AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,43

sur 156 notes
5
4 avis
4
4 avis
3
7 avis
2
1 avis
1
0 avis
* Mini-trilogie : Valentin 1, 2, 3 *

Valentin 1 « Lettres portugaises », Gabriel Guilleragues
Valentin 2 « Laissez-moi », Marcelle Sauvageot
Valentin 3 « Mon cher amour... », Julie Maillard

On ne saurait réduire Lettres portugaises, recueil de cinq lettres d'amour d'une religieuse portugaise à un officier français, à une envolée lyrique, précieuse et répétitive. Il constitue un texte fondateur dans la littérature classique. Il marque un tournant vers un discours porté exclusivement sur la nature des sentiments, et aussi, l'origine du genre épistolaire.

Son écho le plus retentissant est la Princesse de Clèves, publié neuf ans plus tard.

De nombreux romans par lettres, français et étrangers, sont inspirés des Lettres portugaises, à noter, parmi d'autres, « La Nouvelle Héloïse », « Les Liaisons dangereuses », « Clarisse Harlowe », « La Religieuse » de Diderot et « Cleveland » de l'Abbé Prévost.

Ce qui est fascinant aussi ce sont toutes les conjectures qui ont germées autour de la genèse de cet opuscule.

Je tiens entre mes mains un charmant petit livre cartonné bleu, au format poche (10X15), absent de Babelio car sans numéro ISBN, publié par la « Guilde du Livre », en 1956.

Il est préfacé par Dominique Aury, pseudo de Anne-Cécile Duclos (1907-1998), autrice du sulfureux « Histoire d'O », qui résume les présupposés de l'histoire réelle.

En 1666, à Beja, Algarve, Portugal, au couvent royal de Notre-Dame-de la Conception, une nonne de vingt-six ans, Mariana Alcoforado, a une liaison passionnée avec le marquis de Chamilly, colonel, qui participe à la libération du Portugal, envahi par l'Espagne.

Nonobstant l'absence de preuve que Mariana et Chamilly se soient réellement rencontrés et aimés, le doute subsiste quant à la paternité de ces lettres.

« Au mois de janvier 1669, Claude Barbin, libraire « au Palais, sur le second perron de la Sainte-Chapelle » publiait à Paris, avec « privilège Du Roy », un petit livre intitulé « Lettres portugaises, traduites en françois ». Son édition s'ouvrait par un avis au lecteur, dont le but était d'éveiller et de soutenir la curiosité d'un public mondain ». (Article de Maurice Toesca, Revue des deux mondes, juillet 1954).

Nous devons l'essentiel de la documentation à Claude Aveline, qui en 1951, l'a regroupée dans « Et tout le reste n'est rien ».

Il désigne Gabriel de Guilleragues (1628-1685), écrivain mondain, membre de la cour, habitué des salons littéraires, qui a remis lesdites lettres à Claude Barbin, comme l'auteur. Il pourrait n'en être que le messager, voire le traducteur, mais Aveline estime que même si Mariana aurait pu parler le français et Chamilly, le portugais, il est peu probable qu'une nonne portugaise du XVIIème siècle ait pu produire des lettres dans un langage aussi soutenu.

C'est intéressant de noter des similitudes entre Lettres portugaises et d'autres oeuvres classiques de la même période, notamment Dom Juan de Molière, d'où un doute de paternité qui s'étend à l'ensemble des oeuvres du règne du roi Soleil.

Dominique Aury va même jusqu'à supposer que Lettres Portugaises aient pu être écrites par Racine, sachant que Racine et Guilleragues étaient amis !
Commenter  J’apprécie          3217
C'est le premier roman épistolaire, paru en 1669. Et c'est une longue lamentation tragique. Nous n'avons en effet que les lettres de Marianne, et juste un vague écho de celles de l'amant, qui ne sont pas de véritables lettres pour Marianne puisqu'elles ne parlent pas d'amour.
Les lettres s'adressent à un absent et semblent se perdre dans le vide. Elles sont une tentative d'abolir la distance entre les amants, distance qui ne cesse de s'accroître au fil des cinq lettres. le format épistolaire du roman est donc pleinement justifié par l'histoire racontée, il n'apparaît jamais artificiel. (Je viens de lire Lady Susan de Jane Austen où la chose était plus douteuse).
A partir de la lettre III, on lit la déception et la lucidité de Marianne face à l'absence de réponse de son amant. Elle se met à écrire pour elle-même puisque le dialogue se révèle impossible. Dans la lettre V, on voit qu'il n'est plus question d'échange, de message mais plutôt d'un approfondissement de la connaissance de soi-même, par le biais de la lettre. Elle peut dire "J'ai éprouvé que vous m'étiez moins cher que ma passion".
Pour autant que je sache, c'est le premier roman à tout miser sur un "je" pour bâtir son intrigue, si simple soit-elle.

