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Documentaire poétique sur les camps soviétiques pour les allemands vivant en Roumanie. Une découverte, un univers, une écriture. C'est à cela qu'on reconnaît un prix Nobel de littérature.
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Challenge Nobel de la littérature 2013.2014

Léopold est sur la liste des roumains germanophones qui seront déportés en URSS en janvier 1945.
La police roumaine vient le chercher au milieu de la nuit et il s'en va avec en tête une phrase de sa grand-mère: "Je sais que tu reviendras". Phrase qui l'habite et le soutient tout au long de sa déportation: cinq années en enfer, où rester en vie ne tient qu'à un fil.
"Le samedi, l'eau-de-vie de betterave égaie les sentinelles, qui ont la gâchette facile. le dimanche matin, quand un homme gît dans la cour, il paraît que c'est une tentative de fuite. Et si on le retrouve en caleçon dans la cour parce qu'il filait aux toilettes, ses intestins rongés ne supportant plus la soupe aux choux, ce n'est pas une excuse".
J'ai pris du temps à lire ce livre, pas par rapport au nombre de pages (350) mais rapport au poids des mots.
La guerre finie, il ne sera pas fait de cadeaux à ces jeunes! " Aucun de nous n'avait fait la guerre, mais pour les Russes nous étions responsables des crimes d'Hitler, étant allemands".
Ce livre est rempli des images que se fait Léopold dans sa tête pour rester en vie.
Une écriture magnifique pour faire vivre avec une force incroyable cinq années terribles!
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il n' y pas mieux
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Leopold a 17 ans en 1945 et comme tous les Allemands vivant en Roumanie il est déporté dans un camp de travail forcé en Russie.
C'est avec de courts chapitres qu'Herta Müller nous fait entendre la voix de Léopold qui passera cinq années au goulag.
Le récit se présente comme une histoire morcelée par fragments, une photographie instantanée sur un moment (les saisons, Noël…), un objet (le ciment, la pelle, le bois, le mouchoir…), un lieu (La cimenterie, les baraquements, la tuilerie, l'usine de charbon…), un évènement (la mort d'une détenue, le vol du pain, les dix roubles trouvés par terre…) et bien sûr le quotidien (la soupe, le pain, les vêtements…)…
La vie quotidienne du camp est décrite de façon très crue.
L'écriture est sobre et jonchée de métaphores poétiques.
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1945-1950 : Cinq ans de paix. Pour Léopold, âge de 17 ans, cinq ans de camp de travail forcé. Faisant partie de la communauté Allemande de Roumanie, il sera déporté pour contribuer à l'effort de reconstruction de l'Union soviétique, comme le seront tous ceux de sa communauté âgés de 17 à 45 ans. Il devra supporter la présence de l'ange de la faim. Celui qui lui fera manger l'immangeable, celui qui le fera rêver à la plénitude, celui qui sans cesse le promènera au bord du gouffre du manque. L'ange de la faim a-t-il été son gardien ? L'écriture d'Herta Müller est tranchante, et cisèle la dalle de béton sur laquelle Léopold est jeté. La raison se déshumanise, les objets s'humanisent. Là réside toute l'écriture poétique de l'auteure.Comment écrire l'indicible? Comment dire le retour, la frontière qui se dresse entre ceux qui "y étaient " et ceux qui ne peuvent pas imaginer ? Qui revient, quel est cette part qui ne revient jamais, qui est cet autre qui prend place dans le manque de nous ? Un témoignage bouleversant.

Astrid SHRIQUI GARAIN
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Personnage dérangeant que ce Léopold. La passivité incarnée. Mais n'est-ce pas pour nous rappeler de ne pas l'être ?
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Herta Müller a commencé, en 2001, pour rédiger ce texte, par interroger le poète germano-roumain Oskar Pastior. ils devaient écrire le récit à quatre mains, mais celui-ci est décédé prématurément. Elle raconte ici un épisode peu connu de l'après Seconde Guerre mondiale. Celle-ci n'est pas encore terminée que les Russes exigent de la Roumanie qu'ils envoient en Russie de jeunes roumains germanophones (la région d'om est originaire Herta Müller et qui est au centre des ses autres livres), soupçonnés d'avoir été d'importants soutiens de l'Allemagne nazie. La mère de l'auteure a été elle-même déportée dans ces camps. le texte est fort, poétique malgré le sujet lourd qui est traité, et j'ai de plus en plus envie de découvrir cette auteure en version originale... de toute façon, la VO est indispensable pour lire d'autres livres, puis que j'ai maintenant lu presque tous ceux qui ont été traduits en français (L'homme est un grand faisan sur terre, La convocation et Animal du coeur), il ne me reste plus qu'à lire le renard était déjà le chasseur... Pourquoi les éditeurs français ne nous permettent-ils pas d'accéder à d'autres textes?
Lien : http://vdujardin.over-blog.c..
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Léopold a dix-sept ans en 1945. Roumain germanophone, il est à ce titre sur la liste de ceux qui seront envoyés par les Soviétiques en camp de travail en Sibérie. Mal à l'aise avec son homosexualité vécue mais dissimulée à ses proches, il ne tente rien pour se soustraire à cette déportation. Suite à un voyage de plusieurs semaines en wagon à bestiaux, où les individus perdent vite toute dignité, il arrive au camp.

