Je suis relativement déçu par ce polar, dont un bandeau affiché par mon libraire himself m'annonçait une écriture coupée au couteau pour une intrigue haletante au possible.
Le sujet est intéressant s'il en est, et d'actualité : l'effondrement. Mais ce n'est abordé que par les passions/avis de certains personnages/suspects relativements tarés/marginaux. Par contre le côté "génie du mal" du PDG de la grosse boîte dont j'ai oublié le nom, Rorh le paraplégique là, fait vraiment "too much", on se croirait dans un vieux James Bond. Or, ce qui a du cachet dans un vieux James Bond, ça fait hors de propos pour un polar censé se passer aujourd'hui, censé être crédible...
Ce qui m'a le plus déçu, c'est le profil des flics. Irina la flic "qui en veut", dure au mal, qui refuse d'aller chez le toubib malgré ses pertes de conscience à répétition : énervant. Son côté cow-boy, à partir interroger des suspects potentiels seule, hors de sa juridiction, dans un autre pays est particulièrement énervant : qui fait ça ? Je ne suis pas flic bien sûr, mais ça ne répond à aucune règle de sécurité, et aucune règle morale/législative non plus... le commandant Ronan aussi, qu'on nous présente comme un professionnel qui connaît les rouages du métier, qui en a vu des vertes et des pas mûres... Qui devient parano à la limite du trouble maniaco-dépressif (je prognostique ça sans être psy hein) à peine a-t-il lu quelques lignes du bouquin d'un autre personnage sur l'effondrement, me paraît curieux. Comment est-il arrivé à ce niveau de hiérarchie et de respectabilité s'il est à ce point inconstant ? Et bien sûr, son côté cow-boy aussi, insupportable, qui se manifestera quand, sans véritable raison, il va malmener/tabasser un suspect sans abri, et encore plus à la fin, quand il partira en expédition punitive suicidaire pour buter l'assassin de sa famille, sachant qu'il laissera son fils orphelin, mais je m'en branle-on-a-buté-ma-femme-ma-raison-de-vivre-il-faut-que-je-cogne, franchement, c'est fatigant à lire. Ce genre de psychologie à deux balles ça fait vraiment bas du front, et ce n'est pas ce qu'on est en droit d'attendre d'un haut gradé (ni d'un bas gradé d'ailleurs)
Bref, des personnages flics énervants, et relativement peu professionnels donc.
Quant aux délinquants... Mouais. On a un radicalisé de la gachette ex du RAID devenu éco-terroriste (je résume), un PDG paraplégique suspect, un youtubeur milliardaire suisse spécialisé dans les vidéos de survie, et quelques militants de bas étages accros aux stages commandos...
Pour relier tout ça (les flics et les brigands, on a un meurtre tarabiscoté dans un bunker haute sécurité, suivi de près par un second, moins tarabiscoté, d'un jeune découpé dans une rivière...
Le problème de ce roman ce n'est pas son univers collapsologiste, ni les opinions tranchées (quoique bien argumentées) des suspects, c'est plutôt les motivations dignes d'un méchant de James Bond, avec les moyens dignes... D'un méchant de James Bond, pour un résultat qui se serait voulu digne aussi d'un méchant de James Bond. Pas très réaliste tout ça, et c'est dommage, ça aurait gagné à être plus près de la réalité.
Une relative déception donc. Même si l'écriture est fluide et qu'on a envie de savoir ce qu'il va se passer après à chaque péripétie, ça n'enlève pas l'amertume de la construction des personnages ni de celle de l'intrigue principale relativement bancale...
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Ce roman m'a effrayé, tout simplement car ce qu'il décrit nous pend au bout du nez. L'auteur montre bien comment la peur de l'effondrement (que ce soit une pandémie, une guerre, une catastrophe climatique…) peut conduire à des dérives qui sont au final, pire que le mal qu'elles prétendent combattre. L'auteur dresse un portrait noir d'une partie de la société, de ceux qui ne croient plus en notre avenir collectif et qui préfèrent se réfugier dans des bunkers… ou pire, bien pire ! le sujet est parfait pour explorer les affres de la société contemporaine.
Le résultat est glaçant et surtout extrêmement prenant. Aucun temps mort, on est pris dès le premier chapitre avec une scène inaugurale marquante. Un PDG est assassiné dans un bunker a priori inviolable, près de Paris. Comment le tueur a-t-il pu entrer et ressortir d'un tel lieu ultrasécurisé ? Et pourquoi les riches et les puissants se préparent-ils à un prochain effondrement en se barricadant dans des bunkers ? Au même moment, le cadavre d'un jeune youtubeur survivaliste est repêché dans un étang près de Lyon. A priori, rien ne relie ces deux affaires même si on se doute bien qu'elles vont finir par se rejoindre, ce qui arrive effectivement, pour mettre à jour un complot cauchemardesque.
Le style est efficace, visuel. Les chapitres sont courts et s'enchaînent rapidement, d'autant qu'on passe d'une histoire à l'autre. le rythme ne faiblit jamais et des rebondissements et des sous-intrigues relancent constamment l'envie de continuer la lecture.
J'ai aussi aimé les personnages, leur côté humain, loin de la perfection. Ils ne sont pas irréprochables moralement ou « politiquement correct » mais on comprend leur choix face à ce qu'ils découvrent. Et au final, on s'interroge sur soi-même : quel est mon propre rapport face à cette peur ancestrale de l'effondrement ?
Un nouvel auteur à suivre !
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L'histoire commence avec un meurtre dans un bunker inviolable, ambiance Mystère de la chambre jaune. Comment le tueur a-t-il fait ? Suspeeeeense ! Il n'est pas évident d'en dire plus car je risquerai de dévoiler des parties de l'intrigue. Je parlerai donc plutôt de la construction du récit. On suit deux flics sur deux affaires a priori sans lien. L'histoire alterne entre ces deux enquêtes et nous plonge dans le milieu du survivalisme, ce qui va mettre les nerfs de nos deux policiers à rude épreuve.
Sombre mais diablement efficace, ce roman fait frissonner autant qu'il interroge !
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Cette idée de fin du monde n'était que le délire d'une poignée d'exaltés en mal de mission et de sensations fortes. Le genre à passer ses journées sur Internet à regarder des vidéos complotistes.
Mais le blindage mental de Ronan s'était effrité. Et depuis deux jours, il avait l'impression d'être soumis à une véritable pilonnage. Une brèche s'était ouverte. Il ne pouvait pas le nier. Et si jamais ces gens-là avaient raison ? Même un tout petit peu ?
Mais le bonheur était une drogue puissante. Il l'avait su à la seconde où il avait pris son fils dans ses bras. Une seule dose suffisait.
Il avait vaguement conscience d'avoir régressé au stade de tube digestif, mais ça ne le dérangeait pas. Tant qu'on lui laissait ses habitudes.
Sébastien Le Jean - Le grand effondrement