Encore un excellent essai de
Jean-Luc Marion. Meum corpus n'est comme tous les autres corps : c'est une troisième notion primitive qui, dans l'ordre des matières, n'est rien d'autre que la première. Cette chose qui pense, l'ego, est aussi cette chose qui ressent, dans une union évidente du corps et de l'âme. Elle ressent : ce n'est pas dire que l'âme est le corps, mais qu'il y a aussi une pensée passive, exprimée dans l'union. On parle de dualisme des substances de
Descartes. Mais il ne faudrait pas s'y tromper : non seulement l'union de l'âme et du corps n'a rien d'accidentelle (ce qui est sans doute admis par tout lecteur attentif), mais en plus le problème de l'existence du corps n'en est pas un à partir du moment où l'évidence de l'union est reconnue. Même l'existence des corps extérieurs n'est pas le problème de la sixième méditation. On comprend mieux la doctrine des passions de
Descartes (et
les Passions de l'âme parachèvent la métaphysique cartésienne). Les passions ne sont pas à mettre à distance. Elles relèvent de la pensée passive. Celle-ci provoque la volonté. Quoi de mieux, alors, que vouloir ses bonnes passions, c'est-à-dire vouloir bien vouloir, se satisfaire de son ego en tant qu'il se satisfait éthiquement, toujours de façon subordonnée à la volonté divine ?