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EAN : 9782366260182
176 pages
Christophe Lucquin (21/08/2014)
3.85/5   10 notes
Résumé :
Le gardien d’une grotte raconte sa vie extravagante, reclus sur une colline où tout afflue, converge, recommence. L’audacieux misanthrope s’affranchit du siècle : les lois de la famille, de l’Histoire, de la vraisemblance comme de la ressemblance sont peu à peu abolies.Dans Grotte, l’ombre d’un idéalisme excitant et salvateur se profile.
La liberté conquise par le narrateur fait écho à celle de l’auteur : Amélie Lucas-Gary se permet beaucoup et livre un roma... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
"Je suis le gardien d'une grotte, je vis juste au-dessus. Dessous, c'est creux, étroit, frais, humide et silencieux. Je me répète souvent ces mots ; ils résonnent et réconfortent ma solitude."

Les présentations maintenant faites, sachez que la-dite grotte en question est fermée depuis des années au public. Trop de monde, trop de vibrations, elle était prête à s'écrouler, les dessins préhistoriques - les premiers bisons dessinés sur ces parois rocheuses, d'un ocre orangé, c'est magnifique - menaçaient de s'effacer, par toutes ces caresses, cet oxygène aspiré, ce monoxyde recraché. le gouvernement a décidé de faire une réplique, plus vraie que nature, pour les visites. Depuis, je suis le gardien d'une grotte qui ne se visite plus. J'ai les clés pour descendre, m'y engouffrer et par plaisir j'y descend comme on descendrait à la cave chercher une bouteille de Monbazillac ou de Pacherenc du Vic-Bihl.

Je suis un oublié de ce monde, ou presque, de temps en temps, de plus rarement, on me fait encore un petit signe, signe que je ne suis pas encore entièrement sous terre. Et là, j'ouvre l'antre. A qui le voudrait bien. du coup, c'est une galerie de portraits qui défilent devant moi. Une femme que l'humidité des lieux émoustille, un abbé plus philosophe que religieux, le petit-fils d'un führer ou un barbu qui voyage de grottes en grottes, il dit s'appeler Oussama... Bref énormément de monde dans une vie qui passe dans ce coin-ci, même Philippe Bouvard, c'est dire la notoriété (datée) d'une telle grotte, ou d'un tel premier roman. Finalement trop de monde pour moi, pourtant quoi de plus beau métier que gardien d'une grotte oublié, je délaisse la grotte pour la cave, y chercher un single malt et passer à d'autres lectures... Je sais c'est court, mais à la cave ou dans la grotte, le clair de lune ne passe plus, alors je ferme les yeux et m'endors vers d'autres cieux littéraires. Mes excuses, Amélie, à une prochaine rencontre. Je retourne à mon Cave ( & the Bad Seeds)...
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Voici un roman étonnant auquel on s'attache immédiatement, les mémoires du gardien d'une grotte, qui présente de fortes similitudes avec celle de Lascaux, également ornée de peintures pariétales, découverte durant la seconde guerre mondiale, et fermée au public pour éviter sa dégradation avec la réalisation d'un fac-similé à proximité.

«Je suis le gardien d'une grotte, je vis juste au-dessus. Dessous, c'est creux, étroit, frais, humide et silencieux. Je me répète souvent ces mots ; ils résonnent et réconfortent ma solitude.»

Ce gardien reclus au sommet de sa colline, et qui va jouir d'une longévité inespérée dans cette fonction, raconte ses aventures vues du ventre de la grotte, miroir des obsessions et peurs de l'époque actuelle, et de toutes les fantasmagories de la grotte-matrice.

«Je veux transmettre le souvenir de cette vie en retraçant ici certaines de mes aventures les plus folles. Vue d'une petite grotte, repli isolé dans le creux d'une colline, cette histoire donnera pourtant une idée de l'époque agitée que nous avons traversée, et dont vous avez peut-être entendu parler. Qui connaît le temps qui me lira ?»

Obsessions de la ressemblance et de la copie, volonté de se nourrir de la célébrité de la grotte, protection contre les menaces diverses d'une société mondialisée…, chaque nouveau chapitre nous transporte en terrain inconnu, réaliste, onirique, fantastique, ou simplement décalé et drôle, tandis que la modeste ambition solitaire du gardien se modifie, et que son désir protéiforme de protéger la grotte ou de façonner sa légende grandit.

«Au fil des ans, sans qu'il y eût de passage souterrain, la grotte devint ma cave. Dans les caves, on séquestre les petites filles, on enterre des cadavres, on perd ses illusions, on réalise ses fantasmes, on cache ce qu'on refuse de voir, on range ce qu'on veut garder oublie, on imagine le pire. C'est souvent dans les vieilles maisons qu'il y a des caves. C'est souvent elles qui y sont les plus anciennes. C'est largement le cas ici.»

