Le livre est divisé en trois parties : des témoignages de filles et femmes entre 14 et 54 ans, un dossier et des entretiens avec des sociologues et anthropologues.
Les témoignages sont plus ou moins pertinents mais sont les marqueurs d'une réflexion et d'une conscience plus ou moins avancée sur le sujet ; d'ailleurs, le discours de Louise, 18 ans, témoigne d'une rare maturité et est très intéressant pour introduire le dossier.
En ce qui concerne l'essai, j'ai eu envie de pousser un gros soupir de soulagement à la lecture de ce qui devraient être des évidences, mais qui ne le sont pas. L'explication sur le "cerveau plastique" à la page 80 m'a notamment donné envie de dire merci à l'auteure :
"
Catherine Vidal montre que le cerveau est plastique : à la naissance, 90% des connexions entre les neurones [...] ne sont pas encore construites et vont se faire progressivement. [...] A ce titre, chaque individu, quel que soit son sexe, développe ses propres synapses en fonction de son vécu. [...] Ainsi, dès l'enfance, des compétences différentes se développent pour les uns et pour les autres, et cela en raison des idées toutes faites sur les compétences des sexes. C'est bien un cercle vicieux : parce que les fillles sont censées être plus sensibles et sociables, on les conditionne à l'être, et parce que les garçons sont censés être plus dégourdis, on fait tout pour qu'ils le deviennent. Mais si ce type d'apprentissage est susceptible d'agir sur le développement du cerveau, il n'est pas irréversible [...] Ainsi, les différences que l'on constate entre les individus ou les sexes ne signifient pas qu'elles sont inscrites dans le cerveau depuis la naissance, ni qu'elles y resteront. [...] Quel est l'enjeu ? Si l'on dit que par nature (ou par une très lente évolution génétique), l'homme est plus apte qu'une femme à s'orienter dans l'espace, cela devient une fatalité. Car les lois de la nature sont en principe immuables : les choses sont ainsi depuis les origines et on ne peut rien y changer. Et, de ce fait, on justifiera le confinement des femmes à la maison et aux taches domestiques. Si, au contraire, on fait le constat que les différences entre garçons et filles, entre hommes et femmes sont le résultat d'un conditionnement culturel, d'une éducation, la fatalité disparait, car on peut toujours influer sur une éducation."
L'ensemble du livre n'est pas exempt de défauts : un petit regret sur le choix de ne prendre en considération que les femmes dans l'étude du sujet. Pourquoi ne pas avoir fait plus généralement des recherches sur les genres, le conditionnement des fillettes et des petits garçons en parallèle (par ailleurs évoqué à plusieurs reprises, avec des petites phrases type "Les garçons ne pleurent pas", etc.) ? Revendiquer l'égalité en mettant au jour le conditionnement culturel et social, c'est aussi admettre les limites de l'épanouissement des individus, qu'ils soient de sexe féminin... mais aussi masculin.
Malgré ça, c'est un bon ouvrage de vulgarisation, qui se lit très facilement, et que je recommande ; j'ai juste peur qu'il touche un public limité, et surtout des lecteurs déjà sensibilisés au sujet, qui n'ont plus besoin d'être convaincus...
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