La plupart des mots dont nous nous servons quotidiennement sont susceptibles de prendre des sens différents selon les situations ou les contextes où on les emploie. Nous y sommes habitués et cela ne nous gêne pas. La situation est différente lorsqu'on aborde l'étude attentive d'un phénomène. Il est alors indispensable de caractériser exactement ce dont on va traiter et si l'on se sert pour le désigner d'un terme de la langue courante, il faudra préciser lequel de ses divers sens est retenu en l'occurrence. Dans bien des cas, il s'impose de trouver, pour l'objet d'étude, un terme nouveau et c'est bien ce qui s'est produit pour l'indo-européen.
Le public cultivé, en France, ne s'est guère intéressé aux problèmes des origines indo-européennes. La découverte, il y a quelque deux cents ans, que la plupart des langues d'Europe, y compris le grec et le latin, dérivaient d'une même langue plus ancienne a pu remplir de satisfaction Allemands et Scandinaves dont les parlers natifs se voyaient, du coup, mis sur un pied d'égalité avec les langues classiques de l'Occident. Les Français, pour leur pan, se sentaient les héritiers directs de ces langues et, de ce fait, peu concernés par cet élargissement préhistorique du concert des nations.
Pendant longtemps, ceux-là même qui étaient les plus ardents défenseurs des « lois phonétiques sans exceptions. se demandaient comment on pouvait expliquer leur existence. Il a fallu arriver jusqu'aux années trente de ce siècle pour trouver la réponse à cette question: chaque langue a, en fait, un nombre déterminé d'unités phoniques qu'on désigne comme des phonèmes. A chaque phonème correspond une habitude articulatoire particulière. C'est pourquoi l'apprentissage d'une nouvelle langue nous pose, en la matière, des difficultés.