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EAN : 9782267028843
120 pages
Christian Bourgois Editeur (27/08/2015)
3.44/5   26 notes
Résumé :
A l'origine, une idée simple : que se passerait-il si un livre changeait tandis qu'on ne le lit pas ? Idée a priori plaisante, mais qui rendra fou le metteur en scène polonais, auquel un directeur de théâtre parisien a confié la tâche d'adapter pour la scène le roman d'un auteur autrichien, roman dont les personnages et les situations disparaissent d'une lecture à l'autre. Les répétitions parisiennes sont catastrophiques : un interprète alcoolique traduit pour les c... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Etrange, vous avez dit étrange, oui j'ai dit étrange.

Un metteur polonais décide de mettre en scène un court roman d'un dramaturge autrichien. Pourquoi choisit-il ce court roman et non une pièce de théâtre allez savoir ... Rien ne fonctionne comme il le voudrait. Et puis le tout prend un tour endiablé à la Krasznahorkai. Bon, vous me direz, c'est un Hongrois, pas un Polonais. Certes, mais quand même...

Belle écriture, rythme soutenu, et c'est peu dire, une belle découverte de ce jeune auteur français.
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C'est grâce à ma participation au Prix des lecteurs 2016 de l'excellente librairie L'Armitière, que cet Objet Littéraire Non Identifié m'est tombé entre les mains.

Notre metteur en scène polonais tente de venir à bout de l'adaptation théâtrale d'un roman autrichien, roman dont le contenu instable évolue à chacune de ses lectures, ce qui n'est finalement pas si grave dans la mesure où le metteur en scène lui-même n'est pas allé au-delà de la trentième page, distribuant des rôles à des acteurs qui n'y joueront finalement pas, les faisant répéter sans leur parler, éclatant un budget pourtant conséquent. Bref, ce qui devait être l'événement d'ouverture de la saison théâtrale parisienne, se transforme en chronique d'un fiasco annoncé. Voilà pour l'histoire.

Mais celle-ci n'est finalement pas si importante que cela. Elle pourrait même être qualifiée d'accessoire. Car l'intérêt de ce - court - livre, c'est l'incroyable tourbillon dans lequel Antoine Mouton enferme son lecteur dès les premières pages pour ne plus le lâcher jusqu'à la fin. Obsédant, inquiétant, déroutant, il nous martèle page après page les symptômes de la folie de son personnage en réussissant pour cela un exercice de style original.

Les phrases sont longues, incroyablement longues (parfois plus de deux pages), les reprises incessantes, les boucles bouclent et rebouclent et comme un derviche tourneur de l'antienne obsessionnelle, Antoine Mouton nous entraîne peu à peu dans l'inévitable folie de son metteur en scène. C'est bien fait, c'est maîtrisé, c'est brillant.

Mais à vrai dire, à la fin, c'est un peu fatiguant...
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J'avoue avoir eu quelques craintes après un cheminement de quelques pages dans ce très court roman. L'auteur nous livre rapidement quelques belles trouvailles littéraires en associant affolement et folie ou en jouant sur le double sens des mots dans l'expression ‘folie passagère'. Mais il exhibe ses trouvailles de manière si démonstrative et appuyée que, oui vraiment, j'ai craint le pire.

Pourtant la suite fait vite oublier ce cabotinage désagréable et on suit avec plaisir Antoine Mouton dans ce délire à la croisée des chemins entre farce, roman noir et drame existentiel. Plusieurs chemins de lecture possible en tous cas.

Dans mon cas, je retiens notamment une peinture drôle et critique du monde du théâtre. L'histoire du théâtre au XXème siècle ne manque pas de grands metteurs en scène polonais avec Kantor ou Grotowski. Mais personnellement je me demande si ce n'est pas Krzysztof Warlikowski qui a inspiré le personnage principal dont il partage quelques caractéristiques communes: coqueluche du monde du théâtre européen, invité à jouer en France dans des institutions publiques prestigieuses (l'Odéon, Chaillot), il a fait jouer une grande actrice française (Isabelle Huppert). Sous son camouflage romanesque, Antoine Mouton nous fait une subtile description tout à fait réussie de l'écosystème théâtral et de ses personnages principaux : le metteur en scène en démiurge pervers et capricieux mais finalement impuissant, les acteurs/actrices en stars humiliés, le directeur de théâtre en carriériste zélé prompt à suivre la direction du vent, le public, les critiques …

Je retiens aussi cette incroyable logorrhée qui coule en permanence à travers le roman. Les phrases d'Antoine Mouton sont enflées de métastases qui prolifèrent comme les bulles dans un bain moussant. le langage d'Antoine Mouton cherche à tout dire : ses phrases ont un début mais rebondissent en permanence sur ce qu'il convient de rajouter pour être complet, pour bien faire comprendre les tenants et les aboutissants, pour remonter aux causes sans oublier bien sûr les conséquences, et moins encore les connexions entre les choses, les êtres et les évènements. le langage d'Antoine Mouton cherche à tout dire mais évidemment n'y arrive jamais car que peut le langage pour rendre compte du monde, de sa complexité, de son instabilité et de sa folie ?