La faim l'obsède davantage que le froid et toutes les autres épreuves. Il l'évoque abondamment, de même que son activité forcée et éreintante de manoeuvre en bâtiment. Si ses souvenirs d'enfance et ses relations avec les autres détenus sont abordés dans le récit, le narrateur décrit plus longuement les matériaux manipulés (ciment, houille, brique, sable, charbon…) - ce qui peut surprendre.

Je suis navrée de ne pas avoir aimé ce livre, de m'y être ennuyée. Malgré les conditions éprouvantes de la détention de Léopold, je n'ai pas réussi à éprouver la moindre empathie pour lui. Sa froideur apparente explique peut-être cela ? "(...) je tente toujours de me persuader que je n'ai guère de sentiments. Si je prends une chose à coeur, elle ne m'affecte pas outre mesure. Je ne pleure presque jamais." (p. 221-222)

La présentation de l'éditeur indique : "sous la plume [d'Herta Muller], le camp devient un conte cruel, une fable sur la condition humaine". Même si de nombreuses réflexions m'ont touchée, émerveillée (comme en témoignent les extraits recopiés), je n'ai ni accédé à ce niveau allégorique, ni adhéré à la langue imagée de l'auteur, j'en suis désolée... J'ai probablement eu tendance à comparer à 'Ce qu'ils n'ont pas pu nous prendre', également sur les déportations staliniennes mais beaucoup plus descriptif, plus abordable.
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Un grand roman d'Herta Muller sur les camps germanophone traité de façon magistrale.
Le soupçon de poésie ainsi que la narration subtile dépeignent de façon magistrale une horreur supplémentaire de notre histoire
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« Je n'ai jamais été aussi résolument contre la mort que durant ces cinq années de camp. Pour être contre la mort, on n'a pas besoin d'avoir une vie à soi, il suffit d'en avoir une qui ne soit pas tout à fait terminée »

Roumanie, en 1945. La grande guerre est quasiment finie, une autre commence pour les pays anciens alliés de Hitler. le seul fait d'être d'origine allemande suffit amplement aux russes pour vous inviter dans ces hôtels où personne n'a besoin de clé. Pas de réception, on entre comme dans un moulin, on se croirait en Suède. Léopold Auberg, 17 ans, tout à ses préparatifs de voyage dissimule sa joie à l'idée de quitter cette petite ville, ce dés à coudre où toutes les pierres avaient des yeux. Il passera cinq ans dans ce camp de travail. Cinq ans à combattre la faim, la crasse, le froid, la maladie, l'illusion d'un avenir meilleur car le camp est un monde à l'esprit pratique: pas de pudeur ni d'épouvante, on ne peut pas se le permettre. On agit avec une indifférence immuable si ce n'est une satisfaction résignée. Cinq ans à construire des logements pour les russes, à charrier du ciment qui vous enferme dans sa toile, à transporter des briques cuites dont la poussière évoquait le doux paprika rouge, à pelleter du charbon avec sa pelle en coeur, son maitre. Lui, l'outil en restera tributaire car 1 pelletée=1 gramme de pain. Il travaillera au sous-sol du mâchefer car « intoxiqué par la lumière du jour », chassera le souvenir des compagnons partis car « quand soi-même on n'a que la peau sur les os et qu'on se délabre physiquement, on n'a qu'une envie, c'est tenir les morts à l'écart », luttera contre l'ange de la faim, le lièvre blanc le soir, après le travail, quand il sera autorisé à errer en ville ou au marché pour mendier ou échanger de la nourriture contre quelques éclats de charbon, des objets de valeur, bataillera contre le froid en s'enroulant dans des vêtements pris sur ces morts encore frais, les morts n'ont pas besoin d'habits quand les vivants meurent de froid pendant ces hivers russes.
« Nous portions, quant à nous, un palais si élevé que l'écho des pas, pendant la marche, nous culbutait dans la bouche. La transparence de notre crâne nous donnait l'air d'avoir avalé un excès de lumière vive. le genre de lumière qui se regarde elle-même dans la bouche, se glisse à l'intérieur de la luette pour la faire enfler, monter jusqu'au cerveau. Alors, en guise de cerveau, on n'a plus dans la tête que l'écho de la faim. »