Avec une écriture limpide, Amélie Lucas Gary réussit un premier roman très réjouissant, avec ce gardien surprenant qui semble être une métaphore de l'artiste en devenir.
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Un premier roman décalé, mi-sérieux-mi-ironique. Enfin, plutôt une suite de petits chapitres mettant en scène la grotte et le gardien, comme de petites nouvelles avec unité de lieu et de narrateur. Celui-ci traverse les époques, tel un immortel, abreuvé à une source de jouvence, il accueille donc énormément de gens différents. Amélie Lucas-Gary s'inspire de faits réels, on ne peut évidemment que penser à Lascaux et ses fac-similés, mais pas seulement. Il y a la visite de la Première dame, avec son Président de mari (souvenez-vous de la visite de l'ancien président à Lascaux en 2010), le mouvement des Irrités, Philippe Bouvard, ... Ces faits ou personnages réels sont une base à partir de laquelle l'auteure construit une histoire irréelle parfois saugrenue. Bref, une galerie folle et éclectique.
Au fur et à mesure que j'avançais dans ma lecture, je me disais que c'était bien sympathique mais finalement assez vain, et puis, petit à petit, le manque de profondeur ressenti (le comble pour une grotte !) s'estompe et laisse place à des réflexions plus intéressantes sur sa place dans la société, la manière de vivre, la liberté. La grotte est omniprésente, tour à tour lieu de vie, de mort, d'éternelle jeunesse et d'amour (qui m'a immédiatement fait penser à Monde profond d'Eric Pessan)
Un roman loufoque, drôle, absurde qui se lit très agréablement servi par une langue travaillée et fluide : "Elle [la maison du gardien] était grosse, bien trop énorme pour une seule personne, elle ressemblait cependant à une cabane, conçue dans l'urgence puis rafistolée, boursouflée comme un blockhaus en doudoune, trop habillé en été. Ni l'harmonie ni l'équilibre n'avaient présidé à sa conception ; c'était sûrement ce qui lui donnait ce cachet exotique. Elle impressionnait comme une excroissance, sans que l'on sût de quel corps elle aurait été la triste protubérance." (p.125/126) Une langue qui fait aisément naître des images, la preuve cette maison, sans description technique, on la visualise assez bien.

Bref, un bon roman dans la lignée de ce que présente Christophe Lucquin, bien écrit avec un gros zeste de folie douce, la légèreté en plus. Un premier roman à découvrir livré dans sa robe blanche au point bleu, qui ici, vous l'avez sûrement remarqué, se creuse comme une grotte.
Lien : http://lyvres.over-blog.com
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Une écriture où l'on croit parfois entendre Amélie Nothomb, ce que j'estime bien être un compliment. Avec un plus : le tour un brin déjanté des événements et l'aspect irrévérencieux de certaines situations. L'auteur n'a pas peur, ce qui est rare dans un premier roman.
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La plus célèbre grotte d'art pariétal du monde et son (très) étonnant gardien.

Sur mon blog : http://charybde2.wordpress.com/2014/10/01/note-de-lecture-grotte-amelie-lucas-gary/
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Une fille que j’aimais me conduisit ici ; elle voulait que je visite sa région natale, imaginant que nous y vivrions ensemble un jour. Finalement, à peine arrivée, elle tomba dans les bras d’un garçon du pays. Je pris alors une petite chambre dans le coin ; je pouvais m’installer là, puisque rien ne m’attendait ailleurs.
Le village que je choisis était remarquable et le moment propice : en haut d’une colline se nichait la grotte préhistorique ornée la plus célèbre au monde, dont le gardien mourut peu de temps après mon installation. Une foule de prétendants s’étaient immédiatement manifestés pour assurer sa succession ; quelle qu’eût été la décision, il n’y aurait eu qu’une minorité de satisfaits et des centaines de mécontents. Dans ce contexte, les autorités firent un choix audacieux, qui ne pouvait faire de jaloux tant il était incongru : ils me désignèrent, moi. Aucun villageois ne fut vraiment content, mais tous préférèrent cela, plutôt que de voir l’un d’eux triompher.
Mon destin prit alors un tour singulier. Sur cette colline, je connus une éternité tour à tour trépidante et assommante, jusqu’au jour où une force inconnue fournit encore une fois à mon destin l’impulsion implacable du renouveau.
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Elle [la maison du gardien] était grosse, bien trop énorme pour une seule personne, elle ressemblait cependant à une cabane, conçue dans l'urgence puis rafistolée, boursouflée comme un blockhaus en doudoune, trop habillé en été. Ni l'harmonie ni l'équilibre n'avaient présidé à sa conception ; c'était sûrement ce qui lui donnait ce cachet exotique. Elle impressionnait comme une excroissance, sans que l'on sût de quel corps elle aurait été la triste protubérance. (p.125/126)
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Au fil des ans, sans qu'il y eût de passage souterrain, la grotte devint ma cave. Dans les caves, on séquestre les petites filles, on enterre des cadavres, on perd ses illusions, on réalise ses fantasmes, on cache ce qu'on refuse de voir, on range ce qu'on veut garder oublié, on imagine le pire.
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Je suis le gardien d’une grotte, je vis juste au-dessus. Dessous, c’est creux, étroit, frais, humide et silencieux. Je me répète souvent ces mots ; ils résonnent et réconfortent ma solitude.
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Je ne connus jamais assez puissamment le désir de mourir pour oser le mettre en concurrence avec l'éternité.
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