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4,09

sur 928 notes

Critiques filtrées sur 1 étoiles  
Loin des critiques dithyrambiques que je découvre sur internet, la lecture de ce roman me laisse mal l'aise. A la fois sur le plan du fond et sur celui de la démarche qui le sous-tend.

Au niveau historique tout d'abord, ce récit est farci d'invraisemblances, rendues nécessaires sans doute pour faire passer les « vertiges » (sic) de l'auteur, mais qui sur un tel sujet sont particulièrement malvenues.
Voyons ce personnage de Jacques Desroches qui passe de la LVF (Légion des Volontaires français) à une sorte de mystérieux statut d'agent secret du SD Nazi. On peut douter : les Français de la LVF, on les a envoyé se faire casser la pipe sur le front de l'Est, pas jouer les gardiens de camps (rôle dans lequel on retrouve plutôt des Allemands et des Ukrainiens). Imaginer maintenant que ce monsieur ait été comme on l'explique promu à un poste de grand « organisateur des travaux » de la solution finale, on croit rêver. Les Allemands avaient les Français en trop peu d'estime pour recourir à leurs services pour cette macabre besogne. Quand enfin on découvre cette Polonaise qui travaille gentiment comme servante dans le camp, on s'interroge (c'étaient en réalité les prisonniers qui s'acquittaient de ces tâches), mais quand on la voit apprendre avec surprise que ce camp dans lequel elle travaille assassinerait des juifs, là, on est en plein délire.
Citons enfin l'opération de camouflage de l'identité de Jacques Desroches par les services secrets allemands… Ces derniers avaient mieux à faire que de protéger les arrières d'un petit collaborateur étranger. Déserteur de fait de la SS, ce Jacques Desroches s'exposait en réalité à un peloton d'exécution.
On pourra conclure sur ce point que Les Bienveillantes de Jonathan Littell ont fait des dégâts. Il ne suffit pas de saupoudrer un roman de références historiques pêchées sur internet pour en faire un reflet d'histoire. On peut d'ailleurs se poser la question : est-il moral utiliser ainsi les horreurs de la Shoa, les abominations du troisième Reich, les tordre, les manipuler, tout cela pour mettre en scène dans un décor irréaliste la démarche égoïste d'une adolescente perturbée.
On vous dira que la création et le fonctionnement du camp Sobibor sont relativement bien décrits, mais fallait-il un roman pour en rendre compte… Wikipedia en fait autant à moindres frais.

Après les dérives de l'histoire, l'anachronisme de la psychologie des personnages. le gérant du grand magasin n'a rien à envier à Monseigneur Myriel de Victor Hugo. J'ai des doutes sur la rentabilité de son commerce. Les parents d'Emma sont des bons bourgeois des années cinquante, pas des parents d'aujourd'hui. Emma elle-même, enfin, aurait pu être la fille d'un SS découvrant à la même période le passé de son père …une ado d'aujourd'hui est à mille lieux de ces préoccupations. On l'imagine mal ruiner sa santé pour des histoires datant de plus d'un demi-siècle.

Reste la lourde question de l'anorexie
Comme le dit l'auteur lui-même, « il faut rendre à chaque anorexique le soin de raconter son parcours… ». Peut-être aurait-il dû en rester là car, au-delà de la relation des symptômes cliniques, le cas qui est décrit ici laisse songeur. Car si cette adolescente est en souffrance, certes, elle l'est avant tout à cause de l'image qu'elle se fait d'elle-même. Aller chercher la responsabilité de son état dans les recoins de son arbre généalogique est bien commode.

L'héroïne de ce roman s'est érigée en victime d'un crime qu'elle a fantasmé. Cela lui donne le beau rôle, jusqu'à faire d'elle du haut de ses 17 ans une justicière de ses grands-parents. Après avoir jugé son grand-père, elle se donne le droit de l'exécuter virtuellement, en le dénonçant par écrit aux autorités …ainsi que d'autres l'ont si bien fait aux meilleures heures du régime de Vichy.
De même que son aïeul a assassiné froidement une juive et son enfant, elle assume sans remords la responsabilité de l'avoir poussé au suicide. Mieux, cet assassinat par procuration est pour elle une libération. Pas très moral tout ça. Les jeunes filles qui ont vaincu l'anorexie au prix de mille efforts sur elle-même apprécieront ce qui est donné ici en exemple.

Pour conclure, oubliez ce livre. Lisez plutôt « Si c'est un homme » de Primo Levi. Ou sur le thème de la culpabilité, regardez le film Music Box Costa Gavras.
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