Très beau cadeau de la ville de Vitry aux élèves entrant au collège en 2005, pour transmettre des valeurs de solidarité et d'humanisme aux futurs citoyens Vitriots. Ce qui relie ces textes est le thème de la paix et du refus de la guerre à toutes périodes de l'humanité. C'est un message d'espoir pour que la tolérance, la compréhension, le dialogue et la coopération entre les peuples soient toujours le seul chemin pour résoudre les conflits de façon pacifique.
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Ô amour!
Aveugles ou voyantes nous sommes les porteuses
de ta flamme ô amour!
Nous répandons sous tant de formes ta semence!
Nous avons foi en l’espérance!
Nous savons le prix de la vie
car ce qui naît somnole en nous,
et près de ceux qui trépassent
nous veillons.
Pour la millième fois nous avons relavé
les chemises ensanglantées des champs de bataille.
Pour la millième fois nous avons ressoudé
les foyers disloqués par la guerre,
jardinières d’enfants et gardiennes des nids.
Nous n’avons nul autre besoin que la paix!
Contre la faim, contre l’ordure et la gangrène,
Nous menons l’incessant combat.
De cette bouche qui veut embrasser, qui veut rire,
comment ne pas clamer
dans un seul cri ce mots si bref, si vrai :
la paix! nous voulons la paix!
Ces mains qui vous emballent vos casse-croûte,
qui câlinent les enfants et refont les lits,
comment ne lèveraient-elles pas pour jurer :
nous défendons la paix!
Aveugles et voyantes nous sommes les porteuses
de ta flamme, ô amour!
Nous répandons sous tant de forme tes semences!
Nous avons foi en l’espérance!
Au nom de cet amour et de tous les espoirs
Nous défendons la paix!
(Jarmila Urbankova)
Espoir
Après un jour de pluie, un jour
de pluie. La séquence logique du temps
se manifeste dans le gris du ciel; toutefois
le soleil se laisse deviner derrière
les nuages, et l’homme espère
que le beau temps vienne après la pluie et que
le soleil dissipe la grisaille des nuages.
Le temps, ainsi, nous donne l’image
de ce que nous sommes en droit d’espérer, et nous aide
à éprouver, en ces jours pluvieux, notre froid
sentiment de l’hiver : comme si le soleil
et la pluie n faisaient pas partie
de ce monde naturel, que nous regardons
comme s’il était un miroir de l’âme.
Mais les nuages se moquent bien
de tout cela; ils recouvrent lentement, à mesure
que la journée avance, tout espoir
d’été. Seuls les oiseaux, battant
leurs ailes contre le ciel, nous disent
qu’après le temps, d’autres temps
viendront, par=delà nous-mêmes.
Et la joie brève de leur vol
est un rayon de soleil en ce jour de pluie.
(Nuno Júdice)
Courants d’amour
par temps de paix
Parfois une épée traverse la
nuit depuis les étoiles, son
trait éblouit le fond du ciel,
les tours dressées dans le
vide, les jardins de cendre.
Miracle sur la terre.
Autour des mégapoles, les
dépôts d’ordure accroissent
leur force magnétique, le blé
en herbe ondule aux collines
de détritus.
La rose a beau répandre ses
pétales sur le sol, ses graines
maturent dans les boîtes de
conserve.
Miracle sur la terre.
Un vent de choses par
chacun méconnues modifie
les patries, déplace les
chemins, les prisonniers
désertent leurs prisons, leurs
voix se cassent puis chantent,
reflets tremblés dans la
chaleur.
Une épée traverse nuit.
La gazelle est au point d’eau,
invisible à l’œil du chasseur,
dans les cultures qui vont
disparaître, dans les mots
anciens, elle appelle l’avenir.
//Annie Salager (1965-)
Soleil
Je te donne mon souffle
Et la dernière flamme.
Et je prends ta chaleur
Pour oublier le noir, l’inconnu et la peur.
Je te donne
La course de mon cœur
Le dessin des cheveux sur la plage des draps.
Je veux prendre ta vie dans mon sang.
Je veux perdre ma vie pour tes mains.
Je m’en vais, poignardée
Dérivant dans tes veines
Et je renais en flammes
Et te ferme les yeux.
Tu es aveugle. Pour mieux voir
Quand chavire avec nous un soleil éclaté :
Je suis plus près que tu ne crois.
(Madeleine Riffaud)
Courants de paix par
temps de guerre
Non, il ne voulait plus de lui-
même. Son corps était
obscur, trop de nuit
l’habitait. Il marchait dans le
froid et la chaleur, aveuglé
par le désert, en remâchant
une salive de cendre. Toute
violence venait de le
déserter. On appelait çà la
guerre du Golfe, allait-il
mourir, ce n’était plus une
question.
Pressé par une généalogie
humiliée, il avait mené trop
de batailles avec son bâton
pèlerin ; quelques-unes
contre lui. Il les revoyait
maintenant, lentes, difficiles.
Lui avaient-elles mis un peu
de jour au cœur, comme un
bol de lait de chamelle pour
la soif ?
Le ciel vibrait d’étoiles au-
dessus de sa tête. Il chercha
en grelottant une trace
d’aurore, tout était sombre.
Il crut comprendre le Coran
pour la première fois. Et au
bout de jardins qui lui
l’appelaient. Il se désaltérait
à leur eau fraîche parcourue
de lumière
//Annie Salager (1965-)