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EAN : 9782742734078
175 pages
Actes Sud (16/08/2001)
3.5/5   13 notes
Résumé :


A quarante ans passés, Solange s'emploie à maintenir en elle d'anciennes ferveurs humanistes comme pour protéger à son insu le sommeil où sa vie et son couple sont en train de sombrer.

Un soir, un jeune violeur de "la cité derrière" la réveille du songe où elle se tenait, la projetant dans le cauchemar de sa presque mort lors d'une nuit interminable, dont chacun, autour d'elle, va bientôt s'employer à occulter la barbarie.

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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Elle vivait tranquille, amoureuse de son mari dans une maison terne. Les espoirs de la jeunesse se sont effrités, sont tombés en poussière comme celle qui recouvre les objets qui jonchent son atelier, comme la poussière qui saupoudre ses vitres. Elle vivait comme engourdie, repliée sur ses rêves et ses illusions. Son mari l'appelle toujours sa "Sardine" mais il détourne trop rapidement son regard quand il l'embrasse. de fait, elle ne voit plus rien, n'entend plus rien et, au fond, a-t-elle envie de .... "se réveiller" ?
Jusqu'à la nuit où, son mari en déplacement à l'autre bout de la France elle se trouve seule à affronter la rage destructrice d'un jeune à la tête vide. Ligotée cruellement aux montants de son lit, battue, menacée d'un couteau qui peut la "crever" à tout moment, puis violée, toute son énergie, son intelligence, sa finesse seront mobilisés pour survivre, revoir la lumière du jour. Juste survivre. La force de sa parole convaincra son tortionnaire, qui peu à peu laissera voir sa jeunesse, sa pauvreté. La pauvreté financière n'est rien à côté de la pauvreté de sa personne, pauvreté de pensée, pauvreté de sentiments, pauvreté d'élocution, bref, pauvreté à tous les étages !
Arrivé à ce stade du livre, le lecteur est étourdi de violence à en avoir le souffle suspendu. Et au petit matin, le"gamin" comme elle l'appelle s'en va. Lui, rien ne l'aura marqué ; sauf peut être qu'il n'a pas trouvé de fric ! Mais elle ! "Restait la lumière éblouissante de ce jour gris, l'enivrante certitude d'exister " : c'est une guerrière, une survivante elle a vaincu et savoure cette vie qu'elle a réussi à conserver, seule, sans aucune aide.
Arrive l'appel téléphonique de son mari auquel elle raconte ce qui vient de lui arriver. Et la réponse claque :"Et tu voudrais que je revienne ? Nom d'un chien, ça tombe mal. En plein festival ...". A partir de là une autre violence se déchaîne, peut-être plus cruelle que celle du "gamin" car cruauté émanant de ceux qu'elle aime et dont elle croyait être aimée. Mis a part les mots qu'elle aura dits et qui auront été jetés sur le papier du procès verbal de dépôt de plainte, plus personne ne voudra/pourra l'entendre. Comment peut-elle accepter qu'on se détourne d'elle, elle, la victorieuse. Et là où le sauvage ne l'aura pas détruite, ce sont le silence de ceux qu'elle croyait appartenir à la même espèce qu'elle, les lettrés, les "généreux", ce sont ceux-là qui la mettront à terre.
Superbe roman magistralement écrit qui nous emmène dans cet enfer de l'inhumanité quotidienne. Sans expressément le dire, Virginie Lou exprime combien l'humanité c'est la parole, les mots pour le dire, les mots à entendre, à écouter. Oui on entend bien avec le coeur mais encore faut-il que cette parole passe par les lèvres de l'un et les oreilles des autres. La cruauté est autant l'apanage d'un "gamin" de dix-huit ans que celui des adultes du cercle le plus intime.
Ce livre écrit en 1996 est d'une actualité saisissante.
Le titre a été repris dans un article de Pascale Navarro commentant l'affaire Weinstein parce que, enfin, la parole des femmes se fait entendre.
Pour conclure, je voudrai remercier Madame Virginie Lou d'écrire si brillamment sur notre humanité. Déjà ce questionnement était en filigrane dans ce merveilleux conte : "Le Miniaturiste ".
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La vie de Solange s'enlise dans des habitudes qui ternissent le quotidien, qui l'effacent progressivement jusqu'à la nuit où elle se fait violer par « un jeune de la cité ». Sa vie bascule alors vers la terreur d'abord, une volonté farouche de survie ensuite, une mise en oeuvre de tous ses moyens physiques et psychologiques pour neutraliser ce violeur, vers la volonté de décoder son langage et ses actes pour mieux s'en défendre, puis d'analyse progressive, au vu de leurs échanges certes rudimentaires, de ce qu'est sa vie pour l'avoir amené à la voler, puis à la violer : mais comprendre, c'est déjà pardonner et elle glisse inconsciemment et progressivement vers un début d'empathie envers ce jeune dont elle mesure brusquement à quel point il est en souffrance depuis sa naissance, démunis de tout, affection, éducation, langage, avenir, rêves, qu'elle vit à côté de ce monde sans le côtoyer depuis tant d'années en portant des jugements sans appel et totalement inappropriés sur « les jeunes » , « la cité » et les millions d'êtres qui lui ressemblent de par le monde.

