Exposition sur les débuts de la photographie : comment la couleur (non: la tonalité) d'une photo provoque, telle la réponse à un stimulus, une réaction immnédiate: d'angoisse ou de nostalgie; nostalgie face aux noirs profonds, aux aspects ivoirins, aux ciselures des détails, aux brillances des lumières dans les anciens tirages argentiques (monde jamais approché mais dont quelques éclats me parvinrent tôt dans les minus cules photos dentelées prises par mon père). Angoisse, une certaine horreur même face aux tout premiers calotypes où la photo semble naître d'une relation aux faits divers (et figure, parmi la poignée des « premières » photos, une abominable image de femme égorgée; quand on ne feint pas, comme Hippolyte Bayard, d'être noyé) ; mais aussi: elles restituent une époque où tout est suffoqué de poussière, de peluches, de tentures, de plantes sombres et menaçantes, où l'extérieur est fait de ruelles sordides et pluvieuses, de lointains perdus dans le brouillard, de végétation grouillante et immobile. Le tout sous une lumière d'astre mort, sans différence de densité, ni une quelconque vibration, mais d'une consistance cireuse et inerte.
La nourriture, les repas jouaient un rôle essentiel pour Manganelli. l adaptait le restaurant à son convive, différent pour chacun. Il ne vit plus jamais Einaudi du jour où celui-ci osa picorer dans son assiette. «Manger est un rite religieux, un acte sacré, disait-il, nous mangeons nos morts, nous y sommes en compagnie de nos ancêtres. »>
Les forêts sont parcourues de bruissements ; ce sont des livres à la fois inventifs et sans originalité, des exercices d'admiration, des collections de merveilles, des galeries de miroirs, des recueils de voix attendant leur écho : "it's all mine and none mine".
« Forêt» : le mot désignait au seuil de l'âge moderne un recueil mêlé de notes et marginalia, une collection de fragments et de faits récupérés chez les uns pour être proposés aux autres. Francis Bacon, le chancelier infâme, le philosophe intrépide, qui avait l'eil noisette, et le regard vif et délicat d'une vipère, consacra les dernières années de son existence à la compilation d'une Forêt des forêts, Sylva Sylvarum, qu'il ne put achever et que son chapelain, William Rawley, publia un an après sa mort en 1627. Plus prosaique, ou limité, John Evelyn, compilateur infatigable, rédigea, quelques années plus tard, une Sylva, qui connut le succès, et dans laquelle il se contenta de rass embler, en tautologue, son savoir dendrologique.. Pour Bacon, tout à son projet de réforme du savoir universel, il ne s'agissait de rien de moins que d'amasser tous les matériaux possibles, tirés tant de l'observation que de ses lectures, utiles à l'établissement d'une histoire naturelle; quiconque se sera contenté de traverser le mnonde en l'effleurant, sans le comprendre, comme je l'ai fait, ne saurait certes prétendre à pareil projet ; et serait-il ici question d'histoire naturelle, elle ne le serait que de moi-même.
Écrire au café: s'abs orber, suivre le fil d'une idée en dépit (ou plutôt : sur le fond) du bruit environnant (sorte de magma hypnotique), puis lever les yeux, rencontrer un regard, interlocution interdite. C'est ce courant alternatif qui vous porte, suscite un certain enthousiasme.
Patrick Mauriès - Dans la baie des Anges .Patrick Mauriès vous présente son ouvrage " Dans la baie des Anges" aux éditions Gallimard.http://www.mollat.com/livres/patrick-mauries-dans-baie-des-anges-9782070137886.htmlNotes de Musique : Wolfgang Amadeus Mozart - Concerto for Piano and Orchestra n°23 - 5 - II Adagio