Citations sur Contes et nouvelles (127)
Il était heureux, lui, tout à fait heureux, n'ayant jamais rêvé une autre vie, d'autres plaisirs. Il était né dans ce triste pays, il y avait grandi, il s'y trouvait bien, chez lui, à son aise de corps et d'esprit. Il ne comprenait pas qu'on pût désirer des événements, avoir soif de joies changeantes ; il ne comprenait point qu'il ne semble pas naturel à certains êtres de demeurer aux mêmes lieux pendant les quatre saisons ; il semblait ne pas savoir que le printemps, que l'été, que l'automne, que l'hiver ont, pour des multitudes de personnes, des plaisirs nouveaux en des contrées nouvelles.
(extrait de "première neige")
Je demeurai stupéfait, tremblant, troublé ! Un parfum presque insensible, si vieux qu'il semblait l'âme d'une odeur, s'envolait de ce tiroir mystérieux et de cette surprenante relique.
Qui sait ? Qui sait ? Comme la vie est singulière, changeante !
Comme il faut peu de chose pour vous perdre ou vous sauver !
Simon avisa tout à coup un petit voisin, le fils d'une veuve, qu'il avait toujours vu, comme lui-même, tout seul avec sa mère.
- Et toi non plus, dit-il, tu n'as pas de papa.
- Si, répondit l'autre, j'en ai un.
- Où est-il? riposta Simon.
- Il est mort, déclara l'enfant avec une fierté superbe, il est au cimetière, mon papa.
Un murmure d'approbation courut parmi les garnements, comme si ce fait d'avoir son père mort au cimetière eût grandi leur camarade pour écraser cet autre qui n'en avait point du tout. Et ces polissons, dont les pères étaient, pour la plupart, méchants, ivrognes, voleurs et durs à leurs femmes, se bousculaient en se serrant de plus en plus, comme si eux, les légitimes, eussent voulu étouffer dans une pression celui qui était hors la loi.
["Le Papa de Simon"]
Donc il parlait , il causait et il s' ennuyait , mon solitaire .
Je le tenais .
Je vous dis, moi, qu'on peut aimer plusieurs fois avec toutes ses forces et toute son âme. Vous me citez des gens qui se sont tués par amour, comme preuve de l'impossibilité d'une seconde passion. Je vous répondrai que, s'ils n'avaient pas commis cette bêtise de se suicider, ce qui leur enlevait toute chance de rechute, ils se seraient guéris ; et ils auraient recommencé, et toujours jusqu'à leur mort naturelle. Il en est des amoureux comme des ivrognes. Qui a bu boira - qui a aimé aimera. C'est une affaire de tempérament, cela.
["La rempailleuse"]
Ma chère, quand on n'a pas le moyen de se payer des bijoux véritables, on ne se montre parée que de sa beauté et de sa grâce, voilà encore les plus rares joyaux.
Le train courait dans ce jardin, dans ce paradis des roses, dans ce bois d’orangers et de citronniers épanouis qui portent en même temps leurs bouquets blancs et leurs fruits d’or, dans ce royaume des parfums, dans cette patrie des fleurs, sur ce rivage admirable qui va de Marseille à Gênes.
C’est en juin qu’il faut suivre cette côte où poussent, libres, sauvages, par les étroits vallons, sur les pentes des collines, toutes les fleurs les plus belles. Et toujours on revoit des roses, des champs, des plaines, des haies, des bosquets de roses. Elles grimpent aux murs, s’ouvrent sur les toits, escaladent les arbres, éclatent dans les feuillages, blanches, rouges, jaunes, petites ou énormes, maigres avec une robe unie et simple, ou charnues, en lourde et brillante toilette.
*Les sœurs Rondoli*
Je demeurai stupéfait, tremblant, troublé ! Un parfum presque insensible, si vieux qu'il semblait l'âme d'une odeur, s'envolait de ce tiroir mystérieux et de cette surprenante relique.
Jamais aucun visage ne renaitra semblable au sien. Jamais, jamais ! On garde les moules des statues ; on conserve des empreintes qui refont des objets avec les mêmes contours et les mêmes couleurs. Mais ce corps et ce visage, jamais ils ne reparaîtront sur la terre. Et pourtant il en naîtra des milliers de créatures, des millions, des milliards, et bien plus encore, et parmi toutes les femmes futures, jamais celle-là ne se retrouvera. Est-ce possible ? On devient fou en y songeant.
- La tombe -