Ce qui est très remarquable dans le bâtiment primitif de la Bastille, ce sont les mesures de sécurité : car la rue Saint-Antoine débouche directement au milieu de la forteresse. Il faut d’abord franchir une poterne extérieure, puis passer un pont sur le fossé intérieur. On pénètre alors dans la citadelle elle-même par une redoutable porte entre les deux donjons du centre. On traverse la grande cour et l’on sort par une étroite voie entre les deux tours du sud-est, on longe les deux donjons qui font face au faubourg et l’on traverse les fossés de la ville sur un pont levis. Il est donc impossible de sortir de Paris, ou d’y entrer, en échappant à une quelconque surveillance.
Dans l’imagination populaire, qui, dans ce cas, a tendance à se confondre avec la propagande patriotique héritée de la soi-disant Révolution de 1789, la Bastille est liée intimement aux derniers rois Bourbons, à Louis XIV, Louis XV et au pauvre Louis XVI qui paya de sa vie l’incurie de ses prédécesseurs. Ce n’est pas l’époux timoré de Marie-Antoinette d’Autriche qu’on a conduit à l’échafaud, sur la place qui allait ironiquement devenir « la Concorde », mais réellement le « fils de saint Louis », avec tout ce que cela comportait d’insupportable pour la classe bourgeoise de l’époque, détentrice des moyens de production, des finances et par conséquent du pouvoir de décision.
POÉSIE MÉDIÉVALE – Qu’est-ce que BROCÉLIANDE ? (France Culture, 1993)
L’émission « La matinée des autres », par Jacqueline Kelen, diffusée le jour de noël 1993 sur France Culture. Invités : Jean Markale, Claudine Glot, Philippe Le Guillou, Pierre Dubois, Patrik Ewen et Jean Thos.