Empli de la verve si caractéristique du style Tosches, ce livre fête les pionniers qui, bien avant Elvis, ont défriché le rock. Et les fête parfois de manière un peu vacharde. On ne sait pas toujours si
Nick Tosches a de la sympathie (même amusée) pour les seconds couteaux qu'il présente page après page (quoi qu'on entend parler de Nat King Cole, mais pour sa première période), ou s'il les trouve un peu ringards ces chanteurs dont l'histoire, celle avec un grand H ne retiendra pas les noms. Ce qui est sur, c'est que quand il manque de source sur tel ou tel, il le dit sans détour. Pour le reste, Tosches a compulsé toutes les revues des années cinquante, et notamment "Billboard" auquel il fait référence. Il vous cite des articles parus dans la presse à propos du concert de Ming et Ling, et peut vous reconstituer la carrière de tel artiste label après label, en vous donnant les classements de ces disques dans les hit-parades. Les Jesse Stone (qui raconte comment il dirigea un label avec l'argent de gens de la pègre, et dont Tosches fit l'hommage à son enterrement), Big
Joe Turner, Wynonie Harris, Bill Halley,
Roy Brown (et les autres) ne savaient pas qu'ils faisaient du rock... Ils pensaient faire de la country moderne, du boogie-woogie, du hillbilly. Et pourtant, ce sont bien eux qui ouvrirent la voix à la révolution adolescente du rock.
Nick Tosches leur rend hommage (un hommage "pas toujours très pieux" prévient-il le lecteur), en une galerie de portraits écrits pour les magazines musicaux américains auxquels il a eu l'occasion de collaborer. Agrémenté d'une chronologie et d'une discographie ("Archaelogia rockola"), ce livre est un bréviaire à la gloire des saints du rock, un missel, qui finit par la phrase "Que le Seigneur soit avec vous pendant que votre femme me suce la bite. Car Nick le Prophète est mon nom".