Ceci posé, comment dire ? J'ai, je crois, passé l'âge de me pâmer sur la passion amoureuse ! Je sens comme un mouvement de recul devant cette logorrhée monomaniaque très bien écrite. Je suis du côté de l'amant dans cette histoire. Courage, fuyons ;)
Commenter  J’apprécie          115
Lettres portugaises ou lettres d'une religieuse portugaise, un écrit qui exalte la douleur, dépeint le vide, le manque après la rupture.

Cinq lettres d'une beauté incroyable, d'une sincérité profonde. D'abord publiées anonymement puis sous le nom de Guilleragues. Un titre également modifié plusieurs fois. Les lettres portugaises ont un contexte d'écriture et de publication mystérieux, ajoutant un voile sublime sur l'émotion peinte, sur cette religieuse torturée.
Commenter  J’apprécie          43
En fait de roman épistolaire, il y a beaucoup mieux : "Clarisse Harlowe" ou "Les liaisons dangereuses" ou encore "Les souffrances du jeune Werther" ou "Delphine" de Germaine de Staël : mais toutes ces oeuvres ont été écrites au 18 ème siècle.

Pourquoi cette oeuvre de Guilleragues, publiée en 1669 (donc au 17 ème siècle) a-t-elle eu tant de succès ?

Pour son caractère scandaleux, sûrement, et sa langue maîtrisée :

- son caractère scandaleux : une nonne portugaise écrit des lettres d'amour à un officier français qui l'a abandonnée : pas la moindre référence religieuse dans cette correspondance, mais l'élan d'un amour humain profane ; pas non plus de sentiment de faute de la part de Marianne (c'est le prénom de l'épistolière) : la culpabilité qui fait le fond du catholicisme n'est même pas évoquée ; pas d'opprobre de la part de l'institution ecclésiastique ni de la famille : la religieuse délaissée est l'objet de l'apitoiement de tous ; on tente de lui rendre son épreuve plus douce. C'est un peu "hors sol" "hors moeurs du temps", d'où peut-être les grandes controverses qui apparurent dès la parution et les multiples tentatives de remaniements pour aplanir les aspects subversifs ;

- sa langue : Gabriel Joseph de Lavergne, comte de Guilleragues, est un gentilhomme gascon né à Bordeaux en 1628 : il se garde bien de signer son texte : écrire pour un aristocrate du siècle est une faute de goût, il faut tenir son rang et n'attirer les regards sous aucun prétexte.
Le style des "Lettres" est un style classique mâtiné d'occitanismes, notamment dans la concordance des temps des verbes : par exemple les subjonctifs y sont déjà remplacés par des temps de l'indicatif.
Cette oeuvre a fait l'objet de multiples études grammaticales, sémiologiques et linguistiques : elle constitue manifestement un vivier d'informations.

Pourtant je n'ai pas été émue par les accents de souffrance de Marianne aux prises avec son séducteur : trop de forme, pas assez de fond ; trop de sentiments archi-connus et montés en épingle.

Nous ne sommes plus sensible à l'érotisme suggéré (plus efficace sur les lecteurs de l'époque que la crudité à laquelle nous nous sommes habitués) ; l'expression féminine de la passion ne constitue plus une transgression, elle est presque devenue un genre littéraire en soi.

Il faut faire un effort de remise dans le contexte : ce roman épistolaire annonce le siècle suivant.

Commenter  J’apprécie          119
Un roman épistolaire qui marque, on ressent réellement bien la candeur et la profondeur des sentiments de cette religieuse.
Un vrai déchirement des coeurs qui se lit avec plaisir, cela nous fait penser aux premiers déboires sentimentaux de jeunes amoureux.

A lire,

Clément

Commenter  J’apprécie          10
Comment se montrer tempéré, quand ce qui brûle vos doigts, glace votre coeur ?