Il y a aussi des moments de joie comme cette fameuse nuit où il atterrit chez une vieille dame russe qui l'espace d'une soirée se prend à le considérer comme son fils parti dans un camp, en lui offrant le manger et un mouchoir de batiste d'une blancheur éclatante qu'il conservera comme un trésor. Ces veillées de Noel avec son arbre en fil de fer décoré de la laine verte provenant de ses gants, des morceaux de pain rassi servant de boules. Ces samedi soirs où l'on danse, boit l'alcool maison. Ces rares moments d'intimité juste pour oublier l'enfer dans lequel on vit. Ces excursions en rase campagne, instants d'évasion, de liberté, de nouveautés. Ses coups de gueule que lui inspire Katie le Planton, qu'une ordure avait dû inscrire sur la liste à la place d'un autre natif de Bakowa qui avait racheté sa liberté, ou bien l'ordure était sadique, et Katie avait toujours était sur la liste. Débile mentale de naissance, elle ne savait toujours pas où elle était, au bout de cinq ans. Katie qui reste pour tous l'antidote contre la barbarie.

Léopold Auberg survivra au camp en choisissant la décorporation ( le terme est mal choisi mais c'est le seul qui me vient à l'esprit), en se réincarnant en objet, en ignorant et rejetant tout ce qui fait de lui un homme; il ne vit plus, existe à peine, ne devant sa survie à une mécanisation mathématique de son univers. Objet, plus rien ne peut l'atteindre. 60 ans plus tard, ses souvenirs consignés dans quatre cahiers, il n'en reste pas moins prisonnier du passé cachant ses affaires dans sa nouvelle valise en bois. Rangée sous mon lit, elle me servait de placard à vêtements depuis que j'étais à la maison.

La narration est constituée de courts chapitres, alternant portrait/anecdotes, méditation/observation, veille/insomnies, présent/souvenirs. Entre le guide de survie avec ses mille et une petites astuces et l'auto-analyse, ce livre est plus accueillant que L'HOMME EST UN GRAND FAISAN SUR TERRE avec lequel il partage les thèmes de prédilection de l'auteure: le totalitarisme, l'abrutissement généré par un tel régime, la dégradation des valeurs humaines, sociales, morales, la haine raciale, la négation de l'histoire, l'impossibilité d'échapper à la marque indélébile d'une telle expérience, etc. A quelques différences près. Léopold Auberg est un jeune homme cultivé, réfléchi, observateur, porté sur l'introspection, des qualités qui le sauvent de la folie. La haine n'est pas son moteur de survie, la peur et le « je sais que tu reviendras » que sa grand-mère lui lance au moment d'être emmené par la patrouille, oui. A son unique façon, c'est un anti-héros.


Ce livre, recueil de témoignages auprès de ces allemands qui ont vécu ce drame, devait être écrit à quatre mains. A la mort de Oskar Pastior, poète germano-roumain, Herta Müller reprend le récit et l'écrit à la première personne. Les détails de la vie au camp sont les souvenirs du poète et de la mère de l'auteure qui y a passé cinq ans, un moment jamais mentionné dans l'histoire officielle de la Roumaine. Avec ce travail ou devoir de mémoire, elle rend hommage à tous ces oubliés de l'histoire, leur offre la dignité qu'ils méritent. Il n'en reste pas moins que l'écriture n'est ni poétique ni onirique. Toujours ce léger problème de rugosité de la langue avec elle. Trop mathématique, brutale, un jeu de déconstruction avec les mots, l'emboitement des idées qui restent éloignés de mon univers. D'un autre côté, rendons grâce à Herta Müller d'avoir un humour noir assez marqué et de ne pas nous infliger un récit qui de par le sujet aurait été lacrymal. Et n'oublions jamais comme son héros que La bascule du souffle est un délire, et quel délire.
Lien : http://www.immobiletrips.com..
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