Et la lumière fut est un grand récit sur la vie, la résistance, sur la déportation à l'égal des livres de
Primo Levi, "
Si c'est un homme " où de
Jorge Semprun "
L'écriture où la vie ".
Jacques Lusseyran a 17 ans en 1941, il est aveugle depuis l'âge de 8 ans à la suite d'une bousculade à l'école. Au lycée, éclairé par un professeur d'histoire sur l'avenir de la France sous la botte hitlérienne, avec un groupe d'amis il crée un mouvement de résistance " les volontaires de la liberté ", qui draine rapidement jusqu'à 600 participants, ils publient une feuille d'information clandestine, qui en 1942 fusionnera avec le mouvement qui publie le journal " Défense de la France " devenu à la libération
France-Soir. Malgré son handicap il co-dirige la distribution du journal et les opérations. le mouvement, a étendu ses activités à l'exfiltration des parachutistes anglais tombés sur le sol français, à la fabrication de faux papiers, et aux trafics d'armes. Les membres du réseaux " vont chez l'aveugle " chercher leurs ordres. En Juillet 1943 il est arrêté par la Gestapo, est déporté à Buchenwald en 1944, grâce à sa force de caractère, sa parfaite connaissance de l'allemand et l'intuition que lui procure son handicap, interné dans le bloc des éclopés, il en devient le leader, il survit et est libéré en avril 1945.
Jacques Lusseyran décrit formidablement sa vision intérieure et cette lumière qui au lieu de l'anéantir, le transcendera. Il explique comment sa perception des sons s'aiguise, comment le touché devient primordial, comment il perçoit les voix et arrive à juger les gens sans les voir, mais à leurs intonations, leur contact, leur parfum. Il se plonge avec frénésie dans l'apprentissage du braille, de l'allemand, dans les études. Il montre la force que lui procure le soutien parental, l'amitié et la foi. Il explique la formation du mouvement de résistance avec précision car il doit analyser plus que les voyants les événements, les informations, les décisions qu'il donne et les risques qu'il prend où qu'il fait prendre. Son témoignage sur Buchenwald est essentiellement centré sur ce qu'il vit, comment il se bat pour survivre, comment il aide les plus malheureux que lui, comment il réussit à informer ses compagnons en traduisant les émissions de la radio nazie. Il ne décrit pas la vie du camp, car dit-il tout ce qui en a été dit est au-dessous de la vérité. le livre publié d'abord aux Etats-Unis en 1961, où il était enseignant a fait de lui un héros outre-Atlantique. Cet homme a aimé la vie, mais elle lui a mal rendu car il se tuera dans un accident à 47 ans en 1971. En France, il est sorti de l'ombre grâce à
Jérôme Garcin qui a publié son formidable livre "
le voyant " en 2015.