifiée, la gorge nouée (avec un certain accident) et les yeux noyés de flotte.
Encore un putain d'excellent bouquin du King du Maine !! (à ne pas confondre avec celui de Memphis).
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