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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Combattre toujours la laideur de l'Immonde

Sébastien Lapaque a trouvé auprès des amis et d'une voisine qui s'intéresse aux moineaux la recette pour regarder le monde différemment. Alors même que son couple part à vau-l'eau, il va trouver des raisons de s'enthousiasmer.

La vie de Lazare va basculer un jour de février. Béatrice, avec laquelle il partage sa vie depuis une quinzaine d'années, est partie quelques jours chez ses parents à La Rochelle. Seul, il regarde sa vie et le monde et comprend combien les valeurs sont faussées, combien nous vivons dans un Immonde. «Un monde qui n'en est plus un, un monde dont le visage est une absence de visage.»
En revenant de «ses emplettes» avec des oeufs et des herbes pour préparer une belle omelette, il va croiser sa voisine et lui proposer de partager son repas. Mais Lucie va décliner l'invitation. Comme il va le raconter à son ami et confident Walter, ce n'est que le lendemain qu'ils feront plus ample connaissance. Qu'elle le suivra chez lui et s'endormira sur son canapé, non sans lui avoir révélé sa passion pour les moineaux, une espèce animale qui meurt en silence.
À la suite de ce premier échange, il va tomber dans «l'obsession amoureuse», même si ses camarades de poker, spécialistes des libellules ukrainiennes et des présentatrices de télévision lui ont bien expliqué combien ka chose était risquée.
À la question de Béatrice – Et maintenant? – il ne voit guère qu'une réponse, la séparation. Même s'il ne veut pas en prendre l'initiative. Car les années de vie commune semblent avoir figé une relation que ni la conseillère conjugale, ni l'acupuncture, ni même la procréation médicalement assistée n'ont pu empêcher de sombrer. Il faut dire que le travail de sape des beaux-parents aura été constant et payant.
Désormais, son nouvel horizon s'appelle Lucie. Converser avec elle lui permet de découvrir un autre monde, mais aussi de développer sa théorie de l'Immonde. «En rompant tout lien avec la réalité, l'univers sans regard qui s'était substitué à celui de la nature imposait aux individus de vivre sous le régime de la meute. Créé par l'artifice du commerce et du capitalisme, il se définissait par la rencontre de la technique, du collectif et de l'abstrait. Cette doublure qui enserrait la réalité pour la rendre inaccessible, c'était l'Immonde.»
Sébastien Lapaque passe alors ses journées au crible de sa théorie. du football aux crises politiques, de l'éducation à la religion en passant par les questions environnementales, sans oublier l'amour, il nous propose une vision du monde différente. Ce monde est aussi tellement beau avec la musique de Bach, avec une partie de rugby épique, avec un livre de Shakespeare, un verre de romanée-conti et de nouveaux amis et même avec une promenade entre les tombes du cimetière Montparnasse avec Lucie. Cette femme qui a entraîné Lazare dans une lumière qu'il ne connaissait pas et qui, avec des accents à la Bernanos, a le pouvoir d'entrainer le lecteur vers la beauté.
«Othello, les oiseaux, son ton, son rire frais comme un ruisseau de printemps, son refus des assignations à résidence, son âme blottie en elle comme un petit enfant contre le sein de sa mère. J'ignorais ce qu'elle attendait de la vie, mais je savais ce qu'elle avait fait de moi.»