Ce sont là cinq lettres qui voient le jour pour la première fois en 1669. Rédigée par une nonne portugaise, d'une intensité amoureuse qui sait vers quoi elle tend, qui y tend avec férocité. Mariane fait de l'amour sa religion, de l'autre, son Dieu, l'autre, soldat français qui l'abandonne après l'avoir séduite. Ses mots qui traduisent toute la passion, le désespoir & la déchirure, n'auront que silence comme écho !

Mais susciter des émois que l'on n'éprouve, n'est-ce pas là l'exacte définition de l'imposture ?

Tragiquement on suit l'évolution de ses pensées & de ses émotions, confuse, dilapidée, indéfinie, telle une mer sans rivage où les flots se lèvent, retombent, s'éclipsent, éplorée certes, mais finalement point sotte. Idéaliste & lucide à la fois, puisqu'assurement par-delà le chagrin, tout est avenir, espérance & ardeur, peu importe le temps qui passe.

D'une beauté sans pareille, ces missives sont sensibles, sincères & majestueusement écrites. L'auteur prétendait n'avoir fait que les rassembler, alors que ses successeurs affirment qu'il les aurait écrites lui-même, d'autres réfutent catégoriquement cette hypothèse, arguant qu'il n'y a qu'une femme follement éprise pour coucher de la sorte ce qu'elle ressent.
Mouais, si je me fais l'avocate du diable, je dirai que Zweig est bel & bien un homme, n'empêche, il a bien pondu Lettre d'une inconnue ! Bref, ce mystère à beaucoup contribué à leur succès.

Matisse en a fait l'illustration en 1946, le modèle de ses portraits sera la jeune Doucia Retinsky.

C'est le genre de bouquins oubliés injustement, que vous trouverez peut-être en fouinant dans le grenier poussiéreux de vos arrières grands parents !
Alors fouinez & lisez !
Commenter  J’apprécie          60
Si vous aimez les succès de librairie, je vous présente celui de... 1669 !
Ici cinq lettres écrites par Mariane, une religieuse portugaise, à son amant perdu, un officier français.
Mais que de mystères autour de ces lettres ! Aujourd'hui, nous savons de manière quasi certaine, qu'elles ont été créées de toutes pièces, mais ce mystère a duré presque 300 ans !!!
A l'époque où un certain pessimisme régnait dans la société et où le roman baroque, empli de grandes aventures et d'exploits héroïques, n'a plus la côte, ces lettres symbolisent les attentes des lecteurs d'alors : des histoires plus proches des hommes y montrant leurs faiblesses.

Ici, Mariane est la seule voix que l'on entend , elle nous lance une complainte pleine de passion, de douleur et de rage.
Quittée par l'homme qu'elle aime, c'est un cri incessant dû à l'absence qui nous ait donner d'entendre, la plainte douloureuse d'une femme délaissée. Jusqu'à sa dernière lettre (l'est-elle vraiment ?) dans laquelle elle se résout à reprendre sa vie en main, ayant trop désespérée de penser à voir le retour de l'être aimé...

Un livre donc qui s'inscrit dans son temps mais qui est aussi intemporel de par ce spectacle de la passion tragique et de cette profonde solitude qui émanent de ces lettres...
Commenter  J’apprécie          00
Les Lettres Portugaises, succès paru en 1669, font toujours l'objet d'interrogations quant à leur paternité ou, plus exactement leur parentalité, car elles furent d'abord longtemps considérées comme l'authentique et scandaleux cri du coeur d'une religieuse portugaise avant d'être attribuées à l'imagination du français Gabriel de Guilleragues (d'ailleurs, qu'en pensez-vous ?).

Le livre est court, on évite les longueurs de l'étalage des sentiments. Les transports amoureux de la religieuse portugaise sont magistraux, servis dans une langue parfaite et très fluide du XVIIème siècle.

« Je me suis laissé enchanter par des qualités très médiocres, qu'avez-vous fait qui dût me plaire ? » Les tourments dans lesquels sa passion la plonge sont millénaires : l'attente nerveuse y côtoie la colère stérile et impudique et, aux gémissements infantiles succèdent les amères et sages lucidités. Se dessine finalement tout le deuil d'une passion, la narratrice avouant sans orgueil être plus amoureuse de l'amour que du sujet amoureux, « j'ai éprouvé que vous m'étiez moins cher que ma passion ».

« Je vous ai aimé comme une insensée ». Ce qui donne son remarquable tragique à ce texte, c'est l'élan des vagues de la passion, qui inlassablement se brisent contre la digue de l'indifférence. Face à l'amour en sens unique, quel panache ! Un athée se risquerait peut-être à dire que qui mieux qu'une nonne pour nous parler d'amour non partagé ? (le comble...).