Et pourtant, malgré cela, en refermant le livre, il reste au lecteur le doux plaisir de s'être laissé embarqué de manière virtuose dans une histoire diablement bien racontée.
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Reprenant les paroles mêmes de l'auteur lorsque je l'ai félicité pour son roman délirant, je me suis dit qu'il n'y avait pas meilleur résumé que ce « labyrinthe syntaxique », la présence des deux « y » dans la formule et cet hellénisme latent. Car « le metteur en scène polonais » est tout sauf banal tant sur le plan de la « syntaxe » que sur celui du fond.
D'abord, ça se lit comme un roman mais c'est présenté comme une pièce de théâtre, avec la distribution au début, des didascalies au milieu mais une narration la plupart du temps, pas de dialogues en fait.
A l'opposé, comme en négatif, on apprend que ce fameux metteur en scène est en train de devenir fou à cause de cette pièce qu'il monte. Cette pièce est justement l'adaptation du roman d'un auteur qui n'écrit que des pièces sauf ce roman précisément que le metteur en scène polonais voudrait adapter. On peut faire plus simple. Il faut dire que le mot d'ordre du roman d'Antoine Mouton semble être « pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ». Compliqué mais ténu.
L'ambiance de cette folie en progrès lorgne vers Kafka et la référence au château en fin de parcours me paraît presque évidente mais aussi, pour l'absurdité des situations, vers Boris Vian. Par exemple, que vient faire cette armoire sans style livrée de Suède et dont le metteur en scène a hérité d'une dame qu'il ne connaît pas ou qu'il ne connaît plus. Est-ce sa folie, notre folie ou celle de son auteur qui nous mène en bateau ?
Les personnages rencontrés sont tout aussi loufoques : du philosophe grec, genre Diogène qui vit à l'hôtel avec son chien en passant par « la grande actrice française » ou « l'interprète alcoolique » qui ne sait pas bien la langue qu'il traduit , en fait, il sait moins bien le français que le metteur en scène qui le garde quand même auprès de lui malgré les sommes folles qu'il fait dépenser à la régie menée par « le comptable », lui-même chapeauté par «le directeur du théâtre français ». Aucun n'a de nom mais n'existe que par sa fonction : « le détective portugais », « l'assistante norvégienne », le scénographe hongrois »…c'est très européen, tout ça.
Le style, certes labyrinthique à la Proust, montre la folie qui se noue, j'y vois plutôt un maelstrom de réflexions qui s'enchevêtrent jusqu'à un absurde qui ne fait plus voir qu'une lucarne de réalité dans laquelle, le metteur en scène au mieux de sa forme, partage sans cesse des oeufs durs avec ses congénères. Il y a du Chapelier Fou d'Alice aussi.
Donc, pour conclure, finir et terminer voire clore, c'est un roman des plus originaux d'un jeune auteur qui promet et surtout qui ose inventer encore.
On regrette simplement qu'il n'eût le Médicis
A cause de Titus et de sa Bérénice.
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«Qui peut se douter que les romans changent quand on ne les lit pas ?»

Le directeur d'un théâtre parisien en vue, désireux de faire preuve (pour une fois) d'audace, a confié à un metteur en scène polonais célèbre la tâche de mettre en scène le roman d'un grand auteur autrichien disparu – un roman pour lequel celui-ci s'est enthousiasmé, n'en ayant lu toutefois que les dix ou vingt premières pages. Pour cette mise en scène, programmée à l'ouverture de la saison dans ce grand théâtre, le metteur en scène polonais a reçu beaucoup d'argent, et toute liberté ou presque.

Hélas, ce roman à peine entamé, s'avère à la relecture piégé, versatile et changeant. Lorsque le metteur en scène ouvre à nouveau le livre pour enfin le lire, le texte s'est transformé. À chaque nouvelle lecture il mute, et les personnages, surpuissants, semblent incontrôlables. le metteur en scène polonais devient fou, la mise en scène chose impossible et la pièce de théâtre une débâcle annoncée.

