Strip-tease en ex-RDA
C'est après l'assassinat de Walter, vieil homme aigri de tout, par sa femme que l'on découvre l'existence d'une vie après la mort. Cette renaissance s'avère plus morne encore que la vie passée mais donne l'occasion d'espionner les agissements des villageois occupés de façon toute aussi vaine les uns que les autres. Un roman aussi morbide qu'hilarant sur les existences entre parenthèses.
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Walter ne retenait rien de ce qu'elle lui racontait, il écorchait les noms de ses connaissances et ne lui prêtait aucune attention quand elle le corrigeait. Si elle parlait d'inviter quelqu'un, il était contre, il refusait de jeter l'argent par les fenêtres et ne supportait pas les inconnus. Lorsque Hilde opposait qu'ils n'avaient pas nécessairement à rester des inconnus, il l'invitait à plus de jugeote, car alors ils ne seraient plus des inconnus et les non-inconnus, il les aimait encore moins. Il se plaignait de la nourriture, trop fade ou trop salée, mais il n'oubliait jamais leur anniversaire de mariage. Pour les vingt ans et comme tous les ans, il lui offrit un caoutchouc. Une affreuse petite forêt s'étendait désormais dans leur salon.
Vingt ans, dit-elle, l'âge qu'un cockatiel peut atteindre en cage.
Dans la mer il y a des éponges qui peuvent vivre jusqu'à dix mille ans, répondit-il.
Les deux n'ont pas le choix, dit Hilde, étonnée qu'il ne la contredise pas.
(p.42)
Mon Dieu, mon Dieu, dit la folle.
Et il est où ton dieu, répond Pede.
Il nous a quittés. Nous n'avons plus à être sauvés, dit Norbert.
Dieu est aussi utile ici que le dentifrice, rétorque la folle.
(p.109)
Walter ne s'était pas couvert, il avait du mal à respirer. Ses pieds étaient gros et osseux, ils pointaient vers l'extérieur quand il marchait. Il semblait éreinté. Elle se dit : ça doit tellement lui coûter toute cette gaieté. Il était devenu un vieil homme aimable. Elle le couvrit, toucha ses cheveux, fouilla sa mémoire à la recherche d'un sentiment à son égard, mais rien. Il commença à ronfler, émit de petits bruits tremblotants. Elle aurait pu prendre le fusil, mais opta plutôt pour la hache. Hilde la laissa tomber sur sa tête, comme pour fendre une bûche.
(p.17)
Buchtipp von Angelika Klüssendorf: "Lügen über meinen Vater" von John Burnside (Knaus)