Après cette nuit où elle a touché la violence et frôlé la mort, où tout ce qui faisait sa vie matérielle a été détruit, où son corps a été meurtri et violé, où tout ce qui faisait sa vie psychologique a pareillement voté en éclat, elle affronte le jour enfin délivrée de son violeur et ne veut plus penser qu'au bonheur de voir la lumière du jour et d'être vivante : mais là, c'est la barbarie inconsciente ou non des êtres normaux, de son entourage, famille et surtout concubin qu'elle va découvrir avec stupéfaction, et ce sont ceux et celui sur qui elle comptait le plus sortir de ce cauchemar qui vont achever de l'effondrer par leurs réactions, comportements, égoïsmes, suspicions, puis condamnations de sa façon d'essayer d'envisager sa vie après ce viol, de ses tentatives de reconstruction après ce dynamitage de toute sa vie antérieure. Et si elle avait fini par comprendre, pardonner et presque supporter son bourreau, elle sera anéantie par les gens ordinaires qui eux n'ont aucune excuse à leur attitude. Son seul refuge sera alors l'écriture pour pouvoir comprendre, se comprendre, à défaut d'être comprise.
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Un livre écrit avant la vague metoo qui est certainement passé assez inaperçu à l'époque. du moins l'a-t-il été pour moi.
C'est une histoire de viol presque ordinaire celui qui fait vaciller la vie d'une femme de la quarantaine dans une forme de déni et de culpabilité.
Violée par un gamin de la cité d'à côté qu'elle a toujours défendu, trahis par un époux qui doute de son non-consentement, pas même écoutée de celle qui se dit son amie et bien sûr ignorée et moquée par la police.
L'histoire du viol est dérangeante, la langue est crue et l'ambiance d'une grande tristesse même avant le viol.
Difficile d'avoir des sentiments tant tout est à distance, écoeurée par tant d'indifférence assurément, mais depuis les plumes ont tant témoigné que ce livre fait office de pionnier, mais n'arrive pas à toucher la lectrice que j'ai été.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation

« L’inventaire mesuré d’un chaos exige de la patience. Mais j’ai le temps. Je ne suis plus bonne à rien sauf à déblayer ces restes, débris d’une existence à laquelle j’accorde non le bonheur mais l’innocence, une manière d’absence à soi dont on imagine les crétins heureux bénéficiaires ».
« Cette étincelle de vie vibrante en moi me donnerait la force de croire à nouveau, avec bonne volonté, à l’humanité des hommes, à la civilisation. Elle me rendrait cette certitude implicite, indiscutée, qui permet à chacun de dire bonjour à son voisin, de sourire, de tendre la main pour saluer un inconnu ; de vivre en société. Parfois je réussis à m’en persuader. Sinon, à quoi auraient servi tant d’efforts pour échapper au couteau ? Et si je tiens sans faillir le journal de la lumière, c’est par entêtement. Seule cette activité, menue et vaine mais scrupuleusement menée, pourra un jour échauffer mon sang. »
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Est-ce qu'on sait ce qu'on fait de ses yeux ?
Lorsque je marchais dans la campagne entre les champs labourés, sur les sentes grasses de betteraves écrasées, je ne regardais que mes pieds pour ne pas glisser. Et quand je levais le nez au ciel je fermais à demi les paupières à cause de l'aveuglante réverbération du soleil sur le ventre des nuages. La myopie s'installe à la mesure de nos craintes et de nos faiblesses indistinctes. Qu'avais-je vu de cet arbre lorsque chaque matin et chaque soir je m'approchais de la fenêtre pour le contempler ? Sans parler de l'habileté au trait j'aurais été incapable d'en représenter par un dessin la silhouette, le contour particulier de sa tête penchée par-dessus le mur. Comme ce soir où, après avoir quitté Aziz, je mettais postée derrière les vitres,je n'y avais jamais saisi que mon reflet. J'avais l'air vieille et bien fatiguée ; je m'en détournais, vite.
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Je n'ose pas lui demander Prends-moi dans tes bras. Serre-moi.S'il ne le fait pas, il a ses raisons. Il trottine depuis des heures dans le tambour d'une obsession unique : qui ça peut être ce salopard ? Et pourquoi s'est-il abattu sur moi, sur notre maison?
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Je n'avais besoin de personne maintenant, dans la lumière. Est-ce qu'on était venu à mon secours pendant la nuit ? Est-ce qu'on m'avait tendu la main dans le noir ?
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Vidéo de Virginie Lou-Nony
Des ateliers d’écriture ont été mis en place à la faculté des Lettres de Nîmes, dans le cadre de la licence de lettres modernes, en septembre 2006. Trop rares encore sont les responsables de filières Lettres à oser se risquer dans ce domaine, classique aux Etats unis depuis la fin des années 50 sous le nom de writer’s workshop. Pourtant, comment comprendre de l’intérieur la littérature si l’on ne se frotte pas soi-même à l’écriture ?
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