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J'ai lu une longue interview de Sébastien Lapaque dans une revue littéraire
C'est un écrivain érudit. Pour ce livre, ses références sont La Divine Comédie et L'Odyssée d'Homère
Il a mis six ans à l'écrire
L'histoire est celle d'un homme ordinaire ,Lazare,qui subit une vie sans aspérités.Une vie triste dans un environnement morne et désabusé
Une vie que beaucoup de nos contemporains subissent au quotidien sans grand espoir de changement.
Au bout du compte , un vie pour pas grand chose
La force du livre , sa richesse, c'est la transformation progressive de ce quidam qui va petit à petit s'élever vers la beauté du monde , à travers une vision différente de l'environnement et aussi à travers un cheminement spirituel vers la joie
Mon roman est du côté de la joie du bleu de Chartres écrit Lapaque
A l'inverse du récit de Dante , Lazare, va s'élever progressivement pour trouver la lumière : beauté et spiritualité
Ce qui surprend , c'est que , dans ce monde sombre et finissant, Lazare ne va voir que la beauté, ce qui explique le titre magnifique
Il n'y a pas de mauvais personnages .Au contraire, il révèle la part d'humanité chez tout être humain
C'est un livre très abouti, travaillé avec beaucoup de références culturelles , un vrai travail d'écrivain
Il évite bien des clichés.Lazare n'est jamais seul, par exemple
A titre personnel, je ne me suis pas senti en phase avec le personnage de Lazare car je n'ai pas du tout le même ressenti terne et pessimiste du monde actuel et j'ai l'impression de trouver un peu de beauté chaque jour
Dans un monde qui se voudrait grisaille ,malheur ou apocalypse,Sébastien Lapaque apporte une vision lumineuse du monde qui fait du bien

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Pour nous, lecteurs prisonniers du bagne matérialiste, privés d'espérance, de passé et d'avenir, la lecture de ce roman de Sébastien Lapaque risque d'être difficile, à cause des malentendus et des contresens que nous risquons de commettre. C'est le récit à la première personne d'une libération intellectuelle et spirituelle du héros, qui passe par les trois temps théologiques, l'enfer d'avant la Loi émancipatrice (de Moïse), dans le monde Immonde, le temps de la Loi incarné par un personnage juif qui revient à ses sources, et le temps de la grâce, le temps chrétien, l'enracinement des hommes au ciel et sur terre. Structuré comme La Divine Comédie, le roman nous conduit vers une sorte de fin heureuse.

On risque donc de se tromper en lisant ce livre. Déjà, le titre laisse attendre une espèce de "roman doudou", de livre coach, et les fautes de langue et de style qu'on y trouve montrent que le romancier ne s'est pas entièrement dégagé de la langue de notre époque, celle de "l'Immonde". Heureusement pour eux, les habitués de cette sous-littérature ne poursuivront pas la lecture, et trouveront le roman "trop catho" ("trop catho" est le commentaire d'un Babeliote sur les Pensées de Pascal).

Un autre piège, inverse, attend le lecteur sensible aux auteurs antimodernes, aux dénonciateurs du règne de l'argent, de la machine et des bons sentiments. Souvent, avec les écrivains qu'il affectionne, ce lecteur prend tout son plaisir littéraire aux outrages faits au monde tel qu'il est, l'Immonde du roman. Cette attitude de constante révolte, de constant dégoût, nourrie aux essais de Philippe Muray et incarnée aujourd'hui par Michel Houellebecq, Patrice Jean, Bruno Lafourcade, nous place dans une relation de haine envers le monde, aussi stérile que le conformisme idiot des progressistes. Lazare, le héros de Sébastien Lapaque, découvrant que notre monde est proprement l'Immonde, ne reste pas prisonnier de cette révélation, il ne se plaît pas à le haïr ni à l'accabler d'imprécations. Il va au-delà, entraîné par la grâce divine vers une seconde révélation, celle de la beauté du monde créé par Dieu, préservé et cultivé par certains hommes, non encore assassiné par les manieurs d'argent, le tourisme et les forces de progrès. Ce personnage semble toutefois se convertir au christianisme, à la vie, à la fraternité et à l'ordre chrétiens, plus qu'au Christ lui-même, peu présent, un peu évanescent dans le livre.

C'est là que le bât blesse. On sait bien que l'Enfer de Dante est un poème plus intéressant que son Paradis. Il faut un génie poétique et littéraire hors pair pour rendre la Grâce, la beauté et le bonheur attirants en littérature, surtout quand on s'adresse à des lecteurs privés d'espérance, sceptiques et cyniques. Il n'est pas certain que le talent de Sébastien Lapaque suffise. Son roman contient de belles intuitions et de belles pages, des scènes lumineuses de Paris, de la Bretagne, de la forêt et de la ville pleines d'oiseaux, mais souffre aussi de lourds défauts : le récit à la première personne empêche tout jeu et toute distance critiques du narrateur et du personnage ; de longs passages à thèse maladroitement insérés dans le récit, développent les idées de l'auteur ; les scories linguistiques et stylistiques de la langue immonde encombrent sa prose ; enfin il n'est pas suffisamment armé contre les clichés de l'Immonde, ses abstractions moderneuses, ses "paysages absolus" et autres niaiseries. Sébastien Lapaque rappelle le second Huysmans, celui des romans de la conversion : devenu catholique, ayant l'ambition de participer au renouveau de l'art chrétien, il est resté marqué par les tares littéraires et idéologiques de son ancien maître Zola. Il n'a pas converti sa langue et son art, et cela se voit. Sébastien Lapaque est encore trop peu inactuel.