« Je me souviens pourtant de vous avoir dit quelquefois que vous me rendriez malheureuse : mais ces frayeurs étaient bientôt dissipées, et je prenais plaisir à vous les sacrifier, et à m'abandonner à l'enchantement, et à la mauvaise foi de vos protestations ». Ces fragments épistolaires d'un discours amoureux font du lecteur le destinataire des missives, la prise à témoin frôle la prise à partie. Car nous ne disposons pas des lettres réponses de « l'amant » et même si nous en devinons les contours, prenons garde à la subjectivité de la narratrice, nous aurions tous trop tôt fait de condamner l'officier français sans lui laisser la parole, méfions-nous de la vision déformée, parfois de mauvaise foi, d'une passion sourde à toute raison et qui se veut au-dessus des frontières, des rois et des guerres.

Le fait de n'avoir que la perspective de la religieuse jette un voile de mystère sur cette toile dont on ne peut reconstituer le tableau d'ensemble. Peut-être est-ce au lecteur de poursuivre cette oeuvre, de sorte qu'il ne tient désormais qu'à vous de jeter l'ancre à Lisbonne…ou sur le papier !
Commenter  J’apprécie          642
Roman épistolaire qui met en scène une jeune religieuse éperdue d'amour qui écrit à son amant parti en France. Si ce genre a été très populaire à la sortie de ce roman, je trouve que ça a mal vieilli et que les émotions sont très artificielles.
Commenter  J’apprécie          30
Chère lectrice, Cher lecteur,

Depuis très longtemps, je voulais lire les Lettres d'amour de la religieuse portugaise. Mariana Alcoforada (1640-1723), religieuse résidant au monastère de Beja, signe 5 lettres d'amour. Elle écrit avec toute la passion amoureuse dont elle est capable à un jeune officier français qui l'a abandonnée après l'avoir séduite. Dès la première missive, Mariana clame :

“Mais il n'importe, je suis résolue à vous adorer toute ma vie, et à ne voir jamais personne, et je vous assure que vous feriez bien aussi de n'aimer personne. Pourriez-vous être content d'une passion moins ardente que la mienne? (p. 15)”

L'amour s'avère sa religion. L'autre devient l'objet d'adoration, son dieu…

Ces lettres voient le jour pour la première fois en 1669 et elles connaissent un succès immédiat. de plus, dès leur publication, les gens sont curieux par rapport à l'identité de cette religieuse et de son officier français. le mystère entourant ce recueil semble avoir contribué à sa popularité. Toutefois, il sera établi que l'auteur est Guilleragues.

D'ailleurs, Jean-Jacques Rousseau dit de ces lettres : « Je parierai tout au monde que ces lettres ont été écrites pas un homme».

Stendhal écrit dans la Vie de Rossini «Il faut aimer comme la Religieuse portugaise, et avec cette âme de feu dont elle nous a laissé une si vive empreinte dans ses lettres immortelles». La religieuse portugaise institue donc un art d'aimer, un modèle à suivre.

Rainer Maria Rilke traduit les lettres en allemand et il mentionne : « Les paroles de cette religieuse contiennent le sentiment tout entier, ce qu'il a d'exprimable et ce qui est en lui indicible. Et sa voix est pareille à celle du rossignol, laquelle n'a pas de destin».

Philippe Sollers stipule : «La lucidité qui dévoile un aveuglement de cette dimension est unique».

Dans la solitude du couvent, Mariana explore sa féminité, sa sensibilité en couchant sur le papier les sentiments de son âme. Elle passe à travers diverses émotions comme le désespoir, la cruauté, la jalousie, la folie, le doute, l'amour. Elle est confrontée au silence de celui qu'elle aime et communique son désarroi d'être ainsi abandonnée à ses pensées. Ses lettres deviennent une échappatoire à la folie, un exutoire, une affirmation de soi dans une société où la liberté d'aimer est bien mince.

“J'ai bien du dépit contre moi-même quand je fais réflexion sur tout ce que je vous ai sacrifié : j'ai perdu ma réputation, je me suis exposée à la fureur de mes parents, à la sévérité des lois de ce pays contre les religieuses, et à votre ingratitude, qui me paraît le plus grand de tous les malheurs. Cependant je sens bien que mes remords ne sont pas véritables, que je voudrais du meilleur de mon coeur avoir couru pour l'amour de vous de plus grands dangers, et que j'ai un plaisir funeste d'avoir hasardé ma vie et mon honneur : tout ce que j'ai de plus précieux ne devait-il pas être en votre disposition? (p. 40)”

Quelle amoureuse cette religieuse portugaise! Toutefois, je la plains car elle reçoit une froide lettre de son officier qui lui fait réaliser qu'il est indigne de ses sentiments.

Les 5 lettres débutent par ces termes et elles peuvent évoquer, entre autres, les éléments entre parenthèses :

◾Lettre I : Considère mon amour (crainte de l'abandon, espoir du retour de l'être aimé)
◾Lettre II : Il me semble que je fais (espoir que l'autre ne l'oublie pas)
◾Lettre III : Qu'est-ce que je deviendrai (délibération, pulsion de vie, de mort, chantage, etc.)
◾Lettre IV : Votre lieutenant vient (crise intérieure, dévoilement du drame)
◾Lettre V : Je vous écris pour la dernière fois (fin de la passion, lucidité)

Ces dernières ne sont pas très longues…En les lisant, le lecteur s'imprègne de la puissance d'aimer de cette religieuse. Tout en elle n'est qu'émotion. Il se désole également de son aveuglement, car il ressent sa souffrance et il juge d'une certaine façon cet officier français de l'avoir abandonnée après l'avoir séduite.


“Cependant il me semble que j'ai quelque attachement pour des malheurs dont vous êtes la seule cause : je vous ai destiné ma vie aussitôt que je vous ai vu, et je sens quelque plaisir en vous la sacrifiant. J'envoie mille fois le jour mes soupirs vers vous, ils vous cherchent en tous lieux, et ils ne me rapportent, pour toute récompense de tant d'inquiétudes, qu'un avertissement trop sincère que me donne ma mauvaise fortune, qui a la cruauté de ne souffrir pas que je me flatte, et qui me dit à tous moments : cesse, cesse Mariane infortunée, de te consumer vainement, et de chercher un amant que tu ne verras jamais, qui a passé les mers pour te fuir, qui est en France au milieu des plaisirs, qui ne pense pas un seul moment à tes douleurs, et qui te dispense de tous ces transports desquels il ne te sait aucun gré. (p.12-13)”

Pourquoi ces lettres fascinent-elles encore aujourd'hui après tant d'années? Pourquoi le lecteur vient-il encore s'y abreuver ? Ce sont des questions que nous pouvons nous poser… Comme l'amour est sans aucun doute le plus grand des mystères, la religieuse portugaise nous en parle, nous le fait vivre, nous le dévoile en nous ouvrant son coeur. Elle nous permet de ressentir sa douleur, sa passion comme personne. Sa plume s'avère magnifique. Elle offre à son lecteur un témoignage de son drame intérieur à travers une évolution sentimentale, celui d'une femme amoureuse qui prend conscience qu'elle n'est point aimée, qu'elle a été trompée et bafouée. En fait, elle n'est probablement qu'un trophée de chasse pour l'officier. Ses mots sont puissants… Elle crie à celui qui l'a séduite tout le feu dévorant son âme. Elle est consumée par le sentiment amoureux. Elle brûle… Comme elle l'écrit à l'homme qu'elle aime :


“Il est vrai que j'ai eu des plaisirs bien surprenants en vous aimant […] (p. 49).”

Je ne peux que vous encourager à lire ces 5 lettres… Si vous aimez le genre épistolaire et le sentiment amoureux, vous serez comblé, comme je le suis, par cette brève lecture qui oscille entre passion et désespoir….

Les avez-vous déjà lues? Qu'avez-vous pensé de ces missives?

Bien à vous,

Madame lit

Guilleragues et Philippe Sollers (dir). Lettres d'amour de la religieuse portugaise, Bordeaux, Élytis, 2009, 90 p.

Lien : https://madamelit.wordpress...
Commenter  J’apprécie          40




Lecteurs (546) Voir plus



Quiz Voir plus

Les Chefs-d'oeuvre de la littérature

Quel écrivain est l'auteur de Madame Bovary ?

Honoré de Balzac
Stendhal
Gustave Flaubert
Guy de Maupassant

8 questions
11169 lecteurs ont répondu
Thèmes : chef d'oeuvre intemporels , classiqueCréer un quiz sur ce livre

{* *}