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EAN : 9782930223827
Esperluète éditions (15/10/2007)
4.33/5   3 notes
Résumé :
Ce conte a hanté, et enchanté, mon enfance. Mais le personnage de la sorcière qui arrache la langue de la petite Sirène en échange de jambes de femme, m'a autant fascinée que terrifiée. Plus tard, je me suis dit que ce conte pouvait être entendu autrement que comme une histoire d'amour ratée, fondée sur une épouvantable méprise. Pour le comprendre, il me fallait faire dialoguer la petite Sirène et sa tortionnaire, que j'ai appelée la Mutilante. Méditer sur ma propre... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Myriam Mallié nous livre un texte original de réécriture du conte de "La petite sirène", adoptant le point de vue de la sorcière – rebaptisée la Mutilante – à travers des lettres adressées à la jeune femme. Sacrifice pour accéder à la vie sur terre, la langue coupée devient plutôt ici l'épreuve de l'exil et le devoir de se trouver une nouvelle langue.

Par l'intermédiaire de la Mutilante, dont ce texte nous fait apparaître toute la passionnante ambiguïté et la valeur fondatrice, l'autrice nous donne à lire la tentative laborieuse et vaine de la petite sirène à faire entendre sa voix auprès du prince aimé. Si cette tentative échoue dans l'intrigue, elle réussit à nous atteindre dans l'ordre de la fiction dans ce travail inédit d'incarnation de deux personnages au destin scellé par la délicate question du désir à exprimer par la parole afin qu'il puisse s'enraciner à une mémoire.

Un texte court, puissant et tout en finesse, que je recommande à toutes les personnes friandes des reprises intertextuelles de topiques littéraires.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
[I]l a gardé la peur qui a goût du naufrage. La mer, il n'en veut plus, ou il faut s'en défendre. Toujours, il se raidira quand vous l'approcherez, comme s'il se souvenait d'une ancienne noyade, d'un étouffement sans nom. Pour vous c'est une vie de joie que révèlent ses traits, pour lui c'est une chute opaque et qui va vers la mort. C'est vous qu'il fluira, derrière d'autres visages. C'est vous qu'il cherchera parmi les autres femmes, sans voir que la plupart ont encore cette queue de poisson qui vient des origines, et qu'elles traînent avec elles par peur du sacrifice. C'est encore un enfant. Les femmes qu'il aimera seront des petites filles. Celle-là, vous, qui s'est donnée des jambes et franchi la surface, il ne la verra pas. Vous avez à l'apprendre. Et ce sera par lui.

Car l'histoire est en cours, veut s'inscrire dans la chair. C'est à ça que l'on sait quelle est sa vérité. Elle vous fendra en deux.

(pp. 28-29)
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On ne sait pas assez l'effort de monter, de s'extraire des fonds où l'on s'est construit, où l'on vous a construit. Après, il faut refaire. On croit que c'est simple, qu'il suffit de dire non, de s'en aller. Mais on ne s'en va pas, on tourne le dos, simplement. Et l'on tire avec soi tout ce qui est et reste à nager sous la surface, et rôde les yeux rivés sur vous. Ce qui, dans votre dos, vous dit de revenir, vous rappelle qui vous êtes, que là-haut, vous attend une vie d'étrangère. [...]

Plus tard, vous connaîtrez la nostalgie, qui vous laissera désarmée. Les regrets, qui ébranleront vos édifices. La culpabilité, qui vous éprouvera jusqu'aux talons. Il y aura une frontière, desormais, et de lourdes barrières pour séparer le pays d'avant de celui d'après.

Et vous, divisée, cherchant à relier.

(pp. 37-38)
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Mais peu à peu, la mémoire, anesthésiée par le choc du passage, reprend ses droits. L'arrière-pays retrouve existence et fait durement sentir sa présence, sa séduction. Vous commencez à souffrir. Si vous hésitez, si vous ne pouvez résister à ce chant d'avant, si vous vous retournez, vous êtes perdue.

Vous fixez l'horizon. Là, le pays de devant chante son attente et les vives promesses qui vous sont destinées. Mais le chant de l'arrière a les voix émouvantes de ceux qui se savent reliés et dont l'amour appelle. Écouter vous devient douloureux.

Vous apprendrez lentement à laisser se faire en vous un chant troisième, unifiant les deux autres, ne les opposant pas. Ce sera long, ce sera plein de doutes, de reprises, de silences troublés.

Ce sera beau aussi, inévitablement.

(pp. 16-17)
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Maintenant, vous marchez. Le ciel est sans oiseaux. L'océan chante une chanson fraîche qui apaise vos pieds. Dans votre dos, la ville a ouvert ses lumières, ses boutiques à succès. Y circulent les nouvelles du monde, la guerre, le froid, la faim et tant de tyrannie. Les oiseaux eux-mêmes sont devenus suspects, on les confine en hâte quand c'est nous qui souffrons du virus de la cage. On pille, on tue pour des caricatures, sans voir que tout grimace, à commencer par soi. Les dieux que nous aimions sont montrés en spectacle. Les théâtres sont pleins de paroles trompeuses et les livres aussi. Les enfants ne jouent plus qu'avec leur téléphone. Où se trouve la voix qui pourrait rassurer ?

(p. 64)
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Ce qui est à vous, depuis longtemps, c'est la déchirure qui soudain prend feu. Vous l'aviez oubliée. Elle est là et c'est comme un lance-flamme à l'intérieur. Vous hurlez, mais qui vous entend ? Ils sont tous partis. Crier ce n'est pas dire.

Pour trouver sa place, d'abord s'occuper de se trouver une langue, voilà ce que vous commencez à comprendre. Tout part de là. La parole est territoire.

(p. 47)
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