Malgré toutes ces réserves, "Ce monde est tellement beau" est un beau livre, imparfait, maladroit mais intéressant : un essai d'art chrétien. On lira avec beaucoup de profit l'interview que Sébastien Lapaque a accordée à Jacques de Guillebon et Jérôme Besnard, du magazine L'Incorrect de janvier 2021. Sans la recommandation de ce journal, je n'aurais jamais ouvert ce livre au titre alarmant.
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Ce livre est un livre difficile.
Difficile pour l'auteur, qui s'est lancé dans le récit d'un itinéraire spirituel, qui me parait au final assez crédible. Cet itinéraire rejoindra certains, quand d'autres ne seront pas du tout touchés (ce qui constitue un premier élément de crédibilité). Saluons l'audace du thème, qui n'est guère courant à notre époque qui préfère l'émotionnel et le superficiel aux thématiques spirituelles.
Saluons aussi un style assez précis, avec quelques pages magnifiques, notamment les toutes premières.
Mais le livre est difficile aussi, hélas, pour le lecteur. Il reste très cérébral et manque de souffle, si bien que j'ai pu avoir parfois le sentiment d'étouffer, notamment dans la dernière partie. Rien de bloquant cependant pour un lecteur qui recherche un peu de réflexion.
Pour terminer cette critique, j'ajouterais que le principal intérêt du livre demeure dans la colère qu'il porte et qui n'est pas sans rappeler Bernanos. Comme toute colère, celle-ci vise parfois juste, mais parait aussi parfois excessive voire injuste. Elle nous bouscule, nous dérange, nous horripile, mais ne laisse pas franchement indifférent.
Je ne conseillerai ce livre qu'à des personnes qui aiment réfléchir et qui s'intéresse à la diversité des itinéraires intérieurs. Je parle de diversité, car il me parait moins universel dans son approche que d'autres romans qui ont exploré cette veine (on pense à Dostoïevski, à Bernanos...). Un certain type de lecteurs appréciera à sa juste valeur ce livre qui sort vraiment de l'ordinaire.
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Sébastien Lapaque est un romancier et essayiste singulier dans le monde des lettres : spécialiste du grand Georges Bernanos, il partage avec son maitre un gout pour l'intransigeance morale et la défense de la dignité humaine. Ce monde est tellement beau, son dernier roman publié aux éditions Actes Sud est l'histoire de Lazare, un professeur d'histoire-géographie sérieux et sans ambition matérielle particulière dans lequel beaucoup de lecteurs pourront se reconnaitre. Quitté subitement par sa compagne Béatrice avec laquelle il n'est pas parvenu à avoir d'enfant – ce qui a cristallisé les échecs du couple -, bouleversé par la mort d'un collègue de travail dont il était proche et frappé par la révélation de ce qu'il appelle « l'Immonde », il entreprend par la force des choses une sorte de pèlerinage intérieur l'emmenant vers de nouveaux espaces qui remettent profondément en cause ses mécanismes existentiels. Cette histoire très contemporaine de descente aux enfers et de renaissance spirituelle rappelle évidemment la « trilogie de la conversion » de Huysmans. L'observation sociale de Sébastien Lapaque est aigue, critique et brutale, la narration entraine bien le lecteur depuis ce mal du siècle qu'est l'indifférence ou la résignation vers la joie de se sentir à nouveau vivant et libre des convenances héritées de nos milieux, de nos familles. Une lecture fluide et remuante qui est finalement une belle réussite.
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