La suite sur mon blog ici :
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Tout le monde à Paris lui avait dit que c’était une idée extraordinaire, et que, pour la réalisation de cette idée qui à n’en pas douter ferait événement – mais il y a plusieurs types d’événements : il y a les succès d’une part, et le metteur en scène polonais en avait connu de nombreux, et d’autre part il y a les catastrophes, or à ce deuxième genre d’événement il avait été peu confronté, voire jamais concernant le théâtre, son succès ayant été fulgurant, son talent immédiatement visible, même s’il avait déjà connu des débâcles, familiales comme tout le monde, puis surtout amoureuses, dont une qui l’avait plongé dans une folie moindre que celle qui était la sienne à présent, moindre car limitée dans le temps – il jouirait d’une liberté, sinon totale, du moins immense, mais qui ne serait pas suffisante, étant donné l’ampleur (ou la folie) du projet, ampleur ou folie ayant conduit le metteur en scène polonais à s’excuser à de nombreuses reprises auprès des comédiens, de son assistante norvégienne qui n’était pas idiote, des techniciens, du directeur du théâtre français, du scénographe hongrois, et de sa femme aussi qui avait commencé à s’inquiéter bien qu’elle restât à l’hôtel toute la journée, et même auprès de l’auteur autrichien, qui était mort depuis au moins quinze ans, mais la mort – le metteur en scène polonais le savait à présent – ne changeait rien.
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Les promesses de s’aimer jusqu’à la mort avaient été nombreuses, désarmantes, mais, tout de même, le metteur en scène polonais s’était mis à nourrir, en parallèle de son amour qui n’avait jamais connu de brisures ni même le moindre fléchissement, contre sa femme une rancœur. Il pensait en effet, à cette époque, que, si elle l’avait abandonné, c’était parce qu’elle n’avait pas supporté de le voir devenir fou. Or ce n’était pas du tout ce qu’il s’était passé, car il n’était pas fou, pas même au début d’une démence qui allait le gagner, avant qu’elle ne le quitte. Non, il avait clairement déraillé après son départ, ainsi privé de la possibilité d’exprimer l’amour qu’il éprouvait, qu’il avait continué à éprouver pour elle même quand elle n’avait plus été là, et même quand elle était revenue.
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Il y a mille manières de recevoir la mort, et si j’en venais à mourir, donc, par l’un ou l’autre de ces biais qui sont nombreux, la folie se libérerait et détruirait tout. Je dis bien tout. Elle est de ce genre de folie. Je ne peux pas, en conséquence, me permettre de mourir. Je fais attention aux camions et aux tuiles, Roland Barthes est mort ici-même renversé par la camionnette du laitier en sortant de chez sa maman, et Cyrano non loin de là, du fait d’une tuile glissant d’un toit, tandis qu’Isadora Duncan est morte plus au sud étranglée par sa propre écharpe, qui s’était prise dans les roues d’une voiture, alors que, plus au nord, Émile Verhaeren a été poussé par la foule sous un train. Je suis extrêmement attentif à tout cela, écharpe, train, foule, voiture, tuiles et laitiers.
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Une maladie est un lieu. Une maladie mentale est un lieu particulièrement vaste. Mais on ne s’y promène pas. On y est projeté de toutes parts. Les arbres sains du petit parc à la sortie du meilleur hôpital psychiatrique de Varsovie et la femme du metteur en scène polonais ne partageaient rien, eux. Ils n’avaient pas de maladie, donc pas de lieu commun. Pourtant, ils se promenaient. Car ils avaient ce pouvoir : s’approprier les lieux des autres. Mieux : faire des autres leurs lieux de promenade.
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Il ne s’affolait pas. Il connaissait la différence entre s’affoler et devenir fou. Il s’était déjà souvent affolé, et une fois déjà il était devenu fou mais ça n’avait pas duré, on lui avait donné le bon médicament, il avait consulté le bon psychiatre, et au bout d’un temps relativement court il était sorti du meilleur hôpital psychiatrique de Varsovie sans craindre la moindre rechute, sans même envisager la possibilité d’une rechute, avec ce seul mot en tête : « passager », cette expression : « une folie passagère », qu’il avait prononcée gaiement, légèrement, en se promenant dans un petit parc avant de rentrer chez lui.
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« Toto perpendiculaire au monde » d'Antoine Mouton, Parution le 3 mars